Reportage Afrique

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Nos correspondants et envoyés spéciaux sur le continent africain vous proposent chaque jour en deux minutes une photographie sonore d'un événement d'actualité ou de la vie de tous les jours. Ils vous emmènent dans les quartiers ou dans les campagnes pour vous faire découvrir l'Afrique au jour le jo…

Rfi - Yves-Laurent Goma


    • Dec 14, 2025 LATEST EPISODE
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    Maroc, une nation de foot [1/5] : témoignage des joueurs de la génération 1976

    Play Episode Listen Later Dec 14, 2025 2:15


    Le Maroc se prépare à accueillir la CAN. Le pays est bien décidé à remporter à nouveau le trophée ! Dans l'histoire du football africain, c'est comme une anomalie : le royaume fait partie des grandes nations du continent, et pourtant, il n'a remporté la compétition qu'une seule fois en 1976, en Éthiopie. S'il y a bien des personnes qui savent comment faire pour gagner, ce sont les anciens internationaux marocains de cette époque. Rencontre avec Abdelâali Zahraoui et Abdallah Tazi, deux joueurs de la sélection 1976.  De notre correspondant de retour de Fès,  En 1976, la compétition oppose alors huit sélections. Parmi elles, il y a le Zaïre, le Nigéria, la Guinée, l'Égypte, des cadors du continent. Le Maroc ne fait pas partie des favoris. Abdelâali Zahraoui était milieu de terrain de la sélection marocaine : « Tout le monde a joué avec leur force, avec leur volonté, avec tout ! » L'Éthiopie accueille la CAN cinq mois tout juste après un coup d'État militaire. Abdallah Tazi est également ex-milieu de terrain marocain. « Il y avait deux chars devant l'hôtel. Quand on sortait, on était suivis par des policiers », se remémore-t-il.  Cette CAN se joue sous la forme d'une poule finale. Le dernier match, le 14 mars 1976, oppose le Maroc à la Guinée. Une équipe légendaire avec des grands noms comme Petit Sory, Papa Camara… Les Lions de l'Atlas ont besoin d'un match nul pour finir en tête du classement, les Guinéens doivent absolument l'emporter. « Les Guinéens, dès le début du match, ils ont été supérieurs à nous. Ils avaient une très belle équipe, c'était le Brésil d'Afrique, certainement la meilleure du continent », retrace Abdallah Tazi.  À lire aussiCAN 2025 : Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6]   C'est le Syli national qui ouvre le score à la 33ᵉ minute, et pendant près d'une heure, il est champion d'Afrique. Mais à la 86ᵉ minute, venu de la défense marocaine, Ahmed Magrouh, alias « Baba », envoie un boulet de canon pleine lucarne. « Un but exceptionnel, mais Baba, il monte seulement dans le corner. Si tu lui demandes de tirer 50 fois, il ne marquera jamais. Ils avaient de la réussite », commente Abdelâali Zahraoui.  Il ressort les photos de cette époque. Sur l'un des clichés en noir et blanc, on le voit poser amoureusement ses yeux sur une petite coupe de métal brillant, c'est la CAN 76. « On nous demande à chaque fois de parler de notre parcours, s'amuse Abdallah Tazi. Il n'y en a que pour la CAN 76. L'équipe actuelle va remporter la CAN et on sera enfin tranquilles, les journalistes n'auront plus à nous appeler ! » Pour Abdelâali Zahraoui, également, c'est une certitude : « Au Maroc, on va gagner la Coupe d'Afrique. Cette année ! » À lire aussiCAN: ces héros peu connus qui ont illuminé la Coupe d'Afrique

    Soudan du Sud: à Bor, une école transformée par le raccordement à l'eau potable

    Play Episode Listen Later Dec 13, 2025 2:30


    Au Soudan du Sud, l'eau est un des services de base faisant cruellement défaut à la population. Malgré ce tableau alarmant, des projets se mettent en place avec l'aide internationale. À Bor, la capitale de l'État du Jonglei, une nouvelle station de purification de l'eau du Nil a été mise en service fin 2024. Reportage dans une école où l'arrivée de l'eau courante a tout changé.  De notre correspondante de retour de Bor,  À l'école Saint-Andrew à Bor, au Soudan du Sud, des cadenas placés sur les robinets montrent à quel point, ici, on ne gaspille pas l'eau potable. En cette chaude fin d'après-midi, des élèves viennent se désaltérer pendant que les cuisinières de l'école font la vaisselle tout en veillant sur leurs grandes casseroles sur le feu. Le fait d'avoir l'eau courante a complètement changé leur travail. « Avant, ça pouvait arriver que la nourriture brûle, ça prenait trop de temps d'aller chercher de l'eau. Maintenant, notre cuisine est parfaite, car l'eau est à portée de main ! », explique Tabitha Erjok.  En préparation de l'inauguration des nouveaux délégués de l'école, les élèves répètent des danses sur l'esplanade centrale de Saint-Andrew. On saute, on chante, on transpire tout en étanchant sa soif sans problème, maintenant que l'eau est disponible. L'arrivée de l'eau potable à l'école a considérablement amélioré les performances des 3 000 écoliers, collégiens et lycéens qui y étudient. « Auparavant, nous ne faisions cours que de 7 heures du matin à midi et demi, mais maintenant, nous avons prolongé notre programme quotidien jusqu'à 16 heures. Le nombre d'élèves a même augmenté depuis que nous sommes raccordés à l'eau. Cela nous donne l'espoir que ces jeunes puissent travailler dur et accomplir leurs rêves dans la vie », explique John Kuer Barach, directeur de Saint-Andrew.  La station d'eau de Bor fait figure de modèle Pour Tuna Wilson, élève de 13 ans, l'attitude des élèves en classe est bien plus propice à l'apprentissage, car les élèves étaient vraiment déconcentrés par la chaleur et la soif. « Avant, quand nous n'avions pas l'eau courante, certains élèves dormaient en classe ou faisaient beaucoup de bruit. Le professeur leur demandait de se taire, mais ils continuaient à crier : "C'est quoi cette école où les gens ne boivent pas d'eau ?" Certains étaient même agacés par le professeur, prenaient leurs sacs et rentraient chez eux », relate la jeune fille.  Avant le raccordement au réseau d'eau potable, les filles étaient chargées d'aller chercher de l'eau au puits communautaire, à l'extérieur de l'école. L'année dernière, Abuol Agou, 14 ans, a failli être renversée par une voiture alors qu'elle portait un jerrican de 20 litres sur la tête. « J'ai eu de la chance, raconte-t-elle. La voiture m'a frôlé, et j'ai eu très peur. C'est très difficile de traverser une rue tout en portant un jerrican, on a peur d'être percutée par les voitures. Donc, depuis que l'eau a été installée dans notre école, nous sommes très contentes, car nous n'avons plus à sortir chercher de l'eau et pouvons suivre nos classes. » Équipée d'un système d'électricité solaire, la station d'eau de Bor fonctionne à bas coût. Pour les parents d'élèves de Saint-Andrew, la contribution à la facture d'eau de l'école est très abordable : environ un dollar par an et par élève. À lire aussiSoudan du Sud : inauguration d'une station de purification de l'eau à Bor, dans l'État du Jonglei

    CAN 2025: Fès, une ville liée historiquement à l'Afrique subsaharienne [6/6]

    Play Episode Listen Later Dec 12, 2025 2:29


    Au Maroc, Fès est considérée comme la capitale spirituelle du royaume. Mais son aura dépasse largement les frontières marocaines et s'étend jusqu'en Afrique subsaharienne. Fès est le centre spirituel de la confrérie Tijaniyya, dont les adeptes se trouvent principalement à l'ouest et au centre de notre continent. La CAN sera l'occasion de réactiver ces liens puissants. Fès, le hasard fait bien les choses, sera justement le lieu de résidence, durant la compétition, de l'équipe du Nigeria.    À lire aussiCAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6] À lire aussiCAN 2025: Casablanca, la capitale du foot dont l'étoile pâlit [2/6] À lire aussiCAN 2025: Marrakech, un refuge pour les artistes de tout le pays et d'ailleurs [3/6] À lire aussiCAN 2025: les transformations de Tanger à l'approche de la Coupe d'Afrique [4/6] À lire aussiCAN 2025: Agadir, mémoire vive de la lutte amazighe au Maroc [5/6]

    CAN 2025: Agadir, mémoire vive de la lutte amazighe au Maroc [5/6]

    Play Episode Listen Later Dec 11, 2025 2:24


    Au Maroc, 24 ans après la reconnaissance officielle de l'amazighité comme composante fondamentale de l'identité du pays, les militants de la cause saluent les nombreuses avancées, obtenues au prix d'une longue lutte. De la création de l'Institut royal de la culture amazighe en 2001 à la loi d'officialisation de la langue amazighe, constitutionnelle depuis 2011, et adoptée en 2019. Ils demandent désormais que l'enseignement de la langue tamazight soit généralisé, comme prévu par la loi, à toutes les écoles d'enseignement primaire. À Agadir, où le grand musée du Patrimoine Amazighe va bientôt voir le jour. De notre envoyé spécial de retour d'Agadir, Un bâtiment de 3 000 m², actuellement en construction en face de l'hôtel de ville, arbore sur sa façade des lettres en tifinagh, l'alphabet amazigh. Aujourd'hui, certaines pièces — tapis en laine ou bijoux en argent — sont exposées dans le petit musée d'Art d'Agadir. Hanane Bakka y est médiatrice culturelle. Elle observe un bracelet en argent du XIXᵉ siècle : « Le travail de l'artisan est très particulier, avec le ciselage, les cabochons de verre et les pièces de monnaie. » Mais la présence amazighe ne se limite pas au musée. « On est en centre-ville, devant le café Tefernout, qui signifie petit four en amazigh, et devant l'hôtel Afoud, qui signifie petite montagne. Ces appellations reflètent cette identité amazighe, mais également l'attachement de la population à sa culture et à sa langue. » Tijani Elhamzaoui, membre de longue date du Réseau amazigh pour la citoyenneté, a connu les longues années de lutte pour la défense de cette identité : « Moi, je n'avais pas l'occasion d'étudier la langue amazighe à l'école, cependant j'ai appris le tifinagh à l'époque dans l'association : c'était un travail militant… Mais, pour les enfants d'aujourd'hui, il y a le privilège de pouvoir lire les panneaux écrits en tifinagh. » « Se réconcilier avec l'amazighité du Maroc » Dans la région, plus de 70% des habitants déclarent maîtriser le tachelhit, l'une des variantes de la langue amazighe, devenue langue officielle de l'État en 2011 : « Pour nous, il s'agit d'abord de se réconcilier avec soi-même, avec l'amazighité du Maroc. C'est ça, notre objectif. Ce n'est pas seulement d'opérationnaliser la langue, mais d'en faire un levier de développement, un facteur de satisfaction psychique et personnelle pour chaque Marocain. En ce sens, il y a toujours une bataille à mener », ajoute Tijani Elhamzaoui. Priorité donc à l'enseignement de la langue : la loi impose trois heures par semaine de tamazight pour tous les élèves du primaire. Mais toutes les écoles ne disposent pas de professeurs. Hamid enseigne le tamazight dans une école d'Agadir : il ne peut prendre en charge qu'un tiers des élèves. « Dans l'école Bin Anzarane, je suis le seul professeur pour 1 000 élèves. Je ne peux enseigner que dans huit classes, cela ne couvre pas la totalité des élèves. Il y a un manque au niveau de la volonté politique : les choses ne sont pas prises au sérieux. » Malgré l'embauche de 1 000 nouveaux professeurs de tamazight pour la rentrée 2026, il faudra attendre au moins 2030 pour que tous les élèves marocains puissent accéder à cet enseignement, a déjà prévenu le Premier ministre Aziz Akhannouch. À lire aussiCAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6] À lire aussiCAN 2025: Casablanca, la capitale du foot dont l'étoile pâlit [2/6] À lire aussiCAN 2025: Marrakech, un refuge pour les artistes de tout le pays et d'ailleurs [3/6] À lire aussiCAN 2025: les transformations de Tanger à l'approche de la Coupe d'Afrique [4/6]

    CAN 2025: les transformations de Tanger à l'approche de la Coupe d'Afrique [4/6]

    Play Episode Listen Later Dec 10, 2025 2:22


    Avec ses 2 500 ans d'histoire, Tanger, située au nord du Maroc, n'a cessé d'évoluer au fil des siècles. Hôte de la CAN 2025, la ville a connu, au cours des quinze dernières années, des transformations urbanistiques majeures : déplacement de la gare ferroviaire et du port de commerce, rénovation de la médina, etc. Ces bouleversements ont créé une bataille entre les anciens et les modernes chez les Tangérois, entre les partisans du changement et les nostalgiques d'une ville plus authentique. Reportage dans une ville entre deux mers et plus particulièrement dans la médina de Tanger. De notre correspondant à Tanger, « Cette kissaria a au moins trois siècles. » Depuis 300 ans, des commerçants comme Hassan vendent des habits traditionnels, caftans ou gandouras, dans cette kissaria, une petite cour intérieure de la médina : « C'est très ancien, c'est dans le style marocain. » Longtemps dégradé, le lieu est désormais refait à neuf : les zelliges (faicences) sur les murs ont été restaurés, et le sol est marbré. Des chanteurs apprécient de venir y tourner des clips. Au total, le Conseil régional affirme avoir consacré près de 14 millions d'euros à la réhabilitation de l'ensemble de la médina. « C'était catastrophique. Maintenant regarde comme c'est bien ! Moi, je vois que la municipalité fait pas mal d'efforts, et ça marche de mieux en mieux. » Youssef, qui a toujours habité dans la vieille ville, salue l'effort, tout comme l'artiste tangérois Noam Chaoudri : « Ils ont refait toutes les façades, tous les bâtiments, toutes les ferronneries. Ils ont ajouté des fleurs, ils ont très bien pavé. C'est une merveille de s'y promener. Mon coin préféré dans tout Tanger, c'est clair que c'est la médina ».  Ces dix dernières années, c'est toute la ville qui a changé de visage. Du haut de ses 22 ans, Abdelrahman, joaillier, a été témoin de cette métamorphose, notamment avec la construction d'un nouveau port de commerce. « Avant, au niveau du port, on n'avait que Tanger Ville, on n'avait pas Tanger Med. Les camions passaient par là, on avait la station de train qui traversait en plein milieu de la corniche, la gare routière, la porte de l'ancien port… C'est très différent, oui. » Au milieu de ses bijoux en or, le jeune homme est presque nostalgique d'un temps révolu : « Moi, je préfère l'ancien. Le nouveau, c'est mieux pour toute la ville, mais moi, je préfère l'ancien ». Explosion du tourisme  « Mieux pour la ville », et pour l'accueil des touristes notamment, émerveillés par une cité au charme unique et aux lumières qui ont inspiré plusieurs générations d'artistes. En un peu plus de dix ans, le nombre de nuitées a doublé. On estime à 850 000 le nombre de touristes à Tanger en 2024. Cette vague de visiteurs a bouleversé certains équilibres : « On ne se connaît plus, en fait, entre Tangérois. L'ancienne Médina, c'étaient uniquement des Tangérois qui vivaient ici. Tous ceux qui avaient leur propriété dans la Médina ont vendu leur bien en 2015. S'ils s'étaient sentis bien, ils ne seraient pas partis. » Le site de location de logements de courte durée Airbnb propose 7 810 logements dans la ville, notamment dans la médina et la kasbah. Mounia a grandi dans ce quartier historique fortifié, qui jouxte la médina : « Le tourisme, ça gâche un tas de trucs, et on n'a plus accès à certains endroits, car c'est bondé de touristes. Il y a les Airbnb qui arrivent, un peu comme en Espagne, et donc, il y a une pénurie de logements. » Depuis 2018, le port Tanger Ville peut également accueillir jusqu'à trois bateaux de croisière simultanément, ce qui peut représenter jusqu'à 10 000 visiteurs en transit. À écouter aussiCAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6] À écouter aussiCAN 2025: Casablanca, la capitale du foot dont l'étoile pâlit [2/6] À écouter aussiCAN 2025: Marrakech, un refuge pour les artistes de tout le pays et d'ailleurs [3/6]

    CAN 2025: Marrakech, un refuge pour les artistes de tout le pays et d'ailleurs [3/6]

    Play Episode Listen Later Dec 9, 2025 2:39


    Première ville touristique du pays avec plus de quatre millions de visiteurs en 2024, Marrakech est aussi un haut lieu de la création artistique au Maroc. À côté de festivals internationaux de renom comme le Festival international du film ou la foire 1-54, grand rendez-vous de l'art contemporain, le tissu culturel de la ville se développe dans de nouveaux lieux plus confidentiels où se rencontrent des artistes de tout le pays et d'ailleurs. De notre envoyé spécial de retour de Marrakech, C'est un café niché dans une petite rue calme du quartier de Guéliz. Ici, pas de télé ni de décor austère, mais des lampes de bureau et des tables en bois. Au mur, des affiches de peintres ou graphistes marocains. Le barista Nerman a ouvert Kartell Kollektiv, il y a un peu plus de deux ans ; il est le premier surpris que son café soit devenu l'un des repères les plus prisés de la scène culturelle marrakchie : « Ce n'était pas le projet à l'origine, mais je crois que ce qui plaît, c'est le style du lieu et les événements culturels que nous organisons, les projections. C'est un espace de liberté et un coffee shop en même temps, et je crois que c'est exactement ce dont les jeunes ont besoin. » Bagues amazighes à tous les doigts, vêtu d'un grand ensemble noir en lin, Tarzan, à peine 20 ans, mannequin, photographe et peintre, savoure un café latte en terrasse : « Beaucoup de jeunes créateurs maintenant essayent de venir ici pour se connecter, pour rencontrer des gens, pour se faire un nom dans la scène, pour être respectés dans leur domaine. Voilà, c'est ça Marrakech. » À lire aussiCAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6] Yazid Bezaz est réalisateur et directeur artistique pour de grandes marques internationales de vêtements. Il est né et a grandi à Londres, mais c'est à Marrakech qu'il a posé ses valises : « Automatiquement, je suis tombé amoureux de cette ville, de l'esprit qu'elle a. Elle est tellement charmante, très libre. Je me suis juste senti chez moi ici, et j'ai trouvé que c'est une ville pour les jeunes, où c'est beaucoup plus facile de se trouver : tu as le temps de te développer. » « Ça tue le charme d'une ville » Un sentiment partagé par Joanna Woodford, directrice artistique et DJ écossaise, qui vit et travaille à Marrakech depuis un an : « Ça a été la meilleure décision de ma vie ! D'un point de vue artistique, personnel, vivre ici m'a vraiment poussée à être créative J'ai été inspirée par tout ce qui m'entoure : les gens, la façon de vivre. » À quelques pas de Kartell Kollektiv, dans ce bouillonnant quartier de Guéliz, de nombreuses galeries émergent. L'Blassa expose des artistes de tout le monde arabe. Son curateur, Abdellah Aboulhamid, entouré d'œuvres d'art, est reconnu pour avoir donné de la visibilité à de jeunes artistes de la région : « La culture marrakchie, en elle-même, est très différente des autres villes. Là d'où je viens, c'est beaucoup, beaucoup plus calme. Ici, vous trouvez que la collectivité est présente dans l'espace public : ça fait que les gens s'expriment et que les nouvelles idées sortent. » Le principal risque pour la ville, pointent tous ces amoureux de Marrakech : le tourisme de masse, la bulle immobilière et les logiques commerciales. Yazid Bezaz : « Ça tue le charme d'une ville. Et le charme de Marrakech, c'était toujours cet équilibre entre des trucs locaux et des trucs qui sont faits pour les touristes, ce mélange organique. Mais si tu enlèves ça, tu commences à diminuer petit à petit l'esprit d'une ville. » Selon les estimations, en 2025, Marrakech devrait de nouveau battre son record de visiteurs accueillis en une seule année. À lire aussiCAN 2025: Casablanca, la capitale du foot dont l'étoile pâlit [2/6]

    CAN 2025: Casablanca, la capitale du foot dont l'étoile pâlit [2/6]

    Play Episode Listen Later Dec 8, 2025 2:28


    Dans l'imaginaire collectif, Casablanca est la ville du football marocain. Avec ses deux grands clubs, le Wydad et le Raja, c'est elle qui concentre le plus de supporters, mais cela fait bien longtemps que la capitale économique ne fait plus la pluie et le beau temps dans le royaume. De quoi alimenter la nostalgie de certains Casablancais. Lino Bacco est une légende du journalisme sportif au Maroc, l'une des mémoires du foot marocain. Il vient de publier un livre Et alors !, où il raconte cette époque aujourd'hui révolue. De notre correspondant à Casablanca, Un superbe hôtel-particulier et un hall chargé d'histoire, toute une collection de vieilles radios dont une fonctionne encore... On y entend le direct de Radio Mars, la radio dédiée au sport que Lino Bacco, 79 ans, a co-fondée en 2009 : « Nous sommes dans les locaux de Radio Mars. J'ai un peu plus d'un demi-siècle, je dirais, de journalisme sportif. J'ai commencé exactement en 1967. Je débarque dans la rédaction du petit Marocain. » Casablanca, l'ancien siège de la Fédération À l'époque, tout se passe à Casablanca. « Je suis d'origine sicilienne. Mon père est né à Casablanca. Ma mère est née à Rabat. Je suis né à Casablanca. Le football marocain s'est décidé entre le siège de la Fédération qui était à Casablanca, rue Dumont d'Urville, entre un café, le Marignan, et puis le stade Philippe où, juste en face, il y avait le journal. Tous les après-midi, le secrétaire général qui était Ahmed Antifi venait, ainsi que Daniel Pilard, qui était le patron des sports. On se retrouvait donc au café. Et au café, on parlait de quoi ? On parlait de foot. On parlait de la fédération. On parlait des problèmes, et c'est là qu'ils prenaient les grandes décisions justement pour le football marocain », raconte Lino Bacco. « La preuve, c'est qu'il y a quatre clubs rabatis en première division » Jusqu'à aujourd'hui, Casablanca est la ville du foot au Maroc. Dans son stade emblématique Mohammed-V, résonnent chaque week-end les chants des supporters du Wydad ou du Raja. Alors, lorsque les stades de la CAN 2025 ont été annoncés, des supporters casablancais se sont sentis soudain nostalgiques. « Il y a des gens qui sont déçus, qui disent ''Oui mais pourquoi, pourquoi Rabat a quatre stades et nous un seul ?''... C'est ça, C'est tout. Le centre de gravité s'est déplacé, qu'on le veuille ou non. Et puis, la preuve, c'est qu'il y a quatre clubs rabatis en première division. Il y a l'AS FAR, il y a le FUS, il y a Yacoub El Mansour et il y a Touarga. Donc, c'est tout : 4 à 2, ce n'est pas difficile (rires). » Mais Casablanca pourrait retrouver son rang d'ici à 2030. En ce moment, on construit aux portes de la ville le plus grand stade du monde, 115 000 places, où doit se jouer des matchs de la Coupe du monde 2030. À lire aussiCAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6]

    CAN 2025: Rabat, ville majeure du tournoi et nouveau centre névralgique du football marocain [1/6]

    Play Episode Listen Later Dec 7, 2025 2:17


    Parmi les six villes hôtes de la CAN 2025 au Maroc du 21 décembre 2025 au 18 janvier 2026, Rabat est celle qui accueillera le plus de matchs. Avec ses quatre stades, tous construits pour l'occasion, la capitale marocaine déploie une infrastructure sportive sans équivalent, pour une ville de 500 000 habitants. C'est là désormais que bat le cœur du football marocain.  De notre correspondant à Rabat, Stade olympique, stade Moulay Abdellah, stade Al Medina, stade Moulay Hassan… Additionnées, ces quatre stades représentent plus de 130 000 places. Et au mois de novembre, la clameur des supporters a résonné pour la première fois dans ces arènes ultra-modernes. Les infrastructures à Rabat ont été pensées pour le foot Lors des barrages Afrique de la Coupe du monde 2026, Rabat a pu les tester en conditions réelles. Omar Khyari est le conseiller du président de la Fédération royale marocaine de football, Fouzi Lekjaa. Une fédération dont le siège flambant neuf se trouve évidemment à Rabat. « Rabat reste quand même la capitale du royaume du Maroc, et on ne peut que se satisfaire de la voir être améliorée. Moi, je pense que le plus important, c'est que le Maroc développe ses infrastructures sportives dans toutes ses régions, afin qu'un maximum puisse en profiter. Et, aujourd'hui, c'est le cas. La chance du Maroc, c'est d'avoir une vision à long terme », développe Omar Khyari. Il ne dira pas que Rabat est devenue, en vingt ans, le centre névralgique du foot marocain. Ce serait passer sous silence les investissements dont ont bénéficié d'autres villes, et peut-être aussi risquer d'alimenter une concurrence entre régions. Qu'à cela ne tienne, les infrastructures sorties de terre ces dernières années parlent à sa place. À Rabat, elles ont été pensées pour le foot. Rabat, la ville adaptée pour les grandes compétitions « Ce qui est extraordinaire à Rabat, c'est que toute l'infrastructure est complémentaire. Par exemple, l'aéroport de Sal est à cinq minutes du complexe » Mohammed VI de football, dont Hassan Kharbouch est le directeur. À bord d'une voiturette de golf, nous visitons ses 35 hectares. Inauguré en 2019 près de Rabat, avec ses onze terrains d'entraînement, il sert de lieu de rassemblement pour toutes les équipes nationales marocaines. C'est ici que les coéquipiers d'Achraf Hakimi seront hébergés durant la CAN. Le complexe a nécessité un investissement de près de 60 millions d'euros. « Les anciens joueurs, particulièrement quand ils passent, disent toujours que dans cette génération, maintenant, ils ont une chance et qu'ils ont tous les moyens pour percer. Ça fait de Rabat un outil pour toutes les exigences d'organisation d'un méga événement, d'une compétition », complète Hassan Kharbouch. L'été dernier, c'est la Fifa qui a inauguré à Rabat son bureau principal en Afrique. Devenue capitale d'une puissance émergente du football mondial, la ville réunit aujourd'hui les centres de décision, mais aussi les infrastructures qui contribuent au rayonnement du Royaume. À lire aussiCAN: quand David croque Goliath ou dix exploits de petits-poucets à la Coupe d'Afrique des nations

    Éthiopie: les souvenirs d'Addis-Abeba se collectent et se partagent en photos en ligne

    Play Episode Listen Later Dec 6, 2025 2:19


    Depuis deux ans, la ville d'Addis Abeba est en plein bouleversement. Les travaux liés au Corridor Project – un projet de développement urbain d'assainissement de la ville – transforment la capitale en profondeur : des pans entiers de certains quartiers historiques ont même disparu, pour faire place à de nouveaux bâtiments. Mais des initiatives visant à conserver la mémoire de ces endroits voient aussi le jour. De notre correspondante à Addis-Abeba, Le regard de Fraul se perd le long des plaques de tôle verte qui longent un trottoir flambant neuf. Il y a encore deux ans, le quartier de Piassa, en plein centre d'Addis-Abeba, regorgeait de bars où se retrouvait la jeunesse de la ville. « Mes préférés, c'était l'Interlangano et le Channel 5, ce sont les plus connus. On s'est bien amusés : il y avait la fête tous les jours, surtout le week-end. Le Channel 5 était underground, et il passait de la bonne musique reggae. Quand le Corridor Project a commencé, tout a été démoli », confie Fraul. Addis Memories : un projet de mémoire Le projet Corridor a été lancé en 2022 par le gouvernement. Son objectif : moderniser en profondeur la capitale via la construction de nouveaux logements, de pistes cyclables et de parcs. Mais dans certaines zones historiques comme Piassa, cette rénovation à grande échelle a aussi emporté avec elle la mémoire du quartier. Dayala Ashenafi a donc lancé Addis Memories, une plateforme en ligne de collecte de photos souvenirs : « Il s'agit d'un projet de mémoire visant à préserver l'histoire, le lien des habitants avec leur quartier, les souvenirs qu'ils ont créés en famille, avec leurs enfants et leurs amis. Nous sommes convaincus que les infrastructures et les projets patrimoniaux sont importants, mais il est tout aussi crucial de recueillir la parole des communautés touchées, qui veulent garder tout cela en mémoire. » « Ça me ramène à mon enfance. C'était une très belle époque » Sur le site d'Addis Memories, chacun peut donc envoyer une photo d'un endroit disparu et évoquer ses souvenirs, puis naviguer sur la plateforme et consulter d'autres témoignages, à la manière d'un musée digital. « À Addis-Abeba, il est difficile de trouver quelqu'un qui n'a aucun lien avec ces quartiers, car tout le monde allait à Piassa pour faire du shopping, ou à Kazanchis pour retrouver ses amis… Il y a tellement de souvenirs liés à ces endroits. Nous offrons, je crois, l'opportunité aux gens de s'exprimer », souligne Dayala Ashenafi. À la nuit tombée, les grandes avenues de Piassa sont désormais désertes. Seuls quelques promeneurs profitent de la fraîcheur du soir. Un silence qui tranche avec les souvenirs de Fraul : « Maintenant, quand je retourne à Piassa et que je vois ces avenues, ça me replonge dans mon adolescence. Je revois les rues pleines de monde, de magasins de bijoux, et ça me ramène à mon enfance. C'était une très belle époque. » Le projet Corridor est également déployé dans 58 autres villes du pays. À lire aussiÉthiopie: ces chantiers urbains qui laissent trop souvent de côté les communautés

    Côte d'Ivoire: à Abidjan, un programme aide les enfants à sortir de la rue

    Play Episode Listen Later Dec 6, 2025 2:32


    En Côte d'Ivoire, en 2023, le ministère de la Femme, de la Famille et de l'Enfant a identifié plus de 16 300 enfants vivant dans la rue dans une dizaine de villes ivoiriennes, dont Abidjan. Ils dorment sur les trottoirs, survivent de petits boulots ou de mendicité… Des enfants livrés à eux-mêmes et exposés à la violence et aux abus. Mais depuis peu, les choses changent. Grâce au Programme pour la protection des enfants et adolescents vulnérables, des équipes sillonnent les quartiers pour leur tendre la main. Entre missions de rue, écoute et réinsertion, ces acteurs sociaux tentent de redonner une chance à ces enfants oubliés. De notre correspondant à Abidjan, Ce matin-là, des agents du Programme pour la protection des enfants et adolescents vulnérables arpentent les rues d'Abidjan. À bord de leurs véhicules, ils avancent prudemment, scrutent les trottoirs, les marchés, les dessous de ponts et les feux tricolores. Leur mission : repérer les enfants livrés à la rue. Parmi eux, Seaty Ebert, conseiller d'éducation. « Ce sont les mineurs qui sont recherchés. Celles qui vendent l'eau, qui ont l'âge d'aller à l'école et qui sont dans la rue. Et puis au niveau des jeunes garçons, ceux qui sont entre les véhicules en train d'essuyer les pare-brise. À vue d'œil, on les reconnaît », explique-t-il. Prise en charge des enfants au centre d'écoute et d'orientation du programme Quelques minutes plus tard, deux fillettes en train de mendier, un petit vendeur de chips, et un garçon fiévreux couché à même le sol sont identifiés. Embarqués dans le véhicule, les enfants se montrent d'abord méfiants. Ebert tente alors de les rassurer. « N'ayez pas peur, ne pleurez pas. On ne va pas vous faire du mal. C'est compris ! Votre place ce n'est pas dans les rues. » Direction Yopougon, au centre d'écoute et d'orientation du programme. Ici, les enfants mangent, reçoivent les premiers soins, puis sont suivis par des psychologues et des éducateurs. L'intérêt est de comprendre leur parcours, de recontacter les familles quand c'est possible, ou de préparer leur réinsertion. « Chaque enfant est un cas spécifique pour nous », précise Mamadou Touré, responsable dudit centre. « Si c'est un enfant qui a été déscolarisé, on a des écoles partenaires où on place l'enfant. Pour ceux dont l'âge excède 18 ans, on a des centres partenaires. On essaie de déceler le talent qui est le sien et on l'envoie vers cette formation. » Un réseau d'exploitation d'enfants découvert Le dispositif a permis de sortir plus de 4 000 enfants de la rue ces deux dernières années, assure le ministère ivoirien de la Femme, de la Famille et de l'Enfant. Mais les causes restent profondes : pauvreté familiale, violences domestiques, ruptures sociales. Pour certains enfants, revenir dans un cadre strict n'est pas une chose facile. Le sociologue Bini Koffi explique les résistances. « Un enfant qui s'est autonomisé dans la rue, qui a l'habitude d'agir seul et qui est libre de ses actions, si vous le remettez dans une situation familiale, que ce soit dans sa famille, ou dans un centre où il doit être orienté en terme de comportement, il est évident qu'il y aura un clash et il ne peut pas supporter. » Les maraudes ont aussi permis de mettre au jour un réseau d'exploitation d'enfants à des fins de mendicité, provenant de pays voisins. Fin 2023, 18 adultes ont été interpellés. Une enquête a été ouverte par le procureur de la République. Les enfants, eux, ont été confiés à leurs ambassades à Abidjan. À lire aussiCôte d'Ivoire: sortir de la rue

    Centrafrique: après dix ans de présidence Touadéra, quel bilan économique? [2/2]

    Play Episode Listen Later Dec 4, 2025 2:15


    En Centrafrique, les électeurs devront participer le 28 décembre à un quadruple scrutin historique : présidentielle, législatives, régionales et municipales. Le plus scruté sera bien sûr l'élection présidentielle, au cours de laquelle Faustin-Archange Touadéra briguera un troisième mandat, après avoir changé de Constitution en 2023. Infrastructures, ressources naturelles, agriculture... Les soutiens du chef de l'État affirment que le pays tire déjà des dividendes socio-économiques de la stabilité retrouvée. Mais les populations tardent encore à en sentir les effets dans leur quotidien. De notre envoyé spécial à Bangui, Dans les ruelles terreuses du quartier de Lakouanga, proche du centre de la capitale, la vie est « tactique », dit-on. À comprendre que chaque jour est une épreuve pour remplir la marmite familiale. Livia, debout devant sa petite échoppe, vend des produits de mercerie, de coiffure et quelques boissons. « Les boutons, les chapelets, les cols, les perruques... Je vends aussi les mèches. J'ai trois garçons et deux filles. Avec moi, ça fait six bouches à nourrir. Les gens n'achètent pas comme avant », confie-t-elle. Son fils, Freddy, la rejoint à la sortie du travail : « Tout est cher, même pour payer du savon. Le prix a augmenté. On entend qu'il y a des investisseurs, qu'il y a des subventions, mais on ne sait pas où vont ces subventions. Parce que normalement, quand il y a des subventions, il faut que la population aussi en bénéficie. » Sur le trottoir d'en face, Georges est plus positif. Il constate une embellie : « Présentement, avec les professeurs, les fonctionnaires sont régulièrement payés, les pensions sont payées, les bourses sont payées. Donc c'est déjà un léger mieux. » Les voix divergent sur les indicateurs de développement Les soutiens du chef de l'État défendent des progrès. Evariste Ngamana, porte-parole de la campagne de Faustin-Archange Touadéra, déclare : « Aujourd'hui, l'économie est en train de se relancer, quand bien même nous savons qu'il y a des défis qui restent encore. Nous avons aussi le développement des infrastructures. Tout cela est à l'actif du président de la République. Vous voyez qu'il y a les travaux de routes qui se font dans Bangui, les infrastructures sur le plan des services de base, les écoles, la santé, etc. C'est un progrès indiscutable. » À lire aussiCentrafrique: «Je ne dis pas que tout est parfait, mais nous avons fait un grand pas», estime le président Touadéra Pour les voix critiques, les indicateurs disent le contraire de la communication officielle, et les réalisations actuelles sont en trompe-l'œil. Paul-Crescent Beninga, porte-parole du GTSC, groupe de travail de la société civile sur la crise centrafricaine, pointe les coûts des carburants les plus élevés du continent, la corruption et les accusations de détournements massifs des ressources du pays : « Aujourd'hui, du point de vue économique, la République centrafricaine peine à se relever. L'impunité a été érigée en un mode de gouvernance, tout simplement. Toutes les ressources qui pourraient participer à l'amélioration de notre assiette budgétaire, ce sont ces ressources-là qui se retrouvent aujourd'hui dans la nature, dans les mains et confisquées par certaines personnalités. Et c'est très regrettable. » Pour tirer son économie, la Centrafrique a récemment relancé un plan national de développement et assure avoir reçu des engagements sur les trois-quarts des 12 milliards de dollars espérés. À lire aussiLa Centrafrique se dirige vers des élections apaisées, mais demande justice et réparation [1/2]

    La Centrafrique se dirige vers des élections apaisées, mais demande justice et réparation [1/2]

    Play Episode Listen Later Dec 3, 2025 2:14


    En Centrafrique, les électeurs devront participer le 28 décembre à un quadruple scrutin historique : législatives, régionales, municipales et présidentielle, au cours de laquelle Faustin-Archange Touadéra briguera un troisième mandat, après avoir changé de constitution en 2023. Dans son bilan, le chef de l'État met en avant les progrès en matière de sécurité et de réconciliation. Il affirme que la Centrafrique est aujourd'hui en sortie de crise et qu'on peut traverser le pays sans risque. Mais les Centrafricains n'en sont pas tous persuadés De notre envoyé spécial à Bangui, Il y a cinq ans, les Banguissois avaient voté dans la crainte d'un assaut rebelle. Cette année, l'échéance approche dans une ambiance beaucoup plus apaisée, d'autant que le Conseil constitutionnel a validé les candidatures de plusieurs opposants. À Bimbo, grande commune à la sortie sud-ouest de Bangui, les associations de soutien au président sont mobilisées. Parmi les présents, on loue la figure d'un président sortant pacificateur. « Dès que le président Touadéra est venu, nous avons eu la paix. Vous savez, la Centrafrique revient de loin. On avait la guerre, il y avait la division, il y avait l'insécurité partout, on ne pouvait pas traverser nos provinces. Mais aujourd'hui, on sent qu'il y a la sécurité, il y a la paix. Aujourd'hui, il a fait asseoir le pays. Tout le monde vit dans la joie. » Ces derniers mois, le gouvernement a signé de nouveaux accords avec des groupes armés, un processus de désarmement a été relancé. Pour autant, braqueurs et coupeurs de route entretiennent une insécurité diffuse en province. Les agissements de porteurs d'uniforme et de mercenaires russes sont aussi régulièrement pointés du doigt, ce qui continue d'inquiéter : « Dans la capitale, on se sent en sécurité. Mais ailleurs, dans l'arrière-pays, il y a des tueries, des meurtres. Il faut donc revoir tout ça », déplore un jeune homme rencontré dans une ruelle du quartier Lakouanga. À écouter aussiCentrafrique: un «retour au dialogue» entre le gouvernement et la milice AAKG est «urgent» « On leur doit la vérité » Dix ans après la fin de la transition, cinq ans après avoir repoussé la CPC, les causes profondes des conflits internes ont-elles été traitées ? « Les Centrafricains sont, je pense, aptes à pardonner, analyse le juriste Arnaud Yaliki, spécialiste de justice transitionnelle et commissaire de la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation (CVJRR). Mais avant de pardonner, ils estiment qu'on leur doit la vérité sur ce qui s'est passé, ils veulent que justice soit faite, ils veulent la réparation des réformes institutionnelles qui permettent de corriger les inégalités et les injustices qui sont à la base de la récurrence des crises que nous connaissons. Des efforts ont été faits, mais il y a des défis à relever, souligne le juriste. Si on veut la paix dans ce pays, il faut que tous les Centrafricains, quelle que soit leur ethnie, qu'ils appartiennent ou non à un parti politique, aient les mêmes chances que les autres. Je pense que c'est le levier du développement de la République centrafricaine. » Avec le redéploiement de l'État et la nouvelle carte judiciaire, Arnaud Yaliki appelle à s'attaquer à l'impunité et à la pauvreté. Il demande aux magistrats qui s'installent en province de prendre leurs responsabilités et de juger les coupables de violations des droits humains. À lire aussiCentrafrique: l'opposant Henri-Marie Dondra envisage de «reconcilier le pays et lutter contre la pauvreté»

    RDC: l'un des derniers arbres baobab de Kinshasa menacé de disparition

    Play Episode Listen Later Dec 2, 2025 2:17


    C'est un patrimoine inestimable en RDC. À Kinshasa, l'un des derniers baobabs du centre-ville de la capitale congolaise fait parler de lui, car les défenseurs de l'environnement craignent qu'il ne soit abattu. Pourtant, cette plante, reconnaissable entre mille, fait partie de l'histoire de Kinshasa et de son patrimoine végétal. De notre correspondante à Kinshasa, À lire aussiPourquoi Madagascar est le berceau des baobabs et la terre des lémuriens?

    Sénégal: des courts métrages réalisés, produits et pour la première fois au cinéma

    Play Episode Listen Later Dec 1, 2025 2:28


    Des courts métrages sénégalais pour la première fois visibles au cinéma. Cela se passe à Dakar. Depuis une semaine, quatre films de jeunes cinéastes africains sont projetés deux fois par semaine, le mardi et le jeudi dans les deux grandes salles de la capitale. Le Pathé et le Seanema et suivi d'un débat avec le public. L'occasion jusqu'au 11 décembre de voir le travail de tout jeunes cinéastes qui seront peut-être les grands noms de demain. Kaay Seetaan, (« Viens voir ») en wolof, s'affiche en lettres capitales sur le grand écran. Installé dans un fauteuil de la salle obscure, Armand Komla Sousou 27 ans, originaire du Togo, formé à la réalisation à Lomé puis à Dakar à l'écriture du scénario, peine encore à y croire. Voir son premier film, Marco au cinéma, c'est : « Fabuleux. Je me rappelle encore écrire dans ma petite chambre d'étudiant un scénario et du jour au lendemain le voir porter à l'écran avec des gens qui ont des étoiles dans les yeux, c'est juste fabuleux. » Penda Seck, elle, s'est essayée au métier de réalisatrice et elle aussi est encore émerveillée de l'apprentissage qu'elle vient de faire après cinq mois de formation, à tout juste 22 ans : « Quand tu te retrouves pour la première fois sur un plateau et qu'il y a près de quarante personnes et que tu dois parler à tout le monde en gardant son sang-froid et bien gérer une équipe. Avoir une bonne ambiance sur le plateau, et tout ça pour une première fois : c'est énorme. » « Ça peut être des films d'horreur » Apprendre, c'est bien l'enjeu de cette formation en cinq mois. Financé par la coopération culturelle britannique (le British Council) Le Film Lab, c'est son nom, veut professionnaliser un secteur en pleine expansion, comme l'explique Chloé Orthole Diop-productrice elle-même et qui a supervisé la formation : « Au Sénégal, on est très bon en technique et cinéma, mais pas assez de technicien, en particulier en son, en image et en production. C'est ça qu'on a identifié comme les terrains prioritaires à former. » En tout, seize jeunes, des Sénégalais pour l'essentiel, ont été formés aux métiers de chef opérateur, prise du son, mais aussi compositeur de musique de film ou encore scénariste et réalisateur. Un côté laboratoire que Penda Seck, directrice artistique jusqu'ici, a particulièrement apprécié en tant que réalisatrice : « Tu peux avoir envie de faire autre chose et autre chose, ça peut être des films d'horreur ou du cinéma expérimental. Ce n'est pas parce que je suis Africaine que je ne peux pas faire un film d'horreur. » Au final, c'est le drame psychologique que la jeune femme a exploré. Une histoire très personnelle sur la dépression et le poids du silence qui pèse encore trop souvent au Sénégal sur les femmes mariées qui se doivent d'être des épouses exemplaires. À lire aussiCinéma: au Sénégal, la nostalgie des salles de cinéma d'antan se conjugue avec un renouveau de la fréquentation

    Kenya: pour les parents, les concours de beauté des enfants génèrent un espoir de carrière

    Play Episode Listen Later Dec 1, 2025 2:37


    Au Kenya, les mini miss et mister Kenya 2025 ont été élus la semaine dernière à Nairobi. Une quarantaine d'enfants de 3 à 17 ans ont participé à la compétition. Ce concours de beauté existe depuis près de 15 ans. Il a ouvert la voie à de nombreuses autres compétitions de ce genre qui se transforment parfois en opportunité de carrière pour les jeunes kényans. Le public du théâtre national de Nairobi s'enflamme quand monte sur scène une petite fille de neuf ans. Ella Cheruto commence sa performance. « Là, j'ai dansé et présenté mon projet écologique. Je me sens super bien. Je suis fière de concourir, j'adore ça. J'étudie le mannequinat. Ils m'apprennent à me coiffer, m'habiller, défiler. Vous pouvez me retrouver sur Instagram, Facebook, In box », explique-t-elle. Plusieurs fois par semaine, Ella Cheruto se rend dans une école de mannequinat. Sa mère, Chila Mayo, commerçante, l'y a inscrite. Cela fait deux ans que toutes les deux écument les concours de beauté du pays. « La visibilité, c'est important pour rencontrer du monde. Ella a d'ailleurs une manager. Être mannequin, c'est une carrière et je sais qu'elle ira jusqu'à l'international. Je veux la voir sur des plateformes à l'étranger. C'est un investissement, mais ça rapportera pour les gagnants. La pression, ce n'est rien, on la gérera en avançant », estime-t-elle. « Ça me donne confiance pour faire ce que je fais aujourd'hui » Tina Lughano est la fondatrice des mini miss et mister Kenya. C'est pour aider sa fille, atteinte d'une timidité maladive, qu'elle a créé ce concours en 2013 : « Monter sur scène, s'entraîner et montrer leur beauté, leur talent, cela leur donne confiance en eux. Quel que soit votre physique, vous pouvez participer. On juge surtout la confiance, les projets et le talent. Les enfants ont fait carrière, ça fait partie du plan. Certains réussissent, y compris d'un point de vue commercial ». Couronne sur la tête, écharpe autour du cou, Victor Job se balade dans les coulisses. À douze ans, il revient tout juste d'Inde où il a participé à l'élection de miss et mister univers : « Ce n'est pas une écharpe, c'est le titre de mini mister Kenya 2023. Ça me donne confiance pour faire ce que je fais aujourd'hui. Défiler et gagner des titres et parfois même de l'argent. Je me sens fatigué, mais j'aime aider ma mère avec cet argent. Quand je serai grand, je voudrais être pilote », termine-t-il. À partir du secondaire, l'École coûte en moyenne 400 dollars par an, selon le ministère de l'Éducation du Kenya. Le taux d'abandon pour cette période est de 8,5%.

    Afrique du Sud: réaliser un court métrage professionnel grâce au projet «48 heures chrono»

    Play Episode Listen Later Nov 30, 2025 2:29


    Ils habitent différentes villes partout dans le monde, et participent au même défi : celui de faire un court-métrage en 48 h montre en main. Le« Projet 48h Film » est une initiative mondiale lancée il y a plus de 20 ans pour donner la possibilité à tout le monde de se lancer dans le cinéma. Certains gagnants sont ainsi allés jusqu'au festival de Cannes. Notre correspondant à Johannesburg a suivi l'édition sud-africaine, pour rencontrer ces jeunes motivés par leurs rêves de cinéma. Et peu importe leur budget, les participants ont tout donné. À lire aussiAfrique du Sud: la popularité des films d'arts martiaux sous l'apartheid

    Tour d'Afrique à vélo: le parcours fou de la Marocaine Meryem Belkihel pour «Donner de l'espoir aux femmes»

    Play Episode Listen Later Nov 29, 2025 2:31


    C'est une « sortie » à vélo qui aura duré trois ans. À bord de son Gravel – un vélo mi-route mi-VTT, Meryem Belkihel 30 ans, a réussi le pari un peu fou de faire un tour d'Afrique, seule. 34 000 km parcourus, 33 pays traversés, la jeune Marocaine a finalement achevé son aventure début novembre 2025, à Madagascar. Elle voulait « découvrir l'Afrique », comprendre les pressions exercées sur l'écologie, rencontrer ses voisines et voisins de continent, montrer à qui la croisait sur son passage qu'on peut vivre ses rêves, en étant une femme, seule. Meryem Belkihel raconte son périple militant. De notre correspondante à Antananarivo, Sourire vissé au visage, Meryem Belkihel savoure ses premières journées depuis trois ans sans pédaler. À ses poignets, plusieurs dizaines de bracelets, souvenirs peu encombrants qui lui ont été offerts au fil de ses rencontres.« Celui-là, je l'ai eu en Éthiopie. Celui-ci, c'est, ici, Madagascar. Ça, c'est la Tanzanie, lui, le Kenya, l'Ouganda, l'Afrique du Sud, le Burundi, le Zimbabwe, celui-là l'Eswatini et ça, c'est Mozambique. » Son périple à vélo, elle l'a documenté. Caméra embarquée, drone, elle a filmé ses traversées solitaires et ses découvertes, parfois choquantes. « Le changement climatique, je voulais voir ça de près. L'impact sur notre continent, sur l'Afrique. Et partager aussi parce qu'on voit ça beaucoup, mais parfois, on se dit " Mais non ! Ce n'est pas réel ! », on trouve des excuses. « Là par exemple, c'est une vidéo que j'ai prise à l'est du Cameroun. Ces tronçonneuses que vous entendez, ce sont celles de gens qui travaillent pour une grande société qui coupe les arbres de plus que 100 ans pour les envoyer à l'étranger, en Europe et en Chine. Et là ça m'a choqué parce que pour couper un arbre, il faut en abattre 20 autres. Et ça, c'est tous les jours dans cette forêt du Cameroun. Même chose pour la République centrafricaine. » La jeune femme, informaticienne à Casablanca, avoue avoir semé la gêne dans son entourage : « Les gens ne me comprenaient pas. Ce que j'ai fait, ce n'est pas dans notre culture. On me trouvait bizarre. Mon désir de partir seule, ça a choqué ma famille, mes amis. On me demandait de rester, d'acheter une maison, une voiture, me marier, avoir des enfants. Non ! Moi, je voulais donner de l'espoir aux femmes et aussi donner l'exemple d'une femme marocaine, africaine ! » Un mental renforcé par les épreuves Meryem nous montre sur son téléphone un échange animé, qu'elle a filmé durant son périple : « Là, c'est une vidéo que j'ai tournée quand je suis arrivée au Ghana. J'étais en train de parler avec un vendeur dans un magasin de vélo, pour essayer de réparer mon dérailleur et là, il y a quelqu'un qui était juste à côté. Il a commencé à dire : " Non non non, ce que tu racontes n'est pas vrai, arrête de mentir ! Ce n'est pas possible de venir du Maroc et parcourir plus que 6 000 km à vélo ! " Bah, je lui ai dit, « Je suis Marocaine. Si toi, tu n'es pas fort, moi, je le suis et je peux le faire ! » Les galères, raconte-t-elle, elle en a vécu. Partout. Crevaisons. Casse. Pépins de santé. Chaque épreuve a contribué à renforcer un peu plus son mental d'acier : « J'ai eu quatre fois le palu, j'ai eu la typhoïde, j'ai eu beaucoup d'infections dentaires. Mon visage a été gonflé comme si j'avais pris du botox » rit-elle. « J'étais au milieu de la jungle, au Cameroun. Il y avait un centre de soin, sans eau ni électricité. C'était fou. Mais je n'ai jamais eu l'idée de dire "j'arrête, je n'en peux plus". J'ai appris durant ce voyage que si quelque chose arrive, "it is what it is". Ça m'a appris à rester toujours positive, à apprendre que chaque problème a une solution et que tout est possible. » Marquée, elle le restera. Par l'hospitalité des Guinéens, par la solidarité et la bienveillance des Malgaches, la beauté des paysages de Namibie, du Nigeria, de l'Angola. De retour au Maroc, elle a déjà prévu la suite : écrire un livre, monter le documentaire de son aventure avec les centaines d'heures de rush, et qui sait, reprendre un jour son vélo pour se rendre au point le plus au nord de la planète.

    Dans l'est de la RDC, les bénévoles du «Club RFI de Goma» au chevet des victimes du conflit

    Play Episode Listen Later Nov 27, 2025 2:26


    Dans l'est de la République du Congo, déchiré par les conflits armés depuis une décennie, des organisations humanitaires locales et internationales sont à pied d'œuvre pour soutenir les milliers des personnes qui souffrent suite à la guerre. Parmi ces organisations, le Club RFI intervient dans les communautés au travers des aides, en soutenant la population meurtrière. Durant deux ans, plus de 100 000 femmes et enfants ont été pris en charge dans l'accompagnement psychosocial. Aujourd'hui, ces bénévoles nous racontent leurs engagements pour la communauté au risque de leurs vies.  Dans le quartier Himbi, au cœur de Goma, sous un silence accompagné du chant des oiseaux, Nathalie Muchinya et Alphanie Thembo racontent leur engagement en faveur des habitants de l'est du pays. En dépit des incertitudes, ces deux membres du Club RFI de Goma sont décidées à aller à la rescousse des communautés. « Depuis la guerre du M23, j'organise deux séances de groupe de paroles, de résilience émotionnelle et de décharge émotionnelle avec les jeunes. Travailler pour le bien des autres personnes sans attendre quelque chose en retour », explique Alphanie Thembo. « Ce qui m'anime aujourd'hui est de travailler en tant que bénévole au sein du club RFI Goma. C'est cet esprit d'abord d'humanité. L'humanitaire, c'est vraiment important pour moi et ce service qu'on rend à la communauté. Quelqu'un vient et témoigne de ce que vous lui avez fait ressentir, ce que vous lui avez encore donné, de nouveau cet espoir de vivre », abonde Nathalie Muchinya. Nathanaël Bora, chargé de programme au sein de l'organisation, estime que servir les communautés qui souffrent devrait animer l'humanité aujourd'hui : « Nous ne sommes pas affectés de la même manière. Bien sûr que, nous aussi, vivons dans cette communauté. Il y a des difficultés que nous connaissons. Par exemple, à cause de ce conflit, il y a des femmes qui sont violées. Alors qu'est-ce que nous, au Club RFI, nous faisons ? Nous cherchons à mettre ensemble le psychologue bénévole pour l'accompagnement psychologique de ces femmes violées, de ces victimes de violences sexuelles. Je suis vraiment motivé à continuer à aider ma communauté. Parce que ma communauté a besoin des œuvres caritatives, des œuvres de bénévolat pour surmonter toutes les difficultés que nous connaissons. » Des besoins énormes Depuis la prise des villes de Goma et Bukavu, les besoins sont devenus énormes. Maître Zacharie Bashwira, coordonnateur du Club RFI, plaide pour plus du financement, au regard de la crise actuelle qui s'accentue et dont les femmes et les jeunes, dit-il, sont les premières victimes. « Notre objectif, c'est d'arriver à encadrer ces jeunes. Les clubs RFI, par exemple, viennent de donner une chance à une trentaine de jeunes orphelins de guerre qui vivent dans les orphelinats à Goma et à Nyiragongo. Nous les avons formés à des métiers professionnels. Aujourd'hui, ils sont sur le marché de l'emploi. On ne va pas s'arrêter là. On va continuer ces cycles pour essayer de passer d'une jeunesse à risque à une jeunesse opportune », détaille-t-il. Aujourd'hui, le Club RFI à Goma compte 39 volontaires permanents et une centaine des bénévoles occasionnels, qui œuvrent tous au service de la communauté.

    Tchad: de Tiné à Touloum, la relocalisation des réfugiés soudanais [4/4]

    Play Episode Listen Later Nov 27, 2025 2:30


    Depuis la chute d'El-Fasher entre les mains des FSR du général Mohamed Hamdan Dogolo dit « Hemedti » le 26 octobre dernier, chaque semaine, le Tchad voit arriver en moyenne 2000 réfugiés soudanais. Ils arrivent pour la plupart de la capitale du Darfour-Nord. Traumatisés, affamés, assoiffés, ils ont réussi à survivre à 18 mois de siège, aux massacres, aux viols utilisés comme armes de guerre, aux jours de combat qui ont précédé la chute d'El-Fasher. Ils ont aussi survécu aux routes dangereuses et coûteuses qui mènent au Tchad voisin. Depuis novembre, les réfugiés soudanais sont relocalisés au camp de Touloum, à quelques heures de route de la frontière. Le but : éviter l'installation d'un camp à Tiné, et (donc) désengorger la frontière. Trois fois par semaine, des camions avec à leur bord les derniers réfugiés arrivés, partent pour Touloum, où sera alors finalisée leur installation au Tchad. De Tiné à Touloum : la relocalisation, c'est le quatrième et dernier volet de notre série de reportages sur la route de l'exil des réfugiés soudanais.  De notre envoyée spéciale à Tiné, Effervescence, agitation et angoisse… La tension est palpable dans le camp de transit de Tiné. Daralnayim sera dans l'un des six camions prévus pour la relocalisation vers le camps de Touloum. Seule et enceinte, elle part avec pour seules affaires deux sacs, l'un sur le dos, l'autre qu'elle traîne difficilement. « Je suis heureuse de m'installer dans le camp. Ma mère et ma famille vont pouvoir me rejoindre. Je pourrai m'occuper de ma mère, ma fille et mes frères. Il faut que je puisse manger, pour prendre des forces, travailler et assurer ce qui leur faut », dit-elle. Pour cette cession de relocalisation près de 500 ménages arrivent à Touloum. Le camp existe depuis le début de la guerre au Darfour, il y a 20 ans. Il y accueille aujourd'hui plusieurs dizaines de milliers de personnes. La ville la plus proche est à environ 30 min en voiture. L'eau est rare et la nourriture aussi, alors la solidarité s'organise. « Les réfugiés et les anciens refusés s'organisent entre eux et pour envoyer un peu de la nourriture, des repas chauds, de l'eau et pour accueillir les nouveaux réfugiés », explique Moussa Fofana, agent de terrain pour le HCR À lire aussiLa route de l'exil vers le Tchad: les réfugiés soudanais d'El-Fasher racontent leur cauchemar[2/4] Selon un porte-parole du PAM, l'ONG donne aux nouveaux arrivants une aide alimentaire : céréales, légumineuses, huile et sel avant de passer à une distribution d'argent quelques semaines plus tard. Mais plusieurs sources humanitaires expliquent que ces distributions sont insuffisantes. Rahma est arrivée il y a plusieurs mois à Touloum. « Nous voulons de la nourriture et que l'eau soit présente de manière constante. Ne coupez pas ces services. Voilà mon message ». Le 24 novembre dernier, les FSR ont décrété une trêve humanitaire unilatérale refusée par l'armée soudanaise. Malgré les efforts des médiateurs internationaux, le cessez-le-feu semble loin et les réfugiés de Touloum se résignent à devoir rester au Tchad. À lire aussiAu Tchad, les réfugiés soudanais racontent leur arrivée au camp de Tiné [3/4]

    Au Tchad, les réfugiés soudanais racontent leur arrivée au camp de Tiné [3/4]

    Play Episode Listen Later Nov 25, 2025 2:22


    Depuis avril 2023, se déroule au Soudan l'un des conflits les plus meurtriers, à l'origine de « la plus grande crise humanitaire au monde » selon l'ONU. Selon des témoins ayant fui El-Fasher, la capitale du du Darfour-Nord est le lieu de massacres, violences à caractère ethnique, viols et agressions sexuelles depuis qu'elle est tombée entre les mains des paramilitaires FSR du général Mohamed Hamdan Dogolo « Hemedti », le 26 octobre dernier. Plusieurs organisations humanitaires font état de crime de guerre, de crimes contre l'humanité, les Nations unies parlent d'une « spirale d'atrocité ». Après un siège de 18 mois, après la faim, la soif, la violence et la peur, certains Soudanais ont réussi à quitter El-Fasher pour se réfugier au Tchad voisin. Le Tchad et le Soudan sont séparés par un wadi, un oued sec, depuis la fin de la saison des pluies. De part et d'autre de cette frontière se trouvent deux villes : Tina, au Soudan, et Tiné, au Tchad. C'est là que les réfugiés soudanais traversent à pied, en charrette ou à l'arrière de camionnettes. De notre envoyée spéciale à Tiné, La frontière est gardée par des militaires tchadiens, mais aucune entrave n'a lieu au passage des réfugiés qui traversent tous librement. « Voilà les nouvelles familles qui viennent d'arriver. Elles sont orientées pour faire le circuit : d'abord l'enregistrement des réfugiés avec la Commission nationale d'accueil de réinsertion des réfugiés et des rapatriées du Tchad (Cenar), après avoir obtenu les informations de la personne. Puis un screening médical se fait avec Médecins sans frontière (MSF) avant leur transfert vers le site de transit », explique Georges, membre de l'équipe du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).  Le visage fatigué, en partie dissimulé derrière son foulard bariolé, Souad Ibrahim Abdou s'installe à quelques mètres de la frontière, sous la cabane de MSF. Elle attend désormais d'être enregistrée. « On a laissé les enfants à Tawila. On remercie le seigneur d'être arrivé ici en bonne santé. Dieu merci, tout va bien. On nous a conseillé de venir ici, on nous a dit que la ville était bien. Le seul problème ici, c'est la nourriture. Aussi, il n'y a pas de travail », raconte-t-elle. Une fois le premier enregistrement effectué, les réfugiés doivent se rendre par leurs propres moyens au site de transit à la sortie de la ville. Parmi les infrastructures sur place, des pompes à eau, mais peu de latrines. Et les températures chutent fortement le matin et le soir. La jeune Daralnayim,19 ans et enceinte de sept mois, a fait le voyage seule depuis El-Fasher. Elle raconte sa vie dans le site de transit : « Il n'a pas de nourriture, pas de couvertures, pas de lit. Je n'ai pas eu d'autre choix que de rester avec des femmes ici. On a fait les démarches d'enregistrement ensemble. » Les profils de ces derniers arrivants sont majoritairement des femmes et des enfants. Mais il y a beaucoup plus d'hommes comparé au début du conflit en 2023. « Il y a de plus en plus de vieillards blessés, de gens inaptes et beaucoup d'enfants non accompagnés. Ils avaient encore l'espoir en 2023 qu'ils peuvent défendre leur terre, résister. Maintenant, c'est le désespoir total », détaille Jean-Paul Habamungu, responsable du HCR à Iriba.  À lire aussiLa route de l'exil vers le Tchad: les réfugiés soudanais d'El-Fasher racontent leur cauchemar[2/3]

    La route de l'exil vers le Tchad: les réfugiés soudanais d'El-Fasher racontent leur cauchemar[2/4]

    Play Episode Listen Later Nov 24, 2025 2:25


    Depuis la chute d'El-Fasher entre les mains des FSR du général Mohamed Hamdan Dogolo dit Hemedti le 26 octobre dernier, chaque semaine, le Tchad voit arriver en moyenne 2 000 réfugiés soudanais. Ils arrivent pour la plupart de la capitale du Darfour-Nord. Traumatisés, affamés, assoiffés, ils ont réussi à survivre à 18 mois de siège, aux massacres, aux viols utilisés comme armes de guerre, aux jours de combats qui ont précédé la chute d'El-Fasher. Ils ont aussi survécu aux routes dangereuses et coûteuses qui mènent au Tchad voisin. Le témoignage poignant de réfugiés arrivés à Tiné, ville frontalière du Soudan, dans la région du Wadi Fira. Assise sur un bidon vide, Recroquevillé sur elle-même, le visage couvert par un foulard, Salma Mohamad Abdallah a encore du mal à parler. « On est sorti d'El-Fasher à pied. C'était effrayant. Sortir de chez soi à quatre heures du matin, tout laisser derrière soi, y compris ses proches, c'est dur. Et après ça, on s'est déplacé de nuit. On a marché pendant quatre jours. Il y avait des FSR. Torture, humiliations, ils font peur. Ils nous ont tout pris et surtout, ils frappaient les hommes et ne les laissaient pas passer. » Après quatre jours de marche, elle a dû payer des passeurs, souvent FSR, pour finir le trajet jusqu'au Tchad. « Si on dit qu'on est Zaghawa, ils ne nous laissent même pas sortir d'El-Fasher » « Quand on est arrivé à Garna, on a trouvé les voitures des FSR. On a pris celle qui emmenait à Tiné. Ils nous posent toutes sortes de questions. Et si l'on dit que nous sommes Zaghawa, ils nous torturent et ne nous laissent pas monter dans les voitures. Il faut dire le nom de n'importe quelle autre ethnie pour qu'ils nous laissent passer. Mais si on dit qu'on est Zaghawa, ils ne nous laissent même pas sortir d'El-Fasher. » D'autres ont réussi à récolter suffisamment d'argent pour faire tout le trajet en voiture, mais avec une peur omniprésente : celle de se faire piller par les paramilitaires. C'est le cas de cette mère de trois enfants. Samia Ousman Hadi : « Je suis venue en voiture, mais malgré tout c'était fatiguant, on avait faim, on était épuisés et on a été insultés. Après, il a fallu s'arrêter. On est resté là, dehors en attendant la suite. Il y avait ni à boire ni à manger. C'était éprouvant. » « Des enfants ont disparu » À l'approche de Tiné, Rahma Mouhamad Abdallah et ses six enfants ont cru qu'ils n'arriveraient pas vivants au Tchad. « Des bombardements, des missiles, des drones, c'était très dur. Il y avait des enfants nus, ils marchaient sans aucun vêtement. Beaucoup ont perdu leur mère, leur père. Des enfants ont disparu. Il y a des gens qui n'ont pas retrouvé leurs familles. » Des sources gouvernementales tchadiennes confirment d'intenses activités de drone en territoire soudanais, à quelques dizaines de kilomètres de Tiné. Les humanitaires présents aux postes frontière disent avoir reçu une trentaine de blessés ayant traversé la frontière pour se faire soigner. À lire aussi«Il fallait rester à l'abri, sous terre»: des Soudanais d'El-Fasher réfugiés au Tchad témoignent [1/3]

    «Il fallait rester à l'abri, sous terre»: des Soudanais d'El-Fasher réfugiés au Tchad témoignent [1/4]

    Play Episode Listen Later Nov 23, 2025 2:40


    Au Soudan, se déroule depuis avril 2023 l'un des conflits les plus meurtriers. À l'origine de « la plus grande crise humanitaire au monde », selon l'ONU. Massacres, violences à caractère ethnique, viols et agressions sexuelles. C'est l'horreur décrite par ceux qui ont réussi à fuir El-Fasher, la capitale du Darfour-Nord, tombée aux mains des paramilitaires FSR du général Mohamed Hamdan Dogolo, dit Hemedti. Certains Soudanais ont réussi à quitter El-Fasher pour se réfugier au Tchad voisin. Témoignage de certains d'entre eux à Tiné, au nord du pays et le long de la frontière soudanaise. De notre envoyée spéciale de retour de Tiné, Dans le centre de transit de Tiné, Kaltouma est assise par terre, entourée de ses enfants. Le regard abattu, fixant le vide, cette mère de 32 ans a quitté El-Fasher, il y a moins d'un mois, elle y a vécu l'enfer. Kaltouma Ibrahim Abakar : « Nous étions encore à El-Fasher avant la chute. Il y a eu quatre ou cinq jours d'affrontements avec des bombardements. Le jour de la chute, il était impossible de sortir des trous qu'on a creusés sous-terre. On ne pouvait pas risquer d'aller chercher à manger ou à boire pour les enfants. Il fallait rester à l'abri, sous-terre. » Après la chute d'El-Fasher, Kaltouma et ses enfants réussissent à fuir. « Ils ont creusé toute la ville. Certains ne pouvaient pas sortir des tranchées. Ils sont restés bloqués à l'intérieur. Mais on devait passer par ces trous creusés. On n'avait pas le choix. Ceux qui avaient la force d'en sortir partaient et ceux qui n'y arrivaient pas mourraient dedans. Les enfants, les femmes sans force, les vieillards, tous sont restés bloqués là-bas. »  À lire aussi«Soit tu passes, soit tu meurs»: au Tchad, des réfugiés soudanais racontent leur fuite d'El-Fasher Hawa Adam Abdallah s'avance d'un pas décidé. Elle veut parler, raconter ce que traverse son pays : « À la sortie d'El-Fasher, il y avait des tranchées creusées. En sortant de là, il y avait des paramilitaires. Ils ont tué certains d'entre nous. Parmi eux, mon frère, et ils ont enlevé mon père. Et j'ai un autre frère perdu, plus aucune nouvelle. Et puis sur la route, quand on a dépassé El-Fasher, ils nous sont tombés dessus. Ils nous ont chassés, frappés. Ils nous ont enlevé tout ce qu'on avait. Et si on n'a aucun bien, ils nous font enlever nos vêtements. On est arrivé ici sans rien. » Les deux femmes sont arrivées il y a quelques jours. Elles attendent d'être relocalisées au camp de Touloum, à deux heures de route de la frontière. « Beaucoup sont morts sur la route » Abdelmajad Ahmad Mouhammad descend du camion qui l'a transporté à Touloum. Avec ces quatre jeunes garçons, il espère retrouver sa femme et sa fille parties plus tôt : « Morts, tortures, déplacements forcés, exécutions, destructions, incendies, que des choses horribles ». C'est ainsi qu'Abdelmadjid décrit sa ville natale El-Fasher. Pourtant, ce père de 34 ans n'a quitté la capitale du Darfour du Nord qu'après sa chute le 26 octobre dernier. « Certains ont réussi à sortir, d'autres non. Beaucoup sont morts sur la route aussi à cause de la soif, de la faim, de la torture, mais d'autres, on ne sait même pas quelles directions ils ont empruntées. Leurs propres familles ne savent pas où ils sont. Ils ne savent même pas s'ils sont morts ou vivants. » Plusieurs organisations humanitaires font état de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité. Les Nations unies parlent d'« une spirale d'atrocités » Impossible de communiquer avec ceux qui sont encore à El-Fasher. 170 000 à 250 000 personnes étaient encore bloquées dans la ville au moment de sa chute.

    Sénégal: Kaikai, une startup qui installe des capteurs de pollution dans les écoles du pays

    Play Episode Listen Later Nov 22, 2025 2:15


    À Dakar, la pollution de l'air reste un problème majeur, particulièrement autour des grands axes routiers. Face à cette situation, une start-up sénégalaise mise sur la technologie pour sensibiliser les plus jeunes. Des capteurs de qualité de l'air ont été installés dans plusieurs écoles du pays. De notre correspondante à Dakar, Dans la cour de l'école El Hadji Mbaye Diop, un petit boîtier fixé au mur attire l'attention. Les élèves, eux, le connaissent bien désormais, comme Christelle Williams, 12 ans, cheffe du gouvernement des élèves : « On a des élèves asthmatiques dans l'école avec des problèmes de respiration. Grâce aux capteurs, quand on a des tempêtes de sable, par exemple, ça nous alerte, ça envoie un signal directement dans l'ordinateur du directeur. Une fois qu'il reçoit le signal, il donne l'alerte immédiatement. On prévient certains parents pour que leurs enfants portent des masques ou de les garder à la maison en cas de suffocation. » La petite sœur de Christelle est asthmatique. Et comme elle, de nombreux enfants souffrent de maladies respiratoires à Dakar, une capitale étouffée par la pollution. C'est la start-up Kaikai, spécialisée dans le digital pour le développement, qui a installé 50 capteurs dans des écoles aux quatre coins du pays. Dieudonné Fortune Gnanguenon, chef de projet chez Kaikai : « On a un tableau de bord. Vous voyez sur mon ordinateur où on recense tous les endroits où on a déployé des capteurs. Donc ce tableau de bord mesure plusieurs paramètres liés à la qualité de l'air, notamment les particules fines. » « Les enfants asthmatiques sont moins absents » Les valeurs relevées sont souvent élevées dans cette école située en bordure d'une route très passante du quartier de Ouakam : « Par exemple, ce matin, dans cette école, à 9 h 35, nous constatons qu'il y a eu un pic de pollution, peut-être dû à la circulation. » Depuis la mise en place du boîtier, en décembre 2024, le directeur de l'établissement, Moustapha Diagne, a pu constater les effets sur ses plus de 600 élèves. « Il y a eu des améliorations sur les performances scolaires des enfants. Les enfants asthmatiques sont moins absents et les maladies moins fréquentes également et les parents sont moins inquiets. » Les données sont recueillies en temps réel, puis partagées sur des plateformes de données ouvertes comme IQAir. Mais Kaikai veut aller plus loin : que ces informations servent de levier de plaidoyer auprès des pouvoirs publics, explique Dieudonné « La mise à disposition des données sur la qualité de l'air sont disponibles et permettent de caractériser le problème. On a posé les bases de cette initiative qui pourrait être soutenue par le secteur public ou privé et nous accompagner dans le travail que l'on fait. » La dernière loi sur la qualité de l'air au Sénégal remonte à 2004. Kaikai plaide aujourd'hui pour une modernisation de la réglementation. À lire aussiAu Sénégal, une «start-up» recycle les déchets pour réduire les émissions de gaz à effets de serre

    Nigeria/Boko Haram: des camps de déplacés existent toujours à Maiduguri [5/5]

    Play Episode Listen Later Nov 21, 2025 2:30


    Au Nigeria, deux opérations portées par l'armée et par l'État de Borno ont facilité la réintégration dans la société de dizaines de milliers de repentis de Boko Haram et de l'ISWAP. Pour relancer l'économie de son État essentiellement agricole, le gouverneur Babagana Zulum a organisé le retour de déplacés internes dans leur communauté d'origine. Officiellement, il n'y a plus de camps de déplacés à Maiduguri, pourtant des milliers de familles vivent dans des conditions de vie difficile dans des camps informels de la capitale de l'État de Borno. De notre correspondant de retour de Maiguduri, Souriante devant ses enfants, Yakura dissimule des blessures psychologiques profondes. Kirenowa, sa ville d'origine près du Lac Tchad, est dans une zone sous contrôle de l'ISWAP Et aujourd'hui encore, Yakura reste marquée par le son des armes automatiques lorsque Kirenowa fut attaquée en mai 2014. « Nous avons commencé à entendre des coups de feu. On a cru à une mauvaise blague. Puis la situation a dégénéré. Les gens se sont mis à courir. Quant à nous, nous sommes coincés sur place pendant 10 jours. La plupart du temps, les membres de Boko Haram revenaient dans la communauté. Le soir ou le matin. » Kingibe vit avec sa famille pas très loin de l'emplacement de Yakura Handicapé par une blessure non soignée depuis 7 ans, Kingibe a des difficultés à se déplacer. Il passe ses journées assis sur un tapis à égrener un chapelet musulman. Et avec la recrudescence des kidnappings dans la périphérie de Maiduguri, cet homme d'âge mûr ne sort quasiment plus du camp. « Si les membres de Boko Haram enlèvent une personne, ils exigent une rançon de 5 à 10 millions de nairas. J'ai à peine 500 nairas par mois. Dans ces conditions, comment payer une telle somme ? Comment aller cultiver la terre pour nous nourrir alors que la brousse n'est pas sûre et qu'à seulement 2 km de distance d'ici, ils peuvent nous capturer ? » « Une personne pauvre ne peut pas survivre sans cultiver » Durant plus de 10 ans, Kingibe a difficilement accepté de dépendre des distributions de vivres. Depuis deux ans, ces distributions ont cessé suite au décret local fermant les camps à l'intérieur de Maiduguri. Or pour Kingibe, c'est un cauchemar sans fin de voir ses enfants pleurer de faim. Car cet agriculteur ne peut plus accéder à son champ dans son village près de Marte, à plus de 130 km de Maiduguri : « De nombreuses personnes qui sont retournées à Marte ont été attaquées par les membres de Boko Haram. Puis ces familles ont été déplacées à Dikwa. Avant de revenir nouveau Maiduguri sur instruction du gouverneur Babagana Zulum avec un soutien alimentaire pas trop long. Plus tard, certaines familles sont retournées à Marte, mais d'autres vivent toujours ici. Sans pouvoir cultiver, une personne pauvre ne peut pas survivre. » Pour nourrir sa famille, Kingibe envisage de vendre la tente humanitaire qui leur sert de logement. Plusieurs de ses voisins l'ont déjà fait, laissant vide ainsi de nombreux espaces dans ce camp informel. À lire aussiNigeria: comment j'ai basculé dans Boko Haram [1/5] À lire aussiNigeria: la réintégration d'ex-membres de l'Iswap dans la société, sans passer par la case prison [2/5] À lire aussiNigeria: face à la réintégration des repentis Boko Haram, l'impossible pardon pour les victimes [3/5] À lire aussiNigeria: les sessions de déradicalisation d'ex-membres de Boko Haram [4/5]

    Nigeria: les sessions de déradicalisation d'ex-membres de Boko Haram [4/5]

    Play Episode Listen Later Nov 20, 2025 2:29


    En s'inspirant du « Sul hu » un mécanisme islamique de justice traditionnelle, le Nigeria développe des programmes de déradicalisation et de réintégration. L'armée nigériane et l'État de Borno portent depuis 10 ans cette tentative de réconciliation avec des ex-membres de Boko Haram et de l'ISWAP, non-auteurs de crimes de masse. Ces repentis suivent alors des sessions individualisées et collectives avec notamment des interventions d'experts en théologie musulmane pour déconstruire leurs discours radicaux. Et dans certains cas critiques, ils bénéficient d'une assistance médicale et psychologique. Si peu d'acteurs de ces programmes acceptent de témoigner à visage découvert :  Mustapha Ali et Mohammed Abdullahi deux experts en déradicalisation, ont choisi de le faire. Ils dévoilent les coulisses de leurs interventions. De notre correspondant à Nigeria Plusieurs fois par semaine, Mustapha Ali se ressource sous les arbres du centre islamique Imam Malik. Une nécessité vitale pour ce quinquagénaire à la fine barbe. Depuis cinq ans, ce docteur en théologie musulmane intervient dans des programmes de déradicalisation. Et pour Mustapha Ali, c'est d'abord une bataille intime : « C'est d'abord se confronter à des individus, à une idéologie toxique. Ils pourraient même essayer de me tuer, peut-être. Donc encore jusqu'à aujourd'hui, j'ai toujours peur. Quand vous êtes assis avec eux, vous voyez qu'ils sont très durs. En entendant Les mots qu'ils utilisent lorsque vous discutez d'un sujet avec eux, vous devez les calmer en leur disant que vous êtes frères, en les conseillant. » Faire abstraction des crimes commis par ces repentis, établir une relation d'humain à humain. C'est un sacré défi pour Mustapha Ali. Sur au moins 15 séances, cet expert islamique livre une bataille idéologique devant des petits groupes d'endoctrinés. En se basant sur le Coran, il déconstruit régulièrement la question du Djihad, qui signifie abnégation, effort en arabe. « J'ai organisé une session avec vingt hommes qui revenaient de la brousse. Et ils croyaient que ce qu'ils faisaient était bien. Certains d'entre eux étaient juges ou prédicateurs lorsqu'ils étaient à Sambisa. Et au cours de cette délibération, je leur ai fait réaliser leur erreur. Et après la délibération, beaucoup d'entre eux ont même pleuré. Ils étaient traumatisés. Nous avons même dû demander à des médecins d'intervenir. » « Cela prend du temps » Comme Mustapha Ali, Mohammed Abdullahi sort de sa zone de confort universitaire pour mieux se confronter à l'extrémisme salafiste. Lui aussi anime des ateliers de déradicalisation. Mais Mohammed Abdullahi pratique également des médiations entre victimes et des repentis de Boko Haram, pour faciliter leur réintégration dans la société. « Vous restez toujours polis avec eux. Cela prend du temps, mais vous utilisez la logique, la religion, l'histoire. Vous faites des démonstrations par petits pas, en vous appuyant sur les pratiques du prophète Mahomet. Parfois, lorsqu'ils prennent conscience, alors ils commencent à rire. » Tendre la main aux repentis alors que Boko Haram et l'ISWAP continuent de frapper. Mohammed Abdullahi comprend que cette approche soit difficile à saisir pour beaucoup de personnes. Mais pour lui, c'est la voie la plus solide pour éradiquer à long terme l'idéologie islamiste radicale au nord-est du Nigeria. À lire aussiNigeria: comment j'ai basculé dans Boko Haram [1/5] À lire aussiNigeria: la réintégration d'ex-membres de l'Iswap dans la société, sans passer par la case prison [2/5] À lire aussiNigeria: face à la réintégration des repentis Boko Haram, l'impossible pardon pour les victimes [3/5]

    Nigeria: face à la réintégration des repentis Boko Haram, l'impossible pardon pour les victimes [3/5]

    Play Episode Listen Later Nov 19, 2025 2:19


    La secte terroriste connue sous le nom Boko Haram a lancé une insurrection armée en 2009 pour établir un État islamique, tuant des dizaines de milliers de personnes et déplaçant plus de deux millions dans le nord-est du Nigeria. Pour résoudre cette crise sécuritaire et humanitaire qui frappe également les pays voisins, Abuja a lancé plusieurs programmes de réconciliation et de réintégration pour favoriser les défections dans les rangs de Boko Haram et de l'Iswap. Une perspective qui indigne certaines victimes, qui se sentent abandonnées par l'État. De notre correspondant au Nigeria,  La colère ne quitte plus Aisha. En 2011, son fils est pris dans une énorme rafle de l'armée nigériane, car il était suspecté, comme des milliers d'hommes, d'être un Boko Haram. Aujourd'hui, Aisha ne sait pas si son enfant est encore vivant. Et malgré les intimidations, cette septuagénaire au visage fin et tatoué, hurle à l'injustice à la face des autorités politiques et militaires qu'elle croise dans Maiduguri. « Le gouvernement fédéral ne nous reconnaît pas comme citoyens nigérians. Pourquoi il accepte les repentis ? Et en plus, il les réintègre dans la communauté ? Pourquoi l'armée ne libère-t-elle pas nos enfants pour qu'on puisse connaître la vérité ? Le gouvernement incarcère nos enfants sans jugement et accepte les repentis de Boko Haram. Ce n'est pas cela la justice pour moi », dénonce Aisha. Abba Ashigar réajuste sa prothèse orthopédique remplaçant sa jambe gauche : cet étudiant a survécu à un attentat suicide. Le 16 janvier 2017, il entre avec son père et son jeune frère dans une des mosquées du campus de l'Université de Maiduguri. À peine l'imam démarre la prière de l'aube, un kamikaze déclenche son engin explosif. « Même si vous voulez pardonner, vous ne saurez pas vraiment ce que vous pouvez pardonner. Voulez-vous dire que je dois pardonner à ceux qui ont commis un attentat suicide dans la mosquée ? Ou à ceux qui ont organisé cet attentat ? Ou à ceux qui les ont financés ? Qui dois-je pardonner ? », interroge Abba. À lire aussiNigeria: comment j'ai basculé dans Boko Haram [1/5] Le jeune frère d'Abba, ainsi que trois autres personnes, ont succombé à leurs blessures. Abba est encore marqué psychologiquement par ce drame même s'il se dit fort. Comme Aisha, Abba est choqué par le retour sans procès des repentis Boko Haram : « Comment vous, le Gouverneur de l'État de Borno, vous les gens du gouvernement fédéral, vous osez simplement ramener ces gens ? Ceux qui ont massacré votre mère sous vos yeux. Ceux qui ont massacré votre père, vos voisins. Ou ceux qui ont commis des attentats-suicides contre vous. Les ramener simplement dans la ville, puis dire : "Ce sont des repentis". Pourquoi se repentiraient-ils devant nous ? » Loin de se laisser abattre, Abba se concentre sur son master en statistiques. Et chaque jour, il retourne prier dans la même mosquée du campus, pour le repos de l'âme de son petit frère. À lire aussiNigeria: la réintégration d'ex-membres de l'Iswap dans la société, sans passer par la case prison [2/5]

    Nigeria: la réintégration d'ex-membres de l'Iswap dans la société, sans passer par la case prison [2/5]

    Play Episode Listen Later Nov 18, 2025 2:20


    Depuis dix ans, des dizaines de milliers de membres volontaires ou forcés de Boko Haram et du groupe État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap) se sont rendus aux autorités du Nigeria : soit 120 000 ex-membres, selon l'armée. Le ministère de la Justice est impliqué dans le profilage de chaque cas, avec des poursuites engagées contre les auteurs de crime de masse. En parallèle, le Nigeria s'appuie des mécanismes de justice transitionnelle pour encourager ce retour des repentis dans des communautés où souvent vivent leurs victimes. Des tentatives de réconciliation collective qui se déroulent alors que les deux groupes armés islamistes attaquent toujours des localités du nord-est du Nigeria et dans les pays du bassin du lac Tchad. Rencontre avec des ex-combattants. De notre correspondant au Nigeria,  Après 15 ans de clandestinité, Umar réapprend à revivre dans Maiduguri, sa ville d'origine. Il y a deux ans, ce jeune homme au visage scarifié quittait les rangs de l'Iswap. Umar rejoint alors la capitale de l'État de Borno, pour y retrouver deux amis, Ibrahim et Aliyu, qui depuis l'hébergent dans un camp informel de déplacés internes. « Au début, quand je suis arrivé ici, je préférais le lac Tchad, parce que j'étais habitué à cette vie-là, alors quand je suis revenu ici, j'ai eu du mal à vivre, parce que je me sentais tout le temps coupable, comme si les gens m'observaient et me regardaient comme un animal et non comme un être humain », explique Umar. Umar reconnait avoir participé à de nombreux raids meurtriers de l'Iswap ces dix dernières années, sur le pourtour du lac Tchad. Umar affirme qu'il a renoncé à l'ultra-violence. Pourtant, rien ne l'atteste : « Quand j'ai tourné le dos à l'Iswap, je n'ai suivi aucune formation professionnelle, ni aucune déradicalisation, car je suis un homme d'affaires et j'ai l'habitude de travailler. J'ai donc continué à m'occuper d'achat et de vente. Je suis habitué à faire des affaires », confie Umar. À lire aussiNigeria: le long processus de réinsertion des repentis de Boko Haram Les deux amis d'Umar sont aussi des anciens membres de l'Iswap. Ils ont, eux aussi, déposé leurs armes via le programme « Safe Corridor » encadré par l'armée nigériane. Et rapidement, Aliyu et Ibrahim ont intégré un groupe de miliciens volontaires, dont la majorité vit dans ce camp informel. « Les programmes de réconciliation sont utiles, car parmi tous ces gens qui se repentent, désormais certains d'entre eux viennent travailler avec nous, explique Muhammad Samaila, le commandant de ce groupe. Nous patrouillons ensemble dans la brousse. Ils guident par exemple vers tout endroit où la présence de membres de Boko Haram nous est signalée. Nous avons ainsi pu attaquer ces terroristes avec plus d'efficacité à plusieurs reprises. » Et comme ses amis Ibrahim et Aliyu, Umar a aussi rejoint ce groupe de miliciens. Ensemble, ils effectuent ces missions d'éclaireurs pour l'armée nigériane. À lire aussiNigeria: comment j'ai basculé dans Boko Haram [1/5]

    Nigeria: comment j'ai basculé dans Boko Haram [1/5]

    Play Episode Listen Later Nov 17, 2025 2:16


    Nous vous proposons une série de reportages Afrique en cinq épisodes consacrés aux programmes de justice transitionnelle que le Nigeria expérimente depuis plus de dix ans, pour inciter les défections dans les rangs de Boko Haram. L'opération « Safe Corridor » et le « Modèle du Borno » sont deux mécanismes sur lesquels s'appuient l'armée nigériane, le ministère de la Justice et le gouvernement de l'État de Borno, pour réintégrer des repentis de Boko Haram dans leur communauté d'origine ou des communautés hôtes. Selon l'armée nigériane, 120 000 ex-militants auraient quitté les rangs de Boko Haram et de l'État islamique en Afrique de l'Ouest (ISWAP). Notre correspondant a passé plusieurs semaines dans le nord-est du Nigeria pour recueillir des témoignages de victimes, d'experts en déradicalisation, mais aussi de repentis, ex-membres de Boko Haram et de l'ISWAP. Dans ce premier épisode, Moïse Gomis donne la parole à deux repentis : Kachalla et Ibrahim. Dans ce premier volet, ils nous racontent comment ils ont basculé dans l'islamisme armé. De notre correspondant au Nigeria, Kachalla s'applique à chaque coup de marteau. Il mise sur la qualité de son travail de charpentier. Pas facile de changer le regard de ses voisins, surtout quand on est un ancien Boko Haram. Fin 2014, quand Abubakar Shekau et ses troupes prennent le contrôle de Bama durant six mois, ils ne laissent pas beaucoup de choix aux hommes vivant sur place : s'engager ou bien être égorgé. « À ce moment-là, nous n'avions pas le choix. Nous étions contraints de travailler pour eux, nous ne pouvions donc pas refuser. Nous devions nous plier à leurs exigences, sinon ils nous auraient tués. Si vous ne leur obéissiez pas, ils vous disaient : "D'accord, vous n'acceptez pas notre idéologie, alors nous allons vous tuer". Nous devions donc obéir de force à ce qu'ils nous demandaient », raconte Kachalla. En 2014, Ibrahim est déjà un membre actif de l'ISWAP au Nigeria. Lui, c'est par adhésion qu'il s'enrôle à l'âge de 19 ans. Ibrahim était un fidèle de Mohammed Yusuf, le fondateur de la secte salafiste surnommée Boko Haram. À partir de 2007, comme plusieurs adeptes, Ibrahim se retranche à Markaz, le quartier de gare ferroviaire de Maiduguri. « Nous avons rejoint Mohamed Yusuf pour assister à ses cours islamiques. Nous sommes devenus tellement accros que cela nous est resté gravé dans l'esprit. Nous avons fait nos valises pour aller vivre avec notre guide spirituel jusqu'à ce que les choses dégénèrent », explique Ibrahim. « Tous les villageois étaient membres de Boko Haram » Pris dans l'engrenage, Ibrahim se radicalise malgré son attachement à ses études universitaires. C'est à travers une lettre d'adieu, remise à ses parents, qu'il coupe les ponts. Ibrahim s'exile dans la périphérie de Baga, une localité au bord du lac Tchad. « Tous les villageois étaient membres de Boko Haram. Nous avons été attirés par leur idéologie. Le jour où nous les avons rejoints, ils nous ont donné en naira l'équivalent de 650 euros et une moto neuve. Puis, ils nous ont emmenés dans leur campement. Et là, on est devenu membre à part entière », poursuit Ibrahim. Kachalla et Ibrahim, disent aujourd'hui regretter d'avoir gâché plusieurs années de leur vie. Désormais repentis, ils ont conscience de n'avoir plus le droit à l'erreur. À lire aussiBoko Haram, une tentative de réconciliation au Nigeria

    Kenya: se nourrir grâce à l'agriculture urbaine dans les bidonvilles de Nairobi

    Play Episode Listen Later Nov 16, 2025 2:19


    La COP30 à Belém, au Brésil, entre dans sa deuxième semaine ce 17 novembre. Parmi les sujets abordés de ce grand sommet mondial sur le climat, il y a celui de la sécurité alimentaire. En Afrique, elle est menacée notamment par la croissance des villes. Selon Africapolis, le continent connaît un des taux d'urbanisation les plus rapides au monde. D'ici à 2050, les villes africaines accueilleront 950 millions d'habitants supplémentaires. Alors, comment nourrir ces populations urbaines ? À Nairobi, au Kenya, dans le bidonville de Kawangware, on fait le pari de l'agriculture urbaine.  Reportage de notre correspondant au Kenya,  Jane Changawa habite un petit immeuble délabré de Kawangware. C'est sur le toit qu'elle a lancé, il y a trois ans, ce qu'elle appelle « sa ferme » : 50m² de plantations. « Là, on a des haricots verts, des tomates, des patates douces. On a aussi des épinards et du chou kale. Ma ferme est 100% bio. J'ai mes petits tuyaux. Vous voyez, par exemple, les oignons nouveaux sont plantés au milieu du chou kale. Quand ils sentent les oignons, les insectes s'enfuient. L'urine de lapin est aussi très efficace contre les insectes. Et si je mélange une tasse d'urine et cinq d'eau, ça me fait aussi de l'engrais », raconte Jane Changawa. Jane et sa famille consomment la plupart de sa production. Le reste, elle le vend pour environ 6 000 shillings par mois, soit une quarantaine d'euros. C'est la moitié du salaire minimum légal au Kenya. Lilian Nyariki, elle, vend des légumes dans la rue. Et c'est chez Jane qu'elle s'approvisionne. « C'est beaucoup plus intéressant pour moi que d'aller au marché de gros » « Ici, j'achète en général du chou kale, des épinards et des oignons. C'est beaucoup plus intéressant pour moi que d'aller au marché de gros. Quand je vais au marché, je dois prendre un bus. C'est assez loin. Ça me coûte 200 shillings (environ 1,30 euro, NDLR). Alors qu'ici, je n'en ai pas besoin. Jane vend aussi moins cher. Sept choux kales me coûtent 20 shillings (0,13 euro, NDLR), contre 500 à 1 000 shillings (3,30 à 6,60 euros, NDLR) au marché de gros. Avec Jane, je fais de bons profits », explique Lilian Nyariki C'est l'Association kényane pour les femmes en agriculture (Awak) qui a formé Jane. Ce jour-là, dans une petite église de Kawangware, Julius Mundia, membre de l'organisation, enseigne à une quarantaine de femmes. L'idée du projet lui est venue pendant la pandémie de Covid-19, alors que le confinement a provoqué une grave pénurie de nourriture dans la capitale. « Il est tout à fait possible de produire de la nourriture à Nairobi, dans des endroits exigus. C'est comme ça qu'on a inventé les jardins verticaux. On utilise n'importe quel contenant disponible : des sacs, des vieux vêtements, n'importe quoi dans lequel on peut mettre du terreau. Après, on plante des graines. Un sac peut parfois contenir une centaine de graines. On peut utiliser les toits des immeubles. Avec un simple balcon, on peut faire quelques jardins. Et pour l'eau, on utilise les eaux usées de la cuisine », explique Julius Mundia. Awak a déjà formé plus de 15 000 femmes.  À lire aussiComment promouvoir l'agriculture urbaine pour nourrir les villes africaines ?

    Mauritanie: à Nouadhibou, une école ouvre ses portes aux migrants

    Play Episode Listen Later Nov 16, 2025 2:19


    À Nouadhibou, deuxième ville de Mauritanie, de nombreux Africains partent en pirogues vers les îles Canaries, en Espagne, au péril de leur vie. Dans cette ville portuaire devenue carrefour migratoire, de plus en plus de familles font le choix de rester sur place et tentent d'envoyer leurs enfants à l'école malgré la précarité. Une école, fondée par des migrants pour des migrants, leur ouvre aujourd'hui une chance d'avenir, dans un contexte où l'Europe renforce ses contrôles, et où la Mauritanie devient un partenaire clé de la gestion des flux migratoires.  De notre correspondante en Mauritanie, À l'étage d'une petite maison de Nouadhibou, plusieurs pièces ont été transformées en salles de classe. Particularité : ces classes sont réservées aux enfants de migrants. Yama Fama Ndiaye, Sénégalaise de 12 ans, est à Nouadhibou depuis deux ans avec son père. Elle vient s'inscrire à l'école. « Mon papa travaille dans le poisson. Je veux apprendre le français et l'arabe », explique-t-elle. Les enfants viennent d'une dizaine de pays d'Afrique de l'Ouest et centrale. Les professeurs, eux, sont membres de l'Organisation de soutien aux migrants et aux réfugiés, qui a créé l'école en 2018. « Les enfants apprennent généralement le français. Ici, il y a plusieurs cultures : les Maliens, les Sénégalais... Ils apprennent les mathématiques arabes. Cela leur permet de s'intégrer dans le pays », précise Blanche, Camerounaise. Un enseignement adapté aux enfants en situation de migration Nouadhibou est un lieu de passage prisé des Africains qui cherchent à rejoindre l'Europe : frontalière du Maroc, à quelques jours seulement des Canaries par la mer. L'école adapte son enseignement aux besoins spécifiques de ces enfants venus parfois de très loin. « Ce sont des enfants qui ont traversé des pays et des moments très difficiles. On a aussi des enfants qui sont des réfugiés de guerre. Quand ils arrivent ici, ils ont un traitement quand même à part, surtout dans leur éducation. On a formé nos enseignants de sorte qu'ils puissent détecter ça, et puis améliorer leur éducation », précise Sahid Moluh, directeur de l'école. Baisse du nombre de migrants Sous pression des partenaires européens, la Mauritanie multiplie les contrôles et les rafles contre les migrants sans titre de séjour. Beaucoup de parents n'ont pas obtenu la carte de résidence et ne peuvent donc ni travailler librement ni se déplacer. « On rafle parfois les hommes. On laisse les femmes avec les enfants, raconte Amsatou Vepouyoum, présidente de l'Organisation. Ici, nous sommes en location. Il y a quand même l'apport des parents d'élèves. Ils apportent pour la contribution du loyer et pour donner aux encadreurs, qui sont des bénévoles. » L'école fait payer une petite participation : 600 ouguiyas, soit environ 13 euros par mois. Mais en cette rentrée, le portefeuille des familles est au plus bas, et les inscriptions se font timides. « Ça, c'est un centre qui accueille parfois 250 personnes. Mais depuis lundi, jusqu'à présent, nous n'avons pas encore 80 élèves, cela veut dire que l'impact est visible », poursuit Amsatou Vepouyoum. La tendance aux départs reste forte, même si les chiffres ont reculé. Entre janvier et août 2025, un peu plus de 12 000 migrants ont atteint les îles Canaries, soit une baisse de plus de 50% par rapport à la même période en 2024, selon Frontex et le ministère espagnol de l'Intérieur. À lire aussiGuinée: une nouvelle route dangereuse pour la migration vers les Canaries au départ de Kamsar

    Mauritanie: chasseur de météorites, une activité en plein essor mais peu encadrée

    Play Episode Listen Later Nov 14, 2025 2:18


    Ils parcourent des kilomètres dans le Sahara, avec leurs troupeaux. Et les yeux rivés au sol, à la recherche de météorites. En Mauritanie, ces chasseurs de pierres venues de l'espace sont de plus en plus nombreux, espérant décrocher le gros lot en vendant un fragment tombé de la Lune ou de Mars. Mais faute d'un encadrement officiel et d'un système d'authentification, ces trésors sont difficiles à écouler. De notre envoyée spéciale de retour de Nouakchott, Des jours et des jours à marcher derrière les bêtes dans le Sahara. Et peu à peu, l'œil s'exerce à reconnaître les pierres pas comme les autres. À Nouakchott, Hame Ould sidi Othmen, longue barbe et lunettes vissées sur le nez, montre fièrement sur une natte les météorites qu'il a dénichées dans le désert : « Je pars chercher des météorites dans toute la Mauritanie. » Il y a une dizaine d'années, après la découverte au Maroc de la grande météorite martienne de Tissint, la fièvre des pierres venues du ciel a gagné tout le Sahara. Ces passionnés sont devenus des experts pour les distinguer : « Ça, c'est une chondrite. On la reconnaît grâce à la couche qui l'enveloppe quand elle tombe du ciel, poursuit Hame Ould sidi Othmenn. On la distingue avec les yeux, mais parfois, on utilise des loupes. » « Les prix peuvent aller jusqu'à 1 000 euros » Tous se retrouvent au centre de la capitale pour vendre leurs trouvailles sous un grand arbre. L'activité est calme : « J'ai des météorites, mais je ne veux pas vendre pour le moment, explique notre « chasseur ». J'aimerais les vendre à 100 dollars le gramme. Le prix peut aller jusqu'à 1 000 dollars. Mais ici les gens ne payent pas, il te propose 10 dollars, c'est insignifiant, [alors] je ne vends pas. » Beaucoup de ventes se font désormais en ligne, via WhatsApp ou sur les réseaux sociaux comme TikTok. Certains intermédiaires, dans le nord du pays, autour de Bir Moghrein, inspectent les pierres avant de les revendre à l'étranger. Mais il n'existe pour l'instant aucun centre d'évaluation des pierres en Mauritanie. Les nomades se fient à leur œil, ou envoient leurs échantillons à l'étranger. « Ils ont des comptes de certains chercheurs internationaux à qui ils envoient les photos de leurs trouvailles ou par voie postale un échantillon de la roche », détaille le Dr Ely Cheikh Mouhamed Navee, premier planétologue mauritanien. Un secteur encore très informel, pas encore réglementé, regrette le chercheur : « Les météorites représentent pour chaque pays un patrimoine. Malheureusement, en Mauritanie, il n'y a aucun règlement dans ce secteur. » Une réglementation existe déjà dans des pays voisins, comme le Maroc. Le Dr. Navee voudrait aussi faire installer des caméras pour surveiller les chutes de météorites dans le désert, et créer un musée pour exposer ces pierres venues de l'espace.

    Soudan du Sud: les Akuak, tiraillés entre s'adapter et partir [3/3]

    Play Episode Listen Later Nov 13, 2025 2:27


    Troisième et dernier volet de notre série de reportages chez le peuple Akuak au Soudan du Sud, cette communauté de pêcheurs qui vit sur des îles dans les marécages de la plaine du Nil. Situées à une vingtaine de kilomètres de la ville de Bor, la capitale du Jonglei, leurs terres ancestrales sont aujourd'hui entièrement recouvertes d'eau. Des inondations catastrophiques provoquées par le changement climatique sévissent depuis cinq ans, une montée des eaux qui a démarré il y a des décennies et qui s'accélère, bouleversant le mode de vie des habitants, tiraillés entre s'adapter et partir. Reportage de notre correspondante dans la région. De notre correspondante à Juba, de retour des îles Akuak, Serrés sous un tukul, une demi-douzaine de voisins jouent aux dominos. Ils sont venus en canoë pour se retrouver chez l'un d'entre eux. Le chef de la communauté Akuak, Makech Kuol Kuany, veut espérer qu'ils ne sont pas condamnés à vivre éternellement confinés sur ces îles minuscules. Mais les changements climatiques ont déjà eu un impact dramatique. « La vie de notre communauté a beaucoup changé, affirme-t-il. Par le passé, nous avions des vaches, des champs agricoles, et aussi du poisson. La seule chose qui nous manquait, c'étaient des acheteurs pour notre poisson. Aujourd'hui, la situation s'est inversée. Nous n'avons plus ni champ ni bétail, mais par contre nous pouvons vendre notre poisson, c'est le seul changement positif actuel. Mais ces inondations nous ont forcés à tous devenir pêcheurs. Prenez mon cas : moi et mes six fils pratiquons la pêche. Car sans ça, comment allons-nous nous nourrir ? Et comment acheter des vaches pour la dot lors des mariages ? Nous nous sommes appauvris car, avant les inondations, nous avions ces trois ressources : l'agriculture, le bétail et la pêche. Mais maintenant il ne nous reste plus que le poisson ». À lire aussiSoudan du Sud: les Akuak, une société transformée par le changement climatique [1/3] La vie éreintante dans les îles, loin de tout service, et la persistance des inondations, ont poussé de nombreux Akuak à partir, confie le chef. « Avant ces inondations, la vie était meilleure » Pour Machiek Machar Riak, un pêcheur de 25 ans, il ne faut pas baisser les bras, car le mode de vie traditionnel reste à ses yeux meilleur pour les enfants que la vie urbaine, même s'il a bien changé : « Il y a des difficultés maintenant qu'il y a de l'eau de partout, ce n'est pas comme au temps de mon enfance. Nous étions très libres, nous avions des terrains de jeu, nous pouvions aller d'un village à l'autre à pied, nous pouvions facilement jouer avec les enfants des autres familles. Et nous cultivions du maïs, le maïs nous manque beaucoup aujourd'hui. » Comme tous les pêcheurs Akuak, Angui Kuol Kuany, 45 ans, fait l'aller-retour régulièrement entre les îles et Bor. Lui s'est spécialisé dans le commerce de poisson. Il voit pourtant la généralisation de la pêche d'un mauvais œil : « Dans le passé, avant ces inondations, la vie était meilleure, car toutes ces activités liées à la pêche étaient réservées à ceux qui avaient des filets et des canoës. Mais de nos jours, tout le monde a ces équipements et donc le commerce et la vie en général sont devenus très compétitifs. Beaucoup de gens sont partis des îles, et ceux qui y restent ont une vie misérable. » Des inondations d'ampleur similaire avaient frappé la région dans les années 1960, et la communauté avait réussi à résister pendant près de dix ans. Certains espèrent donc que la crue actuelle s'arrêtera un jour. À lire aussiSoudan du Sud: les Akuak, la pêche comme unique source de subsistance [2/3]

    Soudan du Sud: les Akuak, la pêche comme unique source de subsistance [2/3]

    Play Episode Listen Later Nov 12, 2025 2:30


    La suite de notre série de reportages dans les îles où vit la communauté Akuak, dans les marais de la plaine du Nil, au nord de Bor, au Soudan du Sud. Une région ravagée par le changement climatique, qui a provoqué ces cinq dernières années des inondations bien plus importantes que les crues saisonnières du fleuve. Mais les Akuak résistent face à l'eau, construisant des îles artificielles pour maintenir leurs maisons hors de l'eau, sans soutien extérieur, et avec comme unique source de subsistance, la pêche.  De notre correspondante de retour des îles Akuak, Dans les marais au bord du Nil, derrière les hautes herbes et les papyrus, on entrevoit un abri d'où s'élève de la fumée. C'est là que des pêcheurs Akuak ont installé leur base, une petite île couverte d'une bâche en plastique, où une casserole est sur le feu. Trois canoës sont amarrés. Debout dans l'eau, les hommes démêlent et mettent leurs filets en ordre avant de repartir pêcher. Ajith Nyangeth Riak a 40 ans et dit avoir appris à pêcher dès l'âge de cinq ans : « J'ai appris à naviguer en canoë avec mon grand-père, puis avec mon père, donc je suis très à l'aise, car ça fait partie de notre quotidien de piloter ces pirogues. Nous avons deux méthodes de pêche, selon que nous pêchons dans les marais ou dans le Nil. Lorsque nous pêchons dans les marécages, après avoir préparé nos filets, nous devons chercher des endroits où personne n'est encore allé. Nous coupons l'herbe pour nous frayer un chemin avec nos canoës et installer nos filets là où nous pourrons capturer beaucoup de poissons, en les laissant en place jusqu'au lendemain matin. Et l'autre méthode, c'est sur le Nil. Là aussi, il faut chercher un endroit calme pour tendre nos filets afin d'attraper le plus de poissons possible. » « Chez les Akuak, tout tourne autour de la pêche » À l'église de la paroisse Akuak, bâtie sur une grande île artificielle, il y a toujours une marmite de poisson sur le feu pour offrir à manger aux visiteurs. Ici, chez les Akuak, tout tourne autour de la pêche, explique Nyalueth Abuoi Ngor, une ancienne de la communauté, qui fume la pipe à l'ombre du mur en bambou de l'église : « Toute notre vie dépend du fait d'avoir des filets de pêche. Car quand nous parvenons à attraper du poisson, nous en vendons une partie, ce qui nous permet d'acheter de la farine et d'autres aliments, ainsi que des médicaments lorsque quelqu'un est malade. Sans ces filets de pêche, nous serions complètement désœuvrés. » Un panneau métallique rouillé traîne devant l'église, sur la berge que l'eau commence à recouvrir. C'est l'enseigne de la toute première école de la communauté Akuak, qui avait ouvert en 2018 et a fermé à cause des inondations en 2020. Si Philip Jok Thon, 18 ans, pêche et construit des îles comme tout un chacun ici, il ne cache pas sa frustration : « Les inondations ont chassé notre école, et donc nous n'étudions pas. Mais nous souhaitons que notre école revienne. Parce que nous voulons faire des études et apprendre des choses sur le reste du monde. » Philip Thon Jok aimerait partir, aller étudier à Bor, mais sans personne chez qui aller vivre là-bas en ville, il reste comme prisonnier de ces îles et du mode de vie ancestral des Akuak. À lire aussiSoudan du Sud: les Akuak, une société transformée par le changement climatique [1/3]

    Soudan du Sud: les Akuak, une société transformée par le changement climatique [1/3]

    Play Episode Listen Later Nov 11, 2025 2:31


    Au Soudan du Sud, une communauté de pêcheurs Dinka, les Akuak, se bat contre la montée des eaux. Alors que le pays est très durement frappé par le changement climatique et connaît, depuis 2019, des inondations catastrophiques, qui ont fait des centaines de milliers de déplacés climatiques, les Akuak, eux, refusent de partir. Ils vivent au milieu des marécages qui ont recouvert leurs terres ancestrales, sur la rive est du Nil, dans l'État du Jonglei. Leurs habitations sont érigées sur des îles, qu'ils construisent à mains nues, avec de la boue et des végétaux. Des plateformes qu'ils renforcent et rehaussent au quotidien. Reportage de notre correspondante dans la région. De notre correspondante, de retour des îles Akuak De l'eau jusqu'à la taille, Anyeth Manyang, la quarantaine, prend une grande inspiration avant de plonger au fond du marais. Quelques secondes plus tard, il émerge les bras chargés d'un gros amas de glaise qu'il jette sur la berge. Comme chaque habitant des îles Akuak, il maîtrise parfaitement cette technique de construction d'îles artificielles, qui permet aux familles de maintenir des espaces de vie hors de l'eau malgré les inondations : « Je suis né, j'ai grandi et je me suis marié ici. Cela fait donc de nombreuses années que je fais ce travail. Ce sont mes parents qui me l'ont appris, ils m'ont montré comment construire ces îles. Mon père et ma mère m'ont aussi tous les deux appris à pêcher. Construire et entretenir ces îles est un travail très difficile, car nous le faisons avec nos seules mains. D'abord, il faut récupérer des herbes et des papyrus dans le marais, puis les couper et les étaler à la surface. Ensuite, il faut aller sous l'eau pour ramasser de la boue et la mettre par-dessus. Et ainsi de suite. Nous devons faire ça tous les jours, c'est très fatigant. » Anyeth Manyang souhaite accroître la superficie de son île, qui ne mesure pas plus de 30 mètres carrés. Mais l'eau menace sans cesse de la recouvrir. Une flaque s'est d'ailleurs formée en quelques minutes près de la berge, à quelques mètres de là. Matuor Mabior Ajith, un voisin, explique qu'il faut une intervention rapide : « La raison pour laquelle l'eau s'infiltre ici, c'est que le sol n'a pas été bien compacté, il y a donc des espaces par où l'eau remonte, puisque tout ça est totalement artisanal. Nous allons donc colmater cette fuite de la même façon : en ajoutant du papyrus, de l'herbe, puis en ajoutant de la boue par-dessus. » L'île sur laquelle vit Ayen Deng Duot avec ses six enfants est, elle aussi, en cours de maintenance. Avec d'autres membres de la famille, Ayen se tient dans l'eau et découpe à la machette des tiges de papyrus qu'elle amasse sur la berge en formation, une matière encore toute molle et gorgée d'eau : « Bien sûr, c'est très dur pour nous de vivre ici, mais nous n'avons aucune alternative. En ville, à Bor, nous n'avons rien alors qu'ici, nous avons le poisson, même si nous n'avons pas d'autre nourriture, car les inondations nous empêchent de cultiver. Nos enfants n'ont aucun avenir en ville, où ils risqueraient de devenir des criminels, donc nous ne partirons jamais d'ici. » La ville de Bor se trouvant à cinq heures de canoë, Ayen aimerait que la communauté puisse être dotée d'un bateau à moteur en cas d'urgence médicale. À lire aussiSoudan du Sud: à Bor, des victimes des inondations s'adaptent avec le commerce du poisson

    Centrafrique: dans le parc Dzanga Sangh, l'harmonie entre l'homme, les animaux et la nature

    Play Episode Listen Later Nov 11, 2025 2:41


    Alors que la COP30 a démarré  lundi 10 novembre, cap sur le sud-ouest de la République centrafricaine. Niché dans l'immense bassin du Congo, le parc de Dzanga-Sangha incarne l'espoir et la réussite d'une conservation harmonieuse entre la nature et l'humanité. Véritable sanctuaire de biodiversité, cette réserve abrite des espèces emblématiques et menacées : éléphants de forêt, gorilles, léopards, girafes, lions et beaucoup d'autres. Grâce à un modèle de gestion partagée entre le gouvernement centrafricain, l'ONG WWF et les populations locales, le parc prouve qu'il est possible d'allier conservation, développement durable et valorisation des savoirs autochtones.  Une vingtaine d'éléphants de forêt s'avancent lentement vers la saline de Zangaba, vaste espace dégagé où la terre, gorgée de minéraux, attire chaque jour des centaines d'animaux. À quelques mètres, un jeune mâle joue avec sa trompe dans l'eau. Puis, les femelles forment un cercle protecteur autour des éléphanteaux, tout en arrachant de longues herbes humides qu'elles mâchent lentement. Yoann Galleran, le directeur de l'aire protégée de Dzanga Sangha, nous sert de guide. « Tous les jours, une centaine d'éléphants se rassemblent régulièrement dans cette saline. Les éléphants de forêt, le pangolin et les gorilles sont les espèces emblématiques de notre parc. Le bassin du Congo regorge d'espèces de poissons, d'insectes, de champignons, de végétaux, de produits forestiers non ligneux. La gestion de ces ressources est très importante et elle doit être directement opérée par les communautés locales elles-mêmes. La gestion de la chasse durable, de la cueillette durable sont des questions clés pour le futur des aires protégées de Dzanga Sangha », nous apprend Yoann Galleran.  Le parc de Dzanga-Sangha, en Centrafrique, n'est pas seulement un refuge pour les animaux. C'est aussi le berceau d'un peuple autochtone : les Ba'Aka, gardiens de la forêt. Leur connaissance intime des plantes et des pistes invisibles fait d'eux les véritables maîtres des lieux. Firmin est l'un d'eux. « Depuis toujours, nous vivons en lien étroit avec la terre, l'eau et les forêts. Pour nous, la nature n'est pas une ressource à exploiter, mais une partie de notre famille. Quand la Terre souffre, nous souffrons aussi. Les anciens nous enseignent que chaque décision doit être prise en pensant aux sept prochaines générations », explique-t-il.  Grâce à son modèle de conservation participative, où la protection de la faune et la flore rime avec le développement des communautés locales, Dzanga Sangha est en phase d'atteindre tous ses objectifs, selon Firmin : « La gestion se déroule de façon participative, avec une implication totale de notre part en tant qu'autochtones. Il existe une véritable prise de conscience collective quant aux méthodes de gestion durable des ressources naturelles. Des formations régulières nous sont dispensées sur l'importance de la préservation des ressources. Nous avons mis en place une zone de chasse communautaire que nous respectons scrupuleusement. » Plusieurs projets sont également conçus pour garantir une conservation durable, selon Yoann Galleran : « L'important, c'est de continuer à faire de Dzanga Sangha une destination d'écotourisme qui va bénéficier aux communautés locales. C'est également de promouvoir les nouvelles techniques d'agriculture responsable. C'est de maintenir un équilibre entre conservation et développement sans que l'un prenne le dessus sur l'autre, tout en s'assurant que les communautés locales puissent continuer de bénéficier d'opportunités économiques qui sont liées directement à la préservation de l'environnement. » Cependant, les responsables du parc ont identifié plusieurs menaces potentielles pour la faune et la flore, telles que l'exploitation illégale des ressources forestières, le trafic d'armes et surtout le braconnage visant les éléphants, les gorilles et les pangolins. Ces risques doivent être pris au sérieux, disent-ils, pour assurer la protection du bassin du Congo. À lire aussiCentrafrique: comment les pygmées Ba'Akas préservent et valorisent leur mode de vie traditionnel

    Côte d'Ivoire: le Potager du Futur sensibilise à l'agriculture durable petits et grands

    Play Episode Listen Later Nov 9, 2025 2:24


    Comment sensibiliser à l'agriculture durable ? En Côte d'Ivoire, où le secteur agricole occupe plus de la moitié de la population active, Stéphane Kobena est un pionnier du domaine. Avec sa société, le Potager du Futur, il forme les enfants et les plus grands aux bonnes pratiques. Et ça commence dès le plus jeune âge. Avec notre correspondante à Abidjan, Marine Jeannin La Pépinière porte bien son nom. Aux fenêtres de ses salles de classes, sont alignés des pots en plastique remplis de jeunes pousses d'épinards, de roquette ou de laitue. Dans cette école primaire de Cocody, les tout petits apprennent à cultiver leur propre potager. « Donc on avait des graines au départ, explique une maîtresse devant les enfants enthousiastes. Avec de l'eau. On a mis des graines en terre, et après, qu'est-ce qui s'est passé ? Elles ont poussé ! Mais elles n'ont plus d'espace, donc on va les repiquer. Et elles vont grandir, comme vous ! » Les ateliers, animés par Stéphane Kobena, visent à sensibiliser à l'agriculture durable et à l'économie circulaire. En complément, explique-t-il, un compost a même été installé à côté de la cantine : « L'objectif est de transformer en compost tous les déchets organiques de la cuisine de la cantine, les feuilles sèches tondues par le jardinier et la sciure de bois du menuisier, pour pouvoir ensuite le réutiliser dans les potagers de l'école. Donc l'objectif est d'apprendre aux enfants à avoir les mains dans la terre, à faire du compostage, à aimer la plante, et aussi leur montrer que c'est possible de s'occuper des plantes sans utiliser de pesticides. » Et ça marche, se félicite la directrice pédagogique de l'école, Hélène Denis. « Ils sont très demandeurs ! Ils nous demandent même de créer de petits composts-poubelles dans la cour de récréation, pour jeter les restes de leurs goûters. Pour ne pas mettre ça à la poubelle, parce qu'ils disent : ''Mais c'est pas la même poubelle !'' Et ils ont raison. » Stéphane Kobena poursuit sa journée dans la banlieue est d'Abidjan, à Bingerville, où il anime cette fois un atelier pour les futurs agriculteurs qui souhaitent se former aux pratiques durables. Une nécessité, explique l'un d'eux, Marc-Olivier Kouamé, face à l'appauvrissement des sols induit par les pesticides. « [À l'origine], on était plus dans l'agriculture [intensive] où on utilisait beaucoup de pesticides et autres produits… On a épuisé toutes les ressources des sols. Donc on était obligé de quitter ces sols pour aller chercher d'autres parcelles. Alors qu'avec l'agriculture durable, tu peux continuer d'utiliser la même parcelle. On a fait le constat que maintenant, nos terres sont devenues arides. Donc on est obligés de chercher d'autres méthodes. » L'agriculture durable est encore embryonnaire en Côte d'Ivoire, en particulier dans le secteur vivrier. Mais les professionnels espèrent mettre en place un label, SPG, à horizon 2028.

    Rumba congolaise: le mythique orchestre de la Crèche, à Kinshasa, part en tournée

    Play Episode Listen Later Nov 8, 2025 2:27


    En RDC, direction Kinshasa, pour aller à la rencontre de l'orchestre de la Crèche. Attention, nostalgie ! Ce sont les derniers pionniers de la rumba encore en vie. Tous les week-ends depuis plus de 30 ans, ils font revivre les plus grands classiques de la musique congolaise. Et pour la première fois de leur carrière, ils vont partir en tournée européenne en 2026.  De notre correspondante à Kinshasa  Au rond-point victoire, à Kinshasa, c'est sur le toit d'un immeuble défraîchi que joue l'orchestre de rumba. La moyenne d'âge des musiciens et chanteurs est de 70 ans. Ils se produisent tous les week-ends à la Crèche depuis 1984. Une longévité inédite qui a fait de cette adresse une institution de la vraie rumba à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. « Quand nous parlons de vraie rumba, nous nous référons aux origines de la rumba. La musique congolaise a connu des étapes. Quand on parle de musique de jeunes, de musique moderne, de musique ceci, cela ... Ici, à la Crèche, quand nous jouons, ce n'est pas avec autant de variantes au fil du temps. On danse sur le même temps », nous explique le bassiste Dassi Mbelani. Tous ont évolué aux côtés des grands noms comme Franco et Grand Kallé. Et malgré le temps qui passe, ils n'ont jamais lâché micros et guitares pour continuer à jouer les plus grands classiques. À l'écoute du titre Mundi, il nous raconte : « Mundi, c'est toujours Tabu Ley. C'était vers 1956, 1957. Dans cette chanson, Tabu Ley s'en prend aux gens qui faisaient des yeux doux à sa femme, qui s'appelait Mundi. » Ces concerts sont un véritable retour dans le passé pour les plus nostalgiques comme Marcel, un habitué du lieu. « C'est la musique qui nous intéresse. C'est la musique de nos aïeux. On en profite », s'exclame le passionné de rumba. L'orchestre de la Crèche, c'est plus que de la nostalgie. C'est aussi une passion pour la musique, comme le clame Selidja, leader du groupe : « Je serai musicien jusqu'à ma mort. C'est dans le sang. Nous avons hérité de notre ascendance et nous ferons hériter à notre descendance. » L'orchestre respecte aussi l'une des règles d'or d'un bon concert de rumba : jouer jusqu'au petit matin. À lire aussiLa rumba congolaise, indémodable?

    Littérature jeunesse en Tunisie: des héros africains et musulmans à l'image des petits lecteurs

    Play Episode Listen Later Nov 7, 2025 2:29


    En Tunisie, de jeunes autrices se réapproprient la littérature jeunesse avec des héros africains et/ou musulmans. Une manière d'enseigner aux enfants des récits auxquels ils peuvent s'identifier, avec des personnages issus de leur culture et parfois méconnus du grand public. Ces femmes, également mères, se sont souvent retrouvées confrontées à un vide lorsqu'elles tentaient de trouver des livres pour enfants qui racontent leur culture. De notre correspondante à Tunis À la librairie Arthepage, en banlieue de Tunis, Emna Ennaifer présente le nouveau-né de sa collection Manarat, un livre jeunesse consacré au célèbre journaliste palestinien Wael al-Dahdouh, qui a perdu sa femme et ses enfants dans les bombardements sur Gaza.  « Le livre ne parle pas de la guerre en tant que telle. L'événement, ce n'est pas la guerre, c'est Wael al-Dahdouh, c'est son parcours, c'est sa persévérance, sa patience face à l'épreuve, et c'est vraiment une lettre d'espoir. Dans le langage utilisé, les images, on a essayé de ne pas heurter la sensibilité de l'enfant tout en essayant de trouver un équilibre pour que l'enfant soit sensibilisé à ce qu'il se passe à Gaza », décrit-elle.  Emna a aussi écrit un ouvrage sur Hawa Abdi première gynécologue somalienne, et Fatima Al Fihriya, une femme tunisienne qui a fondé la plus ancienne université au monde, il y a plus de 1 000 ans. Son but : valoriser des héros du monde africain et musulman, peu représentés dans les histoires pour enfants. « Que ce soient aussi des héros auxquels nos enfants pourraient s'identifier au niveau de la culture, de la religion, de l'histoire. Que tout cet héritage-là soit mis en valeur », explique-t-elle. Une démarche similaire chez Bochra Fourti, créatrice du podcast Heya, consacré aux récits de femmes arabes et amazighes. Son premier livre jeunesse s'intéresse à la première femme médecin arabe, la Tunisienne Tawhida Ben Cheikh. Un livre traduit en français et dialecte tunisien. « L'idée, avec cette collection, est de mettre en avant des héroïnes, des femmes qui ont marqué l'histoire du monde arabe et amazigh, et de faire voyager ces enfants entre ces pays. Donc la première, c'est une femme tunisienne, la deuxième sera algérienne, la troisième marocaine, ensuite une femme palestinienne, une femme égyptienne », raconte-t-elle.  Bochra Fourti a créé des versions audio des livres qui vont être traduits dans plusieurs dialectes africains. « Il y a le souvenir de ma grand-mère qui nous racontait ces histoires, en tunisien, en dialecte, et c'était important pour moi de mettre cette touche de transmission et d'oralité qui est très importante dans notre culture. Nos récits, nos histoires se transmettent beaucoup par l'oralité », poursuit-elle.  Trouvant de la réticence dans les maisons d'édition française sur la question de la langue arabe, et même le mot arabe dans ses titres, Bochra Fourti a entièrement autofinancé l'édition ses livres via des précommandes.

    «On n'avait peur de rien»: 50 ans après la Marche verte au Sahara occidental, des témoins racontent

    Play Episode Listen Later Nov 6, 2025 2:24


    Il y a 50 ans, le 6 novembre 1975, des milliers de Marocains entrent sur le territoire du Sahara occidental. Des civils traversent alors la frontière à l'appel du roi Hassan II : c'est la Marche verte. Le chef d'État revendique ce territoire encore sous domination espagnole, estimant qu'il fait historiquement partie du Maroc et qu'il lui a été injustement spolié lors de la colonisation. Cette démonstration de force patriotique et populaire aboutit à la signature des accords de Madrid en 1975 et au retrait des Espagnols. Matthias Raynal a rencontré d'anciens marcheurs. De notre correspondant à Casablanca C'est un reportage radio, mais Ali, 72 ans, tient à répondre à l'interview, entouré de ses reliques. « Ça, c'est le Coran d'époque, c'est avec lui qu'on a récupéré le Sahara. C'était ça notre seule arme, avec ça, le drapeau du Maroc », expose le marcheur de l'époque. Les participants étaient des civils, la marche pacifique. Ali exhibe fièrement son wissam, la médaille qu'il a reçue pour cette marche. Il l'a accrochée au col de sa tunique sahraouie. Le 16 octobre 1975, le roi Hassan II s'adresse à la nation. Il appelle les Marocains à marcher vers le Sahara occidental. Il souhaite que 350 000 personnes s'y rendent pour montrer au monde que son pays n'abandonnera pas ses revendications sur ce territoire. « Au moment du discours, j'étais à la maison, avec ma famille. Il y avait un tel enthousiasme que quand je l'ai entendu, je me suis levé et je leur ai dit : ''je vais partir, notre roi nous demande de récupérer notre terre''. On est parti pour combattre la colonisation, pour poursuivre l'indépendance de notre pays », raconte Ali. Le 6 novembre 1975, l'ordre est donné de traverser la frontière. « On a mis des matelas sur les barbelés pour les mettre à terre. Le drapeau espagnol a été enlevé, on a hissé le drapeau marocain », continue-t-il.  Saadia avait seulement 16 ans. Elle se souvient de l'atmosphère qui régnait entre les participants. « On s'est retrouvées entre femmes de tout le Maroc. On était toutes contentes. On n'avait peur de rien. C'était comme si on faisait le pèlerinage ! », explique-t-elle. Elle traversait son pays et rencontrait des Sahraouis pour la première fois. « À Tarfaya, les femmes Sahraouies venaient nous voir, elles venaient passer la journée avec nous dans les tentes, elles étaient contentes qu'on soit là. On s'est liées d'amitié, on passait notre temps ensemble à rigoler, à discuter », poursuit-Saadia.  À son retour à Casablanca, elle prit conscience de ce qui venait de se passer. Saadia, Ali et les autres furent accueillis en héros. Tout le monde les attendait. Et partout, se répétaient les mêmes scènes de liesse. À lire aussiSahara occidental : 50 ans après la Marche verte, l'ONU fait évoluer sa position au profit du Maroc

    Déforestation du Bassin du Congo: «Nous alertons les institutions internationales, arrêtez de couper du bois!»

    Play Episode Listen Later Nov 5, 2025 2:30


    Dans le sud-ouest du pays, au cœur du bassin du Congo. Une région verdoyante, considérée comme le deuxième plus grand massif forestier tropical au monde, véritable poumon vert du continent africain. Cette forêt joue un rôle essentiel : elle régule le climat, abrite une biodiversité exceptionnelle, et fait vivre des millions de personnes. Mais aujourd'hui, cet écosystème unique est en danger. Exploitation forestière, agriculture extensive, braconnage. Faute d'activités génératrices de revenus, de nombreuses communautés se tournent vers l'exploitation intensive de la forêt. Résultat : la déforestation s'accélère, le climat se dérègle, les saisons changent, et les produits de cueillette disparaissent peu à peu À lire aussiRDC : au coeur de la déforestation

    Afrique du Sud: des musiciens pénalisés par un manque d'infrastructures dans un secteur en forte progression en Afrique

    Play Episode Listen Later Nov 4, 2025 2:20


    Le salon Acces organisé par la plateforme «Music in Africa» rassemble, chaque année, les acteurs continentaux du monde de la musique. Et la semaine dernière, c'est à Pretoria, en Afrique du Sud, qu'ils ont pu échanger, pendant trois jours, pour analyser les modèles économiques possibles et les solutions pour que les artistes africains bénéficient davantage de leur musique. De notre correspondante de retour de Pretoria, Bien qu'il reste encore de taille modeste par rapport au reste du monde, le secteur musical africain connaît une forte progression : selon la dernière étude de la Fédération internationale de l'industrie phonographique (IFPI), les revenus de la musique enregistrée en Afrique subsaharienne se sont accrus de plus de 22% en 2024, dépassant pour la première fois les 100 millions de dollars. Mais pour le chanteur et producteur sud-africain, Zakes Bantwini, les artistes n'obtiennent pas forcément de retombées financières : « C'est magnifique de voir que, dans différentes régions du monde, les gens apprécient désormais la musique africaine. Mais il faut que cela se reflète dans nos comptes bancaires. Pour l'instant, ça ne se traduit pas vraiment comme ça, mais comme je le dis souvent, c'est à nous d'essayer de changer les choses. »  Le manque d'infrastructures Sur place, le secteur est encore trop peu structuré et développé, et les artistes africains doivent continuer à dépendre des marchés mondiaux, comme l'explique Dolapo Amusat, créateur et directeur de la plateforme nigériane We Talk Sound : « Même si on observe un véritable boom, le manque d'infrastructures sur le continent empêche cette croissance de bénéficier pleinement aux artistes. Prenons l'exemple du Nigeria : comment voulez-vous organiser une tournée ? Il n'y a pas toujours d'infrastructures adéquates, les problèmes de sécurité persistent. De plus, du côté des plateformes de streaming, beaucoup de gens continuent à consommer la musique illégalement ou n'ont pas les moyens de payer les abonnements. Résultat : les artistes gagnent très peu d'argent sur leur marché local, et finissent donc par privilégier l'Europe ou les États-Unis, là où se trouvent les revenus — ce qui affaiblit l'écosystème africain. » Et pour la chanteuse Solange Cesarovna, co-fondatrice de la Société cap-verdienne de musique (SCM), il est aussi primordial que les artistes s'informent sur leurs droits : « Je pense que la chose la plus importante qu'il faut viser, pour devenir professionnel, c'est d'acquérir les connaissances. Et bien souvent, nous, les créateurs, nous sommes fascinés par notre processus créatif, et tout le travail autour de la musique en elle-même. Sauf que pour être professionnel, il faut aussi comprendre l'autre versant, la façon dont les affaires fonctionnent, même si on n'a pas l'âme d'un entrepreneur : c'est vital afin de conclure des contrats. » Solange Cesarovna soutient d'ailleurs la plateforme CLIP qui veut justement aider les créateurs à mieux comprendre les droits de propriété intellectuelle, pour réclamer leur dû. À lire aussiÀ Pretoria, le continent cherche à récolter les fruits de sa révolution musicale

    Madagascar: à Antananarivo, les travailleurs informels très exposés aux pics de pollution

    Play Episode Listen Later Nov 3, 2025 2:24


    C'est un fléau sanitaire et environnemental auquel les habitants d'Antananarivo sont habitués : chaque année, peu avant la saison des pluies, l'air de la capitale malgache se charge de particules fines. Une épaisse fumée envahit le ciel en fin de journée. La faute aux feux de brousse environnants qui, en octobre et novembre, viennent s'ajouter au trafic automobile notamment. En plus des enfants et des personnes âgées, les travailleurs informels qui exercent leur activité en extérieur toute la journée sont parmi les plus exposés. À lire aussiMadagascar: Antananarivo sous un brouillard de pollution à cause des feux de brousse

    Nigeria: le retour de l'exposition «Afrobeat Rebellion Fela Kuti» à Lagos

    Play Episode Listen Later Nov 2, 2025 2:14


    Afrobeat Rebellion, c'est le titre de l'exposition consacrée à Fela Anikulapo Kuti. Ouverte jusqu'à fin décembre 2025 à Lagos au Nigeria, cette exposition, avec une offre enrichie, est la suite de celle qui a eu lieu à la Philharmonie de Paris en octobre 2022, au musée de la Musique à Paris. Afrobeat Rebellion qui a lieu en plein cœur de la capitale nigériane, présente une multitude de documents d'archives, allant de photographies et d'effets personnels à des enregistrements audio originaux. Avec plus de 350 objets rares, des installations immersives et un riche programme de spectacles, de conférences et de films, ce projet historique retrace l'héritage et le parcours de Fela, de musicien à icône politique. Chapeau feutre sombre et tenue en lin dégradé bleu indigo, Ade Bantu affiche un sourire solaire. Son oncle Tola Odukoya est l'auteur d'une des attractions d'Afrobeat Rebellion : une série de photos en noir et blanc de Fela prises dans les années 60. Des clichés découverts par Ade, il y a 10 ans, chez Tola, son oncle, et par hasard... « On y voit Fela tenant la trompette, son tout premier instrument. Mon oncle a également des photos de Felo posant à côté de sa voiture personnelle. On y voit les difficultés d'un musicien en devenir dans son petit véhicule, où il doit ranger ses instruments et sans compter ses musiciens en passager. Ce sont les débuts d'une carrière emblématique », explique-t-il. Un peu plus loin, Kola Onosoya se tient loin des regards. Il est pourtant le dernier percussionniste de Fela. Toujours membre du groupe Egypt 80, Kola reste marqué par la pensée et l'engagement du roi de l'Afrobeat. Pour Kola, une exposition internationale consacrée à son leader spirituel est une douce revanche. « De son vivant, beaucoup de gens ne croyaient pas en Fela. Mais après sa mort, beaucoup de parents qui n'avaient jamais autorisé leurs enfants à aller voir Fela en concert viennent maintenant aux expositions consacrées à Fela... Et comprennent enfin ce que Fela voulait dire », estime-t-il. Amplifier la voix et la musique non conformistes de Fela, c'est l'objectif d'Abba Makama. Curateurs des films et vidéos projetés dans cette exposition, Abba estime que l'influence de Fela est universelle. Comme celle de l'écrivain Ernest Hemingway ou encore du dramaturge William Shakespeare. « Les Américains vénèrent Hemingway. Les Britanniques vouent un culte à Shakespeare. Nous devons porter Fela Kuti au même niveau, voire plus haut. Parce qu'Hemingway et Shakespeare ont créé des œuvres d'art intemporelles. Fela a créé une musique unique, l'Afrobeat. Mais il était aussi politique. Il était révolutionnaire Le Nigeria célèbre les politiciens comme des rock stars. Les jeunes n'ont pas suffisamment de figures emblématiques vers lesquelles se tourner », regrette-t-il. Et Abba Makama espère ainsi qu'un maximum d'enfants et d'adolescents de Lagos découvriront Fela grâce aux installations immersives d'Afrobeat Rebellion.   À lire aussiLe Jazz de Joe : «Fela Kuti, Rébellion Afrobeat»

    Journalistes sous pression en Afrique: face au terrorisme et à la censure, comment résister et continuer à informer

    Play Episode Listen Later Nov 1, 2025 2:18


    Sur le continent africain, où les zones de conflit et les poches terroristes se multiplient, les journalistes sont aux premières loges, et sous pression. Ce vendredi 31 octobre 2025 à Dakar, la conférence annuelle du Réseau Dupont-Verlon pour le journalisme d'investigation (REJI) a braqué les projecteurs sur ces défis : antennes détruites, radio-communautaires réduites au silence, journalistes obligés de quitter leur zone.  De notre correspondante à Dakar, Reporters sans frontières tire la sonnette d'alarme :  certaines régions deviennent des trous noirs d'information, où les antennes sont détruites et les relais locaux coupés, comme dans les Kivu (Nord-Kivu et Sud-Kivu) en République démocratique du Congo, ou dans certaines zones du Sahel. Et ce sont les journalistes de terrain, locaux, qui paient le prix fort, explique Sadibou Marong, directeur régional de RSF : « Si vous êtes menacé, vous ne pouvez pas rester. Et quand vous vous déplacez dans des "zones beaucoup plus sécurisées", vous trouvez dans ces zones, des journalistes et autres acteurs des médias déjà installés. » Ces journalistes doivent à la fois faire face à la pression des groupes armés et à celle des États, qui exigent un fort patriotisme. Diane Amoussou, étudiante béninoise qui a travaillé sur cette question pour son mémoire : « Les gouvernants parlent de plus en plus de contre-discours et on se demande si les journalistes, en tant que garants de l'information et de l'intégrité de l'information, doivent se mêler à cette lutte contre le terrorisme. Ce patriotisme soudain, c'est-à-dire manipuler l'information pour que cela soit indirectement de la lutte antiterroriste. » Créer des réseaux de solidarité Pour tenir et continuer à informer, des réseaux de solidarité sont en train de se constituer. L'Alliance africaine de vérification des faits, par exemple, anime un maillage de journalistes sur le continent. Bilal Tahirou coordonne l'organisation : « Il y a des défis d'électricité, il y a des défis de connectivité. Donc, lorsque le journaliste n'arrive pas à faire son travail, par exemple, l'autre membre du réseau peut venir le soutenir pour aider à collecter certaines informations. Et si une fois prête à publier, l'information risque de déranger ou risque de mettre en danger la vie du vérificateur de faits ou du journaliste d'investigation, le réseau peut intervenir pour aider à la publication. » Du côté de la formation, les écoles de journalisme comme le CESTI à Dakar s'adaptent pour que les jeunes journalistes soient prêts à travailler dans des contextes violents ou sous forte pression. Mouminy Camara, directeur des études : « On adapte le contenu en fonction de l'évolution des phénomènes. Et là, on a intégré le terrorisme. Et dans ce module qui traite du terrorisme en Afrique, on sensibilise en amont les étudiants parce qu'ils sont formés - on ne sait pas si demain, ils peuvent se trouver sur le théâtre des opérations - sur deux aspects : leur intégrité physique, mais également l'intérêt de l'information. » En 2024, plus de la moitié des pays africains sont classés par RSF en situation « difficile » ou « très grave » pour la liberté de la presse. À lire aussiSénégal: la presse mobilisée après l'interpellation de plusieurs journalistes

    Guinée: le débat sur l'orpaillage artisanal relancé après deux accidents meurtriers

    Play Episode Listen Later Oct 31, 2025 2:23


    En Haute-Guinée, région frontalière du Mali, l'exploitation artisanale de l'or est la principale activité économique, et emploie une grande part de la population. Mais cette activité n'est pas sans risques. De notre correspondant à Conakry, Dimanche 26 octobre, deux éboulements se sont produits sur deux sites miniers de la sous-préfecture de Kintinian, dans la préfecture de Siguiri, faisant huit morts. M'Bemba Baye est le président de la Croix-Rouge dans la préfecture de Siguiri. Il s'est rendu sur place dès qu'il a appris la nouvelle. « Il y a eu l'effondrement d'une partie, qui a glissé sur les travailleurs, sur le premier site. Sous les décombres, six personnes sur place ont perdu la vie. Les six personnes ont été évacuées à l'hôpital préfectoral de Siguiri. Le lendemain, un a succombé à ses blessures. Le total fait sept morts, le même jour. Sur le deuxième site, il y a eu un autre d'éboulement, un glissement, il y a eu un cas de mort aussi. Ce corps a été extrait des décombres par les volontaires de la Croix-Rouge de la place », raconte-t-il. Ce ne sont pas des galeries qui se sont écroulées, mais, sur le premier site, une excavation, ce gros trou creusé par les orpailleurs avec l'aide de pelles mécaniques. Sur le deuxième site, c'est un terril qui s'est écroulé : une petite montagne de déchets miniers d'une entreprise industrielle dans lequel des orpailleurs cherchent de la poussière d'or. Depuis une dizaine d'années, les mineurs artisanaux utilisent de plus en plus de machines, mais leur usage mal maîtrisé les met en danger, comme l'explique Anna Dessertine de l'Institut de recherche pour le développement (IRD) : « Les pratiques sont très diverses puisque certains creusent à la pioche, d'autres utilisent des engins comme des concasseurs ou des pelles hydrauliques. Un des éboulements de dimanche, ce serait produit sur un site déjà fragilisé par les pelles hydrauliques, avant que des orpailleurs ne viennent à la pioche. La mécanisation pose question. Elle investit les sols différemment, elle crée des instabilités qui n'existaient pas forcément quand l'exploitation était seulement artisanale, bien que l'exploitation artisanale de toute façon comporte aussi des risques. Peu de gardes fous sont mis en place pour assurer la sécurité des orpailleurs qui travaillent de façon très rudimentaire. » Pour Oumar Totiya Barry, directeur de l'Observatoire guinéen des mines et des métaux (OGMM), il faut mieux réglementer l'orpaillage artisanal. Le chercheur plaide pour que l'État s'implique davantage : « L'État doit faire un travail d'identification de toutes les zones qui portent des risques d'éboulement. Donc délimiter les sites et mettre les orpailleurs sur des zones qui portent moins de risques. Et les zones à risques, les surveiller et les protéger contre toute intrusion de personnes non autorisées. » En attendant, les orpailleurs continuent de creuser partout dans la préfecture de Siguiri, parfois au péril de leur vie, donc, pour nourrir leurs familles. Une grande partie de la population de la Haute-Guinée vit directement ou indirectement des revenus de l'orpaillage artisanal. À lire aussiGuinée: 60 personnes inculpées après une émeute meurtrière sur un site minier

    Sénégal: des infrastructures sportives ultramodernes pour les Jeux olympiques de la jeunesse

    Play Episode Listen Later Oct 30, 2025 2:18


    Dans un an tout juste, Dakar accueillera les Jeux olympiques de la jeunesse. La dernière édition, à Buenos Aires en 2018, avait attiré plus d'un million de visiteurs et plus de 4 000 athlètes. À un an de l'ouverture, les chantiers s'accélèrent. Deux sites emblématiques sont entièrement réhabilités pour hisser le Sénégal au niveau des standards olympiques.  De notre correspondante à Dakar, Sur le chantier, le rythme est soutenu. Les travaux ont débuté en octobre 2024. Livraison prévue fin mars prochain, avant les tests techniques du CIO. Philosophie du projet : réhabiliter l'existant. Mais il a fallu tout reprendre à zéro, comme au célèbre stade Iba Mar Diop, où un complexe flambant neuf sort aujourd'hui de terre. « On a totalement démoli l'ensemble des ouvrages qui existaient et on a augmenté la capacité d'accueil du site en termes d'accueil des spectateurs, mais aussi en termes de disciplines, parce qu'aujourd'hui, il n'existe pas de halle multisports. On a construit une halle multisports avec quatre aires de combat, 200 places de gradins et tous les locaux annexes. Et on construit un centre médical et sportif, qui lui est adossé », raconte Salim Sène, coordonnateur adjoint du projet pour l'Ageroute, le maître d'œuvre. Un complexe moderne, accessible et économe en énergie : ventilation naturelle, matériaux locaux, revêtements en terre cuite, comme dans la nouvelle salle de gym. « Ça permet de faire une très bonne isolation thermique du bâtiment et de garantir un très bon confort thermique à l'ensemble des salles qu'on a ici, et de minimiser aussi l'utilisation de la climatisation », ajoute Salim Sène.  « On est allé chercher le meilleur de ce qui se fait aujourd'hui au monde » À ce stade, 65% des travaux sont achevés. Deuxième grand site en chantier : la piscine olympique de Dakar, vieillissante, transformée en un complexe aquatique aux standards internationaux : plusieurs bassins, une fosse de plongée, et des terrains de tennis, volley et basket. Un défi technique, car l'ancienne piscine perdait beaucoup d'eau. « On est allé chercher le meilleur de ce qui se fait aujourd'hui au monde, avec une filtration à perlite, pour pallier l'ensemble des difficultés qu'on avait par le passé, affirme Salim Sène. La filtration traditionnelle était basée sur du sable. C'était un système qui nécessitait beaucoup, beaucoup, beaucoup d'eau pour le lavage des filtres. » Le projet est financé en partie par l'Agence française de développement, pour un budget d'environ 80 millions d'euros. Et la pérennité de ces infrastructures reste au cœur des priorités. « On a essayé d'anticiper pour appuyer les futurs gestionnaires à, au moins, avoir des sources de revenus. D'une part avec le centre d'hébergement, qu'on a démoli. Et d'autre part, avec les terrains de football qu'on a dédoublés et qu'on aménage, pour que les gestionnaires futurs puissent les mettre en location et les exploiter », explique Babacar Senghor, coordonnateur du projet. Onze sites secondaires à Dakar, Saly et Diamniadio sont également en cours de réfection. À lire aussiJOJ de Dakar J-1 an: pour les infrastructures, la course contre-la-montre est bien lancée

    Au Sénégal, l'avenir du livre s'écrit en langues nationales

    Play Episode Listen Later Oct 29, 2025 2:15


    « La souveraineté culturelle et intellectuelle à laquelle nous aspirons passe aussi par la reconquête de notre parole propre », a expliqué le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye lors du premier grand rendez-vous organisé entre l'État et les acteurs du livre, à Dakar, le 16 octobre. Des initiatives émergent pour donner toute sa place à la lecture en wolof, en pulaar, en sérère et dans les autres langues nationales.    À l'embarcadère direction Gorée, une bibliothèque éphémère intrigue. Plusieurs installations du même genre ont été aperçues pendant quelques jours à Dakar, le temps pour l'État de rapprocher les livres de la population. Khalil, un habitué de la liaison maritime, feuillette des ouvrages en wolof. « Si tu me donnes un livre en wolof, je prends beaucoup de temps pour le lire. C'est parce qu'à l'école, on nous apprend en français ! », explique-t-il. Pas de quoi le décourager pour autant. « À partir d'aujourd'hui, je commence à étudier le wolof, je le jure. Je ne suis pas français, je suis wolof ! Il faut juste s'entraîner un peu », s'amuse-t-il. Le wolof résonne partout au quotidien : à la radio, dans la rue, et dans les foyers. Pourtant peu de Sénégalais le lisent. Ndèye Codou Fall, directrice de EJO, l'une des rares maisons d'édition en langues nationales, se bat pour inverser la tendance : « Il n'y a pas de magie, en ce qui concerne les langues nationales, nous les maîtrisons à l'oral, mais pour pouvoir les lire, il faut les apprendre, il faut alphabétiser les gens dans les langues nationales. Entendons-nous bien, je suis pour le plurilinguisme, mais je suis pour nous réapproprier ce qui nous appartient d'abord, et ensuite aller à la rencontre de l'autre. » Pour Ndèye Codou Fall, le Sénégal a besoin d'un retour à ses langues propres pour avancer. « Le rapport en général que les Sénégalais ont avec le français, c'est un rapport douloureux qui rappelle la honte que le colonisateur a voulu instituer aux Sénégalais en les obligeant à rendre les langues nationales muettes. Je pense que c'est ce rapport que l'on veut effacer aujourd'hui », explique-t-elle. À lire aussiLa Wolof Académie, nouvelle tendance pour l'apprentissage des langues via des applications Encourager les jeunes à lire dans leurs langues, mais aussi à prendre la plume, c'est une des missions que se donne Adramé Diakhaté, président de l'Union des écrivains sénégalais en langues nationales. Lui-même auteur de romans publiés en wolof, il parle d'un processus de création plus intime. « Quand on écrit en wolof, effectivement, le personnage que vous mettez en scène devient un complice et il fait corps avec nous. Nous vivons sa vie comme s'il pouvait interagir avec notre propre existence. Je ne ressens pas la même chose quand j'écris en français. La différence est là : [en wolof], je me parle à moi-même et je vis ce que je suis en train d'écrire », raconte-t-il.  Rappelant qu'ils travaillent « pour la nation », les éditeurs spécialisés en langues sénégalaises réclament plus de moyens issus du Fonds d'aide à l'édition. Un fonds géré par le ministère de la Culture pour soutenir la production littéraire. L'État leur a promis un soutien sans en préciser la forme à ce stade. À lire aussiFrancophonie en Afrique: au Sénégal, le wolof monte en puissance face au français [4/5]

    Ghana: une commune sans eau propre à cause de l'orpaillage illégal

    Play Episode Listen Later Oct 28, 2025 2:20


    Au Ghana, les conséquences environnementales du « galamsey », nom local donné à l'orpaillage illégal, sont de plus en plus sérieuses : forêts détruites, risque de pénurie d'eau potable, agriculture en danger. C'est le constat d'un nouveau rapport publié le mois dernier par l'antenne ghanéenne de l'organisation environnementale américaine Pure Earth. L'étude identifie notamment onze localités, où la pollution liée au secteur aurifère sont particulièrement perceptibles, et impacte directement la vie des populations riveraines des exploitations. Notre correspondant au Ghana s'est rendu dans l'une d'entre elles. Reportage dans la commune de Asiakwa, dans la région orientale, à deux heures de la capitale Accra, où les habitants ont dû renoncer à utiliser l'eau de leur rivière. De notre correspondant au Ghana, Midi approchant, Joyce Obngwaa, commerçante, s'apprête à manger dans sa boutique. Au menu ce midi, un ragoût de kontomire, dont elle sort quelques feuilles de son sac. Pour les rincer cependant, pas question d'utiliser l'eau courante. « C'est parce que les orpailleurs illégaux polluent notre eau naturelle, on ne peut pas utiliser cette eau pour laver les légumes, se laver ou toute autre tâche ménagère. On est donc obligé d'utiliser de l'eau propre qu'on achète en sachet. Ça me rend triste », regrette-t-elle.  Voilà près de deux ans que les quelque 3 000 habitants de la commune d'Asiakwa ont dû se détourner de leur rivière. Pour avoir de l'eau propre, il faut maintenant l'acheter, ou creuser des puits, ce qui engendre des coûts importants pour les finances de la commune, selon les autorités locales. À lire aussiAu Ghana, comment rendre le secteur minier plus respectueux de l'environnement ? En cause, une eau de rivière surchargée en plomb et en mercure, des métaux lourds toxiques que l'on retrouve fréquemment à proximité des sites d'orpaillage illégal opérant tout autour de la commune, parfois à même la rivière. Des dégâts qu'Ebenezer Aborakwa, ancien élu communal, constate tous les jours en se rendant près des cours d'eau : « Je me souviens de la couleur de l'eau, avant, elle était très propre. Aujourd'hui, vous le voyez, elle a la couleur de la terre du sol. Les mineurs ne couvrent pas leurs exploitations, donc quand il pleut, la pluie emporte toute la saleté, qui finit dans la rivière. » À ses côtés, plusieurs hommes acquiescent, l'air grave. Armés de fusils, ils font partie d'une équipe anti-orpaillage illégal mise en place par le chef traditionnel local. Francis Tetteh fait partie de cette équipe. Il raconte : « Quand on voit des gens qui minent illégalement, on les arrête. Mais il faut que le gouvernement nous aide, nous donne des moyens, sinon on n'y arrivera pas dans la durée. » À lire aussi«Arrêtez le galamsey»: au Ghana, des manifestants dénoncent l'inaction du gouvernement face à l'orpaillage illégal L'inspection presque terminée, un quad déboule des fourrés. À son bord, trois jeunes, des orpailleurs illégaux, qui reviennent tout juste de la mine. Après quelques échanges tendus, la situation se calme. Joseph, 21 ans, accepte de témoigner. « Ils nous disent d'arrêter, qu'on pollue l'eau, mais moi, je ne suis pas d'accord. La situation économique n'est pas bonne, la jeunesse souffre. C'est pour ça que je mine, pour aider ma mère, mes frères », explique-t-il. Joseph et ses deux amis repartent finalement, sous le regard désapprobateur, mais aussi impuissant, des hommes armés. Ils le savent : tant qu'il n'y aura pas de réelles opportunités d'embauches pour la jeunesse locale, la rivière, elle, restera teintée par l'orpaillage illégal.

    Centrafrique: à Bangui, le marché Combattant fait peau neuve

    Play Episode Listen Later Oct 27, 2025 2:20


    En Centrafrique, la capitale Bangui voit renaître un de ses lieux emblématiques : le marché de Combattant. Longtemps en état de dégradation, ce marché historique vient d'être rénové, apportant avec lui un souffle nouveau pour les commerçants et les habitants de la ville. Situé dans le huitième arrondissement, le marché de Combattant est un carrefour commercial important où se croisent quotidiennement des centaines de vendeurs et d'acheteurs. Pendant plusieurs années, l'état dégradé des infrastructures avait rendu difficile le commerce et détérioré l'image du site. Grâce à un programme de rénovation lancé par les autorités, le marché a bénéficié de travaux de réhabilitation importants et devient aujourd'hui un symbole de renouveau urbain.  De notre correspondant à Bangui, Le jour se lève à peine sur le marché, et déjà les allées s'animent d'un va-et-vient familier. Au centre, Micheline, commerçante bien connue des habitués, installe son étal. Une à une, elle sort des paniers des bottes de carottes encore perlées de rosée, des tomates et une variété de légumes colorés : « Le marché nous offre maintenant un cadre confortable. L'espace est suffisant et l'hygiène est irréprochable. Ce qui me permet de bien présenter mes légumes fraîchement récoltés du jardin. Il n'y a plus de boue, d'asticots et de moustiques. Les conditions sanitaires ont nettement changé. » Autour d'elle, le marché prend vie... Des allées bien tracées, des hangars réhabilités et une meilleure circulation de l'air. Priscille est venue pour ses courses : « Je suis fière de constater que le marché est désormais bien organisé. L'aération est bien faite. Chaque produit a son espace : je sais où trouver les légumes, les produits de première nécessité et les articles manufacturés. Les étals de viande et de volaille sont bien séparés. Avant, pendant la saison des pluies, les gens évitaient de venir ici. Mais maintenant ce marché attire tout le monde. » Une gestion durable en ligne de mire En plus de l'aménagement physique, un système de sécurité a été mis en place : présence accrue de la police municipale, éclairage renforcé la nuit et des règles strictes de gestion des déchets. Une amélioration défendue par Alain Konamna, président de l'Association des commerçants du marché Combattant : « Il n'y a plus de boue dans le marché. Même le sol est en ciment. Nous allons maintenant travailler à la loupe avec le règlement intérieur qui régit le fonctionnement du marché. Nous allons lutter efficacement contre les ordures et l'insalubrité. Il y a des agents balayeurs qui sont là. Très tôt le matin, ils nettoient les saletés. Mais nous avons besoin de moyens logistiques nécessaires pour enlever les dépôts d'ordures à temps pour préserver la salubrité du marché. » Lors de la coupure du ruban blanc marquant l'inauguration du marché, le président Faustin-Archange Touadéra a appelé les commerçants et les usagers à adopter une gestion durable du site : « Je demande à la population de Combattant, de comprendre que ce que nous faisons ici, c'est pour leur bien. C'est pour leur permettre d'acheter des produits sains dans de meilleures conditions. Je demande tout simplement que la discipline soit respectée. Tout le monde doit rester dans le marché, c'est important d'éviter d'aller vendre sur la voie publique. » Le marché Combattant a aujourd'hui une capacité d'accueil d'environ 2 000 personnes.

    Afrique du Sud: à Soweto, la ruée vers l'or continue de toucher les populations pauvres plus de 100 ans plus tard

    Play Episode Listen Later Oct 26, 2025 2:33


    La ville de Johannesburg est aussi appelée « la ville de l'or », parce qu'elle a été fondée à la fin du XIXe siècle quand de l'or y est découvert. Rapidement, la ville se développe autour de cette précieuse ressource. Plus de cent ans plus tard, la plupart des mines ont fermé, mais il reste des milliers de puits encore ouverts, et surtout des matières toxiques qui continuent de toucher les communautés voisines, et aujourd'hui, les habitants sont de plus en plus malades.  De notre correspondant à Johannesburg, L'image est frappante : dans une impasse de Soweto, une immense dune de sable dépasse derrière le toit de modestes maisons en pierre. Quand il y a du vent, la poussière se soulève. Et toutes ces substances toxiques arrivent chez nous. Nous sommes dans le quartier de Snake Park, dans une maison familiale à deux étages où plusieurs générations vivent ensemble. Novulawu Sitshaluza, bob sur la tête pour se protéger du soleil, a grandi ici : « Au départ, on pensait que cette montagne était naturelle, mais nous avons découvert plus tard que c'était en fait une création humaine, issue de la ruée vers l'or. » Des générations marquées par la maladie À la fin du XIXe siècle, la ville de Johannesburg se construit sur l'or. Et pendant l'apartheid, le pouvoir blanc déporte les populations noires dans d'immenses townships, souvent à proximité de mines, et donc de déchets toxiques. « Vous savez, nos ancêtres sont partis travailler dans les mines. Ils ne sont jamais revenus avec de l'or ou de l'argent. Ils sont revenus avec des maladies. Et encore aujourd'hui, nous, leurs arrière-petits-enfants, on tombe malade à notre tour. C'est l'éternelle souffrance des Noirs en Afrique du Sud. ». Thokozile Mntambo est activiste, figure de la lutte des communautés locales face aux géants du secteur minier : « Comme vous pouvez le voir, il n'y a aucune clôture pour sécuriser les lieux… Vous pouvez vous garer ici, on va s'approcher un peu ». Donc là, on va monter sur une petite butte, pour vraiment avoir une vue sur toute la mine. On monte sur du sable très clair, presque blanc. Ce sont tous les résidus ; à l'époque où on cherchait encore de l'or. « Ils continuent de trouver de nouvelles technologies pour extraire les restes d'or. Alors, nous, on meurt encore à cause de cet or ! », ajoute Thokozile Mntambo. Recenser les victimes  Et Thokozile Mntambo ne veut plus voir sa communauté mourir. En 2023, avec la Bench-Marks Foundation, elle démarre un porte-à-porte pour recenser tous les cas de maladies. Résultat : la moitié des répondants déclarent avoir des problèmes respiratoires : « On est venu me voir pour me dire que je devais arrêter de parler aux médias, car cela perturbe les investissements. Mais j'ai commencé ce combat, je ne vais pas m'arrêter là ! » Parce que de nombreuses vies sont en jeu. À cause de ces longues années d'expositions à l'uranium ou à l'arsenic, de plus en plus d'enfants naissent malades. Nous retournons chez Novulawu, qui vit juste en face de la mine : « Ma fille était handicapée, elle est malheureusement décédée en 2022, à 12 ans… Je ne peux pas être certaine que ce soit à cause de ces résidus toxiques, mais cette dune a peut-être joué un rôle, oui. » Selon les activistes de Snake Park, ce combat, c'est un combat entre le profit des grandes entreprises et la santé des communautés locales appauvries ; plus de cent ans après la ruée vers l'or.

    Tanzanie: M-Mama, un programme qui réduit la mortalité maternelle

    Play Episode Listen Later Oct 25, 2025 2:20


    En Tanzanie, la santé est l'un des secteurs le plus en difficulté. Problèmes d'accès aux soins, d'infrastructures ou manque de personnels qualifiés, les défis sont nombreux. Mais grâce à la Fondation Vodafone et l'implication du gouvernement tanzanien, un programme nommé M-Mama a permis de réduire la mortalité maternelle de près de 40%.   De notre correspondante à Dar es Salaam, Cette sonnerie, Sophia Miraji l'entend jusqu'à 40 fois par jour dans son bureau de l'hôpital Mwananyamala à Dar es Salaam. Au bout du fil en général, un dispensaire ou une structure de santé ayant une urgence obstétrique. « On a une urgence, on a besoin d'un véhicule. » Francesca Konyani est infirmière. Avec sa collègue, elle traite cet appel aujourd'hui : « La mère est en plein travail, mais sa tension est élevée, c'est de la pré-éclampsie, donc on doit la transporter du centre de santé de Kigogo à l'hôpital de Mwananyamala. »  Un trajet d'environ 10-20 minutes s'il n'y a pas de trafic et qui sera effectué ce jour-là par une ambulance. Si aucune n'est disponible, c'est un chauffeur privé qui fera le trajet. Grâce au numéro gratuit 115 de M-Mama, depuis 2023, toutes les femmes enceintes ou nouveau-nés en état d'urgence en Tanzanie peuvent être pris en charge et transportés dans un établissement pouvant leur fournir les soins appropriés. Rahma est la responsable du projet M-Mama en Tanzanie : « Nous avons déjà transporté plus de 170 000 personnes dans le pays, c'est énorme. Nous avons des chauffeurs issus des communautés de presque tous les villages dans ce pays. C'est surtout grâce à la volonté politique. » Élargir le programme à d'autres urgences médicales La présidente Samia Suluhu Hassan a fait de la santé des femmes et des nouveau-nés une priorité. Mais avec quasiment 60% du système de santé national financé par des dons extérieurs ou le paiement des particuliers, l'efficacité de M-Mama est loin de refléter la réalité du pays. Faraji Bakari est l'un des chauffeurs du programme : « On espère que ça ne va pas s'arrêter aux femmes enceintes, mais que le gouvernement va étendre ça à ceux qui ont d'autres besoins médicaux dans la communauté. » La Tanzanie ne dispose pas de service de transport d'urgence, c'est donc pour ça que la fondation Vodafone s'est focalisée sur ce problème. Le programme est financé par l'État et désormais aussi géré par différents ministères. Juwairia Hamad tient son bébé de quatre mois en pleine forme dans ses bras : « Sans eux, je ne serais pas là. Quand une mère est en situation d'urgence et qu'il n'y a pas de services, c'est très difficile. C'est une super initiative et je suis très heureuse. »  Si le gouvernement tanzanien a augmenté son budget lié aux infrastructures de santé ces dernières années, le manque de personnel qualifié et le coût des soins restent un véritable problème dans le pays.  À lire aussiNeoNest, un couffin pour sauver les bébés prématurés en Ouganda rural

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