Chaque jour, l’illustration vivante et concrète d’un sujet d’actualité. Ambiance, documents, témoignages, récits en situation : les reporters de RFI présents sur le terrain décrivent le monde avec leur micro.
Croissance, société, urbanisme, le Vietnam est un pays en pleine mutation. L'économie la plus dynamique d'Asie du Sud-Est, fait figure, avec la Thaïlande, d'anomalie sur les questions LGBT+ dans une région pourtant très conservatrice. L'homosexualité et la transsexualité, vues comme des « maladies » et traitées comme telles dans certains hôpitaux au Vietnam, il y a encore quelques années, ont vu leur image évoluer rapidement, notamment dans les centres urbains. À Hanoï, notre envoyé spécial Nicolas Rocca est parti à la rencontre de certaines figures du mouvement LGBT+.
En Syrie, 42 premières familles ont été évacuées du camp de Al-Hol, prison à ciel ouvert où s'entassent près de 30 000 familles suspectées d'être liées à l'État islamique. À l'heure où le groupe terroriste reprend du terrain en Syrie, le rapatriement de ces familles radicalisées est un enjeu de taille pour les nouvelles autorités de Damas. Un accord a été signé fin mai avec les autorités kurdes du Nord-Est, jusqu'ici en charge de ces familles. De notre envoyée spéciale au camp d'Al-Hol, Le pas lourd, Amina traîne ses trois fils sous un préfabriqué en taule. À l'intérieur, quatre tables, une liste de noms, et une association, chargée de faire sortir les 42 premières familles du camp d'Al-Hol. Un homme de l'association : « Quel est votre nom de famille ? Quelle est votre maladie ? Je dois vérifier votre identité ». Amina, trente ans, a été emmenée ici en 2019. Arrêtés dans le réduit de Baghouz, le dernier bastion de l'État islamique, son mari était accusé d'avoir rejoint l'organisation terroriste. Six années plus tard, Amina et ses enfants sont autorisés à sortir... quitter Al-Hol, ses innombrables tentes et ses immenses grillages surmontés de barbelés. « Je suis triste, car je laisse derrière moi mes amis, ma famille. Et à la fois très heureuse parce que je pars là où je peux élever mes enfants en toute liberté », avoue-t-elle. Amina prend ses trois fils par le bras, fait un premier pas à l'extérieur, puis jette un dernier regard à ses amies. Elles sont toutes là, les mains fermement accrochées au grillage, les yeux remplis de larmes. Une femme du camp : « Personne ne veut rester dans ce camp. Regardez, même cette enfant veut partir, tout le monde veut partir. C'est de la détention, c'est pire qu'une prison ». Une autre femme du camp : « La situation est tellement grave ici. Il n'y a pas assez d'eau, de nourriture. Nous avons peur, nous sommes terrifiés, il n'y a aucune sécurité ». À lire aussiSyrie: plus de 200 Français liés à l'EI toujours dans l'attente d'une solution Arrivés dans le bus, les fils d'Amina s'entassent sur un seul siège. Le plus vieux avait un an lorsqu'ils sont arrivés dans le camp. « Ils vont enfin voir le monde extérieur, ils n'ont vu que les tentes ici… Depuis tout à l'heure, ils me demandent : "est-ce qu'il y a de l'eau à l'extérieur" ? "Les arbres, est-ce que nous devons les planter ou est-ce qu'ils poussent naturellement ?" », confie Amina. Près du bus défilent désormais les malades. Des vieillards estropiés, des corps décharnés, souvent trop maigres. Par endroits, trop gros. Déformés par une tumeur ou une blessure mal soignée. Seuls ces cas humanitaires graves ont été autorisés à sortir du camp. Leurs dossiers ont été soigneusement étudiés pour s'assurer qu'ils n'étaient plus radicalisés. Pour les autres, aucune procédure n'a encore été mise en place, explique Jihan Henan, directrice du camp. Jihan Henan : « Il est urgent de trouver une solution. Depuis toujours, le risque, c'est que ces personnes obtiennent des armes, tuent des gens. Avec les opérations de sécurité dans le camp, la situation a commencé à s'améliorer. Mais une fois, ils ont tout de même réussi à hisser un drapeau de l'État islamique sur le toit. En attendant, il existe des réseaux de passeurs qui font sortir ces familles, et cela a augmenté au cours des trois derniers mois. Certains ont pu sortir clandestinement à travers les clôtures, d'autres secrètement par des camions-citernes, d'autres encore grâce à de faux papiers ». Après 10 heures de bus, le retour dans la ville natale d'Amina se fera sans joie. Amina : « Nous sommes tristes, car il n'y a personne pour nous accueillir… » Il y avait déjà la violence psychologique, les corps défaits. Désormais, la solitude. Car revenir des camps de l'enfer, c'est aussi cela. Être affilié à jamais au califat. À lire aussiDans le Sud syrien, la crainte d'une résurgence du groupe État islamique
C'est l'un des chapitres les plus sombres de l'histoire irlandaise : le scandale des foyers pour mères et bébés. Pendant des décennies, en Irlande, des milliers de femmes tombées enceintes hors mariage ont été internées de force dans des institutions dirigées par l'Église catholique. Beaucoup de leurs enfants n'ont pas survécu et ont été enterrés en secret. À Tuam, dans l'ouest du pays, sur le site désormais tristement célèbre de l'un de ces foyers, les premières exhumations débutent ce mardi 15 juillet 2025. À lire aussiIrlande: des experts vont exhumer les restes de 796 enfants morts dans des foyers religieux pour mères célibataires
À Copenhague cet été, les touristes « verts » sont mis à l'honneur. La ville a lancé la deuxième édition de CopenPay, une initiative qui vise à gratifier les visiteurs écoresponsables. En échange de leurs actions en faveur de l'environnement, comme venir en train ou choisir des plats végétariens, ils se voient offrir par exemple une activité ou une entrée gratuite dans un lieu culturel. Notre correspondante a assisté au lancement de l'opération. CopenPay une initiative dans la capitale danoise qui récompense visiteurs et habitants en échange d'un geste écoresponsable.
Au Mexique, le loup bénéficie aussi d'une protection. Depuis les années 2000, quelques individus ont été réintroduits dans les montagnes de l'État de Chihuahua. Là-bas, c'est une région de « rancheros ». Dans ces montagnes et ces grandes plaines, l'élevage de bovin est l'une des activités principales. On pourrait croire que le loup n'y serait donc pas le bienvenu, mais au lieu de s'opposer à la présence du prédateur, quelques « rancheros » s'impliquent. Ils l'encouragent et participent aux efforts de conservation. « Ici, il y a une trace de loup. » Seulement repérables par des yeux aguerris, quelques empreintes se dessinent dans la poussière brune. « Là, regarde ici, la trace est fraîche. Il est allé par là. Et là, il y a d'autres traces de biches. » Jaime Ruffo est vacher. Dans ce grand ranch perché à 2 300 mètres d'altitude, il garde 300 bovins qui évoluent en semi-liberté entre des roches abruptes et la foret. Ici, il fait partie des « pro loups ». « Ils ont été libérés ici et il ne s'est rien passé. Vraiment, ça n'a rien changé ! J'ai passé toute ma vie ici avec ces animaux, donc personne ne peut me raconter des histoires. Le loup n'a pas fait tant de mal. Je vous dis qu'il y a d'autres animaux qui attaquent beaucoup plus les troupeaux comme les pumas et les coyotes. » « Rapprocher les loups et les éleveurs » Un peu plus bas dans la plaine, le biologiste Cristian Aguilar a fait le pari de rallier les éleveurs à la cause du loup. En créant une coopérative, il les aide à vendre une viande biologique deux fois plus cher. Ainsi, quand ils gagnent correctement leur vie, ils sont davantage disposés accepter la présence du prédateur. « On est arrivés avec l'idée romantique de sauver le loup, mais on ne voyait pas les problématiques des producteurs. On leur disait : « Vous devez protéger les loups, car c'est une espèce en voie d'extinction… » Et eux, ils nous répondaient : " Oui, mais tu te rends compte que je n'ai pas déjeuné et que mes enfants ont le ventre vide parce que l'élevage est en crise ! " Donc, nous devons régler les problèmes de chacun pour trouver le moyen de conserver les loups et que ce soit un succès. Avant, on faisait en sorte d'éloigner les loups des troupeaux. Aujourd'hui, on travaille pour rapprocher les loups et les éleveurs. » Nostalgique de la faune disparue, et convaincu que le loup a sa place sur ce territoire, Alonso Olivas a même décidé de libérer des loups sur ses propres terres : « Moi, je suis très content, car les loups aiment mon ranch. Ils viennent souvent me rendre visite. Bien sûr, j'ai eu quelques problèmes au début, mais maintenant, c'est bon. J'ai tout mis en ordre. J'aime bien aller voir les images des pièges photographiques. J'adore voir d'où ils sortent, où ils sont et combien. » L'espèce du loup mexicain Canis lupus baileyi, présent aux États-Unis et au Mexique s'était complètement éteinte au sud de la frontière dans les années 1980, victime des campagnes d'extermination. Aujourd'hui, on estime qu'une cinquantaine d'individus arpentent les montages du nord du Mexique. À lire aussiY a-t-il trop de loups en Europe ?
Le plus célèbre festival de Musique de Serbie, Exit, voit son existence menacée, pour avoir apporté son soutien au mouvement étudiant contre la corruption. Le régime du président Vucic attaque le festival au portefeuille, quitte a affaiblir l'économie du pays. Avec notre correspondant à Novi Sad en Serbie, Laurent Rouy Directeur du festival musical EXIT, Dusan Kovacevic ne s'attendait pas à être pris pour cible par le régime. Mais le soutien du festival aux étudiants qui manifestent contre la corruption n'a visiblement pas plu aux membres du parti au pouvoir en Serbie. « D'abord, ils ont menacé de nous supprimer les subventions que nous recevons chaque année. Puis, ils ont mis leur menace à exécution. Cet argent qu'ils investissent leur revient, pourtant, puisque chaque année Exit rapporte entre 25 et 30 millions d'euros à la Serbie », nous explique Dusan Kovacevic, le directeur du festival. La manifestation est soutenue par des groupes qui défendent aussi des valeurs démocratiques, tel que Atheist Rap, un groupe de musique punk, comme son nom ne l'indique pas. Son bassiste Zoran Lekic témoigne du prix à payer pour avoir exprimé publiquement son soutien : « On annule nos concerts, par exemple ceux qui sont financés par les mairies. En Serbie, toutes les mairies sont aux mains du parti au pouvoir actuel. Les boîtes de nuit nous expliquent qu'elles subissent des pressions pour annuler nos concerts, sous peine de voir débarquer des commissions de sécurité ou des agents du fisc. Voilà le genre de méthodes employées par ce régime ». À lire aussiSerbie: l'opposition anti-Vučić manifeste devant un bâtiment bombardé par l'Otan devenu un symbole En face, les étudiants profitent de la visibilité du festival pour informer le public, comme l'explique Aleksa, un étudiant ayant participé à un blocage devant l'entrée d'Exit. « Le blocage du pont aujourd'hui était juste une performance, pour montrer aux visiteurs étrangers que notre lutte continue. Les gens étaient très peu informés. Mais ils ont compris que c'était une bataille pour la démocratie ». Et il y a même une scène musicale dédiée aux étudiants dans le festival cette année. Elle attire beaucoup de spectateurs serbes. C'est un bon moyen d'aborder le sujet de la contestation avec un public plus large, selon Novak, de la faculté des sciences et techniques : « Les étudiants ont tout organisé. Nous avons trouvé les groupes, les DJ qui vont jouer en concert. Nous avons imaginé une exposition sur les manifestations anticorruption. Et de son côté, Exit a fourni toute la partie technique ». Le festival Exit envisage de déménager à l'étranger l'an prochain. La vitrine culturelle de la Serbie pourrait ne pas survivre au tournant autoritaire pris par le président Aleksandar Vucic.
Donald Trump est attendu ce vendredi dans le centre du Texas, cet État du sud des États-Unis, au chevet des familles des victimes des inondations qui ont touché la région il y a une semaine. Plus d'une centaine de morts et au moins 160 disparus. Le président rencontrera également des membres d'équipes des secours. Donald Trump cherchera à faire taire certaines critiques sur sa gestion de la catastrophe, notamment sur une polémique autour de la Fema, l'agence nationale qui doit intervenir pour les catastrophes climatiques. Une polémique sur un possible retard des secours à cause de mesures du président. À Hunt, dans le comté le plus touché, les habitants s'organisent avec les autorités et font preuve de solidarité. Sur le bord du fleuve, des volontaires découpent les arbres déracinés. Juste à côté, des équipes cherchent les corps des victimes. Heather espère que sa nièce Brylie sera retrouvée. Brylie aurait dû fêter ses 7 ans ce mercredi 9 juillet. Elle faisait partie du camp de vacances pour jeunes filles Mystic, submergé par les inondations. « J'espère juste qu'ils la retrouvent. À ce point, ça serait mieux s'ils la retrouvaient morte que pas du tout. On prie seulement pour qu'elle apparaisse. Je prie pour qu'ils trouvent tout le monde, je veux que toutes les personnes disparues soient retrouvées vivantes ou mortes, c'est tout ce qui compte », dit Heather. Malgré cette tragédie, Heather est venue prêter main-forte. Elle a passé sa matinée à retirer les débris d'une maison détruite. Chris Saldana, lui, manie une tronçonneuse. Quatre jours qu'il est là, après avoir fait quatre heures de route pour venir aider. « Nos efforts vont continuer jusqu'à ce que toutes les personnes soient retrouvées, pour que les personnes puissent faire leur deuil », explique-t-il. Un élan de solidarité impressionnant Il se réjouit du nombre de volontaires venus de tout le Texas et même d'ailleurs. « Vous n'avez jamais vu autant de pick-up de votre vie. Les gens qui sont venus ici avec leurs propres moyens, leur argent, juste pour répondre au besoin de ces habitants du Texas. Et ça a toujours été comme ça et ça continuera de l'être ». Son ami Roan King entasse des troncs d'arbres. « Je mets mon énergie à profit pour aider les habitants sympathiques ici à Hunt et Kerrville, et tout le long du fleuve, il faut un village pour faire ça. Parfois, on a besoin d'eux et là ils ont besoin de nous ». Des objets dispersés dans cette forêt emportés par l'eau, un matelas est suspendu dans un arbre... Roan King découvre sous des débris une malle turquoise avec un nom écrit en rose, le bagage appartenait à une fille du camp de vacances. « Nous allons chercher la tronçonneuse et tout couper autour pour essayer de la sauver et peut-être essayer de la ramener à la mère ou au père ou à la petite fille à qui manque la mallette », dit-il. Roan et Chris ont ensuite réussi à identifier la propriétaire de la mall.. La jeune fille est décédée, et s'en vont rapport cet objet aux parents. À lire aussiÉtats-Unis: Donald Trump se rend au Texas une semaine après les inondations meurtrières
Des milliers de personnes ont entamé mardi une longue marche à travers la forêt bosnienne pour mettre leurs pas dans ceux qui ont fui le massacre de Srebrenica, il y a trente ans. Le 11 juillet 1995, 8 000 hommes ont été massacrés par des militaires serbes dirigés par le général Ratko Mladic. Un crime qualifié de génocide par la justice internationale. Mais en Bosnie, la mémoire reste divisée entre les familles des victimes qui enterrent toujours les restes de leurs morts, et les nationalistes serbes qui refusent le terme de génocide, et estiment avoir été, eux aussi, victimes de la guerre des Balkans. Un reportage à retrouver dans son intégralité dans Accents d'Europe. À lire aussiÀ Srebrenica, à l'ombre du génocide, l'impossible réconciliation
Onze ans après l'adoption de la nouvelle Constitution égyptienne qui prévoyait son retour sur ses terres ancestrales d'où il avait été chassé il y a plus de soixante ans par la construction du haut barrage d'Assouan, le peuple nubien attend toujours. De notre correspondant de retour d'Assouan, Martin Dumas Primbault C'est jour de mariage dans ce village nubien. Les doufoufs, percussions traditionnelles, résonnent dans toutes les rues. « Il n'y a qu'en Nubie qu'on célèbre les mariages avec les doufoufs, et surtout ici, dans ce village », précise un habitant. La commune de Dehmit, à 60 kilomètres au nord d'Assouan, fait partie de celles qui ont été construites dans les années 1960 pour reloger les déplacés après l'édification du barrage. Amer Nour, 62 ans, est né ici : « La Nubie a été totalement sacrifiée. Malheureusement, nous n'avons jamais obtenu justice. Regardez, 62 ans après le déplacement, il n'y a toujours pas de système d'assainissement dans les villages de déplacés. C'est pourtant un des droits humains les plus élémentaires ». À lire aussiBarrage d'Assouan: les populations nubiennes réclament le retour à leurs terres Cette histoire douloureuse remonte à 1960 lorsque le président égyptien Gamal Abdel Nasser lance la construction du haut barrage d'Assouan. Le projet pharaonique, inauguré le 15 janvier 1971, est une promesse de développement pour le pays, autant qu'un drame pour les Nubiens. Le lac de rétention engloutit les rives du Nil sur lesquels ils vivaient. Près de 100 000 d'entre eux sont déplacés, pour beaucoup relogés dans des villages artificiels construits en plein désert aux alentours de la ville d'Assouan. Leur destin est alors oublié. Jusqu'en 2014, où la nouvelle Constitution égyptienne, née après le printemps arabe, promet dans son article 236 un droit au retour de ce peuple, sous dix ans, sur ses terres ancestrales, au bord du lac Nasser. Onze ans plus tard, Amer Nour fait part de son amertume. « Cette décision n'a jamais été appliquée, dénonce-t-il. Au contraire, il y a eu un décret présidentiel qui établit une zone militaire de 110 kilomètres depuis la frontière avec le Soudan. Alors qu'on aurait dû obtenir 17 villages dans cette zone. C'est une injustice flagrante ! » En 2017, à Assouan, la dernière manifestation pacifique en date avait été durement réprimée par la police. « Dieu nous préserve, il n'y a pas de minorité en Égypte, selon le gouvernement. Nous sommes tous des citoyens modèles. C'est en tout cas le narratif que le gouvernement essaye d'imposer à la population », explique un activiste qui préfère rester anonyme par peur des représailles. « Les Nubiens sont une minorité. Mais ils disent qu'ils sont égyptiens-nubiens, pas l'inverse. Ils sont très fiers d'être égyptiens, mais en même temps, ils clament leur identité », constate-t-il. Aujourd'hui, entre promesses constitutionnelles oubliées et silence imposé, les Nubiens continuent de résister, dans leur langue, et en chanson. À lire aussiTerre de rivalités, à quoi ressemblait la Nubie médiévale ?
En Pologne, l'élection du national-conservateur Karol Nawrocki à la tête de l'État a douché les espoirs des militantes féministes, qui ont vu s'envoler toute possibilité de progrès sur la question de l'avortement dans le pays pour les cinq prochaines années. Depuis 2020, il n'est possible d'avorter que si la grossesse résulte d'un viol ou d'un inceste, ou si elle met la vie de la mère en danger. Si le nouveau président a martelé qu'il ne ratifierait pas de loi visant à libéraliser l'accès à l'IVG, les militantes n'ont pas pour autant l'intention d'interrompre leurs activités. Rencontre avec ces militantes dans le premier centre pour avortement, ouvert il y a quelques mois. Le reportage de notre correspondant à Varsovie dans le centre Dream team abortion est à écouter dans son intégralité sur le site de RFI dans Accents d'Europe. À lire aussiPologne: le candidat nationaliste conservateur Karol Nawrocki remporte l'élection présidentielle À lire aussiPologne: déçues du gouvernement, les manifestantes pro-avortement dans la rue
Le Danemark, en plein réarmement, déploie des drones de surface pour renforcer la sécurité maritime autour de l'Europe du Nord. Ces drones voiliers autonomes ont pour mission de surveiller les fonds marins et le trafic maritime en mer Baltique, point chaud de géopolitique européenne. Notre correspondante était présente en juin à Koge, à 40 km de Copenhague, d'où deux de ces drones ont pris la mer. Le reportage est à retrouver dans son intégralité sur RFI dans Accents d'Europe À lire aussiLe Danemark déploie des drones maritimes pour surveiller les eaux du nord de l'Europe
À la frontière entre la Corée du Nord et du Sud s'étend la zone démilitarisée. Une bande de terre de quatre kilomètres de large interdite aux civils. Tous ? Non, quelques apiculteurs travaillent dans cette zone très fermée. Loin des hommes, à la frontière entre deux pays ennemis, ils produisent un miel unique au monde et tentent de protéger la biodiversité exceptionnelle du lieu. De notre envoyé spécial de retour de Paju, Passé le poste de contrôle de la première division d'infanterie sud-coréenne, nous retrouvons Park Jeong-seon, apiculteur en plein cœur de la zone démilitarisée, tout proche de la frontière avec la Corée du Nord. Un petit terrain entouré d'arbres, loin de la civilisation. Une zone unique dans laquelle il a choisi de travailler. « Ma mère est Sud-Coréenne, mais mon père est Nord-Coréen, il est venu au Sud après avoir fait défection. Je suis né non loin d'ici à Paju, mais je voulais vraiment me rapprocher du pays de mon père, donc j'ai pris un terrain ici. » La zone démilitarisée, interdite aux civils, est par accident un havre de biodiversité. Loin des hommes et de la pollution, c'est un endroit parfait pour les abeilles. Mais au loin, des explosions se font entendre, nous rappelant que l'armée n'est pas très loin, ce qui est parfois un casse-tête pour l'apiculteur. « L'armée ne me laisse venir ici que de 8 à 18 heures. Ce qui peut être embêtant, car parfois, je dois venir très tôt ou rester très tard pour m'occuper des abeilles, mais je suis forcé de partir et d'attendre les heures d'ouverture de la zone démilitarisée. » Une réserve de biodiversité bien protégée par les armes, mais qui n'est pas immunisée contre l'étalement urbain. Une menace pour les abeilles de monsieur Park : « Chaque année, ils enlèvent des barbelés et commencent à construire de plus en plus à l'intérieur de la zone démilitarisée, des logements, des usines. Chaque barbelé enlevé est une menace de plus pour la nature et toutes les autres espèces qui vivent ici, il faut les protéger. » Au-delà de l'environnement, Park Jeong-seon, par son parcours familial et professionnel, est un véritable trait d'union dans une péninsule coupée en deux. Au travers des barbelés, il rêve un jour d'une réunification avec le pays de son père. « Comme beaucoup d'autres ici, je suis partisan de la réunification des deux Corées. Mon rêve serait d'aller en Corée du Nord, élever mes abeilles sur la montagne sacrée Paektusan. »
2024, année record pour le photovoltaïque français. Pour la première fois, la capacité du parc solaire a même dépassé celle de l'éolien terrestre, avec plus de 23 gigawatts. C'est bien, mais la France doit faire beaucoup plus si elle veut atteindre ses objectifs climatiques. En Suisse, autre pays à la traîne en Europe, on teste depuis quelques semaines une nouvelle installation. Une centrale solaire sur rails. Logique presque quand on sait que la Suisse est le pays du train. Sun Ways, la Start-up à l'origine du projet pilote déployé dans le petit village de Buttes en Suisse.
C'est l'un des personnages les plus singuliers de la politique britannique : Nigel Farage, 61 ans, ancien banquier et ex-député européen. Tout à droite de l'échiquier politique, il a largement œuvré en faveur du Brexit, puis a pris une pause, pour animer des émissions de radio et participer à des télé-réalités. Mais depuis 2024, il a réussi à se faire élire député, pour le parti nationaliste Reform, sur un programme en large partie tourné sur l'immigration. Un an après les législatives qui l'ont vu entrer au Parlement, reportage à Clacton-on-Sea, là où Nigel Farage s'est fait parachuter. De notre envoyée spéciale de retour de Clacton-on-Sea, Les 25 canards, des alpagas, neuf cochons gambadent dans les champs de la « ferme de Sandy », au nord de Clacton, un espace de zoothérapie pour enfants. L'année dernière, la ferme a failli fermer « C'était très dur. Avant que Nigel Farage ne nous rende visite, nous avions plus de 35 000 euros de dettes. Il a lancé une cagnotte et en un jour, il a récolté près de 22 000 euros pour nous. » Gary et Sandy, les fondateurs : « C'est difficile de savoir vers qui se tourner, et vous ne parvenez jamais jusqu'aux décideurs… à part Farage. » Le couple, qui travaille sept jours sur sept, n'avait jamais voté jusqu'alors : « Je n'avais pas une bonne opinion de lui, jusqu'à ce que je le rencontre. Il m'a fait changer d'avis en nous rendant visite. Il a certaines idées qui ne me plaisent pas, mais tout ça, ce n'est que de la politique. En 40 ans, je n'ai jamais voté, mais il a eu ma voix. » Un « personnage Marmite » Nigel Farage, c'est un « personnage Marmite », du nom de cette pâte de légumes fermentés : on adore ou on déteste. Début 2024, Farage a lancé sa campagne devant le symbole de Clacton, une ville balnéaire délaissée des touristes : le casino sur la jetée. Nigel Brown, directeur de la communication : « Farage, comme Donald Trump, est très bon pour dire aux gens ce qu'ils veulent entendre. À nous, il nous a dit : " je suis une célébrité, n'hésitez pas à m'exploiter ", et il a fait de la publicité à la jetée. Tout ce qu'il nous a promis, il l'a fait : maintenant, l'avenir nous dira si cela porte ses fruits. » Les opposants de Nigel Farage, eux, critiquent ses emplois secondaires, ses voyages à l'étranger et ses positions : eurosceptiques, anti-immigration, anti-islam. Le communicant souligne le paradoxe Farage : « Je n'aime pas ses méthodes, et je pense qu'il désinhibe certains discours problématiques. Mais il bouscule l'ordre établi. » Après un an au pouvoir, les Travaillistes n'ont pas encore réussi à relancer l'économie ni les services publics, alors Reform UK, le parti de Farage mise sur le dégagisme. À Clacton, Dan Casey, élu local de gauche, tente de dissuader les électeurs : « On l'a bien vu quand il était élu au Parlement européen : c'était un véritable clown. Il ne porte aucun intérêt aux gens d'ici. » Mais Nigel Farage semble s'être fixé un objectif : Downing Street, comme un autre « personnage marmite » avant lui, un certain Boris Johnson. À lire aussiRoyaume-Uni: Nigel Farage, figure emblématique du Brexit, entre au Parlement
En Ukraine, la question des violences sexuelles liées au conflit s'ajoute à la longue liste de crimes de guerre commis par l'agresseur russe. Jusqu'à présent, tous crimes confondus, la justice ukrainienne a recensé plus de 150 000 violations. Et lorsqu'il s'agit de crimes à caractère sexuel, l'État et les organisations non gouvernementales qui y répondent font face à de nombreux obstacles. De notre correspondante à Kiev, Les crimes à caractère sexuel font partie des crimes les plus difficiles à recenser sur le territoire ukrainien. À Kiev, les acteurs qui y répondent se sont rassemblés il y a quelques mois autour de la volonté commune de joindre leurs forces afin de proposer le meilleur cadre possible pour que la justice suive son cours et que les survivants soient mieux pris en charge. La problématique du genre des survivants est centrale. Céline Bardet, juriste internationale à la tête de l'ONG We Are NOT Weapons of War, explique : « C'est important parce que de l'extérieur, quand on parle des violences sexuelles, on pense immédiatement aux femmes et aux filles, à juste titre évidemment. Mais il y a plein d'endroits dans le monde où les hommes et les garçons sont très touchés, et en Ukraine, c'est le cas. » Face à ces violences, le travail des ONG ukrainiennes a été crucial. Olena Suslova, fondatrice du centre d'information et de consultation pour les femmes, épaule les survivants depuis plus d'une décennie : « Nous avons commencé à nous attaquer aux problèmes des violences sexuelles liées aux conflits en 2015. Nous nous sommes ensuite rendus dans les territoires libérés de la région de Donetsk, à Kramatorsk, Sloviansk, Droujkivka pour interroger la population. À cette époque, les gens étaient très effrayés et très fermés. Ils avaient peur de parler des violences sexuelles. Alors, nous avons posé des questions pour savoir s'il y avait eu des violations des droits humains. » À lire aussiUkraine : la kétamine utilisée pour soigner les maux physiques et psychiques des vétérans Ce travail a permis à Olena Suslova d'établir qu'au moins 15% des personnes à qui elle parlait avaient été victimes de violences sexuelles. Des ONG comme Global Survivors Fund agissent à leurs côtés et les aident notamment à obtenir des réparations. Pour Fedir Dunebabin, le représentant de l'association pour l'Ukraine, le plus important pour les survivants est d'être reconnus comme tels : « D'après ce qu'on voit dans nos échanges, la chose la plus utile pour eux, c'est de dépasser le traumatisme, c'est la reconnaissance. C'est de savoir qu'ils ne sont pas seuls et que quelqu'un pense à eux. Pas seulement une personne, mais la société ukrainienne, le gouvernement ukrainien ainsi que la communauté internationale. » À l'heure actuelle, seuls 366 cas de violences sexuelles en lien avec l'invasion russe de 2022 ont été documentés. Un chiffre que les autorités craignent bien en deçà de la réalité. Côté judiciaire, le président Volodymyr Zelensky vient de ratifier l'accord sur la création d'un tribunal spécial pour juger la Russie de ses crimes en Ukraine. Le chemin vers la justice est encore long pour les Ukrainiens, mais il est bel et bien enclenché. À lire aussiGuerre en Ukraine: «Dans les prisons russes, la torture des Ukrainiens est une pratique institutionnalisée»
Le Mondial des Clubs se dispute actuellement aux États-Unis, avant la Coupe du Monde dans un an. Donald Trump compte bien faire de ces événements une tribune. La tâche s'annonce difficile, le ballon rond n'étant pas sa tasse de thé, ni celle de sa base de supporters. De notre envoyé spécial aux États-Unis, Une réplique de la Coupe du Monde posée sur le bureau ovale, le président de la Fifa invité à la cérémonie d'investiture… et pourquoi pas bientôt une série de jongles devant les caméras ? Depuis le début de son deuxième mandat, le républicain Donald Trump joue à fond la carte football. Cependant, tout cela ne semble pas très naturel. « Le soccer est clairement un sport de gauche, et je pense qu'il l'a toujours été, remarque Maxime Aubin, correspondant du journal L'Équipe aux États-Unis. Il s'est construit aux États-Unis sur les minorités ethniques et dès le début, le message a été : "On est des minorités, donc on accepte toutes les minorités parmi nous, qu'elles soient politiques, culturelles, ethniques..." C'était en majorité des personnes très politisées à gauche, donc anti-républicaines. Aujourd'hui, on voit beaucoup de drapeaux LGBT dans les stades, par exemple ». Et forcément, le sport des minorités n'est toujours pas adopté par une certaine Amérique conservatrice. « Je me souviens, et c'était très drôle, avoir parlé à New York à un Irlandais qui a ouvert le premier bar qui passait du football dans les années 1990 à la télévision, se remémore Maxime Aubin. Des gens lui demandaient comment il osait diffuser ce sport. Aujourd'hui, le foot est de mieux en mieux perçu par beaucoup de monde, mais il y a toujours une frange très à droite de la population qui le voit comme l'envahissement d'une culture non américaine. À cela s'ajoute la pensée collective aux États-Unis autour du fait que le soccer est un "sport de filles" avant tout ». À lire aussiSoccer Town : Kearny, berceau du football Made in USA Selon les dernières études, s'il y aurait près de six millions d'Américaines sur les terrains de football et si le pays collectionne les titres mondiaux et olympiques chez les féminines, les pratiquants hommes sont malgré tout plus nombreux. Alors pourquoi ce cliché perdure ? Deux jeunes joueuses de la région d'Atlanta tentent d'expliquer ce phénomène. « Nos équipes nationales féminines, historiquement, ont plus de succès que les sélections masculines. Je pense que ceux qui ne s'intéressent pas de près au soccer font naturellement cette association », avance Isabella. Pour Maddison, il y a « la culture du contact » et « l'idée que le soccer n'est pas un vrai sport ». « Tout cela nous vient des anciennes générations, affirme-t-elle. Ici, on grandit avec comme sport référence le football américain. C'est un sport qui dégage une certaine énergie masculine, un certain machisme. En finir avec ces préjugés, ça prend du temps… Même la génération de nos parents est concernée ». Les générations suivantes le sont un peu moins, comme le constate Michelle Kaufmann, journaliste du Miami Herald : « À l'école de ma fille, une journée "tenue sportive" était organisée… Et la grande majorité des garçons portaient des maillots de football… Maintenant, aux États-Unis, être footballeur, c'est cool pour un ado ! » Un signal bien capté à la Maison-Blanche : la finale de la Coupe du Monde sera organisé tout près de New York, le fief de Donald Trump. Tout sauf un hasard. À lire aussiAux États-Unis, le timide essor du « soccer » avant le Mondial de foot 2026
Depuis quelques années, la scène musicale électronique irakienne se développe. C'est à Erbil, au Kurdistan irakien, que ce genre musical se fait le plus entendre, à l'occasion de grandes célébrations qui réunissent plusieurs milliers de mélomanes pour danser aux rythmes de DJs parfois venus de l'étranger. Ces fêtes s'ouvrent de plus en plus aux femmes irakiennes, qui, elles aussi, souhaitent s'imposer comme DJ et passer derrière les platines. De notre correspondant à Erbil, Elles sont cinq femmes, la vingtaine, toutes réunies par leur passion de la musique électronique dans le studio de l'ONG Action Humanitaire et Journalisme à Erbil. Pour une semaine, la DJ française Olympe 4000 leur enseigne les ficelles du métier. Nour, concentrée sur ses platines numériques, raconte sa rencontre avec la techno : « J'ai commencé à aller à des fêtes, à vraiment aimer la musique, se remémore-t-elle. J'avais envie d'essayer, je me suis mise à le faire pour rigoler chez mes amis. Ma copine jouait et je m'amusais à appuyer sur les boutons avec elle... Puis je me suis dit que je devais apprendre, que je devais devenir une DJ moi aussi, parce que je m'en sortais super bien. » Cette passion n'a pourtant rien d'évident lorsqu'on est une jeune femme ayant grandi à Bagdad, comme en témoigne une de ses camarades, DJ 5AM. « La perception est négative... Particulièrement pour les filles, partage-t-elle. Les hommes, personne ne les jugera. Mais nous sommes des filles en Irak et toutes les femmes DJ seront confrontées à leur jugement ». Ayant déjà fait les frais de cette défiance, la musicienne préfère rester discrète. « Je l'ai personnellement expérimentée avec mon chef, raconte la jeune femme. Il a souligné que j'avais une position élevée dans l'entreprise, pourquoi est-ce que je choisirais alors de devenir DJ ? Je lui ai dit que c'était juste un loisir. Ça ne l'a pas tout à fait convaincu, mais je me moque de son opinion. J'ai fait ce que je voulais. » À lire aussiRegards sur l'Iran : l'art comme acte de résistance Cette persévérance suscite l'admiration d'Olympe 4000. La DJ est une habituée des clubs européens, mais c'est sa première expérience en Irak, où elle s'est fixé plusieurs objectifs au cours de la formation qu'elle dispense auprès de Nour, 5AM et leurs camarades. « J'essaie de les accompagner dans le développement de leur carrière, de faire en sorte qu'elles s'autonomisent et surtout leur donner confiance, explique-t-elle. Il y en a quelques-unes qui savent déjà mixer, mais qui ne se sentent juste pas légitimes de jouer devant un public. Le peu d'amis DJ qu'elles ont autour d'elles, ce sont principalement des hommes. » Encore balbutiante, la scène électronique émergente d'Erbil se veut inclusive et protectrice, des valeurs au cœur des soirées que Nour organise avec ses amis. « Lors de nos évènements, de nombreuses femmes dansent librement, c'est un environnement sécurisant : nous nous efforçons de créer un espace où elles se sentent à l'aise de faire ce qu'elles veulent, tous leurs droits sont garantis », témoigne la DJ. L'un des principaux obstacles à l'expansion de cette industrie musicale, c'est la difficulté pour ses artistes de voyager afin de se produire en Europe où les visas sont délivrés au compte-goutte pour les Irakiens. Pas de quoi effrayer Nour : « Je rêve en grand : je me vois un jour jouer dans les grands festivals. Je sais que j'en suis capable, et j'y arriverai un jour. » À lire aussiMusique : où sont les femmes ?
Dans la bande de Gaza, accéder à la nourriture et à l'aide humanitaire reste une mission quasi impossible. Les distributions d'aide alimentaire, gérées par la Gaza Humanitarian Foundation, une ONG pilotée par Israël et les États-Unis, virent à la tuerie presque quotidienne. Quelques camions d'aide humanitaire sont entrés cette semaine dans l'enclave, mais incapable d'enrayer la menace de famine généralisée qui pèse sur les deux millions de Gazaouis. Depuis le début de l'année, chaque jour, 112 enfants sont admis à l'hôpital pour malnutrition. Une situation dramatique renforcée par une pénurie criante de lait infantile. De nos correspondants à Gaza et à Jérusalem, Derrière la voix du docteur Ahmad Al Farra qui dirige le service pédiatrie et maternité de l'hôpital Nasser de Khan Younès, les images de bébés prématurés en souffrance dans leur incubateur se succèdent. Dans une vidéo sur les réseaux sociaux, le pédiatre a tiré la sonnette d'alarme la semaine dernière sur une situation devenue critique pour ces nouveaux nés, particulièrement à risque.« Comme vous pouvez le voir là, nous avons un bébé prématuré qui dépend complètement intégralement sur une formule de lait artificielle pour les prématurés dont la quantité disponible dans l'hôpital Nasser est proche de zéro. » Et sans entrée rapide et massive de l'aide humanitaire, les conséquences pour ces enfants prématurés sont dramatiques.« Il subira un arrêt de son métabolisme, un déséquilibre électrolytique, il sera dans un état grave, cela peut potentiellement menacer sa vie. » Particulièrement tragique pour les bébés prématurés hospitalisés, cette pénurie frappe toute l'enclave où survit un million d'enfants Sous une tente à Gaza City, Thareefa Bassal 32 ans, essaie de calmer sa fille Qasar, un an. « Il y a une semaine, j'ai réussi à lui trouver du lait en poudre pour 23 euros. Mais maintenant, c'est terminé, je ne peux plus me le permettre. » À lire aussiBande de Gaza: l'enfer de 1,1 million d'enfants pris au piège entre guerre et malnutrition Rien ne compense le manque de lait Incapable de s'offrir du lait comme tant d'autres, Thareefa cherche tant bien que mal des solutions. « J'essaie de remplacer cela avec des suppléments alimentaires, mais ce n'est pas suffisant. Je pense aussi à acheter plus de conserves de fruits ou de légumes fondus. Mais rien de tout cela ne compense le manque de lait. Ses os sont en train de se former, ils ont besoin de lait en poudre, elle a besoin du calcium et de tout ça. » Et l'absence de nutriment adapté se fait sentir sur la santé de Qasar : « Elle a maintenant un an et il est temps pour elle de commencer à marcher et à faire ses dents. Mais je ne sais absolument plus quoi faire pour l'aider à se nourrir correctement. Pendant 14 ans, je n'ai pas réussi à tomber enceinte et maintenant qu'elle est née, je ne peux pas lui assurer certaines choses essentielles. Certains documents à l'hôpital indiquaient qu'elle souffrait de malnutrition sévère, sa température est élevée et elle tousse énormément. Elle est très malade. » En mai, selon l'Unicef, plus de 5 000 enfants entre six mois et cinq ans ont été admis à l'hôpital pour malnutrition aiguë. À lire aussi« Mon enfant fait des convulsions »: la malnutrition accable les enfants de Gaza
Les États-Unis à l'heure du football ou du soccer, comme on dit là-bas. Le pays accueille en ce moment le Mondial des clubs, avant la Coupe du monde, dans un an. Les finales des deux compétitions sont prévues tout près de New York, près aussi de Kearny. Avec 42 000 habitants, c'est une petite ville résidentielle, terre d'accueil de travailleurs venus du monde entier, où se serait joué en 1883 le premier vrai match de football d'une équipe américaine et où depuis longtemps le ballon rond est une religion. C'est un petit coin du reste du monde, à l'ombre des gratte-ciels. Au Scots American Club, on descend des bières brunes en kilt écossais et on regarde du football, version originale. Anderson, 60 ans environ : « C'est une tradition ici. On est la ville du soccer aux États-Unis. La ville du vrai football, pas le foot américain avec les mains. Le FOOT-BALL ». Ancien entraîneur, Bob Anderson est un enfant de la balle, comme beaucoup à Kearny, comme ces gamins du coin rentrés dans l'histoire du soccer américain : « Tu vois la photo là. C'est John Harkes, capitaine de l'équipe nationale. Une légende ». Sur la photo de l'équipe américaine au Mondial 94, John Harkes le fils d'Écossais, côtoie deux amis d'enfance : Tony Meola, italien d'origine, et Tab Ramos, né en Uruguay. Kearny et le soccer, c'est d'abord une histoire d'immigration. Michael Mara, directeur sportif du club local et mémoire de la ville : « Kearny est une terre industrielle de travailleurs Le foot est venu ici au 19ᵉ siècle avec les immigrants écossais, les Irlandais. Maintenant, on a les Portugais, les Brésiliens, les Équatoriens, les Péruviens… Et c'est toujours aussi important pour ces communautés que pour celles qui sont arrivées, il y a cent ans ». Le soccer, « une religion » Pour comprendre un peu mieux, il faut suivre Michael, passer la vieille usine, les rues pavillonnaires typiques et s'arrêter dans la ville jumelle d'Harrison. Devant nous, un petit terrain de quartier. « Ça s'appelle "le court", parce que c'était un terrain de tennis à l'origine, avant le sol était dur, il y avait un arbre au coin, des bancs. John, Tony, Tab, tout le monde est passé par là. Ici, tu apprends à être créatif. On a cette culture du foot de rue, comme en Europe ou en Argentine, ça n'est pas courant aux États-Unis. C'est ce qui fait que cette ville est différente ». Ici, le soccer est une religion. On envoie ses enfants au foot, comme au catéchisme, et avec Coach Glendon, c'est du sérieux : « C'est un honneur, un privilège d'entraîner ici. Beaucoup de nos joueurs ont un vrai, vrai potentiel, c'est à nous les coachs de les pousser, de les accompagner pour leur permettre, de donner le meilleur ». Jusqu'au très haut niveau, c'est l'ambition déclarée de certains, comme Paul, capitaine chez les moins de quatorze ans du club : « Je sais que beaucoup d'anciens de Kearny sont passés professionnels, donc je sens que j'ai quelque chose de spécial. Avec ça, il y a plus de pression, c'est sûr, mais surtout ce sentiment qu'on peut répondre aux attentes. Moi, je veux jouer dans l'équipe nationale d'Équateur. Je veux réussir et inspirer les enfants de mon âge dans le futur ». Et c'est ainsi que s'écrit depuis 150 ans la grande histoire, de ce petit bout d'Amérique, où le ballon a toujours été rond. À lire aussiAux États-Unis, le timide essor du « soccer » avant le Mondial de foot 2026
La consommation de drogue dure est en augmentation constante un peu partout en Europe, et elle entraîne une montée des problèmes sociaux liés aux narcotrafics. Pour atteindre l'Europe, la cocaïne est souvent cachée dans les containers d'engrais agricoles, de cafés, ou de bananes. Ces containers arrivent dans les ports du continent : Anvers, Rotterdam, Bilbao… C'est par exemple le cas de celui de Durrës, en Albanie. On retrouve notre correspondant dans la région, Louis Seiller, juste devant l'entrée du principal port de ce petit pays méditerranéen de deux millions et demi d'habitants. Un reportage à retrouver dans son intégralité dans Accents d'Europe. À lire aussiEn Amérique latine, la Triple frontière, la route sud de la cocaïne vers l'Europe
En Pologne, l'élection du nationaliste et conservateur Karol Nawrocki à la présidentielle est un coup dur pour la communauté ukrainienne vivant dans le pays. Tout au long de la campagne électorale, il n'a cessé de les pointer du doigt, les désignant comme des ingrats représentant un poids pour la Pologne, au cours de débats saturés par les questions migratoires et sécuritaires. Malgré le faible pouvoir de l'exécutif polonais, les 900 000 Ukrainiens réfugiés dans le pays s'inquiètent du message envoyé par le futur chef de l'État. De notre correspondant à Varsovie, Tout au long de sa campagne, Karol Nawrocki n'a eu de cesse de répéter son mantra : « Aidons les autres, mais occupons-nous d'abord de nos propres concitoyens. Si je deviens président, je défendrai un principe simple, mais fondamental : La Pologne d'abord. Les Polonais d'abord. » Un slogan emprunté à Donald Trump, à qui il voue une admiration assumée. Le nouveau président polonais a déjà une idée très précise de la façon dont il compte s'y prendre pour le rendre concret. « Je vais introduire le changement de loi le plus important de ces dernières années. Les citoyens polonais devront avoir la priorité dans la queue chez le médecin et dans les centres de santé. Dans nos écoles, dans les crèches, on veut des enfants polonais. Il faut faire en sorte de stopper les dépenses et de payer les retraites pour les Ukrainiens. Et les allocations sociales devront être avant tout destinées aux Polonais », détaille-t-il dans une vidéo. Publiée sur les réseaux sociaux du président élu, celle-ci a eu un fort écho chez les 900 000 réfugiés ukrainiens dans le pays. Le responsable de la fondation Maison ukrainienne, Oleksandr Pestrykov, craint que ce genre de discours ne renforce le sentiment anti-ukrainiens qui monte dans la société depuis deux ans. « En entendant Nawrocki parler de cette manière, une personne qui n'aime pas les Ukrainiens, mais qui aurait eu honte de le dire, peut maintenant le clamer ouvertement. D'une certaine manière, il vient légitimer les discours anti-ukrainien chez les citoyens polonais », estime-t-il. Déjà en début d'année, 86 % des Polonais jugeaient que les allocations sociales devraient être suspendues pour les Ukrainiens sans emploi. Certes, ici, la plupart ont bien réussi à s'intégrer, notamment en trouvant du travail, un logement et en apprenant le polonais, très similaire à leur langue maternelle. Mais Oleksandr Pestrykov attire l'attention sur la diversité des situations au sein de la communauté. « Pour la plupart des acteurs politiques, les problèmes des Ukrainiens concernant le logement, l'apprentissage de la langue polonaise sont déjà derrière nous. Mais il y a encore 29 000 réfugiés qui dorment dans des auberges de jeunesse. Cette catégorie d'Ukrainiens était très visible au départ, l'État polonais et les ONG voulaient les aider, mais aujourd'hui, ils sont invisibilisés », regrette-t-il. Quelle que soit leur situation, tous les Ukrainiens que nous avons contactés ont refusé de commenter les promesses du président devant notre micro. Un silence parfaitement compréhensible selon le responsable de la fondation. Si son pouvoir ne lui permet pas de faire voter les lois, le chef de l'État conserve un droit de veto face au Parlement à majorité libérale. Et Oleksandr Pestrykov craint qu'il ne s'en serve pour bloquer le renouvellement du statut spécial des réfugiés ukrainiens. À écouter aussiAvec Karol Nawrocki, la Pologne entre l'Europe et Donald Trump
Les Allemands redécouvrent leur Bundeswehr, leur armée nationale. Depuis la guerre en Ukraine, on parle en Allemagne de « changement d'époque ». Les autorités consacrent désormais des sommes faramineuses à la défense. Un fonds de 100 milliards d'euros a été créé. Une augmentation du budget qui devrait être confirmée au sommet de l'Otan. Du jamais vu depuis des décennies dans ce pays où les opinions sur le sujet évoluent. De notre correspondante à Berlin, Il fait une chaleur de plomb en ce dimanche de juin dans la capitale allemande. Au pied du Reichstag, de nombreux stands ont été dressés : armée de l'air, armée de terre, jeunes officiers devant un stand... Le lieutenant Hülya Süzen, cheveux courts et blonds, se réjouit du nouvel intérêt de la population envers la Bundeswehr. Cette femme officier a participé à plusieurs opérations de l'armée allemande en Irak et au Kosovo. « Avant la guerre en Ukraine, la population nous montrait un désintérêt bienveillant. Maintenant, les choses sont différentes et, pour la première fois, comme avec les Américains, les gens viennent nous voir et nous remercient pour notre travail. Cela signifie beaucoup pour moi en tant que soldate », explique-t-elle. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a en effet été un tournant dans les mentalités en Allemagne, marquées par un profond pacifisme. Après la chute du rideau de fer, le pays se sentait en sécurité, protégé par l'Otan et par le grand frère américain. Mais cela change, estime le colonel Andre Wüstner qui préside la Fédération de la Bundeswehr, une organisation qui représente les intérêts des soldats et des soldates. « Les gens qui croyaient, depuis 1990 avec la chute du pacte de Varsovie, que la paix était un état permanent, ont désormais malheureusement conscience de la nouvelle réalité. Malheureusement, il ne s'agit pas d'imposer un militarisme ou de dire que nous voulons faire la guerre. Non, il s'agit de défendre notre mode de vie en paix et en liberté », déclare-t-il. Si les esprits ont évolué, c'est aussi parce que la politique allemande a réalisé un virage à 180 degrés en février 2023 après l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe. Avec son fameux « Zeitenwende » (« changement d'époque »), l'ex-chancelier Olaf Scholz a promis de remettre à niveau la Bundeswehr, longtemps négligée. Un fonds spécial de 100 milliards d'euros a été débloqué et son successeur, le chancelier Friedrich Merz, a, lui aussi, desserré les cordons de la bourse. La situation dans les casernes s'est améliorée, mais les défis restent énormes, comme le constate le colonel Wüstner : « Le défi, c'est que nous devons croître énormément pour répondre aux engagements de l'Otan. L'Allemagne devra compter entre 250 000 à 260 000 soldats actifs. En soi, ce n'est pas si difficile si l'on dispose de 20 ans. Or, nous n'avons pas ce temps. Nous devons grandir de cette manière. En quatre ou cinq ans, cela va être un énorme défi. » On parle donc de plus en plus d'un retour du service militaire volontaire sur le modèle suédois. Concrètement, les jeunes hommes de 18 ans pourraient bientôt recevoir un document à remplir et les profils jugés les plus adaptés seraient invités à un service militaire de six mois. À lire aussiL'Allemagne dit avoir besoin de «50 000 à 60 000» soldats supplémentaires pour renforcer son armée
Les campagnes d'arrestation visant les migrants en Californie ont entraîné des manifestations monstres à Los Angeles et dans d'autres villes. Dans cet État démocrate, un grand nombre de travailleurs du secteur agricole sont sans papiers, et les descentes de la police de l'immigration qui ont touché la petite ville agricole d'Oxnard, au nord de Los Angeles, ont frappé les esprits. Nombreux sont les travailleurs qui restent terrés chez eux, par peur d'aller travailler. De nos envoyés spéciaux de retour d'Oxnard, Sous un soleil de plomb, des paysans cueillent paisiblement des fraises. Il y a dix jours pourtant, non loin de là, une opération de police visait plusieurs migrants sans papiers comme eux. Pas de quoi s'inquiéter pour ce responsable d'une ferme, qui refuse de céder à ce qu'il nomme de la « paranaoïa ». « Si nous étions inquiets, nous aurions mis des gardiens à la porte. Il n'y a pas de quoi s'en faire. Il faut vivre normalement. Je déteste vivre dans la peur », témoigne-t-il. Le climat a bel et bien changé pourtant à Oxnard, bourgade agricole au nord de Los Angeles. Dans le restaurant familial mexicain des Pérez, Raquel, la fille, accueille beaucoup moins de clients depuis l'intervention de policiers d'ICE, la controversée agence fédérale chargée de l'immigration aux États-Unis. « En 18 ans de présence ici, c'était la première fois que je voyais "ICE" dans ce secteur, dans la zone industrielle de la ville. Il y avait deux camionnettes : l'une blanche avec une ligne verte et une inscription "patrouille de protection de la frontière", et un autre véhicule avec aucune indication, mais une plaque d'un autre État. J'ai raconté à ma mère. Quand j'étais devant, là, et que je les ai vus... La façon dont ils m'ont regardé, c'était très intimidant. On voyait la haine dans leurs yeux. J'en ai eu la chair de poule. Et moi, je n'ai rien à craindre. Je suis née et j'ai vécu toute ma vie ici », explique-t-elle. Les incidents d'Oxnard ont instillé la peur. Désormais, beaucoup de travailleurs sans papiers n'osent plus revenir au champ, ni même sortir de chez eux. Angélica, elle, explique qu'elle n'a pas le choix. RFI l'a jointe à distance après sa journée de travail. « On va travailler parce que la peur est toujours moins forte que la nécessité. On travaille dans la chaleur, le froid, sous la pluie, agenouillés souvent. On y va dans la peur et dans l'anxiété. Tout ça pour que la nation puisse avoir de quoi manger sur sa table. Sans nous, les paysans, il n'y aurait rien de tout ça », rappelle-t-elle. Le secteur agricole du comté de Ventura, qui abrite Oxnard, a tiré la sonnette d'alarme. Entre 25 et 45% des travailleurs agricoles auraient cessé de se présenter au travail. À lire aussiÉtats-Unis: l'ICE, une police anti-immigration aux méthodes justifiées par la politique du chiffre
Les États-Unis accueillent en ce moment le Mondial des clubs avant la Coupe du monde dans un an. Ici, le « soccer » est en plein développement, encore plus depuis que Lionel Messi a rejoint il y a deux ans Miami et la MLS, le championnat local. Mais la culture football s'installe-t-elle vraiment dans les habitudes des Américains ? « Tu joues le week-end dans un stade où tout le monde t'acclame, et le lendemain, tu redeviens une personne normale, incognito. » En cinq secondes, l'attaquant gabonais Denis Bouanga a tout résumé. On peut être une star de la MLS – le championnat local de football aux États-Unis –, le meilleur buteur de Los Angeles et passer complètement inaperçu dans un pays où l'offre sportive est aussi vaste que le territoire. Un pays où le soccer est encore loin d'être roi. « Le championnat n'a qu'une trentaine d'années d'existence. Le football américain est encore numéro un, suivi du basket et après, il y a la ligue de baseball, celle de hockey. Les sports universitaires sont très importants chez nous. La MLS d'aujourd'hui, avec Messi, est dans ces eaux-là. Mais la NFL et la NBA sont encore devant », détaille Michelle Kauffmann journaliste spécialisée au Miami Herald. « Cela progresse. Le problème, c'est que les gens comme moi s'intéressent plus aux championnats européens », estime Teddy, maillot de Chelsea sur le dos. Ce supporter est à Atlanta pour assister au match entre Chelsea et le Los Angeles FC. « Je regarde jouer Chelsea depuis que je suis petit. Ici, on a une nouvelle équipe, Atlanta United. Mais bon, c'est dur de passer de l'un à l'autre. La qualité de jeu n'a rien à voir », regrette-t-il. Et pourtant, dans les stades de MLS, l'affluence moyenne est en pleine croissance. Plus de 23 000 spectateurs par match en moyenne la saison passée et les groupes de supporters se structurent. Depuis quatre ans, Jo voyage avec l'un d'eux pour suivre les matchs du Los Angeles FC. « Avant, avec mes amis, on suivait le football américain, le baseball, le basket. Classique, quoi. Et puis on est allés voir un match de soccer et on a tout de suite accroché. L'énergie est incroyable. Maintenant, on voyage partout pour suivre l'équipe. Quand vous voyez la passion des supporters de soccer, c'est dur de ne pas être tenté. C'est vraiment génial », s'enthousiasme-t-il. Alors combien sont-ils, comme lui, les convertis devenus fanatiques ? Difficile à dire, mais la passion est contagieuse, transmissible, dans une Amérique qui se rêve demain en nouveau monde du ballon rond. « Vous connaissez Hugo Lloris ? Mon fils est un grand fan. Il est gardien de but comme lui et il a son maillot signé… Il va lui succéder, j'espère. C'est le plan », plaisante même Jo. À lire aussiMexico promet un Mondial 2026 « sans racisme » en lançant le compte à rebours à J-365
Dans la prestigieuse salle du Musikverein, à Vienne, en Autriche, temple de la musique classique connu des mélomanes du monde entier, se déroulent des concerts pas comme les autres. Des concerts Souvenir qui s'adressent aux personnes atteintes de démence. Le but est de réveiller leur mémoire, à travers la musique et ses émotions. Cet après-midi, la magnifique salle Brahms du Musikverein de Vienne, en Autriche, accueille un concert un peu particulier, Souvenir, destiné aux personnes atteintes de démence et leurs accompagnants. Ils sont plusieurs dizaines à s'installer lorsqu'un trio de jeunes musiciens commence à jouer un programme spécialement conçu pour eux. Mélange de classiques et de variétés du 20e siècle. Une animatrice introduit chaque morceau et encourage même les spectateurs à chanter. On voit des mains en attraper d'autres, des têtes qui se posent sur l'épaule du voisin. C'est le but de ces concerts : réveiller les émotions et la mémoire des spectateurs. Pari réussi pour Elfriede, 84 ans, qui a quitté sa maison de retraite avec son accompagnant Walter. « J'ai toujours aimé me rendre à des concerts et celui-ci était beau, magnifique. J'ai aimé toutes les chansons. C'est toujours un plaisir et quelque chose de spécial au Musikverein. Je crois que je pourrais y aller tous les jours », confie-t-elle. « Par la musique, on peut toucher les personnes atteintes de démence au niveau émotionnel. Ces concerts permettent de bien travailler sur leur mémoire, car après, on en reparle. On leur demande de quoi ils se souviennent. Alors, on chante à nouveau ensemble certains morceaux du programme », abonde son accompagnant. Organisés depuis 2022, ces concerts sont bien fréquentés et pas uniquement par des personnes atteintes de démence. Peter, par exemple, accompagne son fils autiste, Alex. « Mon fils écoute des concerts sur YouTube toute la journée. C'est ce qui le calme. Certains autistes ne peuvent pas supporter quand il y a trop de bruit ou trop de personnes dans une salle. C'est pourquoi les gros concerts sont difficiles. Les personnes ayant des besoins particuliers ne sont malheureusement toujours pas intégrés correctement dans la société. Mais ici, on rencontre d'autres familles avec des enfants handicapés et de nombreuses amitiés se sont déjà nouées », témoigne-t-il. Pour les musiciens aussi, cette expérience est remplie d'émotions, comme l'explique le pianiste Shimon Krizek et la violoniste Susanna Budzinski, tous deux polonais : « Je me souviens que lors d'un concert au cours duquel j'ai joué une aria. Un spectateur, probablement un ancien chanteur, a tenu la dernière note aussi longtemps que cela est possible. J'ai donc dû moi-même tenir cette dernière note. Parfois, j'ai l'impression que je vais me mettre à pleurer. C'est vraiment fantastique », explique, ému, le pianiste. « Habituellement, le public reste assis à apprécier la musique, mais ici, certains se mettent à chanter ou à danser. Ils nous envoient une grande énergie. C'est une expérience très enrichissante, non seulement pour les artistes, mais aussi pour le public, car il est scientifiquement prouvé que la musique aide les personnes atteintes de démence », abonde la violoniste. En Autriche, environ 170 000 personnes sont actuellement atteintes de démence. À lire aussi«Expériences vibratoires»: un cycle d'ateliers pour initier les personnes sourdes à la musique
Dans les régions menacées par les ouragans, les conséquences des coupes budgétaires menées par l'administration Trump au sein de la Fema, l'agence fédérale responsable de répondre aux catastrophes climatiques, suscitent l'inquiétude. Le pays pourra-t-il faire face ? De notre envoyé spécial à Statesboro, Il n'y a qu'une seule route pour accéder à l'île de Tybee, en Géorgie. Derrière la plage, des restaurants, bars et magasins touristiques. Quelques rues plus loin, Joachim Kelly tond sa pelouse. Il vit ici une partie de l'année. L'éventualité d'un ouragan et une baisse du budget de la Fema l'inquiètent. « Il y a beaucoup de personnes qui ne pourront pas reconstruire leur maison si la Fema ne fournit pas l'argent qu'elle devrait. Ils ne vous donnent pas une valise remplie d'argent, pas une somme excessive. C'est une somme estimée responsable à recevoir après une tempête », témoigne-t-il. Il estime que l'agence était loin d'être parfaite, mais la politique actuelle n'est pas la façon de régler le souci. « L'agence devrait être réorganisée. Mais pas par Donald Trump et son gouvernement. Tout ce que j'ai vu qu'ils ont fait a été mal réalisé. Aucune bonne chose ne va sortir de ce gouvernement », redoute-t-il. En plus d'apporter une aide financière aux particuliers, la Fema peut aider les villes ou les comtés. Jonathan Mccollar est le maire de Statesboro, une ville de quelque 35 000 habitants à plus d'une centaine de kilomètres, dans les terres. « On fait très attention à ce qu'il se passe depuis les annonces des coupes pour la Fema. Notre plus importante inquiétude est ne pas pouvoir se préparer et se remettre des catastrophes naturelles auxquelles on pourrait faire face », explique-t-il. La municipalité a déjà reçu la moitié de 2,5 millions de dollars après le passage de l'ouragan Hélène pour nettoyer les débris comme les arbres tombés sur la route. Sans la Fema, « cela serait une situation difficile pour n'importe quelle ville, y compris la nôtre, explique Charles Penny, le directeur général. Mais on nettoiera les conséquences de la catastrophe. Puis on regardera nos comptes. Nous avons des ressources limitées. Le conseil municipal devra envisager d'augmenter les impôts ou alors, on devra couper dans certains services pour être sûr de pouvoir continue à gérer la ville. » Et la prévision des ouragans pourrait être moins efficaces, car l'agence responsable de cela, l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique, a également été touchée par les coupes budgétaires. À lire aussiÉtats-Unis: l'Agence fédérale de gestion de l'urgence secouée peu avant la saison des ouragans
De plus en plus de voix s'élèvent pour mieux protéger les enfants des dangers d'internet et de l'addiction aux smartphones. La France a porté le débat au niveau européen. Avec la Grèce et l'Espagne, elle prône l'instauration d'une majorité numérique fixée à 15 ans. Les familles et le milieu scolaire n'attendent pas pour agir. Des initiatives voient le jour dans de nombreux pays. Au nord de Londres, dans la ville de St Albans, les parents et les établissements ont signé un pacte : « Pas de portable avant 14 ans ». 75% des parents, et 33 écoles sur les 36 que compte la ville en ont fait la promesse. À l'origine de cette initiative, l'école Cunningham Hill Junior School, qui accueille des enfants de 7 à 11 ans. À lire aussiLa France veut une interdiction totale des téléphones portables au collège À lire aussiLe collège sans téléphone
En Italie, la Sicile emboîte le pas à la Calabre dans sa lutte contre la criminalité organisée. Le Parlement régional de la plus grande île italienne, berceau de Cosa Nostra, a voté à la fin du mois de mai une loi intitulée « Libres de choisir » qui étend le programme à toute la région après une expérience pilote à Catane. Ce programme a été mis sur pied par le juge pour enfants Roberto Di Bella et permet aux mineurs issus de familles mafieuses de faire l'expérience d'une nouvelle vie loin de leur famille et/ou de leur région d'origine. Car le destin des enfants qui grandissent avec les règles de la criminalité organisée comme seuls repères est souvent scellé d'avance. Le collaborateur de justice Luigi Bonaventura le sait. Ancien chef de clan de la 'Ndrangheta, la mafia calabraise, il s'engage aujourd'hui auprès des jeunes pour leur éviter une vie écrite d'avance par leurs parents. Cécile Debarge l'a rencontré. Un reportage à retrouver en intégralité dans Accents d'Europe. À lire aussiItalie: vaste opération contre la mafia calabraise, plus de 200 personnes sous enquête À lire aussiLa mafia en Italie: les racines tentaculaires d'un mal mondialisé
En quatre ans, le chiffre d'affaires des géants de la livraison explose. Il est passé de cent millions à six milliards de dollars. Et ce n'est qu'un début : il pourrait grimper jusqu'à quarante milliards d'ici à 2030. Mais derrière cette croissance fulgurante, des coulisses moins reluisantes du secteur : livreurs précaires, petits commerçants fragilisés. Ils filent à toute allure dans le chaos des routes encombrées de New Delhi. T-shirts rouges, oranges, assortis aux scooters. Dans leurs gros sacs : des fruits, un ordinateur, une robe… n'importe quoi peut être livré en moins de dix minutes. Naveen, lui, brave les 45 degrés sans s'arrêter. Il enchaîne les courses, infatigable. Une cinquantaine déjà, rien que cet après-midi. « C'est très difficile. Je n'ai pas vraiment de revenus. Les primes sont très faibles, par exemple 24 livraisons me rapportent seulement quatre ou dix euros. Ce n'est rien du tout. Si une meilleure opportunité se présente à l'avenir, je laisse tomber ce travail de livraison. Je veux trouver un emploi plus stable, moins fatigant. Parce qu'avec la chaleur, la pollution… c'est vraiment difficile ». Le succès des livraisons rapides a aussi ses revers. Les petits commerçants de rue, comme Navratan, qui tient un stand de fruits et légumes en bord de route, en ressentent les effets : « C'est vrai qu'on subit des pertes à cause des ventes en ligne. Et en ce moment, c'est surtout la chaleur qui nous pose problème : les produits s'abîment plus vite. La vente en ligne nous impacte déjà beaucoup, mais avec cette chaleur, les marchandises se détériorent encore plus. On perd beaucoup de ventes à cause de tout ça. Et qu'est-ce qu'on peut faire ? Ça nous affecte énormément. On n'arrive même plus à travailler correctement ». Pour Satish Meena, spécialiste des questions de consommation, le boom économique de ces plateformes de livraisons rapides s'explique principalement par l'implantation de « dark store », ces magasins fermés au public, utilisés exclusivement pour préparer des commandes en ligne : « Les clients sont désormais prêts à mettre le prix pour ce service. Les consommateurs sont passés des commerçants de quartier aux "dark stores". Ces "dark stores" permettent de mieux contrôler les stocks, de préparer les commandes plus rapidement, et d'avoir une visibilité en temps réel sur les produits disponibles. Le taux de satisfaction de la commande chez Zomato est aujourd'hui de 99,9 %. Les clients reçoivent presque toujours ce qu'ils commandent ». En Inde, la Confédération des commerçants, qui représente près de 90 millions de petites entreprises, appelle à un mouvement de protestation nationale contre la prolifération des « dark stores ». À lire aussiDark Kitchens: comment les influenceurs bousculent le monde de la restauration
Dans le chaos de Gaza, il y a des histoires humaines fortes qui passent complètement sous silence. C'est l'une de ces histoires que nous souhaitons vous raconter aujourd'hui. Celle d'une famille gazaouie sauvée - sans le savoir - par des Américains de confession juive. Un scénario digne d'un film rendu possible par la magie des réseaux sociaux et par la bonté discrète, mais puissante, d'une jeune trentenaire nommée Hannah. Une histoire qui nous emmène à Gaza, au Caire et à Brooklyn. De notre correspondante à Ramallah, Dans le tourbillon du Caire, une amie me présente Marwan. Un Palestinien d'une trentaine d'années. Le jeune homme a l'air un peu ailleurs. À 300 km de là, certains de ses amis vivent sous les bombes. Il tente de les aider comme il peut : « J'ai posté un message sur mon compte Instagram. J'ai expliqué que j'essayais de fournir des tentes à des gens à Gaza et que ceux qui voulaient participer pouvaient me contacter. C'est comme cela que tout a commencé. Je ne me souviens pas avec précision du montant que l'on a réussi à lever, mais je crois que c'était entre 80 et 90 000 dollars en tout. » La magie des réseaux sociaux opère. Parmi ceux qui répondent à son appel, il y a Hanna, trentenaire de Brooklyn. C'est elle qui va contribuer à lever le gros de la somme : « Je descends d'Ukrainiens juifs qui ont subi des pogroms en Ukraine au début du XXᵉ siècle. Ils ont dû fuir leur village, certains ont été assassinés. Je sais que si nous sommes vivants, nous, c'est parce que des personnes ont été bons avec mes ancêtres. Comme j'ai bénéficié de cette gentillesse, j'estime que c'est à mon tour d'agir de la sorte avec les autres. » Hanna a été élevée dans une famille juive pratiquante. En hébreu, « Tikkun Olam » signifie « Réparer le monde ». Un précepte du judaïsme qu'elle tente d'appliquer à son échelle. Grâce aux fonds levés par Hanna auprès de la communauté juive de Boston, neuf Gazaouis ont pu quitter l'enclave. À l'époque, chaque passage se monnaie aux alentours de 5 000 euros par tête. À payer cash à une agence de voyage égyptienne. Nous décidons de joindre l'un des Gazaouis exfiltrés. Sofiane est ingénieur en informatique. Il est établi à Boston désormais : « On a décidé de quitter Gaza quand le cessez-le-feu a pris fin et que les Israéliens ont menacé d'entrer à Rafah. On s'est donc dit que la seule solution était finalement de quitter Gaza, d'autant que ma femme était enceinte. » « C'est fou que j'aie choisi ce prénom-là » Le 7 février 2024, jour de son départ de Gaza, restera gravé dans sa mémoire à jamais. Quelques heures seulement avant le passage de la frontière, son épouse donne naissance à sa deuxième petite fille. « J'ai appelé ma fille Ann. » - « Et quand tu l'as prénommée ainsi, tu ne savais rien de Hanna, tu ne connaissais pas son prénom », lui demande notre correspondante. - « Non, et d'ailleurs, j'en ris là… Wow… C'est fou que j'aie choisi ce prénom-là. Je viens d'apprendre son prénom grâce à toi », répond Sofiane, très ému. - « C'est beau ! Ann et Hanna. J'espère que vous vous rencontrerez un jour… » - « Ann et Hanna... Oui, j'espère, répond Sofiane. Je veux lui présenter Ann. La petite Ann ! Ce bébé miraculé né à 3 heures du matin et qui à 7 heures était à la frontière pour quitter Gaza. » Hanna souhaitait rester discrète. Car elle estime que la vraie générosité n'attend rien en retour. Sofiane a demandé son contact. Loin du fracas des bombes, Ann et Hanna vont enfin pouvoir faire connaissance.
En Corée du Sud, les semi-conducteurs font la richesse du pays, mais aussi la souffrance de nombreux travailleurs. Exposés à des produits chimiques, les ouvriers des usines de semi-conducteurs dénoncent un manque de protection qui provoque de nombreux cancers. Un problème sur lequel de nombreuses entreprises ferment les yeux. Après 20 ans de carrière passée à Samsung, Jeong Hyang-suk porte un constat amer sur son travail qui l'a poussée à démissionner en 2015 : « J'étais fière de travailler pour Samsung, mais cela a failli me tuer. Quand je suis arrivée dans l'entreprise après le lycée, je n'avais pas eu de formation sur les dangers de ce métier. On ne savait pas les risques, on allait dans l'inconnu ». Sur les chaînes de production des semi-conducteurs, elle et ses collègues ont été exposés pendant des années à des produits chimiques dangereux entraînant notamment des cancers. Des maladies dont souffrent encore Jeong Hyang-suk et ses anciens collègues : « J'ai fait deux fausses couches, eu des problèmes d'infertilité et deux tumeurs, l'une à l'utérus et l'autre à la tête. Je suis encore aujourd'hui sous traitement. Autour de moi aussi, les gens tombaient malades. Mes deux supérieurs, l'un a eu un cancer de la peau, l'autre un cancer du poumon, ils en sont morts. J'ai aussi vu une collègue accoucher d'un enfant mort-né. Une cheffe d'équipe est décédée très vite, sans que l'on sache de quelle maladie il s'agissait. Avec le recul, on pense que c'était peut-être une leucémie. À l'époque, on ne connaissait pas cette maladie. Elle n'avait que 24 ou 25 ans. Ça m'a choquée ». À lire aussiCorée du Sud: le gouvernement dépose un projet de loi pour augmenter la durée de travail hebdomadaire Plusieurs centaines de produits chimiques différents sont utilisés dans les usines de semi-conducteurs de n'importe quelle entreprise du secteur. Seulement, en Corée du Sud, la législation autorise les sociétés à garder secrète la liste exacte des composants utilisés. Une mesure pour se protéger de la concurrence mais qui ne permet pas de demander des mesures de protection adéquates. Lee Jong-ran, de l'association Sharps, qui regroupe d'anciens employés du secteur, témoigne de la difficulté à mieux protéger les ouvriers : « Samsung par exemple, après avoir été condamné en justice en 2018, s'est excusé pour le manque de protection et a promis des améliorations. Mais dans le même temps, l'entreprise a décidé de sous-traiter une grande partie de sa production à des sociétés externes qui sont moins regardantes et ne peuvent tenir Samsung pour responsable. Le problème s'est déplacé ». Aujourd'hui encore, les travailleurs des usines de semi-conducteurs ont deux à trois fois plus de chance de développer un cancer à cause des produits chimiques. Les syndicats et la communauté scientifique appellent à lever le secret industriel autour des composants de fabrication. À lire aussiLa Corée du Sud investit pour devenir un leader des semi-conducteurs liés à l'IA
Quelques heures après les premières frappes indiennes contre le Pakistan, en réponse à l'attaque au Cachemire le 22 avril dernier, la machine commerciale s'est mise en marche en Inde. Des entrepreneurs ont rapidement lancé des t-shirts, casquettes et produits dérivés aux couleurs de l'opération militaire indienne baptisée Sindoor – du nom de la poudre rouge dont les épouses hindoues parent la racine de leurs cheveux. Une vague de consommation nationaliste hindou qui gagne du terrain, portée par le souffle du conflit. De notre correspondante à New Delhi, Gourdes, enceintes et surtout vêtements aux messages bien tranchés. En Inde, le nationalisme s'affiche en grand. En tête des ventes en ce moment : un tee-shirt blanc barré d'un rouge éclatant, avec l'inscription « Opération Sindoor ». Pour le créateur de la marque, ce n'est pas qu'un effet de mode, c'est une façon assumée de revendiquer son patriotisme. « Ce design ne relève pas seulement de la mode. Il rend hommage au courage et au sacrifice de nos soldats, tout en sensibilisant aux réalités auxquelles ils sont confrontés. L'opération Sindoor symbolise le courage, le patriotisme et l'esprit de l'Inde », estime-t-il. Dans ce quartier riche du sud de New Delhi, même les écrans publicitaires diffusent des visuels glorifiant l'opération militaire indienne. Un élan patriotique que Kashish assume pleinement : « Un jour, c'est sûr, je voudrais porter ce t-shirt. L'opération Sindoor est l'une des plus grandes opérations que l'Inde ait menées jusqu'à présent. Ou même dans toute une vie, on peut le dire. » Sur Internet comme dans les rayons des librairies, le nationalisme indien est omniprésent. Ramesh, libraire, constate une hausse des ventes de livres sur les conflits passés. « Après Sindoor, les livres sur les guerres de 1965 et 1971 sont très demandés », confirme-t-il. C'est en fait le gouvernement indien qui est à l'origine de cette communication minutieuse pour susciter un fort sentiment nationaliste. « Je pense que c'est à ce moment-là que le gouvernement indien a très habilement pris la décision de rendre cette opération militaire "vendable", de la présenter de manière compréhensible et accessible pour le public national – en l'appelant, tout d'abord, l'opération Sindoor. Ce nom vise, encore une fois, à toucher une corde sensible émotionnelle chez le public indien, en disant que l'opération a été lancée pour venger la perte des maris de ces femmes qui se trouvaient au Cachemire au moment de l'attentat. Construire une narration autour de cette opération de contre-terrorisme a donc été crucial pour le gouvernement indien », explique Kunal Puro-hit, auteur et journaliste indien. Depuis son arrivée au pouvoir en 2014, Narendra Modi s'est emparé des codes de la culture populaire pour imprimer sa vision. Clips musicaux, films patriotiques, slogans viraux : tout est bon pour ancrer sa vision dans l'imaginaire collectif indien. À lire aussiInde-Pakistan: les armes se taisent, pas la désinformation
Longtemps terre catholique, l'Irlande voit sa foi vaciller, ébranlée par les scandales d'abus à répétition. Les Irlandais tournent donc le dos à l'Église et sont de plus en plus nombreux à embrasser le chamanisme, une autre forme plus ancestrale de spiritualité. De notre correspondante à Dublin, Un dimanche soir, baigné par la pleine lune. Sur la plage de Killiney, à une heure au sud de Dublin, un feu crépite, la sauge embaume l'air, et plus d'une centaine de personnes prennent place pour un rituel de guérison. Une méditation guidée, portée par le battement hypnotique des tambours. « Nous allons entreprendre un voyage, un voyage vers l'île de nos ancêtres. Nous allons laisser les tambours nous y conduire, comme un cheval au galop », lance Christine Higgins, chamane. Elle est suivie par 18 000 personnes sur Instagram où elle fait la promotion de ses cercles de guérison spirituelle. Et elle est loin d'être la seule sur les réseaux sociaux ! Une simple recherche en ligne révèle plus d'une centaine de chamans en activité en Irlande. « Il y a des milliers d'années, c'est ainsi que nous vivions. Nous étions connectés à la Terre Mère, nous vénérions le soleil, et en Irlande en particulier, nous étions très liés à la vie païenne, beaucoup d'entre nous suivaient les rythmes de la nature. Nous avons un riche folklore, nous avions des druides, nous étions profondément liés au côté mystique de l'Irlande », explique-t-elle. Ainsi, le chamanisme, fondé sur la nature, est perçu aujourd'hui comme une renaissance de ces anciens rituels. « Avec l'arrivée du catholicisme en Irlande, un effort concerté a été déployé pour éradiquer ces pratiques, considérées comme primitives. Mais le monde a évolué. Nous observons, en Irlande notamment, un déclin marqué de la fréquentation des églises et de la foi catholique. C'est, je pense, l'une des raisons pour lesquelles le chamanisme refait surface aujourd'hui. Les gens restent en quête de sens, d'une vie authentique, de quelque chose de plus grand qu'eux-mêmes. Et je crois que le chamanisme répond à cet appel », estime Leisha Redmond McGrath, guérisseuse chamanique celtique. Leisha, également psychologue et coach auprès de dirigeants de grandes entreprises de Dublin, insiste : être chaman ne signifie pas forcément vivre reclus dans la montagne. « Quand les gens apprennent que je suis chamane, parfois ils s'imaginent que je vais débarquer en plumes. Tu vois le tableau ! Mais non, en réalité, beaucoup de mes clients viennent du monde de l'entreprise ! Au début, dès qu'ils voient que je ne suis pas une illuminée perchée, ils me le demandent presque en chuchotant : "Est-ce qu'on pourrait faire un peu de travail chamanique… ?" » Mais l'engouement actuel autour des pratiques chamaniques peut aussi ouvrir la porte aux dérives et arnaques. Sur la plage de galets de Killiney, les tambours ont cédé la place à la musique. Et les plus audacieux s'offrent un dernier rituel : un plongeon rafraîchissant dans la mer, histoire de revenir à ses esprits. À lire aussiAbus sexuels dans l'Église catholique: en Irlande, Derek McCarthy fait face à ses démons
En ce mois de juin, les théâtres russes commencent à envoyer leurs programmes de rentrée avec des pièces mettant en valeur ce que Vladimir Poutine continue à appeler « l'opération spéciale ». Jeux vidéo, films, séries télé, toute l'industrie du loisir et de la culture est mise à contribution. Objectif : toucher le grand public. Avec, à ce stade, un succès encore mitigé chez les spectateurs. De notre correspondante à Moscou, En septembre, Irkoutsk accueillera la 15e édition de son festival national biennal de théâtre. Notamment sponsorisée par Gazprom, la compétition accueillera aussi en parallèle un laboratoire dont le thème est cette année « l'Opération militaire spéciale dans l'art théâtral moderne ». Vingt-huit candidatures de pièces originales écrites en russe, jamais mises en scène ni publiées auparavant ont été acceptées. Trois seront ensuite sélectionnées pour être jouées en public. Ce n'est qu'une des nombreuses illustrations de l'effort des autorités pour pousser une culture grand public toute tournée vers le soutien à son « opération spéciale ». Souci prononcé d'être proche des combattants De la capitale russe à Saint-Pétersbourg, de Kaliningrad à Vladivostok en passant par Kazan et Novossibirsk, cette année encore plus que les précédentes, chaque grande ville ou moyenne de Russie a vu se jouer dans ses théâtres au moins une pièce dite « patriotique », illustrant ou vantant l'effort de guerre de l'armée russe, héroïsant ses soldats, avec un souci prononcé d'être aussi proche des combattants que possible. À Moscou cette année, sur la scène du célèbre « Sovremennik », se jouait une pièce intitulée Call Sign Silence : l'histoire du nouveau départ dans la vie civile d'un vétéran handicapé revenu à la vie civile, « renforçant le moral des citoyens de Russie » selon certaines critiques. Dans les journaux de petites villes comme Yoshkar-Ola, à un peu plus de 800 km de la capitale, on peut aussi lire à propos de la présentation d'une pièce ce type de description : « Des témoins des événements ont aidé les artistes à recréer des actions militaires réalistes sur scène (..) Ils ont enseigné comment tenir correctement une mitrailleuse et exprimer la douleur d'une blessure pour que le spectateur vous croie ». Ces « témoins des événements » sont bien sûr les soldats. Même le théâtre amateur ou les troupes des écoles s'y sont mis. « Des films et des poèmes écrits parfois trop rapidement » Sur le grand et le petit écran, on peut aussi aujourd'hui voir des films et des séries dans la même veine que le premier modèle du genre : une série intitulée 20/22, soit une histoire d'amour contrariée qui se déroule pendant le siège de Marioupol, présentant, dans le droit fil du narratif du Kremlin, les soldats russes comme libérant la ville d'un fascisme destructeur. Malgré tous les efforts des institutions, disposant souvent d'un budget généreux pour subventionner toute proposition, le public n'est pourtant pas toujours au rendez-vous. La faute à une qualité qui laisserait à encore à désirer, juge une critique d'art qui fait autorité en Russie : « Aujourd'hui, le point de vue très patriotique trouve un débouché artistique, mais je ne vois pas encore une véritable forme d'art, juge-t-elle. Pour l'instant, et ce n'est que mon opinion personnelle, ce ne sont que des tentatives. Et elles ne sont pas toutes professionnelles. Il y a des films souvent réalisés à toute vitesse, ou bien des poèmes écrits très rapidement. On voit bien aussi ce qu'on appelle la poésie « Z ». Mais dans ce domaine, il n'y a tout simplement pas de bons poètes. Enfin, peut-être un. Il y a Igor Karaulov, qui est généralement considéré comme un vrai écrivain. Mais à bien des égards, ce sont des poèmes aux formes très simples, sans véritable élaboration. » À lire aussiSoutenir, critiquer ou se taire, les artistes russes face à un choix lourd de conséquences Difficile d'échapper à la production « patriotique » La qualité insuffisante est souvent invoquée par les spectateurs qui revendiquent ne pas être intéressés. « Si vous êtes en vacances, vous n'irez pas au cinéma voir ce type de film, même si on vous donne une réduction de 95%. Personne n'en a envie, car c'est mal fait, ça n'a rien à voir avec l'art », explique un jeune étudiant. Ils sont aussi encore nombreux ceux qui cherchent à fuir le plus possible dans leur vie privée, sur leur temps libre, tout ce qui peut leur rappeler la guerre. Comme cette psychologue moscovite, la quarantaine, qui explique : « Je ne regarde pas ce genre de cinéma et je ne l'ai jamais fait, car il provoque des émotions que je n'aime pas vraiment ressentir. Je suis assez sensible et j'essaie de me concentrer sur le positif. Dans ce genre de films, il y a toujours un côté dramatique et douloureux, que, personnellement, j'essaie de minimiser, car je vis déjà suffisamment d'expériences douloureuses dans ma vie. Et on entend parler de morts tous les jours. » Au box office russe de 2025 jusqu'ici, trois films sur le podium : le conte de fées Le Magicien de la cité d'Émeraude (version soviétique du magicien d'Oz), Nezha vaincra le Roi Dragon, un dessin animé chinois, Le Prophète, une biographie de Pouchkine pour adolescents. Il y a bien un film de guerre dans le Top 10, mais il s'agit d'un film d'anticipation qui se déroule dans les fonds marins. Pourtant, à en croire un jeune Moscovite, il est difficile d'échapper à la production contemporaine « patriotique » : « Bien sûr, la propagande est moins oppressante aujourd'hui qu'en URSS. On ne vous dit pas de toutes parts qu'il faut absolument voir tel film, mais le ressenti est très similaire. Mais même si vous n'êtes pas obligé de voir telle ou telle production parce que vous n'en avez pas envie, vous vous retrouverez forcément de toute façon à voir la bannière ou la publicité et vous ressentirez cette émotion écœurante. » Trop de pression peut-être, surtout pour ceux qui, comme ce jeune homme, doivent déjà garder leurs opinions anti-guerre en Ukraine pour eux et s'évader, seuls devant un écran d'ordinateur, en regardant grâce aux VPN des films et séries interdits. Cela n'empêche pas, parfois, des petits gestes, comme celui d'un étudiant qui cet hiver a laissé un commentaire sur le site internet d'un théâtre de Moscou, critiquant la présence de la lettre « Z » sur sa façade. Pour expliquer ces quelques lignes à RFI, il avance : « Je ne soutiens pas l'opération spéciale, je ne soutiens pas la guerre, ni le régime actuel, je pense que toute sa politique est extrêmement mauvaise, et j'essaie de m'y opposer autant que possible. Donc, je n'irai plus jamais dans ce théâtre tant qu'un « Z » y est suspendu. Je pense d'ailleurs que se rendre dans un tel théâtre est un soutien indirect. D'ailleurs, je ne monterai pas non plus dans un bus sur lequel la lettre Z est affichée. Je sais bien que dans la situation actuelle, il est extrêmement difficile de ne montrer aucun soutien, que tout le monde est sous une pression folle, mais je pense que n'importe quel théâtre peut quand même se permettre de ne pas accrocher une énorme lettre Z sur la façade. » À lire aussiRussie: le pouvoir conforte sa reprise en main sur la culture « Faire profil bas n'est pas se taire » Pour combien de temps encore ? Depuis 2022, les autorités ont méthodiquement procédé : elles ont visé toutes les têtes des grandes institutions culturelles connues à Moscou ou à Saint-Pétersbourg. Toute direction jugée pas assez favorable au pouvoir et à sa décision d'envoyer ses soldats en Ukraine a été remplacée par des figures dont la loyauté aux yeux de tous ne pouvait faire aucun doute. A la tête de grands musées, on retrouve par exemple aujourd'hui des personnalités réputées proches des services de sécurité. Parfois, certains d'entre eux siègent simplement au conseil d'administration, mais cela suffit pour assurer un verrouillage désormais total. Quant aux artistes critiques, ceux qui n'ont pas fui courent un risque très élevé de se retrouver derrière les barreaux. Le terme « critique » recouvre d'ailleurs un champ très large. Témoin l'affaire de la metteuse en scène Evguenia Berkovitch et de la dramaturge Svetlana Petriïtchouk, condamnées en juillet dernier à quasiment six ans de colonie pénitentiaire par un tribunal militaire. Motif : « apologie du terrorisme ». En cause officiellement : leur pièce de théâtre intitulée « le faucon », Saluée par la critique et le public, elle avait reçu en 2022 deux Masques d'or, la plus prestigieuse récompense du théâtre russe. Elle raconte l'histoire de jeunes femmes russes recrutées sur internet par des islamistes en Syrie et partant les rejoindre pour les épouser. Soit, disent les artistes qui ont toujours clamé leur innocence, l'inverse de ce qui leur est reproché. D'Evguenia Berkovitch, et des motifs de son arrestation, une personnalité du monde culturel russe dit : « Mon opinion personnelle est que le vrai problème est qu'elle n'était pas capable de se taire, sur aucun sujet. Evguenia a toujours dit que le théâtre ne pouvait pas être en dehors de son temps, en dehors des événements. Que si le théâtre ne parle pas ce qu'il se passe dans le monde, au moment où ça se passe, alors cela signifie qu'il n'est pas honnête » Sans débouchés possibles pour exprimer leur vision – une des personnes rencontrées lors de ce reportage parle de « zone de silence » –, aujourd'hui les artistes qui ne soutiennent pas activement la politique du pouvoir et qui sont restés en Russie se réfugient, dit cette personnalité du monde culturel, dans l'expression de leurs idées de la manière « la plus allégorique possible ». À lire aussiRussie: le musée du Goulag à Moscou fermé Un jeu vidéo russe sur la guerre en Ukraine « Malheureusement, reprend-elle, il y a maintenant une fracture entre "ceux qui sont partis" et "ceux qui sont restés". Beaucoup de gens qui sont partis ont commencé à critiquer très durement ceux qui sont restés en leur disant : "Vous avez cédé, vous avez abandonné, il est impossible de rester dans ce pays sans devenir un salaud". Je pense que ce n'est pas vrai. Qu'il y a toujours des options. Qu'il y a une différence entre se taire et faire simplement profil bas. La question est de savoir comment vous le faites, et quel genre de personne vous êtes. Même si pour moi, même si la guerre se terminait, la situation sur le plan intérieur ne changera pas. » Le pouvoir renforce chaque jour un peu plus son investissement dans la culture. Vladimir Poutine a ainsi ordonné ce printemps la création d'un lieu à Moscou tout entier dédié à promouvoir « le théâtre patriotique moderne ». Date butoir : le 30 novembre prochain. Une production nationale russe en tout cas, semble elle, à en croire en tout cas son chef de projet, tirer largement son épingle du jeu. Il s'agit d'un jeu vidéo intitulé Squad 22: ZOV. Décrit comme « basé sur l'expérience réelle de la guerre des vétérans russes en Ukraine », il propose des volets comme « Campagne de printemps du Donbass, 17 missions sur les combats de 2014 », ainsi que « Marioupol 2022 » et « Contre-offensive ukrainienne 2023 » et revendique 100 000 utilisateurs quotidiens sur la page internet où on peut le télécharger depuis fin janvier dernier. Présenté sur la plate-forme Steam depuis le 30 mai dernier – et bloqué sur son segment ukrainien –, il y est décrit comme « officiellement recommandé par l'armée russe comme manuel de tactiques d'infanterie de base pour l'entraînement des cadets et de la Iounarmia (organisation d'État russe pour les jeunes cadets de l'armée) », plaçant le joueur « aux commandes d'équipes de soldats russes qui combattent les forces armées ukrainiennes, font des prisonniers et libèrent des otages ». Ce même 30 mai dernier, le chef de projet affirmait au quotidien légitimiste les Izviestia que 54% de son chiffre d'affaires provenait déjà... des États-Unis. À lire aussiSoutenir, critiquer ou se taire, les artistes russes face à un choix lourd de conséquences
La Suisse n'a pas de pétrole, mais elle a de l'or et des fonderies. Cinq des sept plus grandes raffineries de métaux précieux se trouvent en Suisse et elles tournent à plein régime depuis le début de l'année et que Donald Trump a déclenché une panique généralisée sur les marchés avec ses droits de douane. Le cours de l'or, valeur refuge par excellence, a explosé, en même temps que les exportations vers les États-Unis. De notre envoyé spécial à Mendrisio,Nous sommes à Mendrisio, petite localité du canton italophone du Tessin, en Suisse. L'entreprise Argor Heraeus est l'un des leaders de ce secteur pas comme les autres. « Ce sont les fourneaux. On fait fondre l'or dans ces sortes de casseroles en carbone à plus de mille degrés. On obtient un or brut liquide qu'on verse dans des moules. On peut alors le travailler », explique le directeur, Robin Kolvenbach, incollable sur tout le processus industriel.Deux types de lingots existent : les lingots moulés, à l'aspect plus brut, et les lingots frappés, plus lisses et plus chers aussi. Pour les tailles, cela va d'un gramme pour les petits investisseurs jusqu'au plus gros lingot, popularisé par les westerns, dont la valeur peut atteindre les 1 300 000 dollars, tel ce lingot présenté lors de la visite. Pourtant, cet ouvrier le jure, il n'y fait même plus attention. « Pour moi, c'est comme si c'était une tablette de chocolat. Je vous assure, je ne pense pas à sa valeur. Bien sûr, je le manipule avec tout le soin requis pour un métal précieux. Mais ce serait du bois ou du fer, ce serait pareil », raconte-t-il.Chaque année, 1 380 tonnes d'or sortent de la fonderie, un peu plus cette année. Même si les exportations ont sensiblement baissé depuis quelques semaines, assure Robin Kolvenbach, les coffres des investisseurs américains sont désormais pleins à craquer. « À mon avis, cette ruée vers l'or américaine est terminée. Mais les investisseurs vont continuer à acheter de l'or pour s'affranchir du dollar tant qu'il y a cette insécurité à propos de la dette américaine. »Avant Donald Trump, la Suisse exportait une dizaine de tonnes d'or chaque mois aux États-Unis. Après son élection, elle exporte dorénavant plutôt 100, voire 195 tonnes. Au plus fort de la crise, le patron d'Argor Heraeus assure que le marché Nord-Américain ne représente que 10 à 20% maximum de ses ventes. Si Donald Trump décidait de taxer les métaux précieux au même titre que le fer et l'aluminium, les fonderies suisses seraient affectées. Mais, avec un prix qui flirte avec les 3 000 euros l'once d'or – 31 g à peu près – et qui pourrait encore grimper, le secteur a encore de quoi voir venir.À écouter aussiDécryptage: pourquoi le prix de l'or atteint-il des records ?
Au nord du Mexique, dans l'État de Sonora, la petite baie de Kino est ouverte sur la mer de Cortés. La région abrite une importante biodiversité et faune marine, mais l'équilibre a été bouleversé ces dernières décennies par la surpêche et des mauvaises pratiques. Alors, depuis quelques années, la petite communauté d'environ 10 000 habitants s'organise. Les pêcheurs, celles et ceux qui vivent de la mer tentent de prendre en main eux-mêmes au mieux la gestion de leurs ressources. De notre envoyée spéciale de retour de la baie de Kino« Là, il faut malaxer. » À marée basse, les femmes remuent les limons pour déterrer et compter les palourdes : « Regarde, il y en a de toutes les tailles. Ça nous fait plaisir de voir cela. Avant, quand on venait, il n'y en avait pas une seule. » De jeunes coquillages élevés en laboratoire ont été semées quelques mois plus tôt dans l'estuaire par une coopérative de femmes : « La palourde grandit et donc on peut la récolter en toute saison. »Ce jour-là, Felice Campo et Delfina Mendoza ne les ramassent pas. Puisque les quantités extraites dépassent la capacité de l'animal à se reproduire, elles préfèrent repeupler : « On a vu que des pêcheurs venaient et sortaient des palourdes. C'est pour cela que je dis que le bénéfice est pour toute la communauté. »À Kino, une dizaine d'associations civiles s'investit dans la préservation de l'écosystème de la baie. La surpêche de la part de certains locaux est souvent pointée du doigt pour expliquer la disparition des espèces. Mais pour Edgar Magdaleno, professeur au Prescott collège, elle ne doit pas servir à faire oublier la responsabilité des grands intérêts privés. Notamment l'élevage de crevettes, très présent dans la région, qui domine la production nationale. « Le secteur a dévasté l'estuaire et la lagune. Et il y a aussi tous ces grands bateaux de pêche aux crevettes et à la sardine qui viennent ici dans le golfe. Ils utilisent des chaluts et détruisent les fonds marins. Pour une seule espèce, ils en détruisent quarante et cela affectent toute l'activité de subsistance de nos pêcheurs. On est une communauté abandonnée par les autorités. »À lire aussiAvant la conférence onusienne sur l'Océan, des scientifiques publient 10 recommandations pour le préserverProtéger les ressourcesSans contrôle et face à l'impuissance des institutions mexicaines, les habitants de Kino s'organisent entre eux pour protéger leurs ressources. Un peu plus au nord, une coopérative s'est vu confier 25 hectares de bas fond. Daniel Torre explique qu'en échange de sa protection, il a le droit de plonger pour pêcher des pétoncles géants : « On fait du monitoring sous-marin pour surveiller les quantités de biomasse à l'intérieur de la zone. »À l'aide d'un tube alimenté en air par un compresseur, il descend à une douzaine de mètres profondeur. Depuis plus de 20 ans. Il est issu de la troisième génération de plongeurs dans sa famille et n'imagine pas faire autre chose : « huit personnes sur dix vivent de la pêche ici. Si une espèce s'effondre, on trouvera des alternatives. Que ce soit la raie manta, le requin, le crabe ou bien les bulots. Il s'agit de pouvoir nourrir sa famille. Mais j'espère qu'avec ce qu'on fait là, les futures générations pourront continuer à pêcher comme nous. »À lire aussiPourquoi faut-il combattre la pêche illégale?
Comment raconter Gaza alors que l'enclave palestinienne reste fermée aux reporters étrangers et que le nombre de journalistes palestiniens tués dépasse désormais les 200, selon le syndicat des journalistes palestiniens ? Une tâche d'autant plus compliquée en Israël, qui semble rester bloqué au 7-Octobre. Un média détonne pourtant dans le paysage médiatique israélien, il s'agit du site d'information « +972 ». Il rassemble une vingtaine de journalistes israéliens et palestiniens, unis pour raconter au mieux l'actualité de cette terre qu'ils ont en partage. Du journalisme « from the river to the sea » comme ils aiment à dire. Depuis le 7-Octobre, l'affluence explose. De 20 000 lecteurs avant la guerre, les rédacteurs en chef du site d'information +972 disent être passés à 120 000 visiteurs par mois, avec des pics pouvant atteindre plus d'un million sur certaines enquêtes. Alors, à quoi ressemble le quotidien de cette rédaction mixte ? Est-ce un laboratoire ? Ou une utopie ? Amira Souilem est allée à la rencontre des équipes en Israël, mais aussi en Cisjordanie occupée.Ce soir encore à Tel Aviv, des centaines d'Israéliens manifestent pour demander la fin de la guerre à Gaza. Des photos d'enfants gazaouis à la main, ils espèrent créer un électrochoc dans l'opinion publique. Dans la foule, caché derrière son objectif, Oren Ziv, journaliste israélien : « La première semaine de la guerre, juste après le 7 octobre, le chef de la police a dit aux manifestants que si certains voulaient manifester en solidarité avec Gaza, il pouvait affréter des bus pour les envoyer là-bas. C'est important d'être là parce que cette mobilisation vise à faire en sorte que les Israéliens réalisent ce qu'il se passe à Gaza ». À lire aussiLes journalistes gazaouis réclament un statut de victimes à la Cour pénale internationaleOren Ziv travaille pour le site d'information +972, un clin d'œil à l'indicatif téléphonique d'Israël. Sa vocation est née pendant la seconde intifada au début des années 2000. Il cherche alors à comprendre pourquoi ses voisins jettent des pierres et s'engage dans une association israélo-palestinienne. L'engagement, c'est l'ADN de +972. Ses locaux sont basés à Tel Aviv. Ghousoon Bisharat, en est la rédactrice en chef. Elle est Palestinienne d'Israël. « Le génocide à Gaza et les atrocités du 7-Octobre, c'est du jamais vu. On n'a jamais vu autant de cruauté. On est tous encore traumatisés par ce qui se passe. On ne s'en remet pas encore. Je crois que la seule solution, c'est d'avoir un État, un État binational où Palestiniens comme Israéliens juifs vivent ensemble. Je sais que ça a l'air d'un rêve en ce moment, mais c'est dans cet endroit que j'aimerais que mes enfants vivent ». Le rêve de liberté pour tous semble bien loin pour le moment. À une centaine de kilomètres de là, en Cisjordanie occupée, Basel Adra est l'un des reporters palestiniens du site d'information. En mars dernier, il a remporté à Hollywood l'Oscar du meilleur documentaire pour son film No Other Land. Il y racontait le quotidien de son village soumis à la violence des colons israéliens. Parce qu'il travaille avec des Israéliens, le jeune homme a essuyé des critiques de la part de certains de ses compatriotes. Il tente de passer outre ces remarques qu'il juge déconnectées des réalités et binaires : « Hier, des activistes israéliens ont reçu des coups de la part de colons et la police n'a rien fait pour les protéger alors qu'ils sont Israéliens. Et ce type de militantisme qui tente de montrer la réalité, c'est important ».De Tel Aviv aux villages de Cisjordanie occupée, les membres de +972 continuent de penser que le cycle de la violence et de l'injustice peut être rompu. Eux, feront tout pour.À lire aussi«Ils ont vidé les maisons»: en Cisjordanie, l'armée israélienne détruit le village du film «No Other Land»À lire aussi«La presse est attaquée»: en Cisjordanie occupée, la répression israélienne contre les journalistes s'aggrave
Quelle prison pour les séniors, une population à la santé fragile ? Reflet de l'évolution démographique, en Allemagne, la population carcérale ne cesse de vieillir. La plus grosse unité de prisonniers séniors du pays se trouve à Bielefeld-Senne, en Rhénanie, à l'ouest du pays. C'est une prison ouverte et le concept serait particulièrement bien adapté à cette population âgée. Difficile de penser à une prison quand on franchit la porte de l'établissement pénitentiaire de Senne, à 200 km à l'est de Cologne. Ici ni barreaux, ni parloir. Le hall donne directement sur le parc. Trois prisonniers vêtus d'un t-shirt rouge passent la serpillère. Tous les espaces sont ouverts et les cheveux gris ou blancs dominent. La directrice du département sénior, Meike Mönikes : « Nous voyons ici beaucoup de personnes atteintes de vieillissement précoce, par rapport au reste de la population. Nous avons des personnes atteintes de diverses formes de démence, de cancers, des personnes qui ont du mal à se déplacer, ont besoin d'un déambulateur. »Comme le reste de la population, la population carcérale vieillit en Allemagne. Et les séniors ont des besoins spécifiques. À la prison de Senne, les départements réservés à 87 séniors occupent deux étages accessibles par ascenseur : « Il y a deux ascenseurs. Le long des murs, il y a une balustrade qui court tout le long du couloir, une salle de bain avec des douches. Et dans chaque département de douche, il y a des poignées pour s'accrocher et un tabouret sur lequel on peut s'assoir pour se laver. »Un taux d'échec proche de zéroLe détenu affecté à la bibliothèque nous fait visiter sa chambre : « Entrez ! pendant des années, j'ai été dans une autre prison, fermée. Mais ici, je suis redevenu un être humain. »La réinsertion, c'est le crédo de la directrice, Kerstin Höltkemeyer-Schwik : « Dans une prison fermée, vous ne pouvez pas préparer les gens à la liberté. Une prison fermée, c'est comme apprendre à nager hors de l'eau. Pour ça, il faut leur donner petit à petit plus de liberté, aussi en dehors de la prison. C'est de toute façon bien plus sûr pour la société dans son ensemble. »Tous les personnels en sont convaincus, le concept de la prison ouverte a fait ses preuves. À Senne, le taux d'échec est stable, entre 0,1 et 0,3% des prisonniers, qui ne rentreraient pas à la fin du week-end par exemple. Reste un défi, la fin de vie en prison. Et le développement de soins palliatifs sur place pour ceux qui, détenus de longue date, préfèreraient finir leurs jours dans le seul environnement qu'ils connaissent.
C'est l'un des pays qui déforeste le plus au monde. Si aujourd'hui, l'essentiel de la production de bois est assurée par des plantations, certains États autorisent toujours la coupe de bois endémique. Et en la matière, c'est la Tasmanie, un État très peu peuplé et dont les forêts sont, pour partie, classées au patrimoine mondial de l'Unesco en raison de la richesse de la biodiversité qu'elles abritent, qui bat tous les records. Une activité menaçant certaines espèces animales, de plus en plus critiquée, et qui par ailleurs crée au final très peu d'emplois. Reportage en forêt où les arbres tiennent encore debout. De notre correspondant en Tasmanie,« Non à la coupe des arbres endémiques », c'est le cri de ralliement de plus de 4 000 personnes qui ont défilé à la fin mars 2025, dans les rues de Hobart, la capitale de la Tasmanie. Cet État australien est non seulement l'un des derniers à autoriser l'abattage des forêts endémiques, il est aussi celui qui le pratique le plus massivement. Près de 20% de la production de bois en Tasmanie est issue de ces forêts. Une situation qui choque Sue, l'une des manifestantes : « Pourquoi détruire ces magnifiques écosystèmes, indispensables pour les animaux (qui y vivent), pour purifier notre air et l'eau, toutes les choses dont nous avons besoin, simplement pour en faire des copeaux de bois. Les forêts, c'est la vie, et nos forêts les plus anciennes doivent être protégées. »Plus de 70% des arbres endémiques coupés sont en effet transformés en simples copeaux de bois, qui sont ensuite exportés vers la Chine et le Japon, pour fabriquer du papier et du carton. Une activité qui provoque par ailleurs beaucoup de gâchis. C'est ce que nous montre Jenny Weber, de la Fondation Bob Brown, en nous emmenant sur une zone de coupe. Au milieu d'une zone entièrement rasée, trône une énorme souche, de plus de trois mètres de diamètre : « Nous nous tenons sur la souche d'un arbre qui avait plus de 500 ans… Et ce qui est tragique, c'est qu'après avoir été coupé, les bûcherons se sont rendu compte qu'il était trop gros pour être débité et chargé sur un camion. »Des espèces animales menacées d'extinctionUn immense tronc git juste à côté de cette souche, à l'orée d'une forêt pour l'instant encore intacte. Elle abrite de nombreuses espèces animales, qui pour certaines sont menacées d'extinction par les bûcherons. C'est notamment le cas de la perruche de Latham, le perroquet le plus rapide du monde, comme nous l'explique Charley Gros. Il est Français et conseiller scientifique de la fondation Bob Brown : « Ces oiseaux ont besoin des cavités dans les arbres pour se reproduire et les exploitations forestières détruisent ces forêts. Donc s'il n'y a pas de cavités, il n'y a pas de nid, il n'y a pas d'enfants, il n'y a pas d'espèces. »L'organisme chargé de la gestion des forêts pour l'État de Tasmanie assure pour sa part exploiter de façon raisonnée les forêts, et replanter systématiquement des arbres là où il y a eu abattage. Mais ces fameuses cavités, indispensables pour la reproduction de ces perruches, prennent, elles, plusieurs siècles à se former. L'impact économique de cette activité est par ailleurs très limité : la coupe d'arbres endémiques a rapporté moins de 50 millions d'euros en 2023, et l'ensemble de la filière bois fait travailler moins de 1% de la population active en Tasmanie.À lire aussiAustralie: près de 400 «dauphins-pilotes», coincés dans une baie en Tasmanie, sont morts
Au début du printemps, une série Netflix a ému, choqué, touché, voire indigné des millions de personnes. La mini-série britannique Adolescence, qui racontait le meurtre d'une jeune fille par un de ses camarades de classe, radicalisé sur internet par l'idéologie masculiniste et incel – l'idée que les hommes n'ont pas le choix que d'utiliser la violence pour parvenir à des relations avec les femmes, popularisée par des influenceurs comme Andrew Tate. Au Royaume-Uni, le gouvernement a même décidé de diffuser la série dans les écoles à des fins éducatives. Mais le programme a aussi permis de lancer un vaste débat sur la santé mentale des garçons et des jeunes hommes. Rencontre avec ceux qui essaient de faire changer les choses. Le regard un peu fuyant, les bras tatoués du prénom de ses deux filles, Ben a 26 ans. Après une enfance difficile, entre un père alcoolique et décrochage scolaire, il se crée une idée très précise du type d'homme qu'il veut incarner : « Un homme traditionnel, qui protège, qui ramène l'argent à la maison, s'assure que sa famille a un toit et de quoi manger. Pour moi, c'est ça, être un homme. C'est beaucoup de pression, mais c'est mon choix. Mais je crois quand même que la société a une responsabilité majeure dans ce qu'on attend d'un homme. »Et parmi ces attentes, il y en a une qui le touche particulièrement : l'impression de ne pas pouvoir exprimer ses émotions, en tant qu'homme. « Ma manière de les gérer, c'était de m'automutiler. Ce n'est pas pour rien que le taux de suicide chez les hommes est si élevé : nous n'avons personne à qui parler. Pour les femmes, en général, vous prenez votre téléphone et vous allez prendre un thé avec des amies. Pour un homme, si j'appelle un pote pour discuter, il se moque de moi. »Après un passage par les drogues et la prison, Ben devient chef cuisinier et intègre un groupe de parole pour hommes. Dans ce groupe, son mentor connaît bien ce phénomène, des émotions refoulées, un sentiment d'injustice qui conduisent à la violence. Parfois contre soi-même, comme pour Ben, mais parfois contre les femmes, surtout depuis #MeToo. Chris Hemmings, ex-journaliste devenu thérapeute, intervient dans les établissements scolaires pour lutter contre cette violence. « Ces 10 dernières années, beaucoup a été fait pour aider les femmes. Mais les jeunes hommes voient toujours le taux de suicide, de sans-abrisme, d'alcoolisme, et se sentent lésés. Ce qu'ils ressentent, c'est une société qui s'occupe des femmes et des filles, et qui se fiche d'eux. Je leur dis : "ok, mais les femmes se sont battues pour tout ça, à nous de nous battre" ! »« L'école a un vrai rôle à jouer »Mais ce genre d'initiatives, dans les établissements scolaires, reste rare. James McCann, co-fondateur d'une ONG baptisée Feminist Men, déplore l'espace laissé aux influenceurs misogynes sur les réseaux sociaux. « Certains hommes se sentent seuls, isolés, se demandent comment naviguer dans un monde qui a tellement changé. Et qui fournit une information accessible ? Malheureusement, ce sont ces individus misogynes, qui font des femmes un bouc émissaire. Il est là, le problème. »Dans son appartement de Brighton, le jeune Ben fixe la mer par la fenêtre : « J'aurais aimé qu'on me tende la main plus tôt. Je pense que je n'aurais pas eu à traverser tout ce que j'ai traversé. Et l'école a un vrai rôle à jouer là-dedans. »Parmi les solutions évoquées par les associations, plus d'investissements pour la santé mentale des hommes, qui représentent encore trois quarts des suicides. Et plus de modération sur les réseaux sociaux, voire des restrictions d'accès pour les plus jeunes.À lire aussiNetflix hit 'Adolescence' stokes UK parents' anxiety
C'est un territoire aussi grand que la République démocratique du Congo, mais peuplé de seulement 57 000 habitants. Convoité par le président américain Donald Trump pour ses minerais, le Groenland souffre d'un manque de main d'œuvre et fait appel à des travailleurs immigrés De notre envoyée spéciale de retour de Nuuk,Dans les hôtels, les cafés, les restaurants de Nuuk, de nombreux travailleurs viennent de Thaïlande ou des Philippines. Mais pour discuter avec eux, il faut aller sur les hauteurs de la ville, sur une colline enneigée. Dans l'église catholique du Christ-Roi, une des rares églises catholiques de la ville, la communauté philippine se retrouve le dimanche en fin d'après-midi. La messe a lieu en anglais avec quelques chants philippins. « Il y a beaucoup de Philippins là où je travaille. L'entreprise aime bien salarier des gens de notre communauté, car nous ne ratons pas un jour de travail. On répond toujours présent et on travaille dur », témoigne cette jeune femme, venue directement du travail. Elle est caissière dans un supermarché du centre-ville et porte encore son uniforme. Elle met de côté systématiquement une partie de son salaire pour l'envoyer à ses parents qui s'occupent de sa fille de quatorze ans restée aux Philippines. Elle ne cache pas les difficultés que peuvent rencontrer les migrants au Groenland : « Sans connaître déjà quelqu'un ici, c'est difficile de trouver un emploi au début et un employeur qui puisse aider à obtenir un permis de travail. »Des Philippins et des Thaïlandais ont commencé à s'installer au Groenland il y a plus d'une dizaine d'années déjà. Ils représentent 3 à 4% de la population. Le patronat aimerait avoir plus d'autonomie pour faire venir des travailleurs étrangers. « Nous n'avons pas de chômage ici. Nous avons besoin d'étrangers », explique ainsi Christian Keldsen, directeur de l'Association des entreprises du Groenland, qui estime qu'il y a à peu près mille postes à pourvoir sur cette île qui compte moins de 60 000 habitants. Parmi les raisons, les difficultés d'accès des Groenlandais à l'enseignement supérieur, mais pas seulement : « 50% de jeunes qui vont au Danemark pour étudier à l'université ne reviennent pas. »Le Groenland manque de travailleurs dans les services à la personne, le commerce. À cause de cette fuite des cerveaux, il manque aussi d'infirmiers et d'infirmières, de médecins, de comptables ou d'avocats pour les étrangers qui veulent pourvoir ces postes-là. Obtenir un permis de travail reste toutefois fastidieux. Une antenne locale de l'Agence danoise de l'immigration va ouvrir ses portes à Nuuk en octobre, ce qui devrait faciliter les démarches des travailleurs étrangers et des entreprises.À lire aussiLa pêche, quel avenir pour la mer nourricière du Groenland?
Alors que Gaza est sous blocus et que les principales infrastructures – électricité, eau potable – sont à terre, comment les Gazaouis réussissent-ils à se connecter à internet ? En grande partie grâce à la solidarité de citoyens du monde entier, qui leur envoient des e-SIMS, des cartes SIM virtuelles. De notre correspondante à Ramallah,Bombardements, témoignages de médecins depuis des hôpitaux dévastés, distributions alimentaires ou choses de la vie quotidienne en temps de guerre. Les témoignages en provenance de Gaza inondent la toile depuis le déclenchement de la guerre. Certains internautes gazaouis comptent même des millions de followers. Un paradoxe, car depuis octobre 2023 et le début de l'offensive militaire, toutes les infrastructures de communication sont à terre.Certains, à l'époque, ont très vite compris que l'enclave palestinienne risquait d'être coupée du monde. C'est le cas de Moaz Mansour, ingénieur en télécommunications égyptien basé sur la côte ouest des États-Unis. « Bien que la connexion soit coupée à Gaza, on peut toujours y capter le réseau égyptien ou encore israélien. On a pris cela en considération. On s'est dit que c'était donc possible de se connecter grâce à un système de roaming », nous explique-t-il en communication via WhatsApp.En clair : Moaz achète en masse des recharges égyptiennes et israéliennes qu'il met gratuitement à la disposition des Gazaouis. Sur son site internet Gaza Online, il reçoit des dons du monde entier. Moaz Mansour dit avoir réussi ainsi à faire parvenir plus de 50 000 recharges Internet à Gaza. « On essaye de pousser les gens à faire des dons réguliers parce que c'est ce qui nous permet de continuer ce que l'on fait. On donne la priorité à la connexion sur place aux personnes qui travaillent dans le secteur médical », détaille-t-il.Comme Moez Mansour, des activistes du monde entier tentent de maintenir Gaza connecté. Jane Shi, une artiste qui vit à Vancouver, au Canada, revendique l'envoi de 18 000 SIM virtuelles vers Gaza. Internet est devenu un besoin élémentaire. « Cela peut être très dangereux de monter sur un toit, d'aller près de la mer ou de se rapprocher de la frontière pour essayer d'avoir une connexion israélienne. Les gens risquent leur vie pour avoir une connexion internet. On a entendu des récits de personnes qui ont été tuées par des bombardements israéliens alors qu'ils essayaient d'avoir un accès à Internet », raconte-t-elle.Maintenir la connexion sur place permet aux Gazaouis de rester en contact avec leurs proches. C'est aussi une façon pour ses militants de garder un œil sur ce qui se passe à Gaza. Une façon de dire aux Israéliens : « On vous voit. » « Quand il y a eu le massacre de l'hôpital Al Shifa, on a envoyé des SIM virtuelles à des journalistes qui étaient sur place », se souvient la militante canadienne. D'après les témoignages recueillis, les opérateurs israéliens tenteraient bien de couper ces connexions sans avoir réussi encore à ce stade à les empêcher complètement.À lire aussiGaza: les sauveteurs de la Défense civile en première ligne face aux victimes des bombardements israéliens