Reportage Afrique

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Nos correspondants et envoyés spéciaux sur le continent africain vous proposent chaque jour en deux minutes une photographie sonore d'un événement d'actualité ou de la vie de tous les jours. Ils vous emmènent dans les quartiers ou dans les campagnes pour vous faire découvrir l'Afrique au jour le jo…

Rfi - Yves-Laurent Goma


    • Oct 31, 2025 LATEST EPISODE
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    Guinée: le débat sur l'orpaillage artisanal relancé après deux accidents meurtriers

    Play Episode Listen Later Oct 31, 2025 2:23


    En Haute-Guinée, région frontalière du Mali, l'exploitation artisanale de l'or est la principale activité économique, et emploie une grande part de la population. Mais cette activité n'est pas sans risques. De notre correspondant à Conakry, Dimanche 26 octobre, deux éboulements se sont produits sur deux sites miniers de la sous-préfecture de Kintinian, dans la préfecture de Siguiri, faisant huit morts. M'Bemba Baye est le président de la Croix-Rouge dans la préfecture de Siguiri. Il s'est rendu sur place dès qu'il a appris la nouvelle. « Il y a eu l'effondrement d'une partie, qui a glissé sur les travailleurs, sur le premier site. Sous les décombres, six personnes sur place ont perdu la vie. Les six personnes ont été évacuées à l'hôpital préfectoral de Siguiri. Le lendemain, un a succombé à ses blessures. Le total fait sept morts, le même jour. Sur le deuxième site, il y a eu un autre d'éboulement, un glissement, il y a eu un cas de mort aussi. Ce corps a été extrait des décombres par les volontaires de la Croix-Rouge de la place », raconte-t-il. Ce ne sont pas des galeries qui se sont écroulées, mais, sur le premier site, une excavation, ce gros trou creusé par les orpailleurs avec l'aide de pelles mécaniques. Sur le deuxième site, c'est un terril qui s'est écroulé : une petite montagne de déchets miniers d'une entreprise industrielle dans lequel des orpailleurs cherchent de la poussière d'or. Depuis une dizaine d'années, les mineurs artisanaux utilisent de plus en plus de machines, mais leur usage mal maîtrisé les met en danger, comme l'explique Anna Dessertine de l'Institut de recherche pour le développement (IRD) : « Les pratiques sont très diverses puisque certains creusent à la pioche, d'autres utilisent des engins comme des concasseurs ou des pelles hydrauliques. Un des éboulements de dimanche, ce serait produit sur un site déjà fragilisé par les pelles hydrauliques, avant que des orpailleurs ne viennent à la pioche. La mécanisation pose question. Elle investit les sols différemment, elle crée des instabilités qui n'existaient pas forcément quand l'exploitation était seulement artisanale, bien que l'exploitation artisanale de toute façon comporte aussi des risques. Peu de gardes fous sont mis en place pour assurer la sécurité des orpailleurs qui travaillent de façon très rudimentaire. » Pour Oumar Totiya Barry, directeur de l'Observatoire guinéen des mines et des métaux (OGMM), il faut mieux réglementer l'orpaillage artisanal. Le chercheur plaide pour que l'État s'implique davantage : « L'État doit faire un travail d'identification de toutes les zones qui portent des risques d'éboulement. Donc délimiter les sites et mettre les orpailleurs sur des zones qui portent moins de risques. Et les zones à risques, les surveiller et les protéger contre toute intrusion de personnes non autorisées. » En attendant, les orpailleurs continuent de creuser partout dans la préfecture de Siguiri, parfois au péril de leur vie, donc, pour nourrir leurs familles. Une grande partie de la population de la Haute-Guinée vit directement ou indirectement des revenus de l'orpaillage artisanal. À lire aussiGuinée: 60 personnes inculpées après une émeute meurtrière sur un site minier

    Sénégal: des infrastructures sportives ultramodernes pour les Jeux olympiques de la jeunesse

    Play Episode Listen Later Oct 30, 2025 2:18


    Dans un an tout juste, Dakar accueillera les Jeux olympiques de la jeunesse. La dernière édition, à Buenos Aires en 2018, avait attiré plus d'un million de visiteurs et plus de 4 000 athlètes. À un an de l'ouverture, les chantiers s'accélèrent. Deux sites emblématiques sont entièrement réhabilités pour hisser le Sénégal au niveau des standards olympiques.  De notre correspondante à Dakar, Sur le chantier, le rythme est soutenu. Les travaux ont débuté en octobre 2024. Livraison prévue fin mars prochain, avant les tests techniques du CIO. Philosophie du projet : réhabiliter l'existant. Mais il a fallu tout reprendre à zéro, comme au célèbre stade Iba Mar Diop, où un complexe flambant neuf sort aujourd'hui de terre. « On a totalement démoli l'ensemble des ouvrages qui existaient et on a augmenté la capacité d'accueil du site en termes d'accueil des spectateurs, mais aussi en termes de disciplines, parce qu'aujourd'hui, il n'existe pas de halle multisports. On a construit une halle multisports avec quatre aires de combat, 200 places de gradins et tous les locaux annexes. Et on construit un centre médical et sportif, qui lui est adossé », raconte Salim Sène, coordonnateur adjoint du projet pour l'Ageroute, le maître d'œuvre. Un complexe moderne, accessible et économe en énergie : ventilation naturelle, matériaux locaux, revêtements en terre cuite, comme dans la nouvelle salle de gym. « Ça permet de faire une très bonne isolation thermique du bâtiment et de garantir un très bon confort thermique à l'ensemble des salles qu'on a ici, et de minimiser aussi l'utilisation de la climatisation », ajoute Salim Sène.  « On est allé chercher le meilleur de ce qui se fait aujourd'hui au monde » À ce stade, 65% des travaux sont achevés. Deuxième grand site en chantier : la piscine olympique de Dakar, vieillissante, transformée en un complexe aquatique aux standards internationaux : plusieurs bassins, une fosse de plongée, et des terrains de tennis, volley et basket. Un défi technique, car l'ancienne piscine perdait beaucoup d'eau. « On est allé chercher le meilleur de ce qui se fait aujourd'hui au monde, avec une filtration à perlite, pour pallier l'ensemble des difficultés qu'on avait par le passé, affirme Salim Sène. La filtration traditionnelle était basée sur du sable. C'était un système qui nécessitait beaucoup, beaucoup, beaucoup d'eau pour le lavage des filtres. » Le projet est financé en partie par l'Agence française de développement, pour un budget d'environ 80 millions d'euros. Et la pérennité de ces infrastructures reste au cœur des priorités. « On a essayé d'anticiper pour appuyer les futurs gestionnaires à, au moins, avoir des sources de revenus. D'une part avec le centre d'hébergement, qu'on a démoli. Et d'autre part, avec les terrains de football qu'on a dédoublés et qu'on aménage, pour que les gestionnaires futurs puissent les mettre en location et les exploiter », explique Babacar Senghor, coordonnateur du projet. Onze sites secondaires à Dakar, Saly et Diamniadio sont également en cours de réfection. À lire aussiJOJ de Dakar J-1 an: pour les infrastructures, la course contre-la-montre est bien lancée

    Au Sénégal, l'avenir du livre s'écrit en langues nationales

    Play Episode Listen Later Oct 29, 2025 2:15


    « La souveraineté culturelle et intellectuelle à laquelle nous aspirons passe aussi par la reconquête de notre parole propre », a expliqué le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye lors du premier grand rendez-vous organisé entre l'État et les acteurs du livre, à Dakar, le 16 octobre. Des initiatives émergent pour donner toute sa place à la lecture en wolof, en pulaar, en sérère et dans les autres langues nationales.    À l'embarcadère direction Gorée, une bibliothèque éphémère intrigue. Plusieurs installations du même genre ont été aperçues pendant quelques jours à Dakar, le temps pour l'État de rapprocher les livres de la population. Khalil, un habitué de la liaison maritime, feuillette des ouvrages en wolof. « Si tu me donnes un livre en wolof, je prends beaucoup de temps pour le lire. C'est parce qu'à l'école, on nous apprend en français ! », explique-t-il. Pas de quoi le décourager pour autant. « À partir d'aujourd'hui, je commence à étudier le wolof, je le jure. Je ne suis pas français, je suis wolof ! Il faut juste s'entraîner un peu », s'amuse-t-il. Le wolof résonne partout au quotidien : à la radio, dans la rue, et dans les foyers. Pourtant peu de Sénégalais le lisent. Ndèye Codou Fall, directrice de EJO, l'une des rares maisons d'édition en langues nationales, se bat pour inverser la tendance : « Il n'y a pas de magie, en ce qui concerne les langues nationales, nous les maîtrisons à l'oral, mais pour pouvoir les lire, il faut les apprendre, il faut alphabétiser les gens dans les langues nationales. Entendons-nous bien, je suis pour le plurilinguisme, mais je suis pour nous réapproprier ce qui nous appartient d'abord, et ensuite aller à la rencontre de l'autre. » Pour Ndèye Codou Fall, le Sénégal a besoin d'un retour à ses langues propres pour avancer. « Le rapport en général que les Sénégalais ont avec le français, c'est un rapport douloureux qui rappelle la honte que le colonisateur a voulu instituer aux Sénégalais en les obligeant à rendre les langues nationales muettes. Je pense que c'est ce rapport que l'on veut effacer aujourd'hui », explique-t-elle. À lire aussiLa Wolof Académie, nouvelle tendance pour l'apprentissage des langues via des applications Encourager les jeunes à lire dans leurs langues, mais aussi à prendre la plume, c'est une des missions que se donne Adramé Diakhaté, président de l'Union des écrivains sénégalais en langues nationales. Lui-même auteur de romans publiés en wolof, il parle d'un processus de création plus intime. « Quand on écrit en wolof, effectivement, le personnage que vous mettez en scène devient un complice et il fait corps avec nous. Nous vivons sa vie comme s'il pouvait interagir avec notre propre existence. Je ne ressens pas la même chose quand j'écris en français. La différence est là : [en wolof], je me parle à moi-même et je vis ce que je suis en train d'écrire », raconte-t-il.  Rappelant qu'ils travaillent « pour la nation », les éditeurs spécialisés en langues sénégalaises réclament plus de moyens issus du Fonds d'aide à l'édition. Un fonds géré par le ministère de la Culture pour soutenir la production littéraire. L'État leur a promis un soutien sans en préciser la forme à ce stade. À lire aussiFrancophonie en Afrique: au Sénégal, le wolof monte en puissance face au français [4/5]

    Ghana: une commune sans eau propre à cause de l'orpaillage illégal

    Play Episode Listen Later Oct 28, 2025 2:20


    Au Ghana, les conséquences environnementales du « galamsey », nom local donné à l'orpaillage illégal, sont de plus en plus sérieuses : forêts détruites, risque de pénurie d'eau potable, agriculture en danger. C'est le constat d'un nouveau rapport publié le mois dernier par l'antenne ghanéenne de l'organisation environnementale américaine Pure Earth. L'étude identifie notamment onze localités, où la pollution liée au secteur aurifère sont particulièrement perceptibles, et impacte directement la vie des populations riveraines des exploitations. Notre correspondant au Ghana s'est rendu dans l'une d'entre elles. Reportage dans la commune de Asiakwa, dans la région orientale, à deux heures de la capitale Accra, où les habitants ont dû renoncer à utiliser l'eau de leur rivière. De notre correspondant au Ghana, Midi approchant, Joyce Obngwaa, commerçante, s'apprête à manger dans sa boutique. Au menu ce midi, un ragoût de kontomire, dont elle sort quelques feuilles de son sac. Pour les rincer cependant, pas question d'utiliser l'eau courante. « C'est parce que les orpailleurs illégaux polluent notre eau naturelle, on ne peut pas utiliser cette eau pour laver les légumes, se laver ou toute autre tâche ménagère. On est donc obligé d'utiliser de l'eau propre qu'on achète en sachet. Ça me rend triste », regrette-t-elle.  Voilà près de deux ans que les quelque 3 000 habitants de la commune d'Asiakwa ont dû se détourner de leur rivière. Pour avoir de l'eau propre, il faut maintenant l'acheter, ou creuser des puits, ce qui engendre des coûts importants pour les finances de la commune, selon les autorités locales. À lire aussiAu Ghana, comment rendre le secteur minier plus respectueux de l'environnement ? En cause, une eau de rivière surchargée en plomb et en mercure, des métaux lourds toxiques que l'on retrouve fréquemment à proximité des sites d'orpaillage illégal opérant tout autour de la commune, parfois à même la rivière. Des dégâts qu'Ebenezer Aborakwa, ancien élu communal, constate tous les jours en se rendant près des cours d'eau : « Je me souviens de la couleur de l'eau, avant, elle était très propre. Aujourd'hui, vous le voyez, elle a la couleur de la terre du sol. Les mineurs ne couvrent pas leurs exploitations, donc quand il pleut, la pluie emporte toute la saleté, qui finit dans la rivière. » À ses côtés, plusieurs hommes acquiescent, l'air grave. Armés de fusils, ils font partie d'une équipe anti-orpaillage illégal mise en place par le chef traditionnel local. Francis Tetteh fait partie de cette équipe. Il raconte : « Quand on voit des gens qui minent illégalement, on les arrête. Mais il faut que le gouvernement nous aide, nous donne des moyens, sinon on n'y arrivera pas dans la durée. » À lire aussi«Arrêtez le galamsey»: au Ghana, des manifestants dénoncent l'inaction du gouvernement face à l'orpaillage illégal L'inspection presque terminée, un quad déboule des fourrés. À son bord, trois jeunes, des orpailleurs illégaux, qui reviennent tout juste de la mine. Après quelques échanges tendus, la situation se calme. Joseph, 21 ans, accepte de témoigner. « Ils nous disent d'arrêter, qu'on pollue l'eau, mais moi, je ne suis pas d'accord. La situation économique n'est pas bonne, la jeunesse souffre. C'est pour ça que je mine, pour aider ma mère, mes frères », explique-t-il. Joseph et ses deux amis repartent finalement, sous le regard désapprobateur, mais aussi impuissant, des hommes armés. Ils le savent : tant qu'il n'y aura pas de réelles opportunités d'embauches pour la jeunesse locale, la rivière, elle, restera teintée par l'orpaillage illégal.

    Centrafrique: à Bangui, le marché Combattant fait peau neuve

    Play Episode Listen Later Oct 27, 2025 2:20


    En Centrafrique, la capitale Bangui voit renaître un de ses lieux emblématiques : le marché de Combattant. Longtemps en état de dégradation, ce marché historique vient d'être rénové, apportant avec lui un souffle nouveau pour les commerçants et les habitants de la ville. Situé dans le huitième arrondissement, le marché de Combattant est un carrefour commercial important où se croisent quotidiennement des centaines de vendeurs et d'acheteurs. Pendant plusieurs années, l'état dégradé des infrastructures avait rendu difficile le commerce et détérioré l'image du site. Grâce à un programme de rénovation lancé par les autorités, le marché a bénéficié de travaux de réhabilitation importants et devient aujourd'hui un symbole de renouveau urbain.  De notre correspondant à Bangui, Le jour se lève à peine sur le marché, et déjà les allées s'animent d'un va-et-vient familier. Au centre, Micheline, commerçante bien connue des habitués, installe son étal. Une à une, elle sort des paniers des bottes de carottes encore perlées de rosée, des tomates et une variété de légumes colorés : « Le marché nous offre maintenant un cadre confortable. L'espace est suffisant et l'hygiène est irréprochable. Ce qui me permet de bien présenter mes légumes fraîchement récoltés du jardin. Il n'y a plus de boue, d'asticots et de moustiques. Les conditions sanitaires ont nettement changé. » Autour d'elle, le marché prend vie... Des allées bien tracées, des hangars réhabilités et une meilleure circulation de l'air. Priscille est venue pour ses courses : « Je suis fière de constater que le marché est désormais bien organisé. L'aération est bien faite. Chaque produit a son espace : je sais où trouver les légumes, les produits de première nécessité et les articles manufacturés. Les étals de viande et de volaille sont bien séparés. Avant, pendant la saison des pluies, les gens évitaient de venir ici. Mais maintenant ce marché attire tout le monde. » Une gestion durable en ligne de mire En plus de l'aménagement physique, un système de sécurité a été mis en place : présence accrue de la police municipale, éclairage renforcé la nuit et des règles strictes de gestion des déchets. Une amélioration défendue par Alain Konamna, président de l'Association des commerçants du marché Combattant : « Il n'y a plus de boue dans le marché. Même le sol est en ciment. Nous allons maintenant travailler à la loupe avec le règlement intérieur qui régit le fonctionnement du marché. Nous allons lutter efficacement contre les ordures et l'insalubrité. Il y a des agents balayeurs qui sont là. Très tôt le matin, ils nettoient les saletés. Mais nous avons besoin de moyens logistiques nécessaires pour enlever les dépôts d'ordures à temps pour préserver la salubrité du marché. » Lors de la coupure du ruban blanc marquant l'inauguration du marché, le président Faustin-Archange Touadéra a appelé les commerçants et les usagers à adopter une gestion durable du site : « Je demande à la population de Combattant, de comprendre que ce que nous faisons ici, c'est pour leur bien. C'est pour leur permettre d'acheter des produits sains dans de meilleures conditions. Je demande tout simplement que la discipline soit respectée. Tout le monde doit rester dans le marché, c'est important d'éviter d'aller vendre sur la voie publique. » Le marché Combattant a aujourd'hui une capacité d'accueil d'environ 2 000 personnes.

    Afrique du Sud: à Soweto, la ruée vers l'or continue de toucher les populations pauvres plus de 100 ans plus tard

    Play Episode Listen Later Oct 26, 2025 2:33


    La ville de Johannesburg est aussi appelée « la ville de l'or », parce qu'elle a été fondée à la fin du XIXe siècle quand de l'or y est découvert. Rapidement, la ville se développe autour de cette précieuse ressource. Plus de cent ans plus tard, la plupart des mines ont fermé, mais il reste des milliers de puits encore ouverts, et surtout des matières toxiques qui continuent de toucher les communautés voisines, et aujourd'hui, les habitants sont de plus en plus malades.  De notre correspondant à Johannesburg, L'image est frappante : dans une impasse de Soweto, une immense dune de sable dépasse derrière le toit de modestes maisons en pierre. Quand il y a du vent, la poussière se soulève. Et toutes ces substances toxiques arrivent chez nous. Nous sommes dans le quartier de Snake Park, dans une maison familiale à deux étages où plusieurs générations vivent ensemble. Novulawu Sitshaluza, bob sur la tête pour se protéger du soleil, a grandi ici : « Au départ, on pensait que cette montagne était naturelle, mais nous avons découvert plus tard que c'était en fait une création humaine, issue de la ruée vers l'or. » Des générations marquées par la maladie À la fin du XIXe siècle, la ville de Johannesburg se construit sur l'or. Et pendant l'apartheid, le pouvoir blanc déporte les populations noires dans d'immenses townships, souvent à proximité de mines, et donc de déchets toxiques. « Vous savez, nos ancêtres sont partis travailler dans les mines. Ils ne sont jamais revenus avec de l'or ou de l'argent. Ils sont revenus avec des maladies. Et encore aujourd'hui, nous, leurs arrière-petits-enfants, on tombe malade à notre tour. C'est l'éternelle souffrance des Noirs en Afrique du Sud. ». Thokozile Mntambo est activiste, figure de la lutte des communautés locales face aux géants du secteur minier : « Comme vous pouvez le voir, il n'y a aucune clôture pour sécuriser les lieux… Vous pouvez vous garer ici, on va s'approcher un peu ». Donc là, on va monter sur une petite butte, pour vraiment avoir une vue sur toute la mine. On monte sur du sable très clair, presque blanc. Ce sont tous les résidus ; à l'époque où on cherchait encore de l'or. « Ils continuent de trouver de nouvelles technologies pour extraire les restes d'or. Alors, nous, on meurt encore à cause de cet or ! », ajoute Thokozile Mntambo. Recenser les victimes  Et Thokozile Mntambo ne veut plus voir sa communauté mourir. En 2023, avec la Bench-Marks Foundation, elle démarre un porte-à-porte pour recenser tous les cas de maladies. Résultat : la moitié des répondants déclarent avoir des problèmes respiratoires : « On est venu me voir pour me dire que je devais arrêter de parler aux médias, car cela perturbe les investissements. Mais j'ai commencé ce combat, je ne vais pas m'arrêter là ! » Parce que de nombreuses vies sont en jeu. À cause de ces longues années d'expositions à l'uranium ou à l'arsenic, de plus en plus d'enfants naissent malades. Nous retournons chez Novulawu, qui vit juste en face de la mine : « Ma fille était handicapée, elle est malheureusement décédée en 2022, à 12 ans… Je ne peux pas être certaine que ce soit à cause de ces résidus toxiques, mais cette dune a peut-être joué un rôle, oui. » Selon les activistes de Snake Park, ce combat, c'est un combat entre le profit des grandes entreprises et la santé des communautés locales appauvries ; plus de cent ans après la ruée vers l'or.

    Tanzanie: M-Mama, un programme qui réduit la mortalité maternelle

    Play Episode Listen Later Oct 25, 2025 2:20


    En Tanzanie, la santé est l'un des secteurs le plus en difficulté. Problèmes d'accès aux soins, d'infrastructures ou manque de personnels qualifiés, les défis sont nombreux. Mais grâce à la Fondation Vodafone et l'implication du gouvernement tanzanien, un programme nommé M-Mama a permis de réduire la mortalité maternelle de près de 40%.   De notre correspondante à Dar es Salaam, Cette sonnerie, Sophia Miraji l'entend jusqu'à 40 fois par jour dans son bureau de l'hôpital Mwananyamala à Dar es Salaam. Au bout du fil en général, un dispensaire ou une structure de santé ayant une urgence obstétrique. « On a une urgence, on a besoin d'un véhicule. » Francesca Konyani est infirmière. Avec sa collègue, elle traite cet appel aujourd'hui : « La mère est en plein travail, mais sa tension est élevée, c'est de la pré-éclampsie, donc on doit la transporter du centre de santé de Kigogo à l'hôpital de Mwananyamala. »  Un trajet d'environ 10-20 minutes s'il n'y a pas de trafic et qui sera effectué ce jour-là par une ambulance. Si aucune n'est disponible, c'est un chauffeur privé qui fera le trajet. Grâce au numéro gratuit 115 de M-Mama, depuis 2023, toutes les femmes enceintes ou nouveau-nés en état d'urgence en Tanzanie peuvent être pris en charge et transportés dans un établissement pouvant leur fournir les soins appropriés. Rahma est la responsable du projet M-Mama en Tanzanie : « Nous avons déjà transporté plus de 170 000 personnes dans le pays, c'est énorme. Nous avons des chauffeurs issus des communautés de presque tous les villages dans ce pays. C'est surtout grâce à la volonté politique. » Élargir le programme à d'autres urgences médicales La présidente Samia Suluhu Hassan a fait de la santé des femmes et des nouveau-nés une priorité. Mais avec quasiment 60% du système de santé national financé par des dons extérieurs ou le paiement des particuliers, l'efficacité de M-Mama est loin de refléter la réalité du pays. Faraji Bakari est l'un des chauffeurs du programme : « On espère que ça ne va pas s'arrêter aux femmes enceintes, mais que le gouvernement va étendre ça à ceux qui ont d'autres besoins médicaux dans la communauté. » La Tanzanie ne dispose pas de service de transport d'urgence, c'est donc pour ça que la fondation Vodafone s'est focalisée sur ce problème. Le programme est financé par l'État et désormais aussi géré par différents ministères. Juwairia Hamad tient son bébé de quatre mois en pleine forme dans ses bras : « Sans eux, je ne serais pas là. Quand une mère est en situation d'urgence et qu'il n'y a pas de services, c'est très difficile. C'est une super initiative et je suis très heureuse. »  Si le gouvernement tanzanien a augmenté son budget lié aux infrastructures de santé ces dernières années, le manque de personnel qualifié et le coût des soins restent un véritable problème dans le pays.  À lire aussiNeoNest, un couffin pour sauver les bébés prématurés en Ouganda rural

    Le Bongo Flava, musique emblématique de la Tanzanie

    Play Episode Listen Later Oct 24, 2025 2:33


    Style de musique iconique de la Tanzanie, le Bongo Flava se fait de plus en plus connaître à l'international. Avec ses notes de hip hop, rap, zouk, le tout en swahili, le style est né dans les années 1990 et continue de faire danser les Tanzaniens. Même si quelques décennies plus tard, les messages de revendications se sont estompés. De notre correspondante en Dar es Salaam, C'était « le » tube l'an dernier en Tanzanie, Diamond PlatnumZ, star du Bongo Flava lançait sa chanson Komasava pour « comment ça va ? ». Le titre a tourné à travers le monde. À coup de voitures clinquantes, femmes légèrement vêtues et de Masai réalisant la chorégraphie de la chanson, le tube parle vaguement de romance… Des thèmes pourtant bien loin des origines du style Bongo Flava, selon Kwame Eli, en charge de la communication pour l'Association de la musique urbaine tanzanienne : « Ça a beaucoup changé, à l'origine c'était quelque chose qui aidait les jeunes à s'exprimer sur différents problèmes dans le voisinage, dans la communauté, mais maintenant c'est juste du divertissement. » À lire aussiLa « success story » du Tanzanien Diamond Platnumz Une musique autrefois engagée Né dans les années 1990, le Bongo Flava est un mélange de genres pour, à l'époque, parler de politique, d'économie et parfois même critiquer le gouvernement. Le titre Ndio Mzee, traduisez « oui chef », de l'artiste Professor Jay, fait partie des classiques. « Nous t'avons donné nos voix ; Tu nous as fait tant de promesses ; Mais aujourd'hui, nous restons affamés », chantait Professor Jay à l'époque. Aujourd'hui, il a préféré ne pas répondre à nos questions. À quelques jours à peine des élections présidentielles, exprimer quelconque critique est très risqué en Tanzanie. Pour Kwame Eli, « Les choses ne vont pas bien. La plupart des musiciens maintenant ne soutiennent qu'une partie. "Parce qu'ils ont peur, vous pensez ?" 100% ! Ils ont peur ! [rires] » Alors, certains chantent les louanges de la présidente au pouvoir Samia Suluhu Hassan. C'était le cas en 2021 de Frida Amani : « J'utilise la musique pour parler des femmes, c'est pour ça que j'ai une chanson comme Madam President. Ça n'était pas du tout politique, c'était pour inspirer les filles. » La chanteuse estime qu'aujourd'hui le public ne veut plus entendre parler des problèmes du quotidien : « Ils pensent : "C'est notre vie, c'est ce qu'il se passe maintenant, s'il vous plaît, laissez-nous avoir du bon temps". ». Une querelle des anciens et des modernes. Quelles qu'en soient les paroles, une chose est certaine, le rythme du Bongo Flava continue de faire danser la Tanzanie.

    Tanzanie: l'éducation en manque de moyens face à l'explosion démographique

    Play Episode Listen Later Oct 23, 2025 2:13


    La Tanzanie fait partie des dix pays africains où la population augmente le plus vite. Parmi les défis que cela implique : l'éducation. Un secteur encore sous-financé et aux nombreux problèmes. Illustration à Dar es Salaam à l'école islamique d'Ubungo. De notre correspondante à  Dar es Salam,  « Ici, ce sont certaines des classes et des laboratoires. »  Ramadhan Mbwana est le directeur de l'école privée islamique d'Ubungo, à l'ouest de Dar es Salaam. Sous son aile, ils sont 250 élèves âgés de 13 ans et plus. Et depuis l'an dernier, il doit s'adapter au nouveau programme scolaire mis en place par le gouvernement. « Parmi les défis qu'on rencontre, c'est le manque d'outils pour la formation professionnelle, par exemple, notre gouvernement a fait imprimer des livres, mais il n'y en a pas assez pour tous les étudiants. Il y a aussi le problème de la formation, ajoute Ramadhan Mbwana, notre gouvernement a essayé de former les enseignants, mais ils ne l'ont pas tous été. » À l'école islamique d'Ubungo, sur 29 professeurs, seuls douze ont été formés au nouveau programme. Malgré ces manquements, l'établissement est privé et donc plutôt privilégié. Financé uniquement par les frais de scolarité qui s'élève à environ 900€ par an pour les internes, il dispose d'équipement informatique notamment et l'éducation s'y fait en anglais. Hemedi est élève ici depuis deux ans, il étudiait auparavant dans une école publique et note la différence : « L'école d'Ubungo est mieux parce que les infrastructures sont bonnes et les professeurs aussi. » Des classes surchargées dans les écoles publiques Le nombre d'élèves par exemple va du simple à plus du double, comme l'explique Said Sumuni, 29 ans, professeur d'anglais : « Dans les écoles publiques, il y a beaucoup, trop d'élèves. Par exemple, dans une classe, vous pouvez avoir pas moins de 100 élèves. » L'école publique, c'est pourtant là où étudie la majorité des enfants tanzaniens. Si l'éducation est obligatoire à partir de sept ans, beaucoup abandonnent après le primaire. En cause, des longs trajets, un manque de moyens pour payer l'uniforme par exemple ou parce que certaines jeunes filles tombent enceintes très tôt. L'autre problème, c'est l'apprentissage par cœur avec très peu de pratique, selon Rajabu James, volontaire à l'association IBET qui vise à améliorer l'éducation en Tanzanie : « Ils ne font pas de lien entre l'apprentissage et la situation dans la vraie vie. On est trop basé sur la théorie au lieu de la pratique. » Un défaut que le nouveau programme tente de palier. L'an dernier, 12,5% du budget du gouvernement était alloué à l'éducation. Dans un monde idéal, le chiffre devrait se rapprocher des 20%. À lire aussiLa bataille contre l'absentéisme des adolescentes à l'école en Tanzanie

    Tunisie: les femmes à l'avant-garde de la pâtisserie

    Play Episode Listen Later Oct 22, 2025 2:24


    En Tunisie, les femmes ont toujours été majoritaires dans le domaine de la pâtisserie traditionnelle. Mais depuis quelques années, de jeunes pâtissières bouleversent les codes, optant pour une pâtisserie à la française, allégée en sucre et diversifiée. Une manière de revendiquer une créativité et une originalité tout en s'inspirant des recettes des pâtisseries ancestrales. À la pâtisserie Boulevard des Capucines, en banlieue nord de Tunis, Salma Langar, 36 ans, donne ses instructions de la journée pour la conception de ses gâteaux. Depuis onze ans, cette passionnée s'adonne à la pâtisserie haut de gamme. « Je voulais faire ça depuis toute petite, j'ai grandi dans une famille de cuisiniers. Mon père avait un restaurant, donc j'ai ouvert les yeux dans le restaurant de mon père et aussi dans la cuisine de ma grand-mère qui est une grande cuisinière. J'ai grandi en cuisinant les gâteaux traditionnels, avec elle et avec mes tantes. Vraiment chaque Ramadan, chaque Aïd », raconte-t-elle.  Et pourtant, dans les vitrines de sa pâtisserie, les douceurs traditionnelles tunisiennes sont absentes. Salma a misé sur la différence. On trouve des opéras revisités, des tartes aux fruits, des trompe-l'œil, dont le best-seller, un saucisson chocolat noisette... « J'aime bien qu'on s'amuse avec la pâtisserie. Puisque ici les gens ne peuvent pas manger de la charcuterie de porc, on s'est dit ''on va leur faire une charcuterie en chocolat''. Et les gens adorent », s'amuse-t-elle.  Pour cette cheffe, formée entre la Tunisie et la France, notamment chez le chef pâtissier Cyril Lignac, le terrain de la pâtisserie en Tunisie est un tremplin pour les femmes et laisse place à la créativité. « On voit beaucoup de femmes qui sont en train de se lancer, même qui sont en train de faire des reconversions professionnelles, c'est ça qui est beau », s'enthousiasme-t-elle.  À lire aussiLes délices du continent: en Tunisie, le mleoui est une institution de la street food [4/10] Une reconversion qui a fait le succès de sa collègue, Kawther Hattab, à la tête d'une autre pâtisserie, Madeleine et Proust. Dans son enseigne, la précision et le dosage sont les maîtres mots. Kawther, 40 ans, ancienne ingénieure, s'est amourachée de la pâtisserie à travers le jeu sur la matière. « Je me suis inspirée de ce que j'aimais manger : la fleur d'oranger, l'eau de rose, etc. Mais à ma façon et en l'intégrant dans des mousses, des recettes françaises. C'est aussi comme ça que j'ai des combinaisons entre les saveurs tunisiennes, la Méditerranée et la France », détaille-t-elle. Dans un pays qui compte 16% de diabétiques, Kawther a voulu aussi innover en diminuant le sucre. « Je n'ai pas travaillé uniquement sur le sucre, j'ai travaillé également sur le gras, parce que c'est un ratio. Si on diminue seulement le sucre, le taux de gras augmente, donc on n'est pas sur une recette qui est forcément saine ou avec moins de calories », explique-t-elle. La recette fonctionne car la pâtisserie vient d'ouvrir un café dédié au brunch. Salma, elle, a inauguré une boutique de glaces artisanales, nommée Lou, inspirée des recettes italiennes. À lire aussiTunisie: la richesse du patrimoine culinaire encore méconnue

    En Centrafrique, la pharmacie de rue pose un problème de santé publique

    Play Episode Listen Later Oct 21, 2025 2:20


    Dans les rues de Bangui et des provinces de Centrafrique, ils sont partout. On les appelle les « docta » ou encore « les docteurs de quartier ». Ce sont ces vendeurs de médicaments à la sauvette, installés à même les trottoirs ou dans de petites cabanes en bois, au bord de la route et dans les marchés. Pour beaucoup, ils sont devenus une solution de santé de proximité, accessible, rapide, sans ordonnance, et surtout sans frais élevés. Mais derrière cette facilité d'accès se cache une réalité bien plus inquiétante : automédication, médicaments de qualité douteuse, erreurs de traitement… La pharmacie de rue, bien qu'elle réponde à une détresse sanitaire réelle, pose aujourd'hui un grave problème de santé publique. Alors que la situation prend de l'ampleur, le gouvernement centrafricain a pris des mesures. De notre correspondant à Bangui, Au coin d'une rue animée, entre les cabines de transfert de crédits et les boutiques de commerce général, une cabane en bois attire les passants. À l'intérieur : des flacons sans étiquettes, des cartons de médicaments aux couleurs vives, des pommades et des seringues… Bintou Dayonko, une femme d'une quarantaine d'années, chemise fleurie et regard alerte, accueille ses clients avec un mince sourire : « Je suis diplômée en médecine, mais après l'obtention de mon diplôme, je me suis retrouvée sans emploi. J'ai donc décidé d'ouvrir cette pharmacie afin d'avoir une activité professionnelle, mais aussi et surtout pour venir en aide aux familles démunies et vulnérables de mon quartier. » Dans les quartiers populaires de Bangui, ces vendeurs répondent à un besoin de certains habitants. Le phénomène s'est amplifié depuis 30 ans à cause de la pauvreté généralisée, de l'absence des pharmacies de proximité et surtout, de l'accès inégal aux soins. « Ces petites pharmacies sont très importantes, considère Elvire Ndiba, une mère de famille. En cas de fièvre, de paludisme ou de maladies moins graves, elles nous soignent efficacement. Même avec seulement 100 ou 500 FCFA, on peut se faire soigner. Le personnel est très accueillant et attentionné. » Danger sanitaire Mais ce marché parallèle n'est pas sans conséquences. Selon Elvire Ndiba, les malades font également face à des mauvaises qualités de médicaments, le surdosage avec des effets secondaires graves : « L'inconvénient est que la majorité de ces pharmaciens de rue ne maîtrisent pas réellement leur métier. Dans ces kiosques, les médicaments sont souvent mal conservés, exposés à la chaleur et à l'humidité, voire périmés. Ces pratiques peuvent entraîner des complications graves, mais les cas de décès sont rares. » Selon certains professionnels de santé, la plupart des médicaments de rue sont des poisons pour le corps humain. « Ça dépend des malades, mais ces produits font plus de mal que de bien, prévient un médecin sous couvert d'anonymat. Le vrai problème, c'est l'accès aux soins de qualité qui est difficile dans notre pays. Tant que les pharmacies officielles resteront hors de portée financière pour les plus pauvres, ce marché existera. L'État peut toutefois former ces vendeurs, contrôler leurs produits, créer des structures de santé de proximité à bas coût : ce serait déjà un pas. » La vente de médicaments de rue est interdite par le ministère de la Santé depuis 2020. Et le gouvernement mène régulièrement des opérations de sensibilisation.

    NeoNest, un couffin pour sauver les bébés prématurés en Ouganda rural

    Play Episode Listen Later Oct 20, 2025 2:17


    En Ouganda, une jeune ingénieure s'attaque à un fléau silencieux : la mort de nouveau-nés faute d'équipements adaptés dans les zones rurales. Vivian Arinaitwe a mis au point un couffin chauffant, fabriqué à partir de matériaux recyclés, pour transporter les bébés prématurés en toute sécurité vers les hôpitaux. Son invention, baptisée NeoNest, vient d'être distinguée par l'Académie royale d'ingénierie au Royaume-Uni.  Vivian Arinaitwe a 24 ans. Diplômée en ingénierie biomédicale, elle a grandi dans un village à l'ouest de l'Ouganda, loin de tout hôpital. C'est là qu'est née l'idée de NeoNest : « Quand on était enfant, on entendait ces histoires, nos parents disaient : "Oh le bébé de cette femme est mort parce qu'il était bleu"… » Dans de nombreux centres de santé du pays, il n'existe pas d'équipement pour stabiliser les bébés prématurés. Ils doivent être transférés vers des hôpitaux mieux équipés, parfois à plusieurs heures de route. « La plupart de ces bébés sont prématurés ou ont besoin de soins urgents, donc il faut les amener rapidement vers une unité de soins intensifs, parfois à six, huit ou dix heures du village. Actuellement, il n'y a pas de moyen de les transporter en sécurité, on les emmaillote juste dans des draps. » Un nid chauffant pour un transport en toute sécurité C'est pour ces trajets souvent périlleux que Vivian a imaginé NeoNest : un petit nid de transport chauffant, simple d'usage et pensé pour les zones rurales. La priorité : maintenir le nouveau-né à la bonne température, autour de 37 degrés, pendant tout le trajet. Sa batterie tient plus de six heures, et le système envoie une alerte en cas de baisse de chaleur. « Ça, vous voyez, c'est le capteur de température sur le bébé qui nous donne sa température en temps réel », explique-t-elle.  À l'intérieur, le couffin est ajusté pour absorber les secousses des routes en terre et protéger les bébés. « Le bébé doit être transporté de manière à ce qu'il ne remue pas, donc on peut vraiment ajuster le nid à la taille du bébé, et on a aussi des lanières, parce que NeoNest n'est pas conçu seulement pour les ambulances, mais aussi pour les motos, les vélos, ou même à pied », détaille Vivian Arinaitwe. Une invention saluée par la Royal Academy of Engineering Un dispositif fabriqué localement, à partir de plastique recyclé de bidons d'eau. Cette année, NeoNest a valu à Vivian d'être finaliste du Prix africain d'ingénierie décerné par la Royal Academy of Engineering. Le jury, présidé par l'entrepreneure camerounaise Rebecca Enonchong, a salué le potentiel de ce projet pour sauver des milliers de vies : « Il y a d'autres zones, on peut parler d'Asie, on peut parler d'autres zones en voie de développement qui pourraient bénéficier de cette technologie. Non seulement ça, mais l'innovation créée peut être appliquée différemment, c'est-à-dire comment utiliser moins de ressources. » Au-delà de l'invention, Vivian veut un modèle durable : chaque unité revient à environ 115 euros, pour un prix de vente d'un peu plus de 280. Son objectif : qu'au moins un NeoNest soit disponible dans chaque centre de santé du pays.

    Le Guéréwol, rituel nuptial des jeunes M'Bororo au Tchad

    Play Episode Listen Later Oct 19, 2025 2:20


    En cette fin de saison des pluies au Tchad, un clan de la tribu M'Bororo, une branche nomade de l'ethnie peul, s'est établi dans la brousse autour de la ville de Dourbali, à une centaine de kilomètres au sud de Ndjamena. Ils sont éleveurs de bétail et avant de commencer leur voyage vers le sud, ils fêtent le Guéréwol. De notre correspondante de retour de Dourbali, En ce mois d'octobre, la terre est gorgée d'eau et la transhumance débute avec la fin de la saison des pluies. C'est à quelques dizaines de kilomètres de Dourbali qu'un clan M'Bororo a choisi de s'établir. Gouda en est le chef : « Nous allons vers le Chari, certains vont au Cameroun, d'autres jusqu'en Centrafrique. Nous nous déplaçons derrière les pluies qui tombent et derrière les premières herbes qui poussent. Quand la saison des pluies se termine, ça devient rude par ici et le climat est trop sec, donc nous repartons vers le sud. » Avant de quitter la brousse pour aller vers le sud, le clan organise un Guéréwol, une célébration annuelle et un concours de beauté et de danse masculine qui doivent permettre d'attirer les femmes éligibles au mariage ou à l'amour. « Je m'appelle Ali, je suis éleveur de vaches et j'ai 31 ans, se présente l'un des candidats. On achète cette teinture dans le village et on la met sur le visage pour la danse. » Beauté, danse et choix amoureux Ali et les autres jeunes hommes du clan se maquillent le visage avec des pigments naturels couleur ocre. Cela permet de mettre en avant la finesse de leurs traits, mais surtout la blancheur de leurs dents et de leurs yeux, symboles de bonne santé. Bijoux, étoffes et coiffes colorés, les hommes se font beaux pour danser et chanter. Pendant plusieurs heures, ils se tiennent en ligne ou en cercle, et dansent au rythme de leurs chants. Ils claquent des dents, bougent les yeux de gauche à droite frénétiquement. Certains entrent en transe sous les yeux des juges, les femmes, qui, à la tombée de la nuit, vont choisir un époux ou un amant. Difficile de parler aux femmes, elles préfèrent rester discrètes. Alors, c'est Mokhtar, un proche du clan qui nous explique : « Les filles, depuis qu'elles sont petites, ont des amis garçons dont elles sont proches avec lesquels elles dansent et chantent. La cérémonie sert à choisir le futur partenaire. Une fois la cérémonie terminée et le choix arrêté, l'homme élu doit donner un bœuf et un franc symbolique pour la dot. C'est cet homme qui deviendra son mari. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'ils deviennent époux et que la fidélité commence. Si la femme n'est pas satisfaite, elle peut aller en chercher un autre lors d'une prochaine cérémonie. » Impossible d'assister au choix fait par les femmes ou même de savoir lequel des danseurs a été élu. Dès le lendemain matin, le clan et leur bétail prennent la route vers le sud.

    À Rennes, des migrants sans-papiers cultivent la solidarité

    Play Episode Listen Later Oct 18, 2025 2:24


    Ils sont une dizaine de demandeurs d'asile regroupés au sein du collectif des Agriculteurs migrants de Rennes. Ils se sont rencontrés dans les centres de distributions alimentaires et dans des hébergements de fortune avant de se retrouver autour d'un projet agricole commun à Melesse à une quinzaine de kilomètres de Rennes dans le nord-ouest de la France. Une habitante leur a prêté un hectare de parcelle pour leur projet. Ces migrants originaires d'Afrique subsaharienne, notamment de la Côte d'Ivoire et du Cameroun, cultivent des fruits et des légumes qu'ils donnent à des associations comme les Restos du Cœur et le Secours populaire. De notre envoyée spéciale de retour de Rennes, Eddy-Valère Djonang Ngandjeu, originaire du Cameroun, est sans-papiers et n'a pas le droit de travailler. Pour s'occuper et ayant des connaissances dans l'agriculture, il a créé le collectif des Agriculteurs migrants de Rennes et lancé un projet avec d'autres personnes dans la même situation que lui. Ce matin, ils récoltent des poireaux, des poivrons et des potirons. Des légumes qui seront distribués aux bénéficiaires d'associations aidant les personnes en situation de précarité. « Lorsqu'on partait chercher à manger aux Restos du Cœur, on voyait que les Restos du Cœur et le Secours populaire partaient prendre les invendus dans les marchés pour nous les donner, se souvient Eddy-Valère Djonang Ngandjeu. On s'est demandés si on ne pouvait pas également travailler pour accompagner ces établissements alimentaires. Donc, voilà comment on s'est lancé. » Le collectif des Agriculteurs migrants de Rennes a donné gratuitement près d'une tonne de légumes au Secours populaire. Malgré le succès de cet essai, Eddy a parfois du mal à convaincre d'autres demandeurs d'asile de se joindre à eux : « Il y en a certains qui, en venant ici, pensaient que la France était un eldorado où tout se donne, où tout se ramasse. Ils ne cessent de nous dire qu'on ne peut pas laisser la terre pour venir la travailler ici. Mais si tout le monde faisaient comme eux, qui travaillerait la terre pour que les autres mangent ? » « Je veux continuer, c'est mon projet » Kassiri Gbeuli Ellogne travaille avec Eddy. Il souhaite continuer dans l'agriculture : « En Côte d'Ivoire, j'étais planteur, éleveur. Je n'ai pas changé, je veux continuer parce que je sais ce que la terre produit. Donc, j'ai eu de la chance d'avoir de la terre ici. Je veux continuer, c'est mon projet. » Pour que ce projet puisse être une réalité, le collectif Campagnes ouvertes et solidaires avait lancé un appel à la solidarité qui a fait effet selon Maxime, membre de ce mouvement citoyen : « Dans notre collectif, beaucoup sont à la Confédération paysanne, syndicat agricole. On a donc relayé le message. C'est comme ça qu'un paysan a répondu qu'il était prêt à prêter des terres à leur collectif. On a récolté du matériel dans une ferme pas très loin et on leur a amené. Et puis après, le bouche-à-oreille a fait qu'ils ont reçu des trucs au fur et à mesure. » Eddy Valère et ses camarades ont ouvert une cagnotte pour leur permettre de poursuivre ce projet agricole. À écouter aussiÀ la rencontre des agriculteurs migrants de Rennes

    10e édition de Dream City: la Médina de Tunis au rythme de l'art engagé

    Play Episode Listen Later Oct 17, 2025 2:28


    Rendez-vous incontournable de l'art contemporain en Tunisie, la biennale Dream City tient sa 10ᵉ édition à Tunis jusqu'au 19 octobre. Sa particularité ? Les artistes investissent des lieux de la Médina, une trentaine sont mis à leur disposition, une aubaine pour les habitants, mais aussi les visiteurs qui redécouvrent leur patrimoine. Cette édition consacre une grande place à l'art engagé dans l'actualité au Moyen-Orient et à l'artisanat tunisien. À Dar Mallouli, une bâtisse vieille de plusieurs siècles, le bourdonnement d'un bruit de drone envahit les lieux. In search of justice among the rubble, présenté par un collectif d'artistes libanais, retranscrit le quotidien du Liban bombardé par Israël entre octobre 2023 et novembre 2024. Un travail d'archivage et de cartographie qui a ému Aymen, jeune bénévole du festival Dream City. Cet étudiant en audiovisuel explique l'œuvre aux visiteurs : « La maison est en cours de rénovation pour illustrer les effets de la guerre. Le bruit du drone témoigne des attaques psychologiques qu'a menées Israël contre le Liban pendant un an, avec ce bourdonnement permanent des drones. Donc, on est complètement immergé dans le quotidien de la guerre à travers l'œuvre et le lieu. » Un lieu privé, objet de patrimoine et ouvert spécialement pour le Festival Dream City, une découverte pour Aymen : « C'est vraiment l'occasion pour moi de découvrir pleins d'endroits dans la Médina, cette maison n'était pas du tout accessible avant. D'ailleurs, je vois beaucoup d'étudiants en architecture qui viennent au festival juste pour visiter des lieux inédits de la Médina. » L'artisanat mis à l'honneur Alors qu'une averse frappe la Médina en plein milieu de la journée, la plupart des visiteurs se réfugient à la caserne El Attarine, autre lieu emblématique du festival où sont exposés plusieurs travaux d'artistes palestiniens et tunisiens. Fathi, 21 ans, un habitant de la Médina, arpente les lieux : « Pour moi, c'est un festival important pour la Médina, mais aussi parce qu'il présente des œuvres engagées. En tant que jeune, on suit tous les jours ce qu'il se passe à Gaza sur les réseaux sociaux, donc voir un regard à travers l'art, développer un regard critique, cela permet aussi d'avoir un autre point de vue. »  Dans les salles du rez-de-chaussée, l'artisanat des potières de Sejnane a été mis à l'honneur. La gestuelle de ce savoir-faire ancestral inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco a été érigé au rang d'œuvre d'art par deux artistes tunisiens, une reconnaissance pour Lamia Saïdani, une potière de 34 ans qui a hérité cet art de sa grand-mère : « On a trouvé notre place dans ce festival, car ce n'est pas comme quand on va vendre les poteries à une foire. Ici, on vend à un prix fixe et les gens nous voient travailler vu qu'on anime un atelier et ils voient aussi l'œuvre artistique, donc on se sent valorisés. » Le festival qui expose des artistes africains et aborde aussi les luttes décoloniales ou encore le rapport à l'identité et mise sur un public jeune et de plus en plus diversifié à chaque édition. À lire aussiTunisie: la culture sur sable, une pratique ancienne qui tente de résister

    Soudan du Sud: Nyan Paleu, chanteur traditionnel de Bor au service de la paix et de l'unité

    Play Episode Listen Later Oct 16, 2025 2:41


    C'est un chanteur traditionnel originaire de Bor, la capitale de l'État du Jonglei, à l'est du Nil. Thiong Lual Thiong, de son nom de scène Nyan Paleu est l'auteur de véritables tubes de la musique sud-soudanaise. Des morceaux qui ont accompagné l'accession à l'indépendance en 2011 et, avant, l'Accord de paix global de 2005 qui avait mis fin à 21 ans de guerre avec le régime de Khartoum. Artiste engagé en politique, le musicien ne renonce pas pour autant à sa carrière, il continue d'œuvrer à l'unité du Soudan du Sud. À lire aussiSoudan du Sud: à Juba, un gangster repenti crée une Académie de foot pour sortir les jeunes de la rue

    Nigeria: Lagos, la mégapole nigériane des industries créatives et culturelles

    Play Episode Listen Later Oct 16, 2025 2:26


    La seconde édition du Forum Création Africa débute ce 16 octobre à Lagos. Porté désormais par MansA (la Maison des mondes africains), ce forum aspire à devenir le carrefour des nouvelles industries culturelles et créatives. De la création immersive  - XR, jeux vidéo, réalité augmentée, innovation dans la mode -  à l'édition trans-média (webtoons), en passant par la création audiovisuelle, les entreprises émergentes africaines de ces secteurs à fort potentiel vont croiser une multitude d'investisseurs, producteurs et créateurs dans la capitale économique du Nigeria. Car depuis une quinzaine d'années, Lagos se révèle être l'une des mégapoles africaines où se concentre le plus grand nombre d'entreprises culturelles, créatives et numériques au km². Pour aller plus loin : Forum Création Africa

    Soudan du Sud: à Juba, un gangster repenti crée une Académie de foot pour sortir les jeunes de la rue

    Play Episode Listen Later Oct 14, 2025 2:36


    Au Soudan du Sud, pays englué dans une grave crise politique et économique, la pauvreté progresse. Et presque mécaniquement, la criminalité des jeunes explose. À Juba, la capitale, les gangs de jeunes se multiplient. Source de subsistance pour des adolescents livrés à eux-mêmes, parfois même enfants des rues, ces gangs rendent la vie des habitants de plus en plus pénible, les vols et les agressions proliférants. Face à ce fléau, de rares initiatives se mettent en place. C'est notamment le cas dans le quartier de Sherikat, à l'est de la capitale sud-soudanaise, où un ancien gangster a créé une académie de foot, un précieux espace de bienveillance pour une jeunesse en dérive. De notre correspondante à Juba, Sur la grande esplanade du quartier de Sherikat, dans l'épaisse poussière soulevée par le vent, des centaines d'enfants et d'adolescents s'entraînent. Ils driblent, slaloment entre des cônes, disputent des mini-matchs. Les différentes équipes sont reconnaissables à la couleur de leur maillot. « Voici la Young Dream Football Academy. Nous travaillons avec les jeunes, la plupart viennent de la rue, et certains sont dans les gangs. » Alaak Akuei, 24 ans, que tout le monde appelle « Kuku », a créé cette académie de foot en 2018. C'était après avoir réussi à se sortir du gang qu'il avait rejoint en 2013, à son arrivée à Juba : « Les jeunes sont désœuvrés. C'est pour cela que beaucoup traînent dans la rue et finissent dans les gangs. Ce qu'il faut, c'est leur proposer des activités, pour qu'ils soient occupés et qu'ils ne décrochent pas de l'école. Le foot peut être très puissant pour lutter contre les gangs. » Sakaya Peter, travailleur social de l'ONG Gredo, qui travaille avec Kuku, pense aussi que le sport peut détourner les jeunes des gangs : «  Ces jeunes recherchent un sentiment d'appartenance, le fait d'être aimés. C'est la principale raison pour laquelle ils rejoignent les gangs. Dans ces groupes, ils ne se contentent pas de s'amuser, de se battre ou de voler. Ils s'aiment profondément et se soucient les uns des autres. En les réunissant régulièrement autour d'activités sportives, on peut leur offrir ce même sentiment d'avoir des personnes auprès desquelles ils peuvent trouver du soutien. » Ces jeunes, « ils sont le futur de cette nation » Lorsque Kuku a décidé de créer cette académie, il a convaincu six autres amis gangsters de le suivre. Ils sont maintenant entraîneurs pour plus de 900 apprentis footballeurs. Emmanuel Aman Malual, 21 ans, est l'un de ces gangsters devenus coaches : « Les gangs ne nous apportent rien, on peut même mourir. À l'époque, quand on était dans le gang, on dormait à la rue, on buvait et on fumait. On a fait beaucoup de choses qui sont mal. Mais c'est possible de changer. Je suis désormais une personne différente, et je ne peux pas imaginer y retourner. Tout ce que je veux, c'est aider ces enfants, car ils sont le futur de cette nation. » Sur le côté du terrain, à l'ombre d'une véranda en tôle, une vingtaine de très jeunes garçons se chamaillent, ce sont des enfants des rues que Kuku tente d'aider. Parmi eux, John, 17 ans, est à la rue depuis 2017. Il a fui la violence de sa mère alcoolique : « Je veux jouer au foot et aller à l'école, et être hébergé dans un endroit agréable, où je puisse dormir, me changer, vivre normalement. » Kuku leur a déjà créé une équipe au sein de la Young Dream Football Academy, mais il tente aussi de rétablir le contact avec leurs familles.

    Guinée: le centre culturel La Paillote, haut-lieu de la musique guinéenne, menacé de disparition

    Play Episode Listen Later Oct 13, 2025 2:51


    C'est un haut lieu de l'âge d'or de la musique guinéenne. Son nom : La Paillote. Cet ancien centre culturel est situé sous le pont du 8-novembre, à l'entrée de Kaloum, en plein cœur de Conakry. Ce repaire des vétérans de la musique guinéenne, idéal pour se produire et répéter, est en piteux état depuis plus d'un an et menacé de disparition, même si rien n'est fait. À l'ombre d'un grand manguier, ils sont neufs, assis sur des chaises en plastique, à débattre d'un standard de la musique guinéenne. Chanteurs, guitaristes, joueurs de balafon... Tous sont des musiciens réputés. Et ils sont privés depuis un peu plus d'un an de leur salle de concert. « On ne voulait pas que vous le voyez comme ça, ce n'est pas notre volonté. C'est ici que la musique guinéenne a commencé », explique Ousmane Hervé Camara.  Le chanteur du groupe mythique Keletigui et ses tambourounis nous guide dans ce qu'il reste de La Paillote, une structure en béton à ciel ouvert : « La Paillote, c'est notre nid, c'est notre bled. Il y a pleins de musiciens tout le temps qui sont là. On n'a pas d'autres endroits que celui-ci pour les anciens, les grands musiciens guinéens, c'est notre repaire. » Un repaire bien amoché. Sauvé in extremis des pelleteuses en août 2025, le bâtiment, désossé et sans toit, est inutilisable. Depuis un an, les musiciens ont donc dû se rapatrier dans un grand container de chantier mis à disposition par le ministère de la Culture de Guinée. Ce jour-là, c'est le groupe Émergence culturelle en Guinée forestière qui répète, comme tous les vendredis. Joseph Faranimino, surnommé Petit Jo, en est le chanteur. « Nous sommes dans des mauvaises conditions. Nous étions là, nous faisions nos répétitions au sein de la salle de La Paillotte. Tout se passait très bien. Mais actuellement, vous voyez comme c'est cassé. Aujourd'hui même, des gens sont venus mesurer, réparer », confie-t-il, inquiet. En août, c'est un autre monument de la nuit de Conakry qui a été rasé : le Bar-Dancing, voisin de La Paillote. Il y a deux ans, en janvier 2023, c'étaient les habitations des musiciens des orchestres nationaux guinéens qui ont été détruites. Lamine, doyen du groupe et percussionniste titulaire du mythique Bembeya Jazz, est dépité, mais veut croire à leur salut : « C'est dégueulasse, on n'a pas la force de s'opposer au gouvernement. On a toujours travaillé avec l'État. Nous tendons la main à notre gouvernement. La Paillote fait partie de ces choses qui nous permettent de travailler. » Il y a un an, l'espoir est venu du ministre de la Culture, Moussa Moïse Sylla, avec sa promesse de restaurer La Paillotte. Annoncés pour octobre, les travaux de restauration devraient commencer dans les prochains jours, espèrent les artistes, ce que confirme le ministère de la Culture. À lire aussiLe Guinéen Kaabi Kouyaté présente «Tribute to Kandia» en hommage à son père Sory Kandia Kouyaté

    Congo-Brazzaville: de moins en moins de mariages coutumiers célébrés à domicile

    Play Episode Listen Later Oct 12, 2025 2:13


    Au Congo-Brazzaville, le mariage coutumier n'est plus tout à fait ce qu'il était. Jadis célébré au domicile du père de la mariée, il se déroule désormais à Brazzaville, dans des salles louées spécialement ou dans les cours de certaines mairies. Une transformation qui n'est pas bien vue par tout le monde. Les parents de la mariée sont assis sur la droite et ceux du mari à gauche. La famille a loué cet espace situé derrière le CEG de la Liberté, dans le sixième arrondissement de Brazzaville, spécialement pour le mariage. L'ambiance a atteint son plus haut niveau quand la future épouse a fait son entrée en compagnie de jeunes danseuses, habillées en pagnes. William est loin d'apprécier cette tendance à la location de salles pour les mariages traditionnels au Congo-Brazzaville : « Les raisons sont très négatives, parce que là, nous perdons nos repères habituels, selon nos traditions, nos coutumes. Il y a beaucoup d'influence au niveau de la religion. Du coup, les coutumes commencent à perdre leur valeur. Nous déplorons ce comportement. Nous sommes des Bantous. » L'exiguïté des parcelles parentales et les difficultés liées aux voies d'accès sont d'autres raisons avancées. Mais elles sont loin de convaincre Julia, jeune femme de 29 ans. Pour elle, aucun lieu ne bénit plus le mariage que la maison des parents. « Personnellement, je ne soutiens pas trop cet avis d'aller se faire doter dans une salle louée, parce qu'aller se marier chez son père est une grande bénédiction. Donc, aller dans une salle de fête, peut-être pour le m'as-tu-vu, ça ne fait pas beau, selon moi », argumente-t-elle. La location d'une salle, un « surcoût important pour les mariés » Animateur de cérémonies coutumières, Sylver Bourangon, estime, lui, que la location de ces lieux se fait à des prix excessifs et représente un surcoût trop important pour les mariés : « Ces espaces ne sont pas nos villages, nos maisons, nos adresses personnelles. Ce sont des endroits en location. Étant des endroits en location, cela donne un coût de surplus sur la gibecière ou la bourse qu'a préparée le futur marié. L'espace que vous louez peut atteindre 300 000 francs CFA, soit 450 euros. Il peut y en avoir à 250 000 francs CFA, soit 381 euros par jour. On vous limite parfois des heures, parce qu'après vous, il y aurait d'autres activités qui vont s'y dérouler. » Selon le code la famille congolaise, le coût de la dot est fixé à 50 000 francs CFA, soit l'équivalent de 76 euros. Mais, d'après plusieurs témoignages concordants, les beaux-parents demandent largement plus que ce montant. À lire aussiCongo-Brazzaville: l'explosion du prix de la dot

    Côte d'Ivoire: la pollution du N'Zi, source d'inquiétude pour les riverains

    Play Episode Listen Later Oct 11, 2025 2:25


    En Côte d'Ivoire, 80 % des cours d'eaux, des lacs et des lagunes du pays seraient contaminées, en raison, entre autres, des déchets plastiques, de l'agriculture incontrôlée, ou encore de l'orpaillage. Reportage à Dimbokro, où l'état du N'Zi, l'une des plus importantes rivières du pays, suscite l'inquiétude depuis plusieurs années. De notre envoyé spécial à Dimbokro, Le soleil se lève sur le N'Zi. Une demi-douzaine de pêcheurs vident les nasses installées dans le méandre de la rivière. Matthieu sort de sa pirogue, la prise est décevante. Quelques silures frétillent dans le sac plastique au fond de son embarcation. « C'est devenu trop sale, ces temps-ci, il n'y a pas de poisson », regrette-t-il. Autrefois jugé limpide par les villageois alentours, le N'Zi a désormais la couleur de l'argile, surtout pendant la saison sèche. Et le poisson se fait plus rare. « C'est ce qu'on prend pour nourrir notre famille, quand c'est comme ça, ça ne nous arrange pas », ajoute Matthieu.  Pour les pêcheurs comme Richard, les responsables sont connus. « C'est à cause des orpailleurs, les gens qui extraient de l'or, donc quand on vient, on ne trouve rien », affirme-t-il. D'après les riverains, les chercheurs d'or ratissent le lit du N'Zi à l'aide de dragues. Des monticules de graviers témoignent de leur passage. En contrebas du village de Kongossou, la berge est creusée. Loya ne veut plus nager dans la rivière. « Avant ici, on appelait ici la plage, mais aujourd'hui c'est plus la peine. Les gens des dragues ont gâté le N'Zi, ils ont fait leurs forages ici, se désole-t-il. C'est le gravier qu'ils ont sorti qui est là, c'est pour forer l'or. » Il y a la dégradation visible. L'eau boueuse est 200 fois plus trouble que la norme de limpidité. La société Sodeci la nettoie avec un floculant avant de pouvoir la distribuer vers Dimbokro. Mais il y a aussi une pollution invisible. Ces dernières années, des études scientifiques ont décelé entre autres des restes de cadmium et de mercure dans l'eau tout au long du N'Zi. Le mercure est un métal notamment utilisé pour l'amalgamation de l'or. La concentration de ces métaux lourds fluctue en fonction de la saison et du niveau de la rivière. Les dernières études en date montrent des niveaux inférieurs aux seuils de dangerosité établis par l'Organisation mondiale de la santé, mais leurs auteurs appellent à la vigilance. À lire aussiLa Côte d'Ivoire adhère à la convention des Nations unies sur l'eau Face à la pollution, les agents du ministère des Eaux et Forêts déguerpissent fréquemment les orpailleurs proches du N'Zi. Mais ce n'est pas suffisant pour le professeur Bernard Yapo, le patron du Ciapol, le centre ivoirien antipollution : « On arrête certains mais pas tout le monde, et le phénomène continue de s'amplifier. Mais il faut savoir que les populations elles-mêmes participent à ces activités d'orpaillage. Il faut vraiment impliquer les populations qui sont sur les cours d'eaux, c'est à elles de s'impliquer véritablement et de refuser que ce genre d'activités illégales s'implantent dans leur zone. » Pour Bernard Yapo, l'utilisation mal contrôlée d'engrais et de pesticides, les déchets et les rejets d'eaux usées dégradent également les rivières comme le N'Zi. Outre les conséquences sanitaires et environnementales, le directeur du Ciapol s'inquiète aussi de l'impact économique de la pollution des cours d'eau sur l'industrie. Une préoccupation qui contraste avec l'insouciance des écoliers de Dimbokro. Chaque après-midi, ils continuent de plonger tête la première malgré l'état notoirement connu de la rivière.« L'eau, elle est très sale. Très, très sale même ! », s'exclament-ils. Et quand on leur demande pourquoi ils continuent à se baigner dedans, ils répondent : « On est habitués à ça en fait, on est habitués à ça quoi. » À lire aussiCôte d'Ivoire: près de 185 cas de contamination liés à la pollution d'une mine d'or

    Côte d'Ivoire: au lycée public de Bocanda, les défis de l'éducation secondaire en milieu rural

    Play Episode Listen Later Oct 10, 2025 2:16


    Elle est l'une des priorités du gouvernement de Côte d'Ivoire : l'éducation. Dans un pays où plus de 40% de la population a moins de 18 ans, elle est en tout cas un enjeu de développement. Dans leur bilan des 15 dernières années, les autorités ivoiriennes mettent par exemple en avant la construction de plus de 600 nouveaux lycées et collèges publics, ainsi que des collèges de proximité. Les défis restent nombreux dans l'intérieur du pays, hors d'Abidjan, où les statistiques révèlent un taux de réussite au bac inférieur à 35% des inscrits à l'examen. Illustration au lycée moderne de Bocanda, dans une zone rurale du centre-est de la Côte d'Ivoire. De notre envoyé spécial à Bocanda,  Chaque matin, une marée humaine déferle sur la route. Uniformes kakis, robes bleues et blanches, des centaines d'ados marchent jusqu'au lycée de Bocanda. Mais pour cette rentrée scolaire, cet élève de terminale ne traîne plus les pieds : « L'année passée, les bâtiments étaient endommagés, mais cette année, on constate un nouveau changement au niveau des bâtiments, des salles de classe, la cour du lycée même, ça nous plaît. » Car pendant les vacances, le lycée a été réhabilité, une première depuis sa création en 1978. Les classes sentent la peinture fraîche, les tables-bancs sont neuves, tout comme les tableaux. « Quand c'est beau, les enfants sont heureux de venir à l'école, ils sont heureux d'être là ! », se réjouit le proviseur, Doulaye Silué. Il supervise près de 3 500 élèves. Des chantiers, ce chef d'établissement en a d'autres dans le deuxième plus grand lycée de la région du N'Zi. Des défis persistants Il y a les classes très chargées : « Les sixièmes sont les plus nombreux, en moyenne, on peut avoir 60 à 65 élèves. » Il y a la pauvreté des familles : « La plupart de nos enfants viennent des villages environnants. Les parents n'ont pas les moyens comme ailleurs. » Et le manque de profs : « Les matières scientifiques, y a eu un manque. On ne peut pas laisser les enfants sans enseignants. » Célestin Koffi préside le Comité de gestion du lycée. Le Coges a pu recruter des vacataires cette année, mais ce parent d'élève assure avoir toujours connu des pénuries d'enseignants depuis 20 ans à Bocanda : « Quand vous passez trois ans sans avoir de professeur dans des matières spécifiques comme les mathématiques, l'anglais, même souvent le français, il va sans dire que c'est une formation au rabais qui a des conséquences à la fin du cycle : il y a beaucoup d'échec. » Un espoir fragile En 2025, le taux de réussite au baccalauréat était de 24% des inscrits – deux points de moins que la moyenne de la région du N'Zi. Des résultats en progrès relatifs. La direction régionale de l'éducation nationale entend « renforcer la pédagogie » pour améliorer les taux de réussite. Le problème est plus large pour le proviseur Doulaye Silué : « Il y a la pédagogie, et il y a l'environnement. Un enfant quand il vient à l'école, quant à midi il n'a pas eu à manger, imaginez un peu demain matin… C'est un tout pour que les enfants réussissent, qu'ils aient de bons résultats. »

    Cameroun: au nord, les femmes toujours reléguées au second plan

    Play Episode Listen Later Oct 10, 2025 2:15


    Dans le nord du pays les femmes peinent encore à imposer leurs opinions et sont souvent reléguées au second plan, une injustice pour ces petites mains qui permettent à la société de fonctionner. En marge de cette élection présidentielle, quelques voix de femmes s'élèvent... Elles sont commerçantes, mères célibataires ou sont à la tête des associations qui militent pour l'épanouissement de la femme.  Sous son hangar au marché palar Maman Didi vend les mets locaux, le lalo, folere, gubdo... Il y a quelques mois, les autorités de la ville de Maroua l'ont contraint de quitter son premier stand, pour l'installer dans ce secteur de la ville, où l'eau se fait rare. « Depuis qu'on nous a déplacé ici, au carrefour Para au marché du dimanche, nous manquons d'eau. Notamment en saison sèche où les difficultés d'accès à l'eau se multiplient, il y a qu'un seul puits ici et un particulier est en train de construire autour, si jamais il finit l'élévation, on aura plus d'eau ici, il n'y aura aucun point d'eau dans la zone. Il faut que les autorités regarde cette affaire d'eau et nous viennent en aide. Si on installe ne serait ce qu'une seule pompe, ça va nous aider », dit-elle. « Personne ne pense qu'il y a une mère célibataire quelque part qui souffre » À l'autre bout de la ville, au quartier Domayo une autre femme s'affaire à servir des clients. Longtemps au chômage, C'est grâce à une association que Nafi, à décroché ce travail de serveuse. En cette période de campagne, des militants s'arrêtent ici pour manger. La mère célibataire les écoute d'une oreille, car il n'y a pas place pour les femmes dans leur programme selon elle. « Je ne vois pas de candidat qui parle de questions de femmes. Chacun ne pense pas qu'à son intérêt personnel, surtout les hommes. Personne ne pense qu'il y a une femme quelque part qui souffre avec les enfants. Personne ne pense qu'il y a une mère célibataire quelque part qui souffre pour l'éducation des enfants, pour l'inscription des enfants à l'école, pour la nutrition des enfants. Personne ne pense à ça ».  Esther, 28 ans, dirige l'association Perles du Sahel, qui aide les femmes à trouver du travail auprès des particuliers. Son combat : rendre les femmes et les jeunes filles du nord du pays autonomes. « On aimerait outiller vraiment la jeune fille, la femme. On aimerait que peut-être notre "woman weeks" où on fait la promotion de la femme, de ses œuvres, de son bien-être et de son leadership, qu'on puisse être en mesure de mobiliser encore plus qu'on ne le fait déjà » explique-t-elle. Esther en est consciente, le combat pour l'autonomisation de la jeune fille est encore long. Il faut entre autre lutter contre la sous scolarisation, les mariages précoces et plusieurs stéréotypes culturels qui limite grandement le potentiel des jeunes fille et femmes du septentrion.

    Biennale Euro-Africa à Montpellier: Bella Bah, un artiste qui représente son parcours de migrant [2/2]

    Play Episode Listen Later Oct 8, 2025 2:23


    La biennale Euro-Africa bat son plein du 6 au 12 octobre dans tous les recoins de Montpellier, ville dans le sud de la France, avec 130 événements dans de grandes institutions aux lieux les plus cachés de la ville. Restanque, nouveau tiers lieu culturel et artistique, accueille l'exposition de Bella Bah, artiste guinéen qui est arrivé en France par la route migratoire alors qu'il n'était pas majeur. Huit ans plus tard, il expose ses peintures et sérigraphies colorées toute la semaine.  À lire aussiBiennale Euro-Africa: l'exposition «Mix and Match», quand le textile devient langage [1/2]

    Biennale Euro-Africa: l'exposition «Mix and Match», quand le textile devient langage [1/2]

    Play Episode Listen Later Oct 7, 2025 2:21


    La biennale Euro-Africa de Montpellier, ce sont 130 événements : danse, musique, spectacles vivants, conférences littéraires, cinéma, sport, rendez-vous d'entreprises, mais ce sont aussi dix expositions. À la Halle Tropisme, c'est la Fondation béninoise Zinsou qui présente 25 artistes et une soixantaine d'œuvres de tout le continent africain dans l'exposition « Mix and Match ». Le fil directeur : le textile sous toutes ses formes. Reportage lors des derniers réglages avant le vernissage de l'exposition. Pour aller plus loin :  L'exposition «Mix and match par Fondation Zinsou   À lire aussiMarie-Cécile Zinsou, pionnière de l'art contemporain au Bénin

    Afrique du Sud : des archives étonnantes du sport non racial sous l'apartheid

    Play Episode Listen Later Oct 6, 2025 2:19


    Retour sur un pan assez peu connu de l'histoire de la lutte contre l'apartheid : le combat pour développer le sport non ségrégué.  Un mouvement de boycott sportif avait vu le jour, afin d'isoler Pretoria au niveau international et la faire exclure des organisations mondiales, mais à l'intérieur du pays, des clubs et des fédérations se sont aussi battus pour créer tout un écosystème sportif non racial parallèle, et un fonds tente de préserver cette histoire. De notre correspondante à Johannesburg,  Les archives au sous-sol de l'université de Wits sont un vrai dédale, mais Ajit Gandabhai sait exactement où il se dirige : « Il y a une multitude de catégories, mais nous, on va vers la section sportive ». Ici se trouvent de précieuses ressources pour les historiens et les passionnés de sport. Une collection d'objets et de documents qui montrent que bien avant la fin de l'apartheid, les communautés noires, indiennes et métisses jouaient déjà au cricket, au rugby ou encore au tennis : « Là, ce sont des rapports financiers de clubs qui datent de 1973. Et ça, c'est le trophée de la compétition de cricket, seulement pour les fédérations non raciales, le vainqueur l'emportait avec lui », détaille Ajit Gandabhai. En 1964, l'Afrique du Sud est exclue des Jeux olympiques, puis six ans plus tard, de la Coupe du monde de foot. Le gouvernement prend alors des mesures cosmétiques pour présenter au monde une façade plus acceptable. Refusant toute compromission avec le régime, une organisation militante voit ainsi le jour ; la SACOS (South African Council of Sport). En plus d'orchestrer un boycott des équipes sud-africaines sur la scène internationale, des clubs et des fédérations parallèles ont été créés afin de promouvoir le sport non racial :«  Le sport est devenu un terrain de choix pour combattre l'état ségrégationniste de façon non violente. Et nous avions le slogan suivant : " Pas de sport normal dans une société anormale ". C'est encore vrai aujourd'hui ». À lire aussiAfrique du Sud: Saha, des archives militantes pour comprendre la résistance quotidienne au régime d'apartheid [1/3] Ne pas oublier  C'est pour que cette histoire ne s'oublie pas qu'un fonds d'archives a été créé, en 2014, par d'anciens militants et représentants d'organismes sportifs, dont Ajit Gandabhai : « Nous ne pouvons pas perdre la mémoire de ces gens qui ont sacrifié leur vie, qui ont été détenus par la police. Cette histoire doit être racontée, et pas seulement à partir de 1995 ». Comme les médias officiels, sous l'apartheid, ne couvraient pas ces compétitions, il a fallu se tourner vers des sources alternatives, des documents conservés par d'anciens joueurs ou passionnés. Et selon le secrétaire général du projet, Michael Kahn, il y a encore du travail : « Plusieurs sections ne sont pas encore bien documentées. Et en particulier en ce qui concerne le sport féminin, il y a des manques. Les femmes noires pratiquaient aussi du sport ! Dans des conditions vraiment difficiles ». Les responsables du fonds continuent leurs recherches, pour conserver ce pan d'histoire dans une société où l'accès au sport est encore loin d'être égalitaire entre les communautés. À lire aussi30 ans plus tard, l'ombre des crimes de l'apartheid continue de planer sur l'Afrique du Sud

    Centrafrique: l'importance du dépistage dans un pays où le cancer du sein est méconnu

    Play Episode Listen Later Oct 5, 2025 2:25


    En Centrafricaine, le cancer du sein reste largement méconnu. Pourtant, de nombreuses femmes en souffrent sans en avoir conscience, ne découvrant la maladie qu'à un stade critique, souvent trop tard pour une prise en charge efficace. Ces dernières années, le cancer du sein a causé de nombreux décès parmi les femmes du pays. C'est dans ce contexte alarmant que Mylène Limbio, elle-même ancienne patiente atteinte de cette maladie, a décidé de fonder l'association Ô Fil des Femmes. Son objectif pour lutter concrètement contre cette maladie : sensibiliser la population, informer les femmes sur les risques, les symptômes et l'importance du dépistage précoce. La chambre 12 de l'hôpital général de Bangui est baignée d'une lumière douce. Docteur Clémence Sylvie Djabanga, cheffe du service de cancérologie, s'approche du lit où repose une patiente récemment diagnostiquée. Tout comme les autres malades, son état est critique.   « Tout revient à la consultation tardive. Quand elles viennent, la maladie est déjà avancée. Le cancer envahit les poumons, envahit le foie et les os. Donc, il y a déjà des complications. Quand c'est comme ça, ce n'est plus la guérison qu'on recherche, mais un meilleur mode de vie pour améliorer le confort de vie de la patiente, pour attendre son dernier jour. C'est rare que je suive une femme pendant deux, trois ans. Elles succombent toujours avant », commente le docteur.  Assise dans un fauteuil en rotin, à l'intérieur de son restaurant, Mylène Limbio a eu la vie sauve grâce à une auto-palpation. Elle explique : « J'ai ressenti des boules et j'ai commencé à avoir des doutes. J'ai aussitôt fait des examens et on m'a diagnostiqué un cancer du sein. J'ai eu ma première opération le 20 juillet 2020. Quand on subit une ablation, oui, c'est un choc, mais c'était nécessaire. Quand on a un moral d'acier, on se bat pour avancer, être accompagnée, avoir un but. C'est ce qui m'a permis d'être là aujourd'hui devant vous. » Chaque semaine, l'hôpital général de Bangui reçoit au moins deux à trois cas diagnostiqués positifs au cancer du sein, parmi lesquels des hommes. Pour prévenir cette maladie qui gagne du terrain, Mylène Limbio a créé en 2021 une association baptisée : Ô fil des femmes. À lire aussiEn Centrafrique, une association tente de sensibiliser sur le cancer du sein « Le cancer du sein est un sujet assez tabou en Centrafrique. On n'en parlait pas beaucoup. Le cancer, c'est une maladie qui peut se soigner si elle est prise en charge à temps. Il faut en parler. Continuer à sensibiliser. Cette année, nous avons travaillé avec beaucoup de bénévoles, de femmes dynamiques et disponibles. Nous allons nous battre pour offrir des chimiothérapies et aider le plus possible nos sœurs », affirme Mylène Limbio.  Diagnostiquée positive en 2022, Raymonde Sadetoua, continue les traitements avec beaucoup de difficultés. « Le médecin m'a dit que je dois suivre le traitement jusqu'à cinq ans. C'est difficile par rapport au coût des médicaments. Les médicaments sont très chers. À l'hôpital, la chimiothérapie coûte 154 000 francs CFA tous les 21 jours. C'est avec les efforts de mes parents et par la grâce de Dieu que je m'en sors petit à petit. » En Centrafrique, les médicaments contre le cancer du sein sont rares. En raison de l'absence d'infrastructures adaptées, certains malades vont suivre un traitement à l'étranger, sur fonds propres. Restés au pays, de nombreux patients en meurent, faute de moyens suffisants. À lire aussiOctobre rose : prise en charge du cancer du sein

    L'imprimerie nationale Patrice Lumumba, un acteur oublié de la Guinée indépendante

    Play Episode Listen Later Oct 4, 2025 2:06


    La Guinée a fêté cette semaine l'anniversaire de son indépendance. L'occasion pour nous d'un gros plan sur l'un des joyaux de la Première République de Guinée, l'imprimerie nationale Patrice Lumumba. Cette imprimerie, créée fin 1961, était située à Coléah dans la commune de Matam, à Conakry. Nommée en hommage à Patrice Emery Lumumba, le Premier ministre congolais assassiné en 1961, et figure emblématique du panafricanisme, elle était sans équivalent dans la sous-région et représentait pour la Guinée, un symbole de souveraineté nationale. Mais ce géant est aujourd'hui tombé. De notre correspondant à Conakry, C'est avec l'assistance technique d'experts est-allemands que l'Imprimerie a été construite. Elle a permis à la Guinée d'imprimer de nombreuses revues, des livres, mais aussi de produire des cahiers et des documents administratifs officiels. Alpha Cissoko, un ingénieur en imprimerie passionné par l'histoire de ce lieu, est nostalgique : « Cette imprimerie a représenté la fierté de la Guinée. Le souci majeur des dirigeants d'alors, c'était de sortir la Guinée de l'obscurantisme et de donner la possibilité à tout Guinéen, de se former. Il y a eu une campagne d'alphabétisation. Au cours de cette campagne, certains manuels ont été rédigés dans toutes les langues nationales parlées en Guinée. Ces brochures-là et ces livres ont été distribués dans tout le pays et les jeunes élèves apprenaient ça à l'école primaire et commençaient avec le français, surement au collège ». L'Imprimerie Patrice Lumumba était un véritable lieu de vie, avec notamment un réfectoire qui pouvait devenir salle de répétition ou de spectacle. Antoine Sylla, employé de l'imprimerie, se souvient : « C'était la grande salle de spectacle de la commune de Matam, où l'ensemble instrumental faisait ses répétitions et le spectacle de la commune ». Production emblématique de l'imprimerie : les tomes regroupant les discours et les conférences du premier président, Ahmed Sékou Touré. La fabrication de certains tomes a été soumise à une discipline particulière, notamment le « Livre blanc » qui rassemblait les « confessions » enregistrées après l'attaque du 22 novembre 1970.  Antoine Sylla raconte : « Pendant l'impression de ce tome, personne ne sortait jusqu'à la fin de cette impression, pour ne pas qu'il y ait de fuites du "Livre blanc". Le président Ahmed Sékou Touré, lui-même, venait à partir de minuit pour les corrections et restait jusqu'à cinq heures du matin. » Le site de cette imprimerie à Coléah a d'abord été privatisé au milieu des années 1990, puis a réintégré en 2022 le patrimoine de l'État. Il est fermé et désormais à l'abandon. À lire aussiGuinée: l'imprimerie «Patrice Lumumba», trésor oublié de la Première République

    RDC: coup de projecteur sur la 4e édition du Festival Pianos de Kinshasa

    Play Episode Listen Later Oct 3, 2025 2:29


    Du 27 septembre au 9 octobre se déroule la quatrième édition du Festival Pianos de Kinshasa. Il met en lumière des compositeurs congolais et internationaux et se donne surtout un objectif : rendre accessibles les concerts de piano à tous les Kinois. Reportage de notre correspondante à Kinshasa, Dans ce bar du centre de Kinshasa, les notes de piano se mélangent au brouhaha de la ville et aux klaxons des voitures. Un concert est organisé dans la rue. Divin Kaskayenga, producteur, confie : « Nous sommes sur la route 24. La 24, c'est une artère animée. Nous avons l'habitude d'être remplis de chaises et de tables pour boire, mais là, au milieu de toutes ces tables et chaises, il y a un piano, et c'est une chose à laquelle les gens n'ont pas habitué de voir. » Au clavier, il y a David Clément, pianiste professionnel. Son répertoire va au-delà de la musique classique pour proposer des rythmes rumba : « Le piano a la capacité de faire tout. C'est un instrument de musique qui n'est pas limité, il peut faire toutes sortes de musique. Ici, la concentration, c'est très difficile parce qu'il y a toute l'ambiance de Kinshasa. Tu joues et puis, tu entends les gens siffler, tu entends les gens crier, tu entends les gens parler... C'est pas du tout facile pour être vraiment concentré. » Casser les codes Quand viennent les premières compositions congolaises, Cherubin ne peut s'empêcher de bondir de sa chaise : « Ça, c'est du mutuashi, c'est ''Mamu nationale''. Tshala Muana, une grande dame, ça nous plaît ! Voilà ! » Il poursuit : « C'est ma toute première fois, de voir un piano comme ça, parce que, d'habitude, nous voyons des jeunes avec la guitare. Mais avec cette initiative, nous avons vu les gens en train de jouer avec les pianos. » Faire découvrir un instrument perçu comme élitiste, c'est l'objectif du Festival Pianos Kinshasa. Olga Piton, l'une des organisatrices de l'événement, explique : « Ça reste un instrument que peut-être on a l'habitude de voir dans des situations plus formelles. Mais ici, ça devient informel. Et pour nous, c'était très important de démystifier un petit peu l'instrument en soi. L'intérêt, c'est aussi de mettre tout le monde ensemble et voir comment, à Kinshasa, tout peut se fusionner. Des ambassadeurs qui viennent à côté des enfants qui vendent des cigarettes... Ça réfléchit aussi complètement l'âme de Kinshasa. » Une fusion réussie pour ce festival qui déborde d'énergie.

    Rentrée scolaire au Tchad: un programme pour mieux accompagner les enfants des écoles coraniques

    Play Episode Listen Later Sep 30, 2025 2:23


    Ce mercredi 1er octobre, c'est la rentrée scolaire pour les écoliers, collégiens, lycéens et étudiants au Tchad. Mais certains n'ont pas eu droit aux vacances : ce sont les élèves des écoles coraniques, appelés Mouhadjirines dans le pays. Souvent, ils viennent de très loin, quittent leur famille et rejoignent une école coranique. La plupart ont recours à la mendicité pour payer l'accès à cette école. Pour offrir un meilleur encadrement et une meilleure intégration à ces Mouhadjirines, ainsi que des perspectives, le Secours islamique France (SIF) a lancé le programme pilote « Tawde ». Il est présent dans l'ouest du pays, dans la région du lac, mais aussi à Ndjamena, dans sept écoles coraniques.  C'est l'heure de la pause pour Yacoub et ses camarades. Il n'a que 15 ans, mais il étudie dans cette école coranique depuis ses deux ans : « Tôt le matin, on a le cours coranique, et vers 8 heures, on passe au cours séculier. Mais je suis encore obligé de mendier. Ça me permet de me nourrir, sinon je ne trouve pas toujours de quoi manger. Et tous les vendredis, je verse 100 FCFA à l'école coranique. » Plus tard, Yacoub rêve de trouver un travail. Il aimerait intégrer un bureau de l'administration tchadienne. Pour les accompagner dans leurs projets, plusieurs professeurs du SIF enseignent le français, par exemple, mais des activités créatives et ludiques sont aussi prévues. Elles sont assurées par Djibril Hissène Mouhammad, l'animateur communautaire : « Les enfants aussi ont besoin de temps pour s'amuser. On a tous été à l'école. Et on a été à l'école coranique. Moi, j'ai fait la mendicité pendant trois ans, avant de regagner l'école. Et aujourd'hui, je travaille. Et il y a tant de milliers d'exemples dans le pays. » À écouter aussiTchad: comment améliorer la prise en charge des enfants des écoles coraniques? Tous les jours, au moment des cours séculiers, des repas et des encas sont distribués : « On a mis des intrants alimentaires à leur disposition pour qu'ils aient de quoi se nourrir. Au lieu de mendier, ils apprennent ici et, en même temps, ils ont de quoi à manger. » Impliquer la communauté pour mieux intégrer les enfants Autre élément pris en compte par le SIF : l'intégration au sein de la communauté du quartier. Lassine Doumbia, coordinateur programme au sein du SIF : « Le programme a mis en place pas mal de petits comités communautaires. Ouvrir la gestion de l'école à la communauté d'accueil facilite l'acceptation de l'école et l'acceptation des enfants. Dans la majeure partie des cas, l'exclusion de ces enfants est liée au fait que les gens ne comprennent pas trop leur mode de vie pour se nourrir – généralement, la mendicité. Tout ceci, on y travaille par des sensibilisations qu'on donne au prorata à des personnes qui sont de la communauté. » Le programme « Tawde » est encore un projet pilote, mais déjà plus 2 000 enfants en bénéficient. Objectif : réussir à intégrer les écoles coraniques dans le système éducatif formel. À écouter aussiLe Tchad face au fléau des enfants mendiants

    Le lourd fardeau des femmes «wowo» en RDC, entre violence et précarité [2/2]

    Play Episode Listen Later Sep 29, 2025 2:14


    En RDC, à la frontière avec la Zambie, environ 700 femmes de Kasumbalesa assurent le transport manuel des marchandises des petits commerçants. On les appelle les femmes « wowo ». Si leur travail est vital pour l'économie locale, il se fait dans la précarité et sous la menace permanente de violences. De notre correspondante de retour de Kasumbalesa, Dès le matin, les femmes « wowo », chargées de sacs de farine, de packs de biscuits, de lots de boissons sucrées pesant parfois de plus de 30 kilos, sont dans le couloir piétonnier de Kasumbalesa et dans la zone neutre. Un sac sur sa tête, Anto vient de braver les différentes barrières du couloir : « Il y a trois barrières. À la sortie de la Zambie, je paye 500 francs congolais. Au couloir, je donne 1 000 francs congolais et un peu plus loin, je débourse encore 1 000 francs congolais. Une fois en dehors du couloir, d'autres agents des services publics nous attendent. Des fois, je négocie avec eux et ils me laissent passer. » Des attouchements et des humiliations Au-delà de ces tracasseries, certaines femmes subissent des violences verbales de la part des agents publics. Jacquie, jeune femme veuve, rencontrée à la sortie du couloir piétonnier, témoigne : « On m'insulte souvent. Ces agents me disent. Pourquoi es-tu ici ? Où est ton mari ? Est-il incapable de te nourrir ? Bon, je n'en ai rien à faire, on supporte parce qu'ils ne connaissent pas ma situation. » D'autres subissent même des agressions sexuelles, déclare Régine Mbuyi, une autre femme « wowo » : « Lorsqu'un agent m'interpelle parfois, il me demande des faveurs sexuelles pour laisser passer la marchandise. Il arrive également que pendant la fouille, ces agents se permettent des attouchements jusque sur les parties intimes. C'est humiliant… » Les femmes « wowo » de Kasumbalesa n'ont aucune protection sociale ni de recours légal. L'Association des femmes actives dans le commerce transfrontalier (AFACT) dénonce une situation alarmante. Solange Masengo est la présidente : « Dans la zone de la Comesa, le Marché commun de l'Afrique orientale et australe, nous voyons les femmes assurer le transport transfrontalier sans problème. Mais ici, chez nous, ces femmes discriminées, elles sont chassées. Il y a des filles qui ont été humiliées et déshabillées, et nous avons des preuves. On a aussi des femmes qui ont été fouettées publiquement. Lorsque l'association veut intervenir, on nous demande de laisser la situation comme ça. Pourquoi la femme ne peut pas faire un travail de son choix ? » Pour l'heure, nous n'avons pas réussi à avoir la réaction du maire de Kasumbalesa et même du sous-directeur de la douane. Les femmes « wowo » quant à elles, continuent de porter le commerce frontalier sur leurs épaules malgré la fatigue et les humiliations. À lire aussiFemmes «wowo», ces forces invisibles du commerce transfrontalier entre la RDC et la Zambie [1/2]

    Femmes «wowo», ces forces invisibles du commerce transfrontalier entre la RDC et la Zambie [1/2]

    Play Episode Listen Later Sep 28, 2025 2:26


    À Kasumbalesa, à la frontière entre la Zambie et la RDC, se vit un trafic parallèle, loin des grands camions et des formalités douanières. Chaque jour, plusieurs centaines de femmes congolaises transportent sur leur tête, ou leur dos, des marchandises pour traverser la frontière Zambienne. On appelle ces femmes « wowo », en référence aux camions chinois de la même marque. Notre correspondante a suivi quelques-unes de ces femmes. De notre correspondante de retour de Kasumbalesa, À Kasumbalesa, deuxième poste frontalier plus important de la RDC, elles sont là, à quelques mètres des files interminables de camions : des femmes portant de lourdes charges sur la tête et le dos, qui franchissent le couloir piétonnier. Ce sont les femmes « wowo » raconte avec sourire Alphonsine, l'une d'elles : « Je suis en mesure de faire passer la charge de tout un camion. Nous sommes les mamans "wowo", c'est l'image des camions qui transportent des charges importantes. Nous travaillons en équipe. S'il faut décharger le camion, nous le faisons et puis nous transportons la cargaison jusqu'à la destination au Congo, selon les instructions du propriétaire. » Selon l'association des femmes actives dans le commerce transfrontalier, elles sont près de sept cents, tous âges confondus, qui exercent ce métier. Les petits commerçants, eux, ne s'affichent pas dès qu'ils confient la marchandise aux femmes « wowo ». Témoignage de Régine Mbuyi, une autre transporteuse : « Le petit commerçant vient acheter toute sorte d'articles, du jus, de la farine de froment, de l'huile végétale… Il me sollicite pour faire traverser ces produits. S'il est de bonne foi, il me donne aussi l'argent pour payer la douane et d'autres services publics. Mais s'il n'a rien, je dois me débrouiller. » À la sortie de la frontière côté congolais, quatre femmes arrivent chacune avec cinq packs de boisson sucrée d'environ 30 kg sur sa tête. Coût de transport, 1 500 francs congolais par course, soit moins d'un dollar. La recette journalière de chacune est de près de 5 dollars. Ces femmes doivent transporter environ une tonne. Pour y arriver, c'est la course contre-la-montre, explique Keren pendant qu'elle range les packs : « Chacune de nous a une quantité qu'elle doit transporter. Moi, j'ai 25 packs. Le commerçant a acheté 100, ce n'est pas beaucoup. Bon, on y va pour la dernière course. » Les services de douanes, quant à eux, ne voient pas d'un bon œil cette activité des femmes, car elle favoriserait un manque à gagner quotidien de près de 3 000 dollars. Pour Malaxe Luhanga, président des petits transporteurs transfrontaliers, il faut formaliser cette activité : « On peut appliquer le système de groupage selon la catégorie des marchandises et qu'elles soient taxées officiellement. On peut adopter ce système qui est admis par les pays membres du Comesa pour faciliter les transactions et la taxation par les services publics. » En attendant, des centaines des femmes « wowo » de Kasumbalesa poursuivent leur activité de manière informelle. À lire aussiLa frontière entre la Zambie et la RDC rouvre après plusieurs jours de fermetures

    Massacre du 28-Septembre en Guinée: des victimes toujours sous le choc après la grâce de Dadis Camara

    Play Episode Listen Later Sep 27, 2025 2:15


    En Guinée, plus d'un an après le procès des accusés du massacre du 28 septembre 2009, et ce verdict historique qui a vu la condamnation de huit personnes, dont l'ex-président Moussa Dadis Camara à vingt ans de prison pour crimes contre l'humanité, les familles de victimes réclament d'urgence l'ouverture du procès en appel. Pour l'heure, seuls 334 sur plus de 700 victimes recensées ont été indemnisés, tandis que le principal accusé Dadis Camara a bénéficié d'une grâce et a quitté le pays. Notre correspondante s'est rendue dans les locaux de l'association des Victimes Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009, à Conakry. De notre correspondante en Guinée,  Plongée dans le jugement du 31 juillet 2024, un document de près de trois cents pages. Asmaou Diallo, qui dirige l'Association des Victimes Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009, est perplexe. Sur les près de 800 victimes recensées, et qui se sont portées partie civile au procès, moins de la moitié a obtenu un droit à réparation.« Je vois les victimes qui ne sont pas prises en compte m'appeler à longueur de journée, me dire : "Qu'est-ce qu'on va faire ?". Je réponds d'abord, moi-même, mon fils n'a pas été pris en compte dans le processus. On se demande : est-ce que maintenant, après les 334, est-ce qu'il y aura une continuité pour les victimes qui ne sont pas prises en compte ? », réagit Asmaou Diallo. Asmaou, qui a perdu son fils en ce jour terrible du 28 septembre 2009, comme les autres familles de victimes, a donc interjeté appel, pour que la justice réexamine les cas des victimes oubliées. Mais plus d'un an après, rien, elle s'inquiète, d'autant plus depuis la grâce accordée en mars 2025 au principal coupable, l'ex-président Moussa Dadis Camara. À lire aussiGuinée: deux mois après la grâce de Moussa Dadis Camara, une mission de la CPI à Conakry « J'ai été dévastée par la nouvelle de sa grâce au point de tomber malade » Aïcha qui fait partie des 109 femmes reconnues victimes de viol, et qui a obtenu réparation de la part de la justice guinéenne, se souvient exactement de ce qu'elle a ressenti le 28 mars 2025, jour de la libération de Dadis : « J'ai été dévastée par la nouvelle de sa grâce au point de tomber malade, et depuis je ne me sens plus en sécurité, car une personne m'a appelée de Kankan et m'a dit qu'elle m'avait reconnue sur une photo. Elle m'a menacée, depuis je suis terrifiée par la libération de Dadis Camara. » Souleyman, blessé le 28 septembre 2009, est également membre de l'association qui vient en aide aux victimes, confirme ce sentiment d'une justice restée à mi-chemin : « La justice avait commencé d'une bonne manière, jusqu'à la condamnation, tout le monde était content. La libération de Dadis Camara, a été un coup de massue qui est tombée comme un couperet sur la tête des victimes. Cela a vraiment changé le visage de la justice. Les autres victimes, qui attendent l'appel pour être indemnisées, maintenant, on ne sait pas s'il y aura même cet appel avec la libération du principal auteur. » Du côté du ministère de la Justice, on se veut rassurant. Un procès connexe après l'inculpation de quatre nouveaux accusés l'année dernière doit s'ouvrir prochainement. Aucune date n'a pour l'heure été rendue publique. À lire aussiProcès du massacre du 28 septembre 2009 en Guinée: vérités judiciaires et zones d'ombres

    La BD ivoirienne s'expose et lance un magazine en auto-édition pour gagner en visibilité

    Play Episode Listen Later Sep 26, 2025 2:41


    Depuis le 18 septembre, de jeunes auteurs de bande dessinée, illustrateurs et animateurs présentent leurs œuvres à l'Institut français d'Abidjan. Une initiative du collectif nouveau-né, Lumia, l'Union des Métiers de l'Illustration et de l'Animation. Et une vitrine nécessaire, dans un secteur encore balbutiant, où les opportunités d'édition manquent.  Reportage de notre correspondante à Abidjan, Les expositions ne sont pas rares à Abidjan. Mais celles consacrées à la bande dessinée, beaucoup plus. Pendant un mois, une vingtaine de jeunes artistes présentent des illustrations grand format, des planches de BD et même de courts films d'animation diffusés sur des écrans. À l'initiative du projet, l'illustrateur Nandy D. Diabaté, auteur de BD et directeur artistique des studios d'animation Bouya : « Le but est de faire voir leur talent, puisqu'ils sont hyper-talentueux, et de montrer ce que les jeunes font aujourd'hui : quelles sont les tendances, quels sont les styles graphiques qui dominent ? Créer une connexion entre eux, des éditeurs, des studios d'animation, pour qu'ils comprennent que c'est ce qu'il faut là, maintenant, à la Côte d'Ivoire, ce type de création. Il ne faudrait pas qu'on soit en retard sur notre temps, parce qu'on a déjà beaucoup de retard dans ces métiers-là. En vrai, en Côte d'Ivoire, on n'en vit pas. » La Côte d'Ivoire ne compte aucune maison d'édition de bande dessinée à proprement parler, regrette l'un des exposants, Stéphane Guy Lago, illustrateur et graphiste : « Il n'y a pas une industrie de la bande dessinée ici, donc il y a beaucoup à faire. Il y a beaucoup d'appréhension à imprimer de la bande dessinée ici, à éditer de la bande dessinée. Les maisons d'édition ne maîtrisent pas assez le marché ivoirien, en fait. On a vu plusieurs œuvres éditées, sans citer de nom, qui n'ont pas eu le succès qu'elles méritaient, parce qu'il n'y avait pas la bonne stratégie. » « On veut vraiment avoir des histoires qui nous ressemblent » Pourtant, la demande locale est là, insiste Polver, un autre exposant, illustrateur et auteur de BD : « Les gens se sont mis à consommer des produits qui venaient de l'étranger, parce que si tu es fan de bande dessinée en Côte d'Ivoire, et que tu n'as pas de bandes dessinées ivoiriennes, tu vas acheter peut-être des mangas, ou des webtoons, ou des comics. Ce qu'on a compris, c'est qu'il y a bien un marché qui existe. C'est juste qu'il n'y avait pas encore de produit adapté. On aime ça, mais on n'en a pas assez. Donc c'est l'occasion d'en faire ! » Le collectif Lumia prépare justement le lancement d'un magazine en auto-édition, Case 225. Un bimensuel, qui où seront publiées uniquement des BD écrites par et pour les Ivoiriens. Bilhal Ouattara, responsable marketing aux studios Bouya, et auteur de BD lui aussi : « On veut vraiment avoir des histoires qui nous ressemblent. Je travaille beaucoup sur des histoires traditionnelles, ou des histoires qui s'inspirent du folklore ivoirien. Parce que je trouve que sur le plan culturel, on n'a pas assez de représentation. Moi, ma BD dans Case 225 va parler des Gouros et de leurs alliés. Donc, on va faire de notre mieux pour montrer aux gens qu'il y a de l'intérêt, c'est juste que les histoires et les dessins n'étaient pas adaptés. » Lumia ambitionne de publier le premier numéro de Case 225 début 2026. En attendant, l'exposition Impact Frame restera visible à l'Institut français jusqu'au 18 octobre. À lire aussiCôte d'Ivoire: le dessin de presse face aux fake news, lors du Festival Cocobulles

    Congo-Brazzaville: le blanchiment de la peau devient de plus en plus rare

    Play Episode Listen Later Sep 25, 2025 2:20


    Au Congo-Brazzaville, la mode revient à une peau sans éclaircissant. Il y a plusieurs années, les jeunes étaient tentés de se faire blanchir l'épiderme à l'aide de produits. La pratique a largement reculé ces derniers temps, à cause, notamment, des conséquences de ces produits, mais aussi parce que la tendance est à la beauté naturelle aujourd'hui. Reportage de notre correspondant à Brazzaville, Il est midi. Nous sommes devant l'école des beaux-arts de Moukoundzi Ngouaka, dans le premier arrondissement de Brazzaville. Son sac accroché au dos, Alioty, la quarantaine révolue, marche, en pensant à ce phénomène de blanchiment de la peau. Il se rappelle de ses origines. « Ce phénomène, on le constatait davantage avec les gens de la diaspora. C'est surtout ceux de la diaspora, quand ils revenaient, ils se blanchissaient la peau », témoigne-t-il. Les jeunes filles et les garçons restés au pays, à Brazzaville et dans l'intérieur du pays, ont pris le relais, en enduisant leurs visages de différents produits. Pour le sociologue Éric Aimé Kouizoulou, la pratique d'éclaircissement de la peau vient de loin : « Ce sont les effets psychologiques qu'a eus la colonisation sur les colonisés que nous sommes. On nous a poussés à penser que la peau blanche était la meilleure », affirme-t-il. Au fil du temps, les produits et autres pommades utilisés ont pourtant eu des effets néfastes : certains hommes ou certaines femmes ont déclenché des cancers de la peau ou ont vu apparaître des taches indélébiles sur leur visage. Jadis habitué de ces produits, Didier Clotaire, fonctionnaire, a préféré renoncer par précaution : « Parce que j'ai vu les conséquences. Tu peux être malade facilement. Tu peux attraper une sale maladie de la peau. Ça détruit la peau et ça pousse quelqu'un à vieillir, avec le soleil. Il y a beaucoup de conséquences. Ça n'est pas bien de faire cela. On doit rester tel qu'on est », argumente-t-il. Chimène, 25 ans, prodigue conseils et met en garde les uns et les autres : « Je leur conseille de ne pas se décaper [la peau]. Mais, s'ils se décapent, quand ils vont devenir "bizarres", ça leur regarde » lance-t-elle. Du bio pur, du mixa ou du coco pur sont autant de laits mis par les jeunes congolais, pour maintenir leur teint. Observateur de l'évolution de la beauté congolaise, Bazin Mboungou parle d'un retour à l'authenticité : « Cette fois-ci, nous remarquons que les jeunes filles et les jeunes garçons reviennent à leur peau d'origine, de naissance. La peau de leur race. C'est encourageant, le retour à l'originalité. Il n'y a pas de race au-dessus d'une autre », analyse-t-il. Cela fait au moins une dizaine d'années que l'usage des produits éclaircissants a diminué à Brazzaville. À lire aussiDépigmentation volontaire, une mode dangereuse

    Présidentielle au Cameroun: la campagne des influenceurs sur les réseaux sociaux

    Play Episode Listen Later Sep 24, 2025 2:12


    Au Cameroun, une part importante de la campagne électorale se joue désormais sur les réseaux sociaux. Des influenceurs assument publiquement leurs choix politiques pour convaincre les électeurs, certains allant jusqu'à rejoindre officiellement des équipes de campagne. Mais ce déplacement du débat vers les plateformes numériques s'accompagne d'une prolifération de « fake news ». De notre correspondant à Yaoundé, « Dans le monde numérique, je pense qu'il ne faut pas se prendre très au sérieux à la base. » Valery Ndongo est humoriste et présentateur télé bien connu. Dans son podcast, il donne la parole à des personnes qu'il rencontre dans la rue : « La plupart des questions que je pose aux gens dans la rue, c'est de savoir si, un, ils sont au courant qu'il y a une élection au Cameroun, et ensuite, est-ce qu'ils peuvent dire pour qui ils vont voter ? » Un candidat a cité son nom, Cabral Libii pour ne pas le nommer, comme étant un de ses soutiens ? « Ça, ce n'est plus un secret pour quelqu'un. Je l'ai dit, je l'ai annoncé, je l'ai publié, j'ai mis sa photo, j'ai partagé ses publications et je vais continuer à le faire. » La politique à l'heure des réseaux À quelques kilomètres de là, Yvanna Besseke, ancienne Miss Cameroun France, tient une réunion avec son équipe. L'influenceuse, qui ne se sépare jamais de son téléphone, a été choisie par Hiram Iyodi, le benjamin des candidats, comme porte-parole : « Ma génération aujourd'hui est hyper connectée, il faut pouvoir amener la politique justement là où elle est. Parce que lorsqu'on veut parler à une population, il faut pouvoir parler avec ses codes. Et aujourd'hui, la population camerounaise est composée à 75% de personnes de moins de 30 ans. » On l'interroge : fait-il des contenus qui parleraient plus facilement à cette génération Z ? « En réalité, on adapte les contenus par rapport à la plateforme. Vous verrez qu'on ne communique pas pareil sur TikTok que sur Twitter, parce que la cible n'est pas la même. Mais, effectivement, oui, il faut pouvoir s'adapter aux codes. Il y a les codes sur TikTok, il y a des musiques qui fonctionnent bien, pour pouvoir adapter ça à la politique. » Prolifération de fausses infos Cette bataille de l'attention favorise aussi la circulation de fausses informations, comme l'explique Chedjou Kamdem, expert en communication digitale : « Les contenus émotionnels, polémiques ou spectaculaires circulent plus vite, même s'ils sont faux. Ce mécanisme est exploité par ceux qui veulent manipuler en diffusant des rumeurs, en modifiant des images, des vidéos, ce qu'on appelle les "deepfake". Ou encore en créant des récits alternatifs pour influencer des électeurs. Le danger, c'est qu'une fausse information bien construite peut atteindre une audience massive avant d'être corrigée. Il est indispensable que chaque citoyen développe un réflexe critique en ligne. » Avec environ cinq millions d'utilisateurs actifs sur les réseaux sociaux, selon l'Institut national de la statistique, le Cameroun vit sa première présidentielle véritablement digitale.

    Centrafrique: Chinko, impliquer les communautés riveraines [3/3]

    Play Episode Listen Later Sep 23, 2025 2:32


    Direction la Centrafrique pour le dernier volet de notre reportage consacré à la réserve naturelle de Chinko au sud-est du pays, dans la préfecture du Mbomou. Depuis de nombreux siècles, les autochtones vivent essentiellement de l'agriculture, la chasse, la pêche, la cueillette et l'exploitation minière. Interdire à ces communautés de pratiquer leurs activités quotidiennes dans le cadre de la conservation s'avère être un combat difficile. Présente dans la localité depuis 2014 (grâce à un accord de partenariat avec le gouvernement centrafricain), l'ONG African Parks a initié plusieurs projets visant à sensibiliser, éduquer et impliquer notamment les communautés riveraines de l'aire de conservation de Chinko, dans une gestion durable. De notre correspondant de retour de Kocho, Dans les broussailles qui longent la piste d'atterrissage de la base de Chinko, quelques hyènes déambulent. À quelques jets de pierre de là, une troupe de babouins investit les arbres. Réchauffés par les premiers rayons du soleil, les plus jeunes et même les adultes se lancent dans des courses, sauts et jeux de balançoires... Mermoz Bizon, responsable de l'aménagement territorial à African Parks, monte dans un petit avion de surveillance pour aller à la rencontre des communautés : « Je suis censé travailler avec les communautés locales. Nous avons mis en place plusieurs associations pour faciliter les tâches en termes de gestion communautaire des ressources naturelles qui sont autour de l'aire de conservation de Chinko. Nous avons des activités comme Acadja, qui soutient la production durable du poisson pour la communauté locale. Nous mettons en place des ateliers avec des scieurs artisanaux pour la production du bois de manière artisanale et durable. Nous travaillons aussi avec les maraîchers et les agriculteurs dans le domaine de la transformation d'huile de palme, la saponification et beaucoup d'autres activités. » À lire aussiCentrafrique : Chinko, la renaissance de la réserve naturelle [1/3] Dans le Mbomou, une centaine d'ethnies vit autour de l'Aire de conservation de Chinko (ACC) avec une grande diversité culturelle. Adja Kalthouma, maire de la ville de Nzako, plaide en faveur des autochtones qui dépendent essentiellement de la chasse, la pêche et la cueillette : « Ces dernières années, l'équipe de Chinko a délimité la réserve naturelle, nous avions été sensibilisés sur l'importance de la conservation que nous trouvons très pertinente. Mais nous voulons aussi des retombées concrètes à Nzako. » Prendre conscience des enjeux de conservation De jour en jour, de nombreux riverains prennent conscience des enjeux de conservation. Mais d'importants défis s'imposent encore, selon Ghislain Boukar, colonel des eaux et forêts : « La transhumance transfrontalière est l'une des difficultés majeures. Nous sommes toujours confrontés à un afflux d'éleveurs venus du Soudan. De l'autre côté, nous avons aussi nos frères centrafricains qui sont des braconniers locaux qui ne cherchent pas à respecter les principes et les orientations que nous leur donnons. Nous avons également le cas des pêcheurs. Au lieu de respecter la limite de la zone des conservations, ils ont l'habitude de s'infiltrer dans le parc. Ces difficultés existent au quotidien, mais nous sommes également là pour les sensibiliser et continuer à toujours insister. » Pour une gestion durable et apaisée de Chinko, African Parks et le gouvernement centrafricain placent les autochtones au cœur de leurs actions. Plusieurs projets de développement économique ont été mis en place. Thomas Bala est président du groupement des apiculteurs du village Fadama : « Nous sommes déterminés à protéger cette réserve naturelle. Mais nous voulons aussi bénéficier des efforts de conservation. C'est comme ça que nous avons mis en place ce groupement de production du miel avec le soutien de Chinko. Nous produisons en grande quantité et on n'a plus le temps d'aller détruire les aires protégées. » À lire aussiCentrafrique : les écogardes du parc Chinko [2/3] Depuis 2022, un projet de lutte contre la déforestation a été mis en place à travers la conservation de carbone. Cette initiative a permis d'obtenir des crédits carbone achetés par des entreprises. L'argent généré est injecté d'une part à la gestion de la réserve naturelle, et l'autre part est destinée à la mise en place des programmes de développement durable en faveur des riverains.

    Centrafrique: les écogardes du parc Chinko [2/3]

    Play Episode Listen Later Sep 22, 2025 2:27


    Située au sud-est du pays, la réserve naturelle de Chinko est en phase de restauration depuis 2014, après plusieurs décennies de crises sécuritaires qui l'ont presque décimée. Aujourd'hui, les écogardes, encore appelés rangers, sont en première ligne pour protéger la faune et la flore issues de cette aire de conservation d'une surface estimée de plus de 30 000 km2. Le travail de ces hommes et femmes, recrutés pour la plupart dans les villages périphériques, est très important dans la chaîne de préservation des écosystèmes, la régénération de la faune et le développement socio-économique des communautés locales.  De notre correspondant de retour de Kocho, 6h30, les écogardes sont déjà en colonne par deux dans leur zone de rassemblement pour définir le plan de la journée. Chacun porte un sac lourd, rempli de fournitures de premiers soins, de matériel de sauvetage, de nourriture et d'eau, une tente et des appareils de communication. Mathurin Davis Ndallot est responsable de la lutte anti-braconnage : « Notre quotidien ici, c'est la surveillance 24 heures sur 24, sept jours sur sept à travers nos équipes de terrain que nous utilisons. Au sein de la communauté, nous avons des hommes de confiance qui nous fournissent des informations en temps réel pour nous permettre de prendre de l'avance sur les braconniers et les éventualités. » À lire aussiCentrafrique : Chinko, la renaissance de la réserve naturelle [1/3] Chaque unité est ensuite dirigée vers les zones de contrôle par des véhicules tout terrain. L'endroit est isolé et logistiquement très difficile d'accès. Ce matin, une unité de lutte anti-braconnage (LAB) est en patrouille au cœur de l'aire de conservation. En tenue de camouflage, les écogardes marchent lentement au milieu d'une végétation très dense. Le chef d'équipe balaye le sol du regard, à la recherche des traces de braconniers : « En tant que rangers, nous faisons des patrouilles régulières pour protéger nos forêts, nos rivières et la faune. Nous faisons aussi le comptage des traces des animaux, la maintenance des salines et nous veillons également au respect du code de gestion des aires protégées de Chinko. » Bientôt, la saison des pluies va laisser la place à une période compliquée pour l'équipe de contrôle, selon Mathurin Davis Ndallot : « En début de saison sèche, les pasteurs du nord du Sud-Soudan descendent en Centrafrique. Leur arrivée crée beaucoup de stress dans nos activités. C'est pourquoi nous avons mis en place une équipe de sensibilisation des acteurs de transhumance appelée Tango, et Échos que nous utilisons pour aller sensibiliser les communautés et les éleveurs afin de leur montrer leur limite et l'importance de la conservation. » « Nous sommes là pour changer les mentalités » À l'approche de la rivière de Kocho, Mathurin Davis Ndallot ordonne à son équipe de se taire et d'avancer discrètement. Sous un soleil accablant, il vérifie avec ses jumelles militaires s'il n'y a pas de pêcheurs dans le coin : « On utilise également des caméras Traps, qui est un dispositif que nous plaçons dans la forêt et qui permet de faire des photographies de la faune et flore sans intervention humaine. Ces caméras sont placées à des endroits stratégiques et sur les salines afin de contrôler le mouvement des espèces que nous protégeons, pour faire également le contrôle général et l'infiltration des braconniers. » Au milieu des fauves, de mille et un dangers, les écogardes se déploient plusieurs jours, à pied, en pirogue motorisée et parfois en avion de surveillance, selon le chef d'équipe : « Le but de nos patrouilles n'est pas forcément de faire la guerre. Nous sommes là pour changer les mentalités et appeler à la préservation de cette réserve naturelle. » En cas de récidive ou de résistance, les braconniers et les exploitants illégaux de la forêt sont arrêtés et traduits en justice. À écouter aussiCentrafrique : Chinko, impliquer les communautés riveraines [3/3]

    Centrafrique: Chinko, la renaissance de la réserve naturelle [1/3]

    Play Episode Listen Later Sep 21, 2025 2:27


    En Centrafrique, la réserve naturelle de Chinko, située dans la préfecture du Mbomou, au sud-est du pays, incarne l'un des récits de restauration de biodiversité les plus inspirants. Ces trente dernières années, les crises sécuritaires à répétition et le braconnage ont eu de graves conséquences sur la faune et les ressources naturelles. Afin de sauver ce patrimoine, le gouvernement centrafricain et l'ONG African Parks ont signé en 2014 un accord de gestion durable du parc. Cette convention, renouvelée en 2020 pour une durée de 25 ans, instaure une politique de conservation des ressources naturelles et du développement communautaire. De notre correspondant à Kocho, Ce matin, le brouillard se lève, s'enroule puis disparait au-dessus de la réserve naturelle de Chinko... Le grognement rauque d'un phacochère signale la présence des visiteurs. En petits groupes de quatre ou de cinq, ces phacochères, aux pelages gris, brun et noir, se nourrissent d'herbes, de racines, d'écorces et de fruits. Debout à quelques mètres de ces mammifères, Ghislain Boukar, colonel des eaux et forêts, fait l'inventaire des espèces disparues : « Il a eu un effondrement considérable de toutes les espèces confondues. En disant cela, je fais allusion aux buffles, aux carnivores comme les lions, les grands mammifères comme les pachydermes, les éléphants et autres. Nous avons aussi des espèces telles que les rhinocéros, les girafes qui ne sont plus dans le parc. » Toutefois, la réserve naturelle de Chinko abrite aujourd'hui des espèces comme le lycaon, le lion, le léopard, le chimpanzé, l'éland de Derby, plus de 400 espèces d'oiseaux, 100 espèces de poissons d'eau douce et beaucoup d'autres encore. À lire aussiCentrafrique : Chinko, une réserve à préserver au milieu d'une zone de conflit La vision du gouvernement centrafricain et d'African Parks consiste à réintroduire, avec le temps, les espèces qui n'existent plus. Mermoz Bizon, responsable de l'aménagement territorial à African Park Chinko, explique : « Cela a une importance capitale, car un jour, nous, nos enfants et nos petits-enfants, auront la chance d'avoir autour de nous des animaux sauvages. Tout ce qui est potentialité en termes de faune, flore et ressources aquatiques, représente une richesse inestimable. On doit faire en sorte que cette richesse ne nous quitte pas. Notre combat aujourd'hui est de permettre à ce que les communautés locales puissent en bénéficier. » Engagement local et éducation à l'environnement Quand on survole les 30 500 km² en avion de surveillance et d'observation, l'immense étendue sauvage de Chinko offre une belle vue sur les montages, les rivières et les cours d'eau. Les défis actuels consistent à empêcher des chasseurs, des pêcheurs et même des éleveurs, de pénétrer dans les zones de conservation. Pour Ghislain Boukar, colonel des eaux et forêts, « la transhumance transfrontalière est l'une des difficultés majeures. Ces pasteurs viennent du Soudan et mettent le feu dans la brousse, juste pour avoir de nouvelles poussées d'herbes, ce qu'ils jugent très intéressantes pour leur bétail. Ils commettent aussi des abattages illicites de nos arbres et de nos espèces. Ils pratiquent également le braconnage en tuant aussi nos espèces. Quand ils repartent au Soudan, ils les revendent là-bas. » Pour relever ce défi, l'équipe mène plusieurs activités réparties en trois axes : l'engagement, l'entrepreneuriat et l'éducation à l'environnement, selon Mermoz Bizon, responsable de l'aménagement territorial à African Park Chinko : « Nous avons mis en place un guide d'éducation à l'environnement qui est censé enseigner aux enfants dès le bas âge ce qu'est l'environnement, ceci pour leur permettre de comprendre tout ce qui les entoure, pour pouvoir l'impliquer dans leurs habitudes. Nous appuyons aussi l'inspection académique de Bangassou pour tout ce qui est soutien à la mise à niveau des enseignants tout autour de l'aire de conservation de Chinko. » Pour garantir une gouvernance participative de cette réserve naturelle, un plan d'aménagement du territoire de Chinko est en cours de validation par le gouvernement centrafricain et ses partenaires.

    Maroc: l'incivisme au cœur des débats à l'approche de la Coupe d'Afrique des nations

    Play Episode Listen Later Sep 20, 2025 2:12


    À trois mois de l'ouverture de la CAN et à cinq ans de la Coupe du monde co-organisée par le Maroc, le vieux débat sur les incivilités ressurgit dans le royaume. Selon un sondage publié en mai, seuls 3% des Marocains estiment que le niveau de civisme dans l'espace public est élevé. L'enquête a entraîné dans son sillage la publication d'une avalanche d'articles qui disent tous la même chose : si le pays va briller grâce à ses infrastructures flambant neuves durant ces grands évènements sportifs, son image risque de souffrir du chaos qui règne encore dans ses rues. De notre correspondant à Casablanca, Un vieil immeuble des années 1930. La cour immense est traversée chaque jour par des centaines de personnes. Il n'y a pas un papier qui traîne par terre. Mohammed est le gardien de l'immeuble : « Les gens jettent leurs mégots, les épluchures de fruits, les emballages. Eux, ils jettent et moi, je ramasse. Je ne peux pas faire autrement. Moi, je suis gardien. À l'origine, mon travail, c'est juste de surveiller la porte. »  Mais Mohammed se retrouve à faire le ménage : « Je souffre, je suis fatigué. Ce n'est pas normal, c'est la honte, franchement. » Le manque de propreté, c'est ce que dénoncent justement la majorité des sondés dans l'étude du Centre marocain pour la citoyenneté (CMC). Un millier de personnes interrogées sur toute l'étendue du royaume. Ils sont 70% à alerter sur le harcèlement des femmes et 60% à s'alarmer des infractions au Code de la route. « On vit dans l'anarchie. Il n'y a pas de respect. S'il y en avait, tout ça n'existerait pas. » Nawal habite à quelques mètres, avec ses deux enfants, dans un appartement situé juste au-dessus d'un bar. « La nuit, il y a des bagarres, les gens urinent dans la rue. Ça klaxonne tout le temps. Qu'est-ce que tu peux attendre de la nouvelle génération qui grandit dans cet environnement ? » L'incivisme, un fléau quotidien Des centaines d'articles ont été écrits dans la presse marocaine depuis la publication du sondage du Centre marocain pour la citoyenneté. Nawal, elle, se sent abandonnée par les autorités. Avec d'autres résidents, elle a organisé plusieurs « sit-in » pour réclamer la fin des nuisances, mais ça n'a rien donné pour l'instant : « On a fait des réclamations, on a été à la wilaya, on a même pris un avocat, mais on n'a eu aucun résultat. On ne sait pas si c'est un problème d'éducation ou si les gens s'en fichent tout simplement. Ils sont totalement inconscients. Sur la voie publique, ils ne respectent rien. » Les causes de l'incivisme font l'objet de toutes les hypothèses dans les médias marocains et les mesures qui permettraient d'améliorer la situation aussi. Si rien n'est fait, estiment-ils, c'est le « soft power » du Maroc qui risque d'être entravé.

    Tchad: les habitant craignent des inondations à N'Djamena

    Play Episode Listen Later Sep 19, 2025 2:27


    Au Tchad, on approche de la fin de la saison des pluies et cette année les précipitations à N'Djamena sont en baisse par rapport à l'année passée. Moins de dégâts, mais la capitale tchadienne entre dans une nouvelle phase : celle des risques d'inondations fluviales. Dans le 9ᵉ arrondissement de N'Djamena, l'un des plus pauvres de la capitale tchadienne, les habitants autour de la digue surveillent de près la montée des eaux des fleuves Chari et Logone.  De notre correspondante à N'Djamena, Il a fallu parcourir quelques kilomètres à moto sur la digue pour arriver au quartier Kabé, le quartier le plus exposé aux inondations du 9ᵉ arrondissement. Ici, quelques 8 000 personnes habitent entre le Logone et la digue. « Chaque année, la zone est inondée. On est seulement dans l'eau. Quand ils ont fait les digues, l'eau va et vient. Mais cette année, on ne sait pas encore, raconte Kelly Nganda, une habitante de Kabé. J'ai peur même si l'eau de pluies n'est pas arrivée à nous. Je suis contente. Mais maintenant, j'attends l'eau salée. Est-ce qu'on va fuir ? On va rester ? Je ne sais pas encore. » À lire aussiTchad: la capitale Ndjamena n'est pas épargnée par les inondations Les habitants craignent la même catastrophe que l'année derrière Vont-ils fuirent, vont-ils rester ? C'est la question que se pose, Acyl Fassou Toukouna porte-parole de l'association Agir qui vient en aide aux sinistrés dans le 9ᵉ arrondissement. Régulièrement, il vient vérifier le niveau de l'eau dans la digue. « Le niveau d'eau est à 5,80 mètres et comparativement à l'année dernière, à la même date, nous étions à 6,11. Donc il y a une différence de plus d'un mètre. Donc pour le moment ça monte, mais pas avec une grande pression. Déjà, avec ce niveau, nous pensons que la menace n'est pas assez imminente, mais néanmoins, nous, nous restons encore sur nos gardes parce que ce n'est pas fini. » Mais pour Mangué Zoubé Nedjou, militaire et habitant de Walia, le souvenir des inondations de l'année passée sont encore vifs. « Nous sommes exposés. L'année passée, ici, tout était inondé. L'année dernière, l'eau était arrivée jusque-là. Il y a la marque sur le mur de la maison. L'année passée, à cette heure-ci là, l'eau était pleine déjà. On a eu beaucoup de pertes matérielles. Les maisons sont cassées, les rues englouties, même les animaux. On a beaucoup perdu des chèvres, même les volailles, tout est parti. On a eu beaucoup de pertes. Il faut que l'État fasse les digues au bord du fleuve, sinon cette année, on aura le même problème. Donc la solution, il faut que l'État fasse la digue au bord du fleuve. Comme ça on sera épargné. » À lire aussiLe Tchad sous les eaux: l'ONU craint une crise humanitaire Les prochaines semaines vont être décisives. La décrue ne devrait pas avoir lieu avant novembre.

    Les archives étonnantes sur les «années cachées» de la musique sud-africaine [2/3]

    Play Episode Listen Later Sep 16, 2025 2:39


    Le fonds intitulé The hidden years of music, soit « les années cachées de la musique », est l'une des plus grosses collections d'enregistrements et de documents du pays qui relatent la vie musicale sous l'apartheid, en particulier dans les années 1970-1980. Tout cela a été rassemblé, à l'époque, par un passionné. De notre correspondante à Stellenbosch, Cet enregistrement de Johnny Clegg et Sipho Mchunu à leurs débuts fait partie des pépites dont le fonds des hidden years of music regorge. La conservatrice, Lizabé Lambrechts, a travaillé plusieurs années sur cette collection pour la réorganiser et en superviser la numérisation : « Il y a plus de 7 000 enregistrements sur vinyles, environ 30 000 photos, et quelque chose comme 7 à 8 tonnes de documents. Donc ce sont vraiment d'énormes archives. »  Ce trésor musical est désormais conservé à l'université de Stellenbosch, mais aussi en ligne, et on le doit à un homme : David Marks, compositeur, chanteur, ingénieur du son et producteur, qui a enregistré des heures et des heures de concerts. David Marks au festival de Woodstock de 1969 « David a travaillé au festival américain de Woodstock de 1969. Il y a rencontré Bill Hanley, qui lui a donné une partie du matériel de sonorisation pour le ramener en Afrique du Sud. Cela a permis à David d'organiser de grands concerts en plein air. Et il a enregistré tous ces événements, pris des photos, gardé les posters, et c'est comme ça que ces archives sont nées. Laissez-moi vous jouer un petit extrait… David a commencé à organiser ces concerts « Tribal Blues » à partir de 1971, et c'était parmi les seuls, en Afrique du Sud, à être interraciaux, en plein pendant l'apartheid. Donc c'étaient vraiment des moments magiques, imaginez comment cela devait être incroyable. » Lizabé Lambrechts conserve avec elle une petite partie de ces archives, pour achever son travail. Certains éléments ne sont pas toujours en bon état, car David Marks les a gardés dans son garage, sur la côte Est très humide. « Laissez-moi voir si je peux ouvrir ça ... Vous pouvez sentir cette légère odeur ? C'est une bobine du festival de musique pop de Monterey que David projetait lors de cafés-clubs qu'il organisait à Johannesburg et à Durban. Il voulait partager des films et de la musique pour que les gens connaissent ce qui se fait dans le monde. » De la contre-culture musicale face à l'apartheid Pour les chercheurs universitaires comme Ashrudeen Waggie, qui travaille sur les concerts organisés en Afrique du Sud pendant la période de boycott culturel, ce sont des documents rares : « C'est une très bonne source pour moi. Je pense que cela permet de mettre en avant une partie de l'histoire qui est restée cachée sous l'apartheid, donc c'est important. » Cette collection permet donc de redécouvrir la contre-culture musicale qui s'est construite face à l'apartheid et un pan de la résistance culturelle de l'époque. À lire aussi«Soweto Blues» de Miriam Makeba: une voix contre l'apartheid

    Afrique du Sud: Saha, des archives militantes pour comprendre la résistance quotidienne au régime d'apartheid [1/3]

    Play Episode Listen Later Sep 15, 2025 2:19


    À l'époque de l'apartheid en Afrique du Sud, pour contourner le contrôle de l'État raciste sur les archives, des militants en exil lancent Saha, une collecte d'archives militantes de la vie quotidienne : pamphlets, affiches de meetings, t-shirt de partis anti-apartheid... Aujourd'hui installées à l'Université de Wits, à Johannesburg, elles représentent un trésor précieux pour comprendre la lutte quotidienne de l'époque à travers des héros de tous les jours, et non pas seulement à travers des personnages célèbres tel Nelson Mandela. De notre correspondant à Johannesburg, Ce trésor se trouve au sous-sol de la bibliothèque. Après un petit escalier sombre, il y a une porte en métal, le bruit de la climatisation, puis de grandes allées d'archives. « Saha a été créé à la fin des années 1980 par des militants anti-apartheid en exil pour mettre leurs documents en sécurité, pour les mettre à l'abri du régime d'apartheid », raconte Arianna Lissoni professeur d'histoire, spécialiste de la lutte anti-apartheid et directrice des archives de Saha. « Nous avons plusieurs collections de photographies, plus de 4 000 affiches, des autocollants, des pin's. Nous avons aussi une très grande collection de t-shirts de la lutte. Ils se trouvent tous dans ces boîtes que vous voyez là. Là, on a des t-shirts du parti communiste, énumère Arianna Lissoni. Dans cette autre boîte, c'est un t-shirt avec le visage de Matthew Goniwe, un activiste assassiné par le régime. C'était sûrement pour ses funérailles, car il est écrit "Hamba kahle, comrade", ce qui signifie "Au revoir camarade", en zoulou ». Ces témoins du passé sont uniques. Comme cette cassette placée dans un grand tiroir : un enregistrement précieux qui raconte la vie quotidienne sous l'apartheid. « C'est une interview de Vesta Smith, une femme originaire d'un township métisse de Soweto. Et pour autant que je sache, il n'y a aucun autre enregistrement d'elle ! », s'enthousiasme l'historienne. À lire aussi30 ans plus tard, l'ombre des crimes de l'apartheid continue de planer sur l'Afrique du Sud À présent, le défi, c'est de faire connaître ces figures parfois oubliées pour raconter la vie de tous les jours. D'une collecte de militants en exil au départ, Saha est aujourd'hui devenu un réel vecteur d'éducation en Afrique du Sud. « Vous avez ici le mur de nos publications. Là, c'est "Entrer à Tembisa", parce que les gens connaissent Soweto ou Alexandra, mais que l'histoire du township de Tembisa n'a pas vraiment été documentée, souligne Arianna Lissoni. Il y a donc eu ce projet, en partenariat avec une photographe, des historiens et des membres de la communauté, pour raconter cette histoire méconnue ». Une volonté d'éduquer qui se heurte, parfois, au manque de moyens. Si Saha s'efforce de lancer de nouveaux projets pour rendre ces archives encore plus accessibles, en utilisant le digital par exemple. Souvent, les aides financières, notamment de l'État, viennent à manquer. À lire aussi«Soweto Blues» de Miriam Makeba: une voix contre l'apartheid

    Trafic de drogues: le Kenya, de plateforme logistique à marché de consommation émergent

    Play Episode Listen Later Sep 14, 2025 2:14


    D'abord plateforme du trafic de drogue mondial, le Kenya est devenu ces dernières années un marché de consommation émergent. D'après le dernier rapport de Nacada, l'Autorité nationale pour la campagne contre l'abus d'alcool et de drogues, un Kényan sur six consomme des substances illicites. Les populations les plus vulnérables sont les plus pauvres, comme à Kibera, le plus grand bidonville d'Afrique. De notre correspondante à Nairobi,  C'est à l'âge de 13 ans que Rollins Odiero Odhiambo a démarré son chemin vers l'addiction : « J'ai commencé par l'alcool illicite. Quand j'étais en primaire, ma mère en vendait pour subvenir à nos besoins. Puis, j'ai commencé à fumer de la marijuana. À l'université, des amis m'ont traîné dans la drogue. Certains ont mis des pilules dans mes verres d'alcool ». D'après Nacada, l'Autorité kényane pour la campagne contre l'abus d'alcool et de drogues, les médicaments détournés représentent la deuxième drogue la plus consommée chez les étudiants du secondaire. Il s'agit d'anxiolytiques ou d'opiacés. L'accès à ces médicaments est extrêmement simple, selon Fauzia Ithambo, ancienne consommatrice : « Une femme nous vend les médicaments dans le quartier. Je crois qu'elle travaille dans une pharmacie. Les pilules coûtent 40,50 ou 20 shillings, soit quelques centimes d'euros. Elles sont bleues, jaunes ou blanches. Prendre ces drogues, c'est très commun. Il y a des familles où le père, la mère, et même les enfants se droguent ». À lire aussiKenya: entre trafics et cartel mexicain... et si le pays devenait un producteur de drogues? Dans les rues de Kibera, une dose de crack coûte 150 shillings, soit moins d'un euro. Félix Kokonya est le fondateur d'Akili Bomba, une organisation qui aide les jeunes à sortir de la drogue. Lui-même en a consommé pendant près de trente ans. Pour lui, il n'y a pas de secret : si les prix sont bas, c'est parce que la demande est là : « Les drogues sont facilement accessibles car beaucoup de gens ont été poussés à consommer. Les dealers proposent une première dose à un pris très bas. Il y a des milliers de clients chaque jour. Si chacun achète trois ou quatre doses à 150 shillings chaque jour, cela représente beaucoup d'argent ». En 2017, le Kenya s'est doté d'un protocole national de soins aux addictions. Mais malgré cela, dans la rue, les programmes de soins et de prévention sont quasi inexistants, selon Hilda Odiaga, membre d'Akili Bomba :« Au Kenya, il n'y a que l'argent qui puisse vous aider à sortir de la drogue. Ceux qui organisent la prévention sont souvent des hommes politiques, durant leur campagne électorale. Mais une fois réélus, ils oublient ces programmes et leurs bénéficiaires. Il n'y a donc pas beaucoup d'aides qui viennent du secteur public », explique-t-elle.  D'après Nacada, la moitié des consommateurs de drogue au Kenya ont entre 10 et 19 ans. À lire aussiKenya: la consommation de drogue toujours en hausse, avec des victimes de plus en plus jeunes

    De la censure à la restauration: l'histoire du film «Lettre paysanne» de la Sénégalaise Safi Faye

    Play Episode Listen Later Sep 13, 2025 2:25


    Cinquante ans après avoir été tourné, « Kaddu Beykat » - « Lettre paysanne » en français -, le film de la réalisatrice sénégalaise Safi Faye décédée en 2023, est en cours de restauration. L'événement est d'importance, ses films étant introuvables ou alors dans un très mauvais état de conservation. Uniquement diffusées dans le circuit des festivals, les œuvres de Safi Faye demeurent largement inconnues du grand public bien qu'elle fût la première femme d'Afrique subsaharienne à réaliser un long métrage. « J'ai choisi le monde paysan parce que je suis paysanne, parce que mon père a été un peu à l'école, et ma mère jamais. Ce sont des paysans. Ils sont venus en ville pour travailler et j'ai voulu mettre l'accent sur ce monde qui, à lui seul, peut sauver l'Afrique et le mener à son autosuffisance alimentaire. On n'a pas d'industrie, on n'a pas de pétrole, donc il faut cultiver pour que les enfants qui naissent puissent manger à leur faim », raconte Safi Faye, en 2010. Elle évoque alors sa conception du cinéma après avoir filmé l'Afrique au plus près de sa réalité. Son film « Lettre paysanne » a été tourné avec les habitants de son village natal.  « Safi est une réalisatrice ancrée dans sa réalité. Contrairement à ses compatriotes cinéastes qui filmaient la ville, elle, elle a préféré le rural, tous ses films parlent de la ruralité. On n'oublie pas que Safi est ethnologue, rappelle la critique de cinéma Fatou Kiné. "Lettre paysanne" a permis à Safi de s'intéresser à ce qui se passe dans son terroir, cette filmographie qui, aujourd'hui, nous sert beaucoup pour mieux connaître la société rurale, et qui reste d'actualité. »  À lire aussiJean Rouch, maître sage, maître fou En 1975, le film de Safi Faye, surnommée « la mère du cinéma africain»», a été projeté au festival de Berlin. Il y remporte un grand succès, mais sera interdit lors de sa sortie au Sénégal.  Baba Diop, critique de cinéma, explique : « On était à l'époque de Senghor et ce dont il parlait - notamment le saupoudrage au DTT des paysans qui n'arrivaient pas à payer leurs impôts - était téméraire, il fallait le faire. Le film a donc surtout circulé en Europe, dans le milieu underground, les cinéclubs et les cinémas alternatifs. Quand j'étais étudiant en France, on l'a effectivement beaucoup regardé, étudié et partagé. C'est un cinéma du terroir. [Safi Faye] était une personne très engagée dans la cause paysanne et, malheureusement, son film a été censuré à sa sortie au Sénégal, tout comme "Lambaaye" de Johnson Traoré, qui parlait de la corruption ».  En 2023, le festival des Trois continents, à Nantes, en France, a rendu hommage à Safi Faye en projetant neuf de ses films, dont « Kaddu Beykat ». Dans un article publié à l'occasion, il est écrit : « Ce monde paysan déborde jusque dans le destin des personnages, jusque dans les jeux des enfants, jusque dans la ville où errent les hommes. Venue elle-même de l'ethnologie, Safi Faye renverse le regard habituellement distancié du cinéma ethnographique en posant sur ses images, fermement et discrètement, sa propre voix, celle d'une fille de paysans qui nous dit : "Regardez chez moi comment on travaille, comment on vit". »  À lire aussiFocus sur le festival des 3 continents à Nantes

    Éthiopie: le succès de l'Ethio Dance Fitness, le fitness revisité du coach sportif Tomy Pluss

    Play Episode Listen Later Sep 12, 2025 2:01


    Ses vidéos sur TikTok et Instagram cumulent des centaines de milliers de vues : en Éthiopie, Tomas Hailu, alias Tomy Pluss, est une star des réseaux sociaux. Coach sportif, il a notamment popularisé l'Eskista Fitness, une sorte de zumba éthiopienne mêlant musique et mouvements traditionnels avec des rythmes actuels. Marlène Panara l'a rencontré dans sa salle de sport, à Addis-Abeba. De notre correspondante en Éthiopie,  Dans la salle éclairée par des néons jaunes et roses siglée Ethio Dance Fitness, une cinquantaine de personnes bougent au rythme de la musique. Tomas Hailu - que tout le monde ici appelle Tomy, son pseudo sur les réseaux sociaux - donne le tempo dans le micro. Khalid, originaire du Somaliland, vient au cours plusieurs fois par semaine : « C'est très amusant, les gens sont sympas. J'aime aussi l'ambiance qu'il y a ici. J'adore l'Ethio Dance Fitness, je n'ai jamais pratiqué une activité aussi géniale ». Tomy Pluss a fondé son concept et ouvert sa salle de sport il y a cinq ans. Les débuts n'ont pas été faciles. « Avant que je ne me lance, personne n'y croyait. Pendant trois mois, il n'y avait personne. Je faisais de mon mieux, j'essayais, mais je n'avais pas de clients », se souvient-il. Puis, grâce au bouche-à-oreille et aux réseaux sociaux, Ethio Dance Fitness a fini par attirer de plus en plus d'individus séduits par cette discipline originale. Rendre le fitness amusant « Pour certaines personnes, le fitness, c'est ennuyeux. Donc, on le rend amusant, on y intègre de la zumba et des danses culturelles. En Éthiopie, il existe plus de 18 danses régionales différentes issues de la culture oromia, tigréenne, guragi, afar, de Gondar, etc. Donc j'ai pris tout cela. Ainsi, les gens ne s'ennuient pas pendant l'entraînement : ils s'amusent, ils se détendent, et ils adorent ça ! Maintenant, on essaie de promouvoir notre culture dans le monde entier et notre plateforme en Europe, aux États-Unis, en Afrique, et dans les pays arabes », raconte Tomy Pluss. Une partie de ses adeptes vient aussi pour raisons de santé. Avant de passer la porte de sa salle de sport, il y a un an, Anna, mèches blondes attachées en queue de cheval, était en surpoids : « J'ai beaucoup maigri : avant, je pesais 96 kilos. Depuis que je viens ici, j'en ai perdu presque 40. C'est génial d'être ici, car c'est très divertissant, on s'amuse beaucoup en s'entraînant. Et alors que je ne savais pas danser avant de venir, maintenant, c'est le cas. J'ai pris confiance en moi, c'est super ! », s'enthousiasme-t-elle. Lors du dernier festival de fitness organisé à Adwa, dans le nord du pays, le cours donné sur scène par Tomy Pluss a attiré plus de 9 000 personnes.

    Madagascar: quand l'État remblaie les rizières et prive les agriculteurs de leurs parcelles

    Play Episode Listen Later Sep 11, 2025 2:23


    À Madagascar, une nouvelle affaire de conflit foncier se joue à deux pas de la capitale. Aux abords de la Tsarasaotra, la rocade de 13 km de long reliant Antananarivo à son aéroport international, d'immenses travaux de remblais dans la plaine rizicole ont démarré à la mi-juillet et avancent à une vitesse impressionnante. Le projet ? Pour les habitants de la zone, c'est un mystère. Aucun panneau ne précise sa nature. Les agriculteurs qui assistent à l'enfouissement de leur unique source de revenus sous des millions de mètres cubes de terre sont dévastés et appellent à l'aide. De notre correspondante à Madagascar,  Il est minuit. Le balai des camions-bennes qui déversent des tonnes de terre rouge pour combler les rizières dans la plaine du Betsimitatatra vient troubler la quiétude de la nuit. Une vingtaine d'engins se relaient sans interruption. Et quand on demande à un ouvrier ce qui se construit ici : « J'n'en sais rien ! », répond-t-il. « Nous, on nous a juste dit : "Remblayez les rizières !" ». Ces immenses terrains rizicoles, à quelques kilomètres seulement de la capitale, attisent l'intérêt d'entrepreneurs immobiliers qui avancent à visage masqué. Pour tenter de leur résister, 1 200 agriculteurs se sont regroupés en association pour faire valoir leurs droits. « Ces rizières, voilà 50 ans qu'on les exploite. C'est le décret 63-467 de 1963 qui nous en donne le droit. Selon le droit foncier malgache, une terre qui est exploitée pendant plus de cinq ans revient à ses exploitants », explique Jean-Baptiste Ranaivoson, membre de l'association Laniera Mamoukatra-secteur 12 en lutte depuis 10 ans. « Le problème, depuis la construction de la rocade et de l'autoroute, c'est que nos terrains sont très convoités. Depuis quelques années, on découvre que l'État malagasy a délivré des titres fonciers à des gens dont on ne connaît pas l'identité, mais qu'à nous, il n'en a pas donné. On se sent spoliés », s'indigne-t-il. Selon l'association, ces titres fonciers achetés sont aussitôt revendus à la chaîne à des prête-noms avertis. En quelques mois seulement, les terres auraient changé de mains plusieurs fois. Résultat : il est à présent très difficile pour les paysans de prouver leurs droits. L'association a relancé la machine judiciaire : huissiers, pôle anticorruption, référé auprès du tribunal de première Instance. « Ces terres, ce sont nos seuls héritages » Le visage irréversiblement mutilé de Carolia Andrianantoandro témoigne de la détermination de l'adversaire. « Sauf que le fait qu'on se révolte, ça dérange », déclare-t-elle. Le 8 août dernier, quelques jours après le dépôt de plainte, la secrétaire générale de l'association a été violemment agressée à son domicile. Un homme lui a porté onze coups de couteau à la tête et au cœur. « J'ai failli mourir. C'est vraiment une tentative d'assassinat. En partant, celui-ci m'a dit : "Arrête ça, tu parles trop". Mais moi, je ne veux pas m'arrêter », raconte Carolina. « Je suis paysanne, mais une paysanne qui a étudié. Je veux aider les gens contre l'accaparement de nos terres. Je ne veux pas qu'elles servent à la spéculation immobilière, mais à nourrir mon pays. » « Le gouvernement dit qu'il veut lutter contre la pauvreté, mais dans cette situation, ce sont les riches qui semblent avoir tous les droits contre nous, les paysans. Ces terres, ce sont nos seuls héritages, ce qui nous permet de vivre et de faire vivre les générations à venir », renchérit Jean-Baptiste Ranaivoson. Contacté, le gouverneur de la région, Analamanga Hery Rasoamaromaka, a révélé qu'il s'agissait d'un projet présidentiel. Un partenariat d'investisseurs publics privés, précise-t-il, pour la construction de « bâtiments administratifs » et d'un parc solaire, notamment. Interrogé sur le litige foncier, le gouverneur s'est dit étonné. « Des vérifications seront faites auprès des cultivateurs » et « des panneaux expliquant le projet seront installés la semaine prochaine », promet-il. À lire aussiMadagascar: multiplication des conflits autour de l'accès à la propriété foncière, les lanceurs d'alerte dans le collimateur

    Ouganda: la réintégration des anciens rebelles partis en Centrafrique [3/3]

    Play Episode Listen Later Sep 10, 2025 2:19


    Troisième et dernier reportage de notre série dans le nord de l'Ouganda, à l'occasion de l'audience par contumace de confirmation des charges contre Joseph Kony à la CPI. Le leader de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA – acronyme en anglais) est accusé de crimes de guerre et crimes contre l'humanité pendant le conflit qui a ravagé le nord de l'Ouganda entre la fin des années 1980 et le milieu des années 2000. Depuis, le groupe armé s'est exporté dans d'autres pays d'Afrique centrale. Fin 2023, 134 anciens membres, incluant femmes et enfants, ont été rapatriés de Centrafrique vers l'Ouganda. C'est le plus grand retour de repentis de la LRA ces dernières années. Après un an et demi en centre de réhabilitation et l'obtention d'une amnistie, les anciens rebelles sont retournés à la vie civile depuis quelques mois, dispersés dans plusieurs petits groupes dans la région nord du pays. Reportage dans le district de Pader, au nord de l'Ouganda Devant une maison en briques entourée de champs de sésame, de maïs et de soja, Walter Okot fait sécher les dernières récoltes : « Quand je suis arrivé en Ouganda, j'ai eu le sentiment de revenir à la maison. J'étais très heureux. On recommence à peine notre vie, mais c'est bien mieux que ce qu'on vivait avant de revenir. » Derrière le rideau d'entrée, l'ancien rebelle a entreposé son vélo et quelques ustensiles de cuisine, parmi les biens accumulés depuis son retour en Ouganda… Les cinq membres de son groupe ont tous passé entre 20 et 30 ans au sein de la LRA, avant de quitter l'unité principale de Joseph Kony : « C'était en 2018, nous devions le rejoindre au Darfour où il était à l'époque. Il n'avait déjà plus beaucoup de soldats. Mais on a entendu des rumeurs d'exécutions et d'arrestations parmi les rebelles, c'est ce qui nous a poussé à partir. » À écouter aussiOuganda: aux origines de Joseph Kony [2/3] Le retour des repentis en Ouganda Les rebelles s'installent alors à Mboki, à l'est de la Centrafrique, jusqu'à leur rapatriement en 2023. Enlevé par la LRA adolescent, Thomas Onayo, 45 ans aujourd'hui, reprend ses repères dans sa région natale, où il a pu revoir une partie de sa famille : « Ils m'ont accueilli et m'ont assuré que j'étais toujours le bienvenu à la maison. Tout le monde était heureux et m'a embrassé, mais ma mère m'a expliqué la situation de la famille. Beaucoup de nos terres ont été vendues, et ils survivent sur le peu qu'il reste. » Pour éviter les conflits familiaux, accompagnés par des ONG, les repentis ont reçu des terres, des maisons et des formations pour les aider dans leur réintégration. Jimmy Otema, de l'organisation Terra Renaissance : « On les a formés pour les activités qu'ils ont choisies, mais aussi sur leurs compétences sociales. Avec les chefs traditionnels, nous avons fait en sorte qu'ils soient accueillis par les cérémonies traditionnelles de réconciliation. Et puis, nous organisons parfois des réunions entre les anciens LRA et les communautés voisines. » Un processus de réintégration lent et progressif, destiné à mener à l'indépendance économique des repentis, qui attendent la finalisation de leur atelier de menuiserie pour pouvoir commencer à travailler. À écouter aussiEn Ouganda, le regard des victimes de Joseph Kony sur la nouvelle procédure de la CPI [1/3]

    Ouganda: aux origines de Joseph Kony [2/3]

    Play Episode Listen Later Sep 8, 2025 2:24


    Deuxième épisode de notre série dans le nord de l'Ouganda. Ce mardi 9 septembre, la CPI ouvre une audience inédite de confirmation des charges par contumace contre Joseph Kony, le chef du groupe armé de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA – acronyme en anglais), groupe qui a mené pendant presque deux décennies, jusqu'au milieu des années 2000, une guerre civile contre le président Yoweri Museveni. Traqué depuis l'émission d'un mandat d'arrêt par la CPI en 2005, mais toujours introuvable, le fugitif, prophète autoproclamé, est accusé de crimes de guerre et crimes contre l'humanité dans un conflit qui a causé la mort d'au moins 100 000 personnes selon l'ONU. Reportage dans son village natal, à Odek, dans le nord de l'Ouganda Lakoc Pa Oyo grimpe l'escalier pour monter le bloc rocheux surplombant les cultures de maïs autour du village d'Odek : « Ici, on est à Got Awere. C'est la montagne où Joseph Kony venait chercher de l'eau sainte. » Au sommet, de l'eau s'amasse à proximité de l'antenne récemment installée. Le voisin d'enfance de Joseph Kony se rappelle les débuts de la rébellion. Après le coup d'État de l'actuel président Yoweri Museveni en 1986, son ancien ami se présentait comme un prophète appelant à la protection de la communauté locale des Acholis : « Nous avions peur que Museveni, qui avait pris le pouvoir à des Acholis, viendrait se venger. Alors les Acholis devaient partir au combat pour l'en empêcher. Et puis, ça nous rappelait le coup d'État contre Milton Obote d'Idi Amin Dada, qui avait ensuite mené des massacres contre nous. » À écouter aussiEn Ouganda, le regard des victimes de Joseph Kony sur la nouvelle procédure de la CPI [1/3] Dans une région marquée par les violences communautaires suivant les multiples coups d'États post-indépendance. Lakoc Pa Oyo rejoint pendant huit mois la LRA : « On se battait, mais c'était plus dur pour nous. Il y avait plusieurs groupes rebelles, et ceux qui auraient dû se regrouper s'entretuaient, alors j'ai décidé de partir. » Seules quelques motos empruntent la piste en terre qui traverse le village, pas épargné par le groupe armé. En 2004, le commandant de la LRA, Dominic Ongwen, y mène une attaque sanglante. Assis sur un banc devant sa boutique, Banya Wilson, élu local pendant la guerre, défend comme beaucoup à Odek le chef rebelle enfant du village : « Tout n'était pas de sa faute ! Il n'a jamais voulu les massacres ou les enlèvements. Mais quand il envoyait ses commandants, ces derniers menaient leurs propres missions, c'est ça qui se passait. » Pour le commerçant, la justice doit aussi passer par un retour de Joseph Kony dans son village natal : « Le juger en son absence, ce n'est pas une justice. C'est comme si on ne jugeait personne. Il faudrait réussir à l'amener ici, que les gens puissent entendre ce qu'il a à dire, et l'entendre leur demander pardon. » Les habitants attendent surtout les réparations annoncées par la CPI suite au procès de Dominic Ongwen. 52 millions d'euros répartis dans la région entre plus de 50 000 victimes et des projets communautaires. À lire aussiOuganda: des victimes d'un ex-seigneur de guerre mitigées suite aux indemnisations promises par la CPI

    En Ouganda, le regard des victimes de Joseph Kony sur la nouvelle procédure de la CPI [1/3]

    Play Episode Listen Later Sep 7, 2025 2:15


    C'est une première à la Cour pénale internationale. Vingt ans après le mandat d'arrêt émis contre lui en 2005, une première audience de confirmation des charges est prévue par contumace du 9 au 11 septembre dans l'affaire concernant le chef présumé de la LRA, l'Armée de résistance du Seigneur, Joseph Kony. Traqué depuis 20 ans entre l'Ouganda, la RDC, la Centrafrique et le Soudan, Joseph Kony est suspecté de 36 charges de crimes de guerre et crimes contre l'humanité au cours du conflit sanglant mené par la LRA dans le nord de l'Ouganda de la fin des années 1980 au milieu des années 2000. À Gulu, principale ville du nord, les survivants du conflit attendent le début de cette première procédure. De notre correspondante à Kampala, Dans les bureaux du réseau des Victimes et enfants de la guerre à Gulu, tous les membres se préparent à suivre à la radio l'audience de la Cour pénale internationale (CPI). Parmi eux, Ochaya Bosco Ojok, resté pendant sept ans en captivité au sein de l'Armée de résistance du Seigneur, la LRA. « Après m'avoir enlevé, ils ont aussi enlevé mon frère qu'ils ont tué devant mes yeux, et c'est pour ça que je suis toujours autant en colère. Il faut qu'ils continuent la procédure, et qu'on obtienne des réparations pour toutes les années perdues en captivité », espère-t-il. En cercle, dans le jardin de l'association, les avis des survivants sont partagés. Est-il pertinent de poursuivre une procédure sans le principal intéressé ? Aucun doute pour Brenda Angom, enlevée par la LRA à l'âge de sept ans : « La procédure contre Joseph Kony est très importante, encore plus que celle contre Dominic Ongwen, car il est le chef et que Dominic Ongwen avait, lui aussi, été enlevé. C'est enfin une audience contre la bonne personne, celle responsable des atrocités en Ouganda, et même pour mon propre enlèvement, je lui en veux encore. » Deux décennies après la fin du conflit qui a ravagé le nord du pays, seuls deux commandants de la LRA ont été jugés et condamnés : Dominic Ongwen à la CPI en 2021 et Thomas Kwoyelo en Ouganda en 2024. Mais après 20 ans de traque, Stella Lanam, survivante, doute de voir un jour Joseph Kony derrière des barreaux. « Est-ce que c'est raisonnable de commencer une procédure en l'absence de Joseph Kony ? S'il ne revient pas, qu'est-ce que va faire la CPI ? On va suivre l'audience, mais ce qu'on veut en tant que victimes, c'est que les responsables rendent des comptes et que justice soit faite », estime-t-elle. Une justice que l'audience de confirmation des charges par contumace doit accélérer, espère Nobert Dacan, directeur de l'ONG Foundation for Justice and Development Initiative (FJDI), basée à Gulu : « Prenons ce qu'on peut pour l'instant. Cela fait des années qu'on cherche à arrêter Kony, mais sans succès. Est-ce que ça veut dire qu'on doit attendre ? Des victimes meurent de vieillesse tous les jours. S'il y a l'opportunité d'une procédure de ce genre, c'est déjà ça. » Une première procédure que l'activiste salue. Mais avant d'éventuelles réparations aux victimes ou condamnation, Joseph Kony, doit d'abord être arrêté et remis à la CPI. À lire aussiOuganda: des victimes d'un ex-seigneur de guerre mitigées suite aux indemnisations promises par la CPI

    En Centrafrique, le mode de vie millénaire des Pygmées Akas

    Play Episode Listen Later Sep 6, 2025 2:25


    Direction la Centrafrique, à la rencontre des Pygmées Akas, une communauté vivant dans la forêt équatoriale avec un mode de vie millénaire fondé sur la chasse et la cueillette. Longtemps marginalisés et discriminés, ces Akas veulent désormais changer le cours de leur histoire. Pour y parvenir, ils ont mis en place une association baptisée One Color Mënë Oko (« unis par le sang », en français) et mènent des actions dans l'objectif de valoriser leur mode vie et de défendre leur droit. Dans leur siège du village de Nzila à 15 km au sud-ouest de Bangui, ils pratiquent la pisciculture, le maraîchage et enseignent la pharmacopée traditionnelle.  De notre envoyé-spécial à Nzila, Veste et baskets noires, jean bleu, Dridemonomotapa Zendicongoso n'a pas du tout le code vestimentaire traditionnel du peuple Aka, mais il maîtrise les gestes, les attitudes et la posture des Akas. Poste radio qui grésille dans la main droite, il circule entre trois bassins d'environ 30 mètres sur 10. « Dans ces bassins, on a les carpes blanches et les carpes rouges. Elles sont très succulentes et font beaucoup d'œufs qui se multiplient rapidement. On a aussi les silures que nous appelons des Ngoros. C'est une espèce de poissons authentiques de notre communauté, depuis l'époque de nos grands-parents. Ça fait trois ans, qu'on n'a pas touché à ce bassin. Si j'ouvre ce bassin, il ne faut pas que quelqu'un de jaloux soit à côté. C'est une fierté, en tout cas, de l'Afrique », raconte-t-il. Pour perpétuer la connaissance de leur mode de vie, ils ont installé un musée au cœur de cette forêt de Nzila. C'est dans cet édifice en terre battue, au sol argileux, que les Akas conservent précieusement leurs objets. Des écorces, peaux de bêtes, cornes, pierres taillées, ils côtoient des traces modernes de leur culture. « Ce siège social comprend l'agroalimentaire généralisé. La littérature sans frontières. On a aussi des poésies. On élève des poulets à titre de développement humain. Nous avons au moins 2 000 pieds d'avocatiers mise en terre et plus de 2 000 pieds de papaye industrielle », détaille-t-il. « Les Pygmées sont les plus discriminés au monde » De la forêt à la ville, Nafissatou, une pygmée Aka de 15 ans, a troqué la vie de cueillette pour apprendre à lire et à écrire. Aujourd'hui, en classe de troisième, elle rêve de devenir médecin : « Dans la forêt, le matin, quand on se réveille, on part ramasser des chenilles avant d'aller chercher de l'eau et des fagots. Nous cherchons aussi les feuilles de maniocs et les gnetums. Dans la forêt là-bas, il n'y a pas d'école. Mais depuis que je suis en ville, je pars à l'école, car j'ai l'ambition de devenir quelqu'un afin d'élever le niveau de notre éducation. Dans l'avenir, je veux devenir docteur. » L'association One Color Mënë Oko fait partie d'un programme mondial de soutien aux peuples autochtones regroupant les Yanomamis du Brésil et les Aborigènes d'Australie. Dridemonomotapa Zendicongoso se bat pour la renaissance des droits des Akas. « Les Pygmées sont les plus discriminés au monde. Ils n'ont pas de valeur, pas d'initiatives. J'ai monté cette structure pour prouver la capacité des peuples autochtones à être relancé. Il est temps de refaire beaucoup de choses. L'homme qui est la créature de Dieu doit être celui qui est vivant, jouissant de tous ses droits », explique-t-il. Aujourd'hui, les 30 000 Pygmées Akas de Centrafrique se battent pour leur bonne intégration sociale. À lire aussiLes Pygmées, communautés dans les griffes de l'Histoire

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