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Donald Trump poursuit sa tournée asiatique, se rendant désormais au Japon, après avoir assisté au sommet de l'Association des États d'Asie du Sud-Est (Asean), organisé ce week-end en Malaisie. Le président américain veut imposer son influence dans une région devenue stratégique, alors que la rivalité économique avec la Chine s'intensifie. Depuis son retour à la Maison Blanche, l'Asie du Sud-Est est devenue un terrain clé de la stratégie mondiale de Donald Trump, non sans arrière-pensées. Le président américain fait prouver qu'il en reste le maître du jeu. Depuis plusieurs mois, il a imposé des droits de douane renforcés sur la plupart des produits asiatiques et beaucoup plus encore lorsque Washington soupçonne qu'ils viennent en réalité de Chine. Son objectif est clair : pousser les pays d'Asie du Sud-Est à choisir son camp, le camp américain. Les enjeux sont concrets. La Malaisie, qui a accueilli le sommet de l'Asean, a signé un accord commercial ce week-end. Dans les grandes lignes, on y trouve les semi-conducteurs, l'intelligence artificielle ou encore l'énergie, autrement dit tous les secteurs. Car Washington veut renforcer son influence industrielle dans la région. Qu'il s'agisse du Vietnam, de l'Indonésie ou du Japon, Donald Trump propose des baisses ciblées de droits de douane, mais en échange, il exige des investissements massifs aux États-Unis ou l'achat de produits américains. C'est la diplomatie du deal, façon Trump. Mais face à cette offensive, la Chine n'est pas en reste. Pendant que Washington brandit la menace des surtaxes, Pékin joue la carte des investissements. Xi Jinping multiplie les visites officielles dans la région — Vietnam, Malaisie, Cambodge, entre autre. Les effets sont d'ores et déjà visible puisque cette année, les exportations chinoises vers l'Asean ont bondi de plus de 20 %. La Chine est désormais le premier partenaire commercial de la région, devant l'Europe et les États-Unis. À lire aussiLes pays d'Asie du Sud-Est en quête d'équilibre entre Donald Trump et la Chine Entre Washington et Pékin, l'Asie du Sud-Est cherche l'équilibre Donald Trump veut avant tout afficher sa fermeté face à la Chine et prouver à ses électeurs qu'il défend les travailleurs américains. Mais dans ce bras de fer entre Washington et Pékin, l'Asie du Sud-Est tente avant tout de préserver son équilibre. Des usines quittent la Chine, des chaînes d'assemblage se déplacent vers le Vietnam, l'Indonésie ou la Malaisie. Cette position, enviable sur le papier, fait aussi de l'Asean un champ de bataille économique. Il y a donc un double enjeu à cette visite du président américain dans la région. Le premier, que Washington y renforce sa place. Le second, que les pays de l'Asean — comme de tout l'Indo-Pacifique — profitent de la rivalité États-Unis-Chine, sans jamais devenir leur champ de bataille.
Europe, Russie, Proche-Orient, Amérique latine, Asie : Autant de champs de bataille pour Donald Trump. Des luttes d'influence géopolitique à la recherche du deal commercial le plus avantageux. La presse internationale s'intéresse d'abord à la tournée asiatique du président américain. « Y a-t-il des avancées entre les États-Unis et la Chine sur le plan commercial ?, s'interroge le Washington Post. Un compromis apparemment gagnant-gagnant a émergé ce week-end à l'issue de négociations tendues à Kuala Lumpur, en Malaisie, mais il ne faut pas encore sabrer le champagne, tempère le quotidien américain. Un accord final ne pourra intervenir que lors de la rencontre entre les présidents Xi Jinping et Donald Trump en Corée du Sud. Ce sera jeudi. Le “cadre“ annoncé pour un accord ressemble davantage à une trêve temporaire qu'à une réconciliation totale, et encore moins à quelque chose qui se rapproche d'un grand compromis qui redéfinirait la relation entre les deux plus grandes économies du monde. » Optimisme prudent « Guerre commerciale : les États-Unis et la Chine sur la voie d'un accord ? », s'interroge également Libération à Paris. « “Je pense que nous allons trouver un bon accord avec la Chine“ : Donald Trump a conclu sur une note d'optimisme la première journée de sa tournée asiatique, entamée hier à Kuala Lumpur. Des partenariats commerciaux ont été signés avec la Malaisie, la Thaïlande et le Cambodge. Mais tous les regards sont tournés vers la bataille suprême entre Washington et son rival systémique chinois. Les signaux envoyés depuis Kuala Lumpur, où les délégations américaine et chinoise ont bouclé ce dimanche deux jours de discussions préparatoires intensives, leur cinquième round de négociations depuis le printemps, alimentent un climat d'optimisme prudent. De part et d'autre, on salue un dialogue “constructif“ et “prometteur“, alors que le monde retient son souffle face à une guerre commerciale entre les deux plus grandes puissances de la planète, dont les secousses ébranlent depuis des mois l'économie mondiale. » Et, attention, prévient Libération, « chacun sait que rien n'est jamais acquis avec Donald Trump, imprévisible et souvent prompt à torpiller ses propres engagements. » Nouvel ordre international C'est d'ailleurs le thème de l'éditorial d'El Pais : « les revirements de Trump sont spectaculaires et inextricables », pointe le quotidien espagnol. « Ses actions erratiques (…) sont autant de variables qui façonnent le nouvel ordre international sans règles qui est en passe de remplacer l'ancien, né de la Seconde Guerre mondiale. (…) Le monde assiste à une montée en puissance de la Chine et doit faire face aux aspirations impériales de Poutine, relève El Pais. La Russie pourrait tirer bénéfice d'une division du monde en sphères d'influence, les États-Unis se repliant sur leur continent et abandonnant l'Europe à son sort. Une fois une paix minimale instaurée, le Moyen-Orient serait sous la tutelle partagée d'Israël et de ses voisins arabes, alliés de type Otan de Washington et, surtout, partenaires commerciaux. La Chine, par conséquent, pourrait miser sur un désengagement trumpien de Taïwan, un mouvement dont la tournée présidentielle actuelle en Asie va offrir un premier aperçu. » Pression sur l'Amérique du Sud Le Figaro à Paris, s'attarde lui sur les visées de Trump en Amérique latine, avec une apparente contradiction : « l'intense activité diplomatique et à présent militaire de l'administration Trump en Amérique latine contraste avec sa volonté affichée de prendre de la distance avec les engagements américains en Europe ou en Asie. Le déploiement de forces dans la mer des Caraïbes pour lutter contre le trafic de drogue et déstabiliser le régime de Nicolás Maduro va aussi à l'encontre des positions précédentes de Trump, qui a lancé sa carrière politique en critiquant l'aventurisme militaire de ses prédécesseurs. » En fait, pointe encore Le Figaro, « Trump renoue avec une politique étrangère où le recours à la force devient le principal levier d'influence. Les pressions exercées contre le Venezuela rappellent aussi les politiques de changements de régime menées avec plus ou moins de succès en Amérique latine au cours du XXème siècle. » Le Figaro qui cite le chercheur américain Henry Ziemer, spécialiste de l'Amérique latine. Lui aussi pointe l'imprévisibilité de Donald Trump : « l'administration américaine essaie de faire pression sur Maduro et de déclencher des troubles internes qui le pousseraient à quitter le pouvoir. Mais des mesures autres qu'une invasion (militaire) en règle sont envisageables, affirme-t-il, comme des frappes aériennes, l'interception navale de navires, peut-être des incursions dans l'espace aérien vénézuélien, tout ce qui, il y a encore un mois, aurait été très improbable semble désormais envisageable. »
Alors que le gouvernement australien prévoit l'interdiction des exportations par bateau de moutons vivants et que le Soudan s'enfonce dans la guerre, la Somalie profite du vide pour augmenter encore ses exportations de bétail, en direction des pays du Golfe. Les exportations de moutons et, dans une moindre mesure, de chèvres ont toujours été au cœur de l'économie somalienne. Un poids qui ne cesse de se renforcer : d'après le Bureau national des statistiques du gouvernement de la République fédérale de Somalie, les exportations de bétail du pays représentaient un peu plus de 310 millions de dollars en 2018, 520 millions en 2021 et 970 millions de dollars en 2024. Autrement dit, les exportations de bétail ont plus que triplé en six ans, à tel point qu'en valeur, elles représentent aujourd'hui plus du quart des exportations de la Somalie. Une demande venue du Golfe toujours plus forte Une situation qui s'explique en partie par la fragile stabilisation du pays après des décennies de conflit, mais pas seulement. D'abord, la demande venue notamment des pays du Golfe est toujours plus forte. En 2023, à elle seule, l'Arabie saoudite a importé près de 10 millions de moutons vivants. Si on y ajoute le bétail importé par la Jordanie et les autres monarchies du golfe Persique, on arrive à plus de 14 millions de têtes importées chaque année. Ensuite, les moutons somaliens ont moins de concurrents. Même si les exportations de moutons venues du Soudan ne se sont pas effondrées autant qu'on pouvait le craindre malgré deux ans de guerre civile, le pays a perdu des parts de marché. L'état des infrastructures et de la flotte soudanaise joue aussi en sa défaveur. En 2022, un bateau a coulé en mer Rouge, entraînant la perte de plus de 15 000 moutons, une cargaison d'une valeur de 4 millions de dollars. La Nouvelle-Zélande et l'Australie mettent fin au transport d'animaux en mer La concurrence plus lointaine se fait aussi plus rare. Emboîtant le pas à la Nouvelle-Zélande, l'Australie a récemment décidé au nom du bien-être animal de mettre fin au transport maritime d'animaux vivants à compter de 2028, entraînant dès aujourd'hui une forte diminution des exportations de moutons. Comme le souligne Bloomberg, les exportations de bétail somalien pourraient donc dépasser pour la première fois cette année le milliard de dollars.
Il y a tout juste une semaine, le 16 octobre, la République démocratique du Congo levait l'interdiction d'exporter du cobalt issu de ses mines. Une interdiction désormais remplacée par un système de quotas, lequel a d'ores et déjà un effet sur les marchés. Tout a commencé en février 2025, lorsque Kinshasa a suspendu les exportations de cobalt. Pour le marché mondial, c'était un coup de tonnerre, car la RDC représente les trois quarts de la production mondiale de ce métal, utilisé dans l'aéronautique, mais surtout dans les batteries. Cette interdiction a été levée il y a une semaine, le 16 octobre, mais remplacée par un système de quotas. Un peu plus de 18 000 tonnes exportées cette année, 96 000 par an pour 2026 et 2027 ; c'est moitié moins qu'en 2024. « On est à la limite du tolérable » Avec cette mesure, Kinshasa entendait, entre autres, faire remonter les prix. Pour le moment, c'est chose faite : en début d'année, le cobalt était tombé à 21 000 dollars la tonne, au plus bas depuis dix ans. Le prix a depuis doublé à près de 44 000 dollars la tonne. Et cela pourrait aller plus loin. « Je m'attends à ce que les prix atteignent un pic à la fin de l'année, ou au début de l'année prochaine », estime Thomas Matthews, analyste chez CRU. Pour lui, cette politique des quotas va « soutenir les prix au moins jusqu'en 2027 ». Ces quotas sont donc en train de réorganiser le marché. Mais pas forcément à l'avantage de Kinshasa. « On est à la limite du tolérable », a déclaré il y a quelques jours le directeur commercial de CMOC, géant chinois de l'extraction minière, qui prévient : les entreprises risquent d'être forcées de trouver des alternatives au cobalt si les prix ne retombent pas. Risque de contrebande La Chine, premier client du cobalt congolais, émet donc un avertissement. Mais un avertissement à relativiser pour Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé à l'IFRI : « Il y a quatre ans, les prix étaient plus hauts, et ils ne disaient pas que c'était inacceptable. » Cela fait plusieurs années que ce métal est peu à peu remplacé dans les batteries. Pour Thomas Matthews, il est « probable » que les mesures prises par la RDC ne parviennent pas à ralentir ce phénomène. Autre risque : celui de la contrebande. Des prix élevés et une politique stricte de quotas pourraient favoriser le commerce informel. « Ça n'est pas impossible », estime Raphaël Danino-Perraud. Alors, comment l'éviter ? Pour lui, favoriser la transformation locale « encouragera la formalisation de l'activité informelle ». Côté congolais, l'Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales et stratégiques du pays (ARECOMS) a mis en garde. Elle se réserve le droit d'exclure du système de quotas « toute entreprise ne respectant pas les lois et règlements en vigueur ». À lire aussiRDC: les exportations de cobalt reprennent après cinq mois d'interruption
Les Têtes d'affiche de Denise Epoté de TV5MONDE, comme chaque dimanche sur RFI, avec Nicolas Brousse. Sur la première marche du podium cette semaine, un ingénieur en génie civil originaire du Cameroun. Après des études en Algérie, Brice Mba a rejoint HEC, avec un échange académique à la Singapore Management University. En 2023, il a cofondé Reasy, une plateforme intégrée de financement et de facilitation de commerce afin de rendre le commerce international rapide et facile pour les petits et les moyens importateurs africains. La seconde tête d'affiche est originaire de la République démocratique du Congo. Diplômé en ingénierie minière de l'université Copperstone de Zambie, Christian Mwamb Rubemb a conçu Makala Vert, une solution durable visant à produire une énergie propre à base de déchets biodégradables, une alternative au charbon de bois.
Les contrôles chinois sur les exportations de tungstène depuis février ont fait grimper les prix. Or ce métal est utilisé pour sa dureté, sa résistance à l'abrasion qui sont des qualités précieuses pour l'industrie. Parmi les secteurs touchés par cette flambée des prix, il y a celui du pétrole aux États-Unis, et plus précisément les entreprises de forage pétrolier, celles qui mettent en œuvre indirectement la doctrine de Donald Trump « Drill baby drill ». Les exportations de Chine ne sont pas interdites, mais elles se font au ralenti. Résultat, le prix du tungstène a presque doublé entre le 4 février, date des restrictions imposées par Pékin et aujourd'hui. Cette hausse se répercute directement sur le coût de production des outils de forage de haute qualité, et notamment ceux en carbure de tungstène. Selon la taille des forêts utilisées, il faut compter entre 3 000 et 25 000 dollars de plus, selon l'agence Reuters. Les entreprises qui produisent ces outils ont de quoi s'inquiéter pour leur clientèle. Certaines comme R.S.Rock Drilling Tools, se sont d'ailleurs lancées dans des opérations de communication pour convaincre que la qualité, même plus chère, restait un bon investissement. Cette hausse réduit un peu plus les marges d'un secteur soumis aussi à l'augmentation des prix de l'acier et pourrait compliquer un peu plus les ambitions pétrolières de la Maison Blanche. L'industrie mondiale du forage n'est pas la seule à être affectée : les produits semi-finis de tungstène alimentent tous les procédés industriels, précise l'Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi). La demande en tungstène pour les secteurs de l'énergie et de la défense va être exponentielle d'ici à 7 ans (75% et plus) selon l'organisme qui précise que l'augmentation concerne aussi le secteur de la construction, des produits de grande consommation et le secteur médical. Quelle alternative pour les États-Unis ? Les États-Unis n'ont pas vraiment d'alternative pour s'approvisionner, car la Chine contrôle près de 80% de la production minière de tungstène et plus de 80 % des opérations de raffinage. En 2024, plus d'un quart de l'approvisionnement américain provenait de Chine, selon les services géologiques américains (USGS). Troisième importateur mondial de tungstène, les États-Unis ne produisent pas de minerai de tungstène sur leur sol. Ils misent sur le recyclage, et la transformation locale, comme l'illustre la subvention accordée à une société texane, Melt Technologies, pour soutenir l'installation pilote de production de matériaux en carbure de tungstène. Suite au renforcement des liens commerciaux entre Washington et Kigali, les États-Unis viennent aussi de recevoir ce mois d'octobre leur première cargaison de concentré de tungstène rwandais issu de la mine de Nyakabingo exploitée par Trinity Metals. Le Rwanda produit moins de 2% du tungstène mondial, mais dans la crise actuelle, chaque tonne commercialisée, hors du circuit chinois, devient précieuse. L'Europe mieux lotie ? À la différence des États-Unis, l'Europe produit du minerai en Autriche, au Portugal et en Espagne, mais elle ne maîtrise pas suffisamment les étapes de raffinage et de traitement, ce qui l'oblige à importer 80% du tungstène raffiné dont elle a besoin. Les restrictions à l'exportation imposées par la Chine ont eu un impact sur les importations nettes européennes : elles ont baissé de 60% sur les oxydes sur le premier semestre 2025 par rapport à 2024, de 45% sur les carbures de tungstène et de 20% sur le ferrotungstène, selon des données d'Eurostat. Tout l'enjeu pour l'Europe est de recycler plus. Sa marge de progrès est encore grande, relève l'Ofremi, à condition qu'elle arrive à freiner l'appétit de la Chine qui a intensifié ses importations de concentrés et de déchets métalliques pour faire tourner son industrie manufacturière et pour capter des parts de marché de la fabrication des produits semi-finis. 70% des produits en fin de vie ne sont pas recyclés – par exemple, les pièces d'usure et de coupe intégrés aux outils industriels –, « pourtant le tungstène se recycle très bien et l'Europe détient des capacités performantes » relève l'Ofremi.
La folle ascension des cours du cacao est-elle terminée ? La baisse, constatée cette année, s'est accélérée depuis la mi-août. Les cours ont atteint ces derniers jours leur plus bas depuis février 2024, soit depuis vingt mois. Le cacao new-yorkais se négociait en début de semaine à moins de 6 000 dollars la tonne contre un pic en décembre 2024 à 12 000 dollars la tonne. La baisse des prix s'explique par les nouvelles rassurantes venues d'Afrique de l'Ouest. Les pluies du mois dernier ont été bonnes, et le risque que la nouvelle récolte soit mauvaise s'éloigne. Les cours s'expliquent aussi par un recul de la demande. Les prix records, qualifiés d'intenables à long terme par certains analystes, ont fini par devenir un frein pour les industriels qui ont imaginé d'autres recettes, et pour les consommateurs qui ont appris à manger moins de chocolat. Les fonds spéculatifs participent également à alimenter cette tendance : sentant la baisse se profiler, ils ont liquidé leur position, c'est-à-dire revendu leurs contrats, ce qui donne l'impression que l'offre est plus abondante sur le marché, même si c'est artificiel. Fin de la hausse des prix ? La baisse des cours qui dure depuis plusieurs mois acte un renversement de tendance, au moins à court terme. Elle ne se traduira, en effet, pas immédiatement sur les prix, il y a toujours dans le secteur du cacao un décalage d'au moins six mois, voire plus, ce qui veut dire que la consommation pourrait encore rester tiède. L'hypothèse d'une nouvelle année excédentaire n'est pas exclue : la production mondiale pourrait dépasser la consommation d'environ 186 000 tonnes au cours de la saison 2025-26, soit plus du double de l'excédent de l'année précédente, selon une enquête de l'agence Bloomberg réalisée auprès de plus d'une dizaine de traders et d'analystes en septembre. Ce décalage entre l'offre et la demande, s'il se confirme, ne devrait pas pour autant faire baisser les prix jusqu'aux niveaux d'avant 2023, époque où le cacao s'échangeait entre 2 000 et 3 000 dollars la tonne, relève le Financial Times. Structurellement, la production d'Afrique de l'Ouest reste sous pression, en raison du vieillissement des plantations, de la prévalence de la maladie du swollen shoot et du changement climatique. Baisse structurelle de la production Le relèvement des prix payés aux planteurs en Côte d'Ivoire et au Ghana, pour la campagne cacaoyère 2025-26, ne semble pas en mesure d'enrayer la baisse structurelle de la production. Si selon Rabobank, ces prix encourageront les agriculteurs à livrer plus de fèves aux transformateurs, pour François Ruf, économiste de la filière, cela ne permettra probablement que de ralentir la baisse de la production, pas à inverser la tendance. C'est en particulier vrai au Ghana où la concurrence de l'orpaillage a déjà fait perdre du terrain à la filière. Le pays pourrait d'ailleurs perdre à court terme sa place de deuxième producteur mondial, au profit de l'Équateur. À lire aussiHausse des prix du cacao en Côte d'Ivoire: «Ces prix jamais-vus ne tiennent pas compte de l'inflation»
L'inondation du marché du diamant par les pierres synthétiques est une source de préoccupation pour la filière. À tel point qu'en juin dernier, l'industrie du diamant naturel s'est engagée à alimenter un fonds pour une vaste opération marketing. Quatre mois plus tard, les promesses de financement n'ont pas été suivies d'actes. Les signataires se sont engagés à verser 1% de leurs revenus d'exportation de pierres brutes à un fonds collectif. Cette structure, le National Diamond Council, existe depuis longtemps, mais a vu ses moyens chuter avec l'arrêt des financements russes d'Alrosa. L'objectif est de le doter à nouveau de 100 millions de dollars pour mener une vaste campagne de promotion mondiale du diamant naturel. Quatre mois plus tard, les montants promis n'ont pas été débloqués, selon le Centre pour le diamant d'Anvers (AWDC) qui a bataillé pour réunir tous ces acteurs à la même table, et qui demande aujourd'hui à chacun de respecter son engagement, dans une lettre ouverte. « Chaque retard affaiblit la crédibilité de l'engagement que nous avions pris ensemble », écrivent les responsables de l'AWDC. La bataille du marketing Du point de vue des diamantaires, il y a urgence à agir, car les pierres de laboratoire ont provoqué une crise dans le secteur ces dernières années, crise qui s'est traduite par une baisse des ventes et une chute des prix. Pour livrer la bataille, le terrain de la communication est incontournable. « Pendant que nous hésitons, les diamants synthétiques inondent le marché de milliards de dollars de publicité et les influenceurs redéfinissent le discours d'une manière qui sape tout ce que notre secteur représente », relève l'AWDC. Le marketing est d'autant plus important à l'approche de Noël et ensuite du Nouvel An chinois, des périodes cruciales pour la vente de diamants. L'Angola intéressé par De Beers Parmi les contributeurs signataires au mois de juin et rappelés à l'ordre figure l'Angola, où l'industrie s'est réunie en juin. Le pays offre aujourd'hui le plus gros potentiel minier du continent et est devenu, depuis l'année dernière, le premier producteur africain en valeur. Une stature qui s'accompagne d'une ambition : Luanda assure avoir les financements pour acquérir une part du géant De Beers, dont la maison mère Anglo American veut se séparer. Proposition presque concomitante avec celle du Botswana, déjà actionnaire à 15% du groupe et qui souhaite devenir majoritaire. « Des offres, qui, à ce stade, illustrent une volonté panafricaine croissante de gérer les ressources du continent, et qui, si elles se concrétisent, pourraient avoir un impact important sur le marché du diamant », commente un industriel du secteur. À lire aussiLe secteur du diamant s'unit pour redorer l'image des pierres naturelles
Mauvaise nouvelle chez le premier exportateur mondial de bananes, l'Équateur. La maladie baptisée TR4 a officiellement été détectée. Ce qui veut dire que le champignon qui en est responsable est probablement entré dans le pays il y a déjà plusieurs mois. Cette alerte sanitaire est prise très au sérieux, dans un secteur qui n'a pas été épargné par les dernières crises géopolitiques, logistiques et climatiques, et conforte ceux qui plaident pour plus de diversité variétale. (Rediffusion du 25 septembre 2025) Les bananeraies ne seront pas décimées dans les mois qui viennent, mais l'arrivée de la TR4 – fusariose race 4 tropicale – est une nouvelle considérée comme grave, car il n'y a pas de traitement possible. La seule solution, c'est la protection, via un contrôle très strict des surfaces qui sont touchées, pour que la maladie ne se propage pas ailleurs. Concrètement, explique Denis Loeillet, économiste de la filière au Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, « ça passe par l'installation de clôture autour des zones atteintes, la désinfection de tout ce qui entre et sort des plantations, que ce soit les pelles, les chaussures ou encore les roues des véhicules agricoles. » Au Pérou, où la maladie est apparue en 2021, les mesures n'ont pas été suffisantes et des zones entières de culture ont été abandonnées, ce qui a entrainé des baisses de production et une contagion aujourd'hui à l'Équateur. Ailleurs, en Colombie ou encore aux Philippines, on a appris à faire avec, preuve qu'il y a des moyens d'agir pour éviter le pire. Pas d'impact à court terme sur l'approvisionnement L'Équateur met chaque année entre 6 et 7 millions de tonnes de fruits jaunes sur le marché, soit l'équivalent de ce que consomment les 27 pays européens et le Royaume-Uni en un an ! Une maladie chez un géant qui nourrit le monde, inquiète forcément, mais l'avenir dépendra de la vitesse de propagation de l'épidémie. A priori, à court terme, l'effet ne devrait pas être significatif sur les volumes, l'approvisionnement mondial sera largement assuré, mais un effet sur les prix n'est pas à exclure : « Les mesures de biosécurité à mettre en place d'urgence vont augmenter les coûts de production », explique l'expert du Cirad. La grande distribution pourra alors difficilement ignorer la situation lors des négociations à venir et sera probablement contrainte d'acheter plus cher la banane, et peut-être de la revendre à un prix plus élevé aussi. Les limites du tout-Cavendish Avant l'Équateur, 25 pays producteurs ont déjà été touchés par cette maladie, mais le fait que la TR4 arrive en Équateur est perçu comme un marqueur important dans la filière, qui fera probablement bouger les lignes. C'est le signe qu'il est peut-être temps de diversifier les variétés ou de travailler sur la résistance de la banane Cavendish, qui domine le marché depuis les années 1960, mais qui montre aujourd'hui, en Équateur, un peu plus sa vulnérabilité. C'est précisément la mission que s'est donnée, en France, le Cirad, via l'initiative Bana+, un projet de 7,5 millions d'euros qui vise à proposer des variétés résistantes contre la cercosporiose noire et la TR4, deux des principales maladies fongiques qui attaquent le bananier.
En Russie, c'est l'une des conséquences des sanctions prises au lendemain de l'invasion de l'Ukraine : les ventes de véhicules chinois ont explosé. Elles ont été multipliées par sept depuis 2022 ! Et malgré un marché de l'automobile morose, une nouvelle domination est en train de s'installer. Depuis le début de l'année, plus d'une voiture neuve sur deux vendues en Russie est de marque chinoise. Sur un parking d'un centre commercial, Mikhail recharge à une borne électrique sa berline, une Hongqi achetée il y a trois ans. « C'est sûr que conduire une voiture allemande, c'est bien plus agréable, mais ça va, en termes de confort, de stabilité et de tenue de route, cette voiture fait bien l'affaire. Après, c'est vrai qu'en hiver la batterie se décharge très vite. Ça, c'est un problème. Mais en été ou à ce moment de l'année, tout est parfait », dit-il. Pour se rendre compte du phénomène, il suffit de se connecter sur l'application de VTC, Yandex. Aux côtés des marques coréennes ou japonaises, de plus en plus de courses sont proposées à bord de véhicules chinois. Taalay est originaire du Kirghizistan et s'il a opté pour une voiture de la marque Geely, c'est avant tout pour son prix. Pour un véhicule chinois moyenne gamme, il faut compter en Russie 2 millions de roubles en moyenne, soit à peu près 20 000 euros. « Aujourd'hui, sur le marché, les voitures chinoises sont bien plus accessibles… Donc moi, c'est le rapport qualité/prix qui m'a décidé. Et puis avec les sanctions, ça ne sert plus à rien d'avoir une voiture européenne, parce que c'est très dur de trouver des pièces détachées. Au moins, avec les voitures chinoises, vous n'avez aucun problème ! », explique-t-il. Un marché conquis après le départ des marques européennes Malgré un contexte économique difficile pour l'automobile en Russie, les constructeurs chinois continuent à gagner des parts de marché. Depuis le début de l'année, 500 000 véhicules chinois ont été vendus en Russie, ce qui représente plus de la moitié des ventes de voitures neuves. Nicolaï Nazaikinskii est journaliste, expert en automobile. « L'une des principales raisons, c'est l'introduction des sanctions occidentales. Quand les Européens ont quitté la Russie, ils ont aussi abandonné leurs concessions. Et les Chinois n'ont eu qu'à les remplacer... Ils ont juste repris leurs concessions et mis leurs logos à la place », indique-t-il. Pour écouler leurs voitures en Russie, les marques chinoises peuvent compter sur des taxes moins élevées qu'en Europe et aux États-Unis, des délais de livraisons plus courts. Mais ils assemblent aussi désormais plus de voitures sur le sol russe. « Nous avons plusieurs usines de voitures chinoises en Russie. La marque Haval avait ici deux usines avant les sanctions, mais vous avez désormais Chery qui assemble ses voitures, et d'autres marques prévoient de faire pareil. En fait, tout est devenu beaucoup plus simple pour ces marques, parce que les infrastructures sont déjà là. Il leur suffit de venir assembler leurs voitures là où les Européens le faisaient auparavant. » Mais cet afflux de voitures chinoises n'est pas sans inquiéter le Kremlin. En janvier, Moscou a décidé de relever les « frais de recyclage », c'est-à-dire des droits de douane pour limiter l'entrée des véhicules étrangers et ainsi protéger les constructeurs russes.
En visite à partir de ce jeudi en Asie centrale, Vladimir Poutine participe à un sommet avec les cinq dirigeants de cette région riche en ressources naturelles. Un déplacement à forte portée économique pour une Russie sous sanctions, qui cherche à préserver son influence face à la montée en puissance de la Chine et d'autres partenaires. Le président russe est au Tadjikistan à l'occasion d'un sommet réunissant les cinq pays d'Asie centrale: le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan et le Tadjikistan. Longtemps considérée comme le cœur de l'influence soviétique, puis russe, cette région stratégique tente depuis la chute de l'URSS de diversifier ses partenariats. Désormais, ces États multiplient les liens économiques avec la Chine, la Turquie et plusieurs pays occidentaux, notamment la France. Une évolution que Moscou observe avec attention. Sous le coup de lourdes sanctions depuis l'invasion de l'Ukraine, la Russie cherche dans cette région un moyen de compenser ses pertes économiques et d'affirmer qu'elle reste un acteur incontournable. L'énergie, au cœur de la stratégie économique russe Le principal levier de cette visite est énergétique. Le sous-sol de ces pays regorge de ressources naturelles — pétrole, gaz et uranium — qui attirent les convoitises. Le Kazakhstan, par exemple, est l'un des plus grands producteurs d'hydrocarbures de la région, mais son pétrole transite à 80 % par les oléoducs russes. L'uranium, essentiel au fonctionnement des centrales nucléaires, constitue un autre enjeu majeur. Plusieurs puissances se positionnent sur ce marché, dont la France. Emmanuel Macron s'est rendu en Ouzbékistan au printemps dernier pour signer de nouveaux partenariats. Moscou, de son côté, veut consolider sa place en proposant sa technologie nucléaire et en négociant de nouveaux contrats énergétiques. Mais Vladimir Poutine avance désormais sur un terrain où la Chine a pris une longueur d'avance. Pékin, Paris, Ankara… la Russie n'est plus seule à la table Derrière ce déplacement, c'est aussi une bataille d'influence qui se joue. Avec son vaste projet des « Nouvelles routes de la soie », Pékin a transformé l'Asie centrale en un couloir commercial entre la Chine et l'Europe, y investissant massivement dans les infrastructures et les technologies. Cette présence chinoise offre aux États centrasiatiques une alternative crédible à Moscou, qui voit son influence se réduire. Dans ce contexte, la visite de Vladimir Poutine apparaît comme une tentative de démontrer que la Russie peut encore peser économiquement malgré la guerre et l'isolement international. Mais le centre de gravité économique de la région s'est déplacé. Les capitaux viennent désormais de Pékin, d'Ankara, parfois même de Paris. Si Moscou demeure un acteur historique et symbolique, elle doit désormais composer avec d'autres puissances bien installées. L'Asie centrale, forte de cette rivalité, tient un rôle d'arbitre, profitant de cette compétition pour renforcer sa souveraineté sans sacrifier son autonomie.
La production de cuivre en plein essor en Afrique. Si la République démocratique du Congo est le premier producteur du continent, la Zambie, le numéro 2, devrait connaître une production record cette année. Le pays n'occupe aujourd'hui que la 9e place au niveau mondial, mais c'est un des rares où la production est en hausse. La production zambienne est plus que prometteuse et cela s'illustre par la présence des grands noms du secteur minier tels que Barrick Mining et First Quantum Minerals pour la partie production. D'autres opérateurs ont lancé des activités de prospection, parmi eux Ivanohe, Anglo American ou encore Rio Tinto. Selon les calculs de l'agence Bloomberg, les miniers présents dans le secteur ont au total investi 10 milliards de dollars pour accroître la production qui était l'année dernière d'un peu plus de 820 000 tonnes. L'ambition du président zambien est d'atteindre 3 millions de tonnes, au début de la prochaine décennie, mais pour y arriver, il faudra des investissements encore plus conséquents. À écouter aussiAnglo American et Teck Ressources, un mariage taillé pour le marché du cuivre Une manne pour l'économie nationale ? La hausse des cours, de plus de 20% cette année, est une bonne nouvelle pour tous ceux qui ont investi dans la production sur le continent. Barrick Mining a prévu de récupérer ses derniers investissements en moins de deux ans si les niveaux actuels du marché se maintiennent, selon Bloomberg. Pour la Zambie, qui sort d'une longue période de renégociation de sa dette, c'est la perspective de nouvelles recettes pour soutenir le redressement économique du pays. Il y a moins d'un an, selon une note du cabinet Global Sovereign Advisory, le gouvernement zambien a conclu un accord avec le groupe de négoce suisse Mercuria pour que son cuivre soit mieux valorisé sur les marchés internationaux. À lire aussiLa Zambie souhaite augmenter ses revenus issus de ses mines de cuivre Mines historiques en déclin L'augmentation de la production de cuivre en Zambie ne permettra cependant pas de compenser le ralentissement des mines historiques, notamment celles du Chili, numéro un mondial dans le secteur. Les volumes extraits ne sont pas comparables, la Zambie a produit moins de 4% du cuivre mondial l'année dernière, mais sa production peut donner une bouffée d'air au marché. Selon l'Agence internationale de l'énergie, d'ici 2050, 60 à 90% des ressources qui sont identifiées aujourd'hui pourraient être épuisées d'ici 2050. En parallèle, les besoins vont bondir, car le cuivre est indispensable à la transition énergétique. Hausse des prix inévitable Dans un secteur où les découvertes minières sont rares, la montée en puissance d'un acteur comme la Zambie participera à modérer la hausse des prix, inévitable à moyen terme. À court terme, les prévisions ne plaident pas pour une flambée durable des cours, précise GSA. La hausse progressive des prix de ces derniers mois est essentiellement liée à la multiplication des perturbations et des imprévus de production chez les leaders du secteur – inondation d'une mine en RDC, effondrement minier meurtrier au Chili, et révision de la production de Teck Resources –, hausse contrebalancée par une demande atone en Chine, et le développement du recyclage selon la note du cabinet d'analyse.
En Russie, c'est l'une des conséquences des sanctions prises au lendemain de l'invasion de l'Ukraine : les ventes de véhicules chinois ont explosé. Elles ont été multipliées par sept depuis 2022 ! Et malgré un marché de l'automobile morose, une nouvelle domination est en train de s'installer. Depuis le début de l'année, plus d'une voiture neuve sur deux vendues en Russie est de marque chinoise. Sur un parking d'un centre commercial, Mikhail recharge à une borne électrique sa berline, une Hongqi achetée il y a trois ans. « C'est sûr que conduire une voiture allemande, c'est bien plus agréable, mais ça va, en termes de confort, de stabilité et de tenue de route, cette voiture fait bien l'affaire. Après, c'est vrai qu'en hiver la batterie se décharge très vite. Ça, c'est un problème. Mais en été ou à ce moment de l'année, tout est parfait », dit-il. Pour se rendre compte du phénomène, il suffit de se connecter sur l'application de VTC, Yandex. Aux côtés des marques coréennes ou japonaises, de plus en plus de courses sont proposées à bord de véhicules chinois. Taalay est originaire du Kirghizistan et s'il a opté pour une voiture de la marque Geely, c'est avant tout pour son prix. Pour un véhicule chinois moyenne gamme, il faut compter en Russie 2 millions de roubles en moyenne, soit à peu près 20 000 euros. « Aujourd'hui, sur le marché, les voitures chinoises sont bien plus accessibles… Donc moi, c'est le rapport qualité/prix qui m'a décidé. Et puis avec les sanctions, ça ne sert plus à rien d'avoir une voiture européenne, parce que c'est très dur de trouver des pièces détachées. Au moins, avec les voitures chinoises, vous n'avez aucun problème ! », explique-t-il. Un marché conquis après le départ des marques européennes Malgré un contexte économique difficile pour l'automobile en Russie, les constructeurs chinois continuent à gagner des parts de marché. Depuis le début de l'année, 500 000 véhicules chinois ont été vendus en Russie, ce qui représente plus de la moitié des ventes de voitures neuves. Nicolaï Nazaikinskii est journaliste, expert en automobile. « L'une des principales raisons, c'est l'introduction des sanctions occidentales. Quand les Européens ont quitté la Russie, ils ont aussi abandonné leurs concessions. Et les Chinois n'ont eu qu'à les remplacer... Ils ont juste repris leurs concessions et mis leurs logos à la place », indique-t-il. Pour écouler leurs voitures en Russie, les marques chinoises peuvent compter sur des taxes moins élevées qu'en Europe et aux États-Unis, des délais de livraisons plus courts. Mais ils assemblent aussi désormais plus de voitures sur le sol russe. « Nous avons plusieurs usines de voitures chinoises en Russie. La marque Haval avait ici deux usines avant les sanctions, mais vous avez désormais Chery qui assemble ses voitures, et d'autres marques prévoient de faire pareil. En fait, tout est devenu beaucoup plus simple pour ces marques, parce que les infrastructures sont déjà là. Il leur suffit de venir assembler leurs voitures là où les Européens le faisaient auparavant. » Mais cet afflux de voitures chinoises n'est pas sans inquiéter le Kremlin. En janvier, Moscou a décidé de relever les « frais de recyclage », c'est-à-dire des droits de douane pour limiter l'entrée des véhicules étrangers et ainsi protéger les constructeurs russes.
L'annonce du plan de sauvetage de la Maison Blanche, dédié aux agriculteurs, tarde à venir en raison du blocage budgétaire qui paralyse une partie de l'État fédéral. Ce plan d'urgence est très attendu par les producteurs de soja, qui souffrent depuis des mois de la chute des importations chinoises. La Chine s'est donné les moyens de se passer de son fournisseur américain. Mais jusqu'à quand ? Difficile de savoir quelle est la marge de manœuvre de la Chine, car plusieurs paramètres entrent en ligne de compte. Ces derniers mois, la Chine a acheté essentiellement du soja du Brésil et d'Argentine pour nourrir ses porcs et ses volailles, mais ces deux pays exportent le gros de leurs volumes d'avril à août. Quand leurs exportations vont se raréfier, les importateurs chinois devront soit acheter ailleurs, c'est-à-dire à cette période de l'année aux États-Unis, soit puiser dans les réserves que Pékin et les industriels ont constituées, en achetant notamment du soja brésilien. L'Empire du Milieu a une tradition de stockage, et a anticipé la crise, personne n'a de doute là-dessus, mais le niveau exact des réserves chinoises est une donnée à laquelle il est quasiment impossible d'avoir accès. Levier politique Au bout du compte, c'est peut-être la politique qui décidera d'une reprise, plus qu'un réel besoin d'approvisionnement. Le soja est clairement un levier pour la Chine, « une arme géopolitique » selon Olivier Antoine, auteur du livre Géopolitique du soja, publié ce mois-ci aux éditions Armand Colin. La Chine a utilisé cette arme lors de la première guerre commerciale en 2018/2019 et la réutilise aujourd'hui, en étant dans une position encore plus forte, car entre-temps, le géant asiatique a continué à diversifier ses fournisseurs. « Ces dernières années la Chine a compris comment transformer sa faiblesse en force » explique Olivier Antoine, sa faiblesse étant son besoin d'acheter plus de la moitié du soja exporté dans le monde, sa force étant d'avoir diversifié ses fournisseurs - Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay pour moins dépendre des États-Unis. La Chine est allée plus loin, pour sécuriser son approvisionnement, explique l'auteur, elle a investi dans toute la chaîne de valeur du soja, en Amérique latine, aussi bien dans la logistique, que dans des entreprises semencières. La Chine achètera-t-elle encore du soja américain demain ? La Chine n'a pas montré qu'elle voulait, dans l'immédiat, se passer totalement du soja américain. Mais à moyen terme ou à long terme, il n'est pas exclu que Pékin cherche à ne plus s'approvisionner du tout aux États-Unis. Les signaux qui confirment la volonté du pays de renforcer sa sécurité alimentaire, et d'être plus résilient se multiplient. La conséquence de cette politique, c'est que les États-Unis ont perdu un moyen de pression. « Les Chinois ont compris que les producteurs de soja étaient un maillon central du système agro-alimentaire américain et qu'ils représentaient aussi un bastion républicain » explique Olivier Antoine. Les producteurs de soja constituent un bloc électoral clé, pour Donald Trump. Un électorat qui a déjà souffert lors de son premier mandat : les producteurs de soja ont perdu 20% de part de marché en Chine, pendant la première guerre commerciale, mais sont restés fidèles. Cette loyauté des communautés agricoles envers Donald Trump fait partie des enjeux de la période actuelle, selon le Financial Times. À lire aussiLe soja américain dans l'attente du plan de sauvetage de la Maison Blanche
C'est le premier grossiste d'ingrédients de chocolat au monde. Avec ses 60 usines, Barry Callebaut, basé à Zurich, en Suisse, fournit les grandes marques, de Mars à Nestlé, mais aussi les chocolatiers gourmets et les restaurateurs en poudre et en beurre de cacao, en blocs et en liquide de chocolat. Mais ce géant continue d'être fragilisé par la raréfaction de sa matière première, le cacao. L'industriel du chocolat vient de voir ses perspectives en Bourse dégradées en fin de semaine dernière. La banque allemande Berenberg ne recommande plus d'« acheter » le titre Barry Callebaut mais juste de le « conserver ». L'action, qui ne valait guère plus de 700 francs suisses en avril dernier, est certes remontée à plus de 1000 francs depuis, mais elle devrait plafonner désormais, alors qu'elle valait trois fois plus, il y a quatre ans. Série de revers Le groupe zurichois a traversé de grosses turbulences. Une épidémie de salmonelle en 2022 dans sa plus grande usine, en Belgique. Les ateliers de produits chocolatés sont fermés pendant des mois, les clients rationnés. Malgré d'énormes investissements dans la sécurité sanitaire, la réputation du géant du chocolat en prend un coup. L'année suivante, c'est le départ brutal du PDG, Peter Boone. Un autre Peter, Feld, imposé par la holding de la famille Jakobs, l'actionnaire majoritaire, supprime alors des emplois et des lignes de production, ce qui fragilise encore les relations commerciales. Dette multipliée par quatre C'est alors que démarre la folle envolée des cours du cacao, multipliés par quatre l'an dernier, après l'annonce de faibles récoltes en Côte d'Ivoire et au Ghana. Ce qui quadruple aussi la dette de Barry Callebaut. Le grossiste est pris en étau : il doit emprunter pour continuer d'acheter de plus en plus cher les fèves qui font tourner ses usines. Mais il ne peut plus passer comme d'habitude la hausse à ses clients. Certains annulent même des commandes ou récupèrent la transformation en interne. Demande de chocolat en berne Aujourd'hui, même si les cours du cacao ont rebaissé, ils restent deux fois supérieurs à la moyenne des dix dernières années, ce qui fait désormais stagner, voire baisser la demande de chocolat – les grandes marques modifient leurs recettes pour intégrer, par exemple, plus de lécithine de soja. Dans ce contexte, difficile pour Barry Callebaut de réaliser ses objectifs de croissance. Sa valorisation boursière n'est plus que de 7,5 milliards de dollars, contre 13 milliards il y a trois ans. Ce qui alimente les rumeurs selon lesquelles, rapporte Bloomberg, le grossiste suisse du chocolat pourrait se retirer de la place financière de Zurich. À lire aussiSur les pistes du trafic de cacao
Les agriculteurs américains sont dans l'attente d'un plan de soutien ce mardi. Le ministre des Finances, Scott Bessent, leur a promis une aide conséquente, en particulier pour les producteurs de soja, très mal en point. Les exportations de soja américain se sont effondrées depuis que la Chine a décidé de réduire drastiquement ses achats aux États-Unis. Les 20% de droits de douane imposés par la Chine en représailles aux taxes américaines ont été plus que dissuasives. Le soja américain n'est plus compétitif par rapport aux origines d'Amérique latine avec cette taxe. Entre janvier et juillet, les exportations américaines de soja vers la Chine ont chuté de 39% en volume et de plus de 51% en valeur. Entre janvier et août, la Chine a acheté 66 millions de tonnes au Brésil, soit les trois quarts des exportations totales du géant d'Amérique latine. La Chine a même acheté deux millions de tonnes de soja en Argentine, en profitant des trois jours pendant lesquels le gouvernement a levé sa taxe à l'exportation de 33%, c'est dire si les importateurs chinois sont sensibles au prix et à quel point ils saisissent toutes les occasions pour ne pas acheter aux États-Unis. Coup dévastateur pour les agriculteurs Plus le temps passe, plus les conséquences sont dévastatrices pour les farmers américains, car la Chine est le premier acheteur de soja au monde, et de très loin. En 2024, les États-Unis ont exporté 27 millions de tonnes de soja vers la Chine, ce qui a représenté un cinquième des importations chinoises de soja pour une valeur de plus de 12 milliards de dollars. À l'heure où la nouvelle moisson débute aux États-Unis, et où la récolte est généralement déjà en partie vendue, la Chine n'a passé aucune commande, ce qui n'était pas arrivé depuis 20 ans. À cette période de l'année, l'Empire du Milieu avait acheté déjà 6,5 millions de tonnes, l'année dernière. La Chine, un marché impossible à compenser Le soja américain s'est exporté plus que d'habitude vers d'autres destinations, le Bangladesh notamment, mais aussi la Thaïlande, le Vietnam, l'Égypte ou encore la Malaisie, mais cela ne suffit pas à compenser la perte du marché chinois. Les exportations américaines, toutes destinations confondues, ont baissé de 8% sur les sept premiers mois de l'année. Dans ce contexte, les silos américains se remplissent, les cours du soja sombrent et pèsent sur les profits de chaque maillon du secteur, comme le rappelle l'agence Bloomberg, que ce soit sur les entreprises qui gèrent les silos à grains, les transformateurs qui fabriquent de l'huile et des tourteaux, ou encore les compagnies ferroviaires qui transportent le soja. Des mesures qui pourraient ne pas suffire Donald Trump a promis de défendre les intérêts des agriculteurs, et en particulier les producteurs de soja lors de sa rencontre avec son homologue chinois Xi Jinping à la fin du mois, en marge du sommet de l'APEC (la Coopération économique Asie-Pacifique) prévu le 31 octobre et 1er novembre en Corée du Sud. « Un accord ne signifierait pas forcément que les exportations reprendront rapidement et au même niveau que par le passé », pointe Olivier Antoine, auteur du livre Géopolitique du soja, publié ce mois-ci aux éditions Armand Colin. Le plan de sauvetage annoncé aujourd'hui ne résoudra pas tout non plus, « il peut être bénéfique à court terme, mais ne compensera pas d'éventuelles pertes de marché qui pourraient être plus durables », prévient Scott Gerlt, économiste en chef de l'American Soybean Association.
Adopté il y a 25 ans, l'Agoa permet à 32 pays africains d'exporter des milliers de produits vers les États-Unis sans droits de douane. Mais il expire ce 30 septembre à minuit, sauf prolongation de dernière minute. Un bilan contrasté pour un accord crucial à la fois économique et géopolitique. En 2000, sous Bill Clinton, l'Agoa (African Growth and Opportunity Act) voit le jour avec un objectif clair : renforcer les relations commerciales entre les États-Unis et l'Afrique subsaharienne. Aujourd'hui, cet accord permet à 32 pays africains d'exporter plus de 6 000 produits sans droits de douane : biens manufacturés, textile, voitures sud-africaines, produits agricoles ou encore ressources minières. En contrepartie, ces pays doivent respecter certains critères : économie de marché, progrès en matière de gouvernance, de démocratie et de droits humains. C'est pourquoi la liste des membres évolue régulièrement. En 2023, les exportations africaines vers les États-Unis dans ce cadre ont atteint 10 milliards de dollars. Des résultats visibles, mais concentrés dans quelques pays Depuis son entrée en vigueur, l'Agoa a permis aux exportations africaines vers les États-Unis de progresser de 37% entre 2001 et 2021. Mais les bénéfices sont très inégalement répartis. L'Afrique du Sud en tire le plus grand profit avec ses voitures, ses agrumes et son vin. Viennent ensuite le Kenya et le Lesotho grâce au textile, ainsi que Madagascar dans une moindre mesure. Pour la majorité des autres pays, l'impact reste marginal. Pourtant, une fin brutale de l'Agoa aurait des conséquences lourdes, comme une perte de compétitivité, un recul des investissements et menaces sur des centaines de milliers d'emplois. Un avenir incertain face au retour du protectionnisme américain Au Kenya, 300 000 emplois du secteur textile sont menacés. Au Lesotho, l'Agoa a permis de bâtir la première industrie du pays, le vêtement, où se fournissent encore de grandes marques américaines. En Afrique du Sud, déjà frappée par un chômage supérieur à 30%, des dizaines de milliers d'emplois pourraient disparaître. Pour ces pays, l'Agoa est indéniablement une réussite, mais ses bénéfices restent concentrés. De leur côté, les investisseurs américains ont aussi profité de cette dynamique. Reste que Washington, à l'heure du protectionnisme et des droits de douane, revoit sa politique commerciale. Et si les États-Unis se retiraient un peu plus du terrain africain, un vide se créerait. Un vide que ne manquerait pas de combler la Chine, devenue paradoxalement l'ennemi numéro 1 de Donald Trump et le premier partenaire commercial de la majorité des pays du continent.
Deauville, dans le nord-ouest de la France, a accueilli en ce début de semaine, les 29 et 30 septembre, la traditionnelle rencontre de l'Association française cotonnière (Afcot). Un rendez-vous qui a rassemblé près de 300 participants issus d'une quarantaine de pays. Cette rencontre s'est déroulée dans un contexte particulier, celui d'un marché « totalement à l'arrêt », pour reprendre les mots d'un participant. Chacun avec leurs mots, les participants ont tous confirmé et déploré à Deauville l'immobilité du marché et l'absence de lumière au bout du tunnel. « Depuis des mois, on assiste à une lente dérive à la baisse, avec une volatilité minimale des prix », résume Antonia Prescott, directrice de la rédaction du site d'information et d'analyse Cotton Outlook. Les négociants, dont le métier est de choisir le moment opportun pour acheter et vendre en dégageant la meilleure marge, sont comme paralysés par cette quasi-stabilité. « On patauge tous, confie l'un deux, comme pris dans un marécage. » Il y a néanmoins du coton qui est exporté, mais surtout du coton du Brésil et des États-Unis. Les deux origines représentent 65% des ventes mondiales. À écouter aussiLes cours du coton dévissent sur fond de bonnes récoltes mondiales Le coton africain pénalisé La situation est beaucoup plus difficile pour le coton africain, dont le coût de production est beaucoup plus élevé que celui du coton brésilien ou américain. Lors des appels d'offre, explique un négociant, le coton de la zone franc se retrouve en haut de la liste des prix, et donc souvent écarté, malgré sa belle qualité qui fait sa réputation. Quand les sociétés cotonnières africaines finissent par céder des volumes, elles le font généralement à perte. Le seul maillon de la chaîne qui est à peu près épargné, c'est le producteur ouest-africain, dont le coton est garanti par un prix fixé en début de campagne dans chaque État concerné. À écouter aussiLes cotonniers africains sur le qui-vive refusent d'être déclassés Des perspectives 2026 très incertaines Dans un tel paysage, l'humilité s'impose, a rappelé le président de l'Association française cotonnière à Deauville, dans son discours de clôture. Le schéma actuel est celui d'une surproduction mondiale par rapport à une demande qui ne suit pas. Il faudrait qu'un des paramètres ou les deux bougent dans le bon sens pour que la filière africaine retrouve des couleurs. Rien ne dit que la production va ralentir, car les subventions accordées au coton brésilien, indien, chinois et américain pourraient inciter les agriculteurs de ces pays à produire plus, relève un participant. « Les tensions géopolitiques, l'affaiblissement du dollar et la pression sur les matières premières agricoles plaident davantage pour une stabilisation des cours que pour une remontée significative à moyen terme », selon Thierry Devilder, le président de l'Afcot.
En RDC, à la frontière avec la Zambie, environ 700 femmes de Kasumbalesa assurent le transport manuel des marchandises des petits commerçants. On les appelle les femmes « wowo ». Si leur travail est vital pour l'économie locale, il se fait dans la précarité et sous la menace permanente de violences. De notre correspondante de retour de Kasumbalesa, Dès le matin, les femmes « wowo », chargées de sacs de farine, de packs de biscuits, de lots de boissons sucrées pesant parfois de plus de 30 kilos, sont dans le couloir piétonnier de Kasumbalesa et dans la zone neutre. Un sac sur sa tête, Anto vient de braver les différentes barrières du couloir : « Il y a trois barrières. À la sortie de la Zambie, je paye 500 francs congolais. Au couloir, je donne 1 000 francs congolais et un peu plus loin, je débourse encore 1 000 francs congolais. Une fois en dehors du couloir, d'autres agents des services publics nous attendent. Des fois, je négocie avec eux et ils me laissent passer. » Des attouchements et des humiliations Au-delà de ces tracasseries, certaines femmes subissent des violences verbales de la part des agents publics. Jacquie, jeune femme veuve, rencontrée à la sortie du couloir piétonnier, témoigne : « On m'insulte souvent. Ces agents me disent. Pourquoi es-tu ici ? Où est ton mari ? Est-il incapable de te nourrir ? Bon, je n'en ai rien à faire, on supporte parce qu'ils ne connaissent pas ma situation. » D'autres subissent même des agressions sexuelles, déclare Régine Mbuyi, une autre femme « wowo » : « Lorsqu'un agent m'interpelle parfois, il me demande des faveurs sexuelles pour laisser passer la marchandise. Il arrive également que pendant la fouille, ces agents se permettent des attouchements jusque sur les parties intimes. C'est humiliant… » Les femmes « wowo » de Kasumbalesa n'ont aucune protection sociale ni de recours légal. L'Association des femmes actives dans le commerce transfrontalier (AFACT) dénonce une situation alarmante. Solange Masengo est la présidente : « Dans la zone de la Comesa, le Marché commun de l'Afrique orientale et australe, nous voyons les femmes assurer le transport transfrontalier sans problème. Mais ici, chez nous, ces femmes discriminées, elles sont chassées. Il y a des filles qui ont été humiliées et déshabillées, et nous avons des preuves. On a aussi des femmes qui ont été fouettées publiquement. Lorsque l'association veut intervenir, on nous demande de laisser la situation comme ça. Pourquoi la femme ne peut pas faire un travail de son choix ? » Pour l'heure, nous n'avons pas réussi à avoir la réaction du maire de Kasumbalesa et même du sous-directeur de la douane. Les femmes « wowo » quant à elles, continuent de porter le commerce frontalier sur leurs épaules malgré la fatigue et les humiliations. À lire aussiFemmes «wowo», ces forces invisibles du commerce transfrontalier entre la RDC et la Zambie [1/2]
Sept maroquiniers éthiopiens étaient récemment à Paris pour présenter leur travail. Objectif : se faire connaître, convaincre des acheteurs et franchir les obstacles qui freinent leur entrée sur le marché européen. « Je fabrique des sacs, des carnets, des ceintures et d'autres accessoires. Comme vous pouvez le voir, je crée aussi bien des articles féminins que masculins, ainsi que des produits mixtes et unisexes », raconte Milki Aberra, cofondateur de la marque Tibeb Leather Works. Il a un atelier de maroquinerie et deux boutiques à Addis-Abeba. Et, tout sourire, le voilà à Paris dans un salon de mode pour tenter de trouver des débouchés à sa production et valoriser enfin le cuir éthiopien. « Il est un peu difficile de trouver une clientèle régulière. Nous avons bien un client à l'export sur le marché américain, mais pas encore en Europe. C'est un peu compliqué, car il y a trop de normes et de spécifications à respecter avant de pouvoir exporter vers l'Europe. Donc oui, c'est assez difficile de pénétrer le marché européen », reconnait Milki Aberra. Une « marque-pays » nommée Éthiopie Impossible pour l'instant de trouver ses créations en Europe : elles ne sont pas distribuées. Pour que cela devienne une réalité, Milki Aberra et six autres maroquiniers éthiopiens sont appuyés par le Centre de promotion des importations des Pays-Bas. Une organisation gouvernementale où travaille Jan Willem Richelmann : « On retravaille le dessin pour réaliser le goût européen. Les collections se sont améliorées chaque année. Et aussi, quand ils viennent à Paris, le marché les reconnaît. Donc chaque fois, vendre "la marque-pays", ça marche mieux. Et ça se traduit en business. » Mais encore faut-il pouvoir venir. Le visa court séjour permettant l'entrée dans l'espace Schengen regroupant 29 États européens est très difficile à obtenir. Un frein supplémentaire à l'exportation pour les entrepreneurs africains. Sans visa, très peu d'achats « Pour les affaires en particulier, c'est très difficile, témoigne Milki Aberra, par exemple, moi, on m'a refusé deux fois, en 2023 et en 2024, je n'ai pas pu venir à ce salon. C'est la première fois que je viens. C'est important pour nous d'avoir des échanges en face à face pour trouver plus de clients ». Résultat de ce séjour parisien pour Milki Aberra : quelques contacts pris, mais, à ce jour, aucun client n'a confirmé de commande ferme. Si le cuir éthiopien reste très prisé par les grandes marques occidentales et chinoises, l'artisanat et la création locale peinent à percer en Europe. Reste les États-Unis, et malgré de nouveaux droits de douane de 10 % supplémentaires, les experts estiment que l'Éthiopie s'en sort plutôt bien face à ses concurrents, comme le Bangladesh ou le Vietnam. À lire aussiMode : comment développer le potentiel du secteur du cuir sur le continent ?
À Kasumbalesa, à la frontière entre la Zambie et la RDC, se vit un trafic parallèle, loin des grands camions et des formalités douanières. Chaque jour, plusieurs centaines de femmes congolaises transportent sur leur tête, ou leur dos, des marchandises pour traverser la frontière Zambienne. On appelle ces femmes « wowo », en référence aux camions chinois de la même marque. Notre correspondante a suivi quelques-unes de ces femmes. De notre correspondante de retour de Kasumbalesa, À Kasumbalesa, deuxième poste frontalier plus important de la RDC, elles sont là, à quelques mètres des files interminables de camions : des femmes portant de lourdes charges sur la tête et le dos, qui franchissent le couloir piétonnier. Ce sont les femmes « wowo » raconte avec sourire Alphonsine, l'une d'elles : « Je suis en mesure de faire passer la charge de tout un camion. Nous sommes les mamans "wowo", c'est l'image des camions qui transportent des charges importantes. Nous travaillons en équipe. S'il faut décharger le camion, nous le faisons et puis nous transportons la cargaison jusqu'à la destination au Congo, selon les instructions du propriétaire. » Selon l'association des femmes actives dans le commerce transfrontalier, elles sont près de sept cents, tous âges confondus, qui exercent ce métier. Les petits commerçants, eux, ne s'affichent pas dès qu'ils confient la marchandise aux femmes « wowo ». Témoignage de Régine Mbuyi, une autre transporteuse : « Le petit commerçant vient acheter toute sorte d'articles, du jus, de la farine de froment, de l'huile végétale… Il me sollicite pour faire traverser ces produits. S'il est de bonne foi, il me donne aussi l'argent pour payer la douane et d'autres services publics. Mais s'il n'a rien, je dois me débrouiller. » À la sortie de la frontière côté congolais, quatre femmes arrivent chacune avec cinq packs de boisson sucrée d'environ 30 kg sur sa tête. Coût de transport, 1 500 francs congolais par course, soit moins d'un dollar. La recette journalière de chacune est de près de 5 dollars. Ces femmes doivent transporter environ une tonne. Pour y arriver, c'est la course contre-la-montre, explique Keren pendant qu'elle range les packs : « Chacune de nous a une quantité qu'elle doit transporter. Moi, j'ai 25 packs. Le commerçant a acheté 100, ce n'est pas beaucoup. Bon, on y va pour la dernière course. » Les services de douanes, quant à eux, ne voient pas d'un bon œil cette activité des femmes, car elle favoriserait un manque à gagner quotidien de près de 3 000 dollars. Pour Malaxe Luhanga, président des petits transporteurs transfrontaliers, il faut formaliser cette activité : « On peut appliquer le système de groupage selon la catégorie des marchandises et qu'elles soient taxées officiellement. On peut adopter ce système qui est admis par les pays membres du Comesa pour faciliter les transactions et la taxation par les services publics. » En attendant, des centaines des femmes « wowo » de Kasumbalesa poursuivent leur activité de manière informelle. À lire aussiLa frontière entre la Zambie et la RDC rouvre après plusieurs jours de fermetures
La Chine vient de lancer une enquête sur les exportations de noix de pécan des États-Unis et du Mexique. Pékin dénonce des ventes à des prix inférieurs à ceux du marché, ventes qui porteraient préjudice à l'industrie nationale chinoise. La Chine ne produit qu'environ 3 000 tonnes de noix de pécan et a besoin de beaucoup plus pour faire tourner ses usines de transformation, explique José Gutierrez Fernandez, analyste, noix, épices et fruits secs, chez S&P Global Commodity Insights. Depuis 2010, la Chine est le premier importateur mondial et dépend des États-Unis et du Mexique qui fournissent à eux deux 70 % du marché ! La Chine achète aussi en Afrique du Sud, ce qui lui permet d'avoir des fournisseurs aux périodes de récoltes différentes, qui lui garantissent un approvisionnement tout au long de l'année. Cette enquête est donc perçue avant tout comme une mesure de rétorsion contre les taxes américaines. Les noix de pécan avaient déjà été prises dans la tourmente de la guerre commerciale lancée pendant le premier mandat de Donald Trump, Pékin avait à ce moment-là riposté par des droits de 47 % sur la noix de pécan. L'intégration du Mexique dans l'enquête est nouvelle, et interroge, dans la mesure où le Mexique n'est pas le fournisseur principal de la Chine. Impact immédiat ? L'enquête chinoise, annoncée pour durer un an, n'interdit pas aux exportateurs américains et mexicains de vendre en Chine, mais il n'est pas exclu de voir les douaniers chinois mettre plus de temps à approuver les commandes. En pratique, l'enquête se fait déjà sentir : les achats chinois ont chuté depuis un an et les exportations américaines aussi, les deux étant très liés. Sur les quatre premiers de l'année de la campagne commerciale, d'octobre 2024 à janvier 2025, les exportations américaines de noix de pécan ont chuté de 70 %, selon le ministère américain de l'Agriculture. L'ensemble de la saison 2024/2025 a été une des plus basses depuis les années 1990, selon S&P Global Commodity Insights. Coup dur pour les États-Unis et le Mexique Les conséquences de l'enquête pourraient être d'autant plus contraignantes que c'est précisément l'appétit chinois qui a poussé les principaux États producteurs à augmenter leurs volumes de production ces dernières années, Mexique et États-Unis en tête. Toute nouvelle baisse des importations chinoises de noix de pécan va faire augmenter les stocks au Mexique et aux États-Unis et risque d'entrainer de fortes baisses de prix sur ces deux marchés. Sans parler des difficultés pour les agriculteurs : lors de la précédente guerre commerciale, les producteurs de plusieurs États américains avaient été durement touchés, et les États-Unis avaient dû diversifier leurs ventes vers le Canada, Israël, la Hollande ou encore l'Allemagne, explique José Gutierrez Fernandez, mais cela n'avait pas suffi à combler le manque d'achats chinois. Cette enquête va aussi directement compliquer l'approvisionnement de la Chine. Son alternative, c'est d'acheter plus en Afrique du Sud, et auprès d'autres producteurs mineurs tels que l'Argentine, le Brésil et l'Australie. Mais ils ne fourniront jamais assez si les besoins de la Chine restent les mêmes. À lire aussiLa guerre commerciale de Donald Trump redessine les exportations chinoises
Sous l'effet de la guerre commerciale menée par Donald Trump, Pékin réoriente ses exportations. Si les flux vers les États-Unis s'effondrent, l'Europe, l'Asie et même l'Afrique deviennent des débouchés privilégiés. Les chiffres d'août 2025 confirment un tournant pour la deuxième économie mondiale. Si les exportations chinoises progressent encore par rapport à l'été 2024, leur croissance ralentit fortement. Surtout, les ventes vers les États-Unis se contractent brutalement : -12% en un mois, soit environ 5 milliards de dollars en moins. En cause, les surtaxes de 30% imposées par Washington sur l'ensemble des produits chinois. Mais Pékin ne se contente pas d'encaisser le choc. La Chine redéploie sa production vers d'autres marchés. L'Europe en première ligne du redéploiement Le continent européen s'impose comme la principale alternative pour les exportateurs chinois. Au premier semestre 2025, il a absorbé 16% des exportations chinoises, une proportion en hausse constante. Tous les secteurs sont concernés : électronique, chimie, textile, jouets, pharmaceutique, acier et surtout automobile électrique. Si certains y voient une opportunité — prix plus compétitifs et accès à des innovations technologiques — d'autres redoutent un « nouveau choc chinois » entraînant une désindustrialisation accélérée. L'Asie et l'Afrique, nouveaux relais de croissance La stratégie dite du « China+1 » illustre cette diversification. Pékin maintient sa base industrielle tout en s'appuyant sur ses voisins de l'Asean (+22% d'exportations vers la région) pour la production et la réexportation, du Vietnam à la Thaïlande. L'Asie centrale bénéficie également des Nouvelles Routes de la Soie, tandis que l'Inde et l'Afrique voient affluer des produits chinois. Pour accompagner ce basculement, la Chine a ouvert 117 nouvelles lignes de fret aérien au premier semestre. Derrière cette intensification logistique, une stratégie claire : compenser le recul du marché américain, renforcer son influence régionale et rappeler qu'elle reste un acteur incontournable du commerce mondial.
Mauvaise nouvelle chez le premier exportateur mondial de bananes, l'Équateur. La maladie baptisée TR4 a officiellement été détectée. Ce qui veut dire que le champignon qui en est responsable est probablement entré dans le pays il y a déjà plusieurs mois. Cette alerte sanitaire est prise très au sérieux, dans un secteur qui n'a pas été épargné par les dernières crises géopolitiques, logistiques et climatiques, et conforte ceux qui plaident pour plus de diversité variétale. Les bananeraies ne seront pas décimées dans les mois qui viennent, mais l'arrivée de la TR4 – fusariose race 4 tropicale – est une nouvelle considérée comme grave, car il n'y a pas de traitement possible. La seule solution, c'est la protection, via un contrôle très strict des surfaces qui sont touchées, pour que la maladie ne se propage pas ailleurs. Concrètement, explique Denis Loeillet, économiste de la filière au Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, « ça passe par l'installation de clôture autour des zones atteintes, la désinfection de tout ce qui entre et sort des plantations, que ce soit les pelles, les chaussures ou encore les roues des véhicules agricoles. » Au Pérou, où la maladie est apparue en 2021, les mesures n'ont pas été suffisantes et des zones entières de culture ont été abandonnées, ce qui a entrainé des baisses de production et une contagion aujourd'hui à l'Équateur. Ailleurs, en Colombie ou encore aux Philippines, on a appris à faire avec, preuve qu'il y a des moyens d'agir pour éviter le pire. Pas d'impact à court terme sur l'approvisionnement L'Équateur met chaque année entre 6 et 7 millions de tonnes de fruits jaunes sur le marché, soit l'équivalent de ce que consomment les 27 pays européens et le Royaume-Uni en un an ! Une maladie chez un géant qui nourrit le monde, inquiète forcément, mais l'avenir dépendra de la vitesse de propagation de l'épidémie. A priori, à court terme, l'effet ne devrait pas être significatif sur les volumes, l'approvisionnement mondial sera largement assuré, mais un effet sur les prix n'est pas à exclure : « Les mesures de biosécurité à mettre en place d'urgence vont augmenter les coûts de production », explique l'expert du Cirad. La grande distribution pourra alors difficilement ignorer la situation lors des négociations à venir et sera probablement contrainte d'acheter plus cher la banane, et peut-être de la revendre à un prix plus élevé aussi. Les limites du tout-Cavendish Avant l'Équateur, 25 pays producteurs ont déjà été touchés par cette maladie, mais le fait que la TR4 arrive en Équateur est perçu comme un marqueur important dans la filière, qui fera probablement bouger les lignes. C'est le signe qu'il est peut-être temps de diversifier les variétés ou de travailler sur la résistance de la banane Cavendish, qui domine le marché depuis les années 1960, mais qui montre aujourd'hui, en Équateur, un peu plus sa vulnérabilité. C'est précisément la mission que s'est donnée, en France, le Cirad, via l'initiative Bana+, un projet de 7,5 millions d'euros qui vise à proposer des variétés résistantes contre la cercosporiose noire et la TR4, deux des principales maladies fongiques qui attaquent le bananier.
Les prix du pétrole résistent dans un contexte en apparence baissier, porté par l'annonce d'une surabondance à venir. Seulement, d'autres points d'incertitude, tels que l'état des stocks chinois ou les volumes de pétrole sanctionnés qui sont commercialisés, rendent difficile la lisibilité du marché. L'offre en pétrole augmente beaucoup plus vite que la demande et, de l'avis général, il faut se préparer à une surabondance de brut dès le quatrième trimestre et au premier semestre 2026. Mais le niveau de cette surabondance est loin de faire consensus – l'Opep+ prévoit une croissance de la consommation deux fois plus forte que l'Agence internationale de l'énergie. « Il y a trop d'angles morts sur le marché » pour dresser un tableau réaliste, résume l'agence Reuters. Parmi les inconnues figurent les stocks de pétrole détenus par la Chine, des stocks sur lesquels le pays ne communique pas. Or, le niveau de ces réserves est en théorie une des données qui peut avoir une influence majeure sur les prix, a fortiori quand il s'agit des stocks du premier importateur mondial de brut. Opacité des stocks chinois Malgré l'absence de données officielles, le recoupement de différentes données permet d'affirmer que depuis le mois de mars, la Chine a importé du brut – notamment de Russie, du Venezuela et d'Iran – à un rythme bien plus élevé que ce qui était nécessaire pour répondre à la demande en carburant du pays. Selon les calculs de Reuters, l'excédent en pétrole brut du pays aurait même bondi à un peu plus d'un million de barils par jour au mois d'août. À lire aussiComment la Chine contourne les sanctions américaines sur le pétrole vénézuélien? Pour l'instant, le marché semble ne pas tenir compte de ces stocks, pointe le Financial Times, comme s'ils étaient invisibles. « Ces stocks ne sont pas nécessairement négatifs, car si les Chinois accumulent, c'est qu'ils vont consommer », explique Charles Thiémélé, directeur Afrique de la société de trading pétrolier et gazier BGN SA, qui précise que la gestion des stocks en Chine ne correspond pas à celle des Occidentaux. Le pétrole sanctionné, mal répertorié Le marché n'est pas en mesure non plus de refléter tous les volumes de pétrole sanctionnés qui naviguent à bord de la flotte fantôme. C'est peut-être ce qui explique que les cours restent depuis le mois de juillet dans une fourchette relativement stable entre 60 à 70 dollars le baril de Brent – une des références mondiales –, et c'est probablement ce qui fait aussi qu'ils ne reflètent pas correctement l'équilibre entre l'offre et la demande. Tant que la Chine achètera beaucoup, elle absorbera une partie de l'excédent mondial, comme le relève Javier Blas, éditorialiste de l'agence Bloomberg, ce qui jouera contre un effondrement des prix. Tant que la production de la Russie et de l'Iran ne sera pas revenue en grâce sur le marché et ne sera pas commercialisée au grand jour, l'impression de manque soutiendra également les prix. Plus que jamais, le marché manque de lisibilité, reconnaît Charles Thiémélé, tout en rappelant que les prix du pétrole sont le fruit de la combinaison de nombreux facteurs et qu'ils « restent liés à la perception que le marché a de la consommation future ». À écouter aussiDétroit d'Ormuz : accès crucial pour les importations de pétrole de la Chine
Shein, Temu, AliExpress, depuis quelques années, des géants de l'ultra fast fashion et du commerce low cost déferlent sur les marchés mondiaux. Ces plateformes proposent du prêt-à-porter ou des petits articles de bazar à prix cassés, dont il est difficile de passer à côté, tant les publicités sont matraquées sur les réseaux sociaux. Une stratégie qui agace de plus en plus alors que la planète est déjà submergée par les déchets textiles. Accusés de vendre des contrefaçons, des produits dangereux ou encore de proposer de fausses promotions ou de communiquer des informations trompeuses, ces mastodontes du low cost attisent régulièrement les critiques. Le 9 septembre 2025, le Parlement européen a définitivement adopté une directive obligeant les fabricants de vêtements à prendre en charge les coûts de collecte, de tri et de recyclage de leurs produits. Une obligation financière qui vise explicitement les acteurs de la fast fashion. Côté français, on milite pour l'adoption d'un outil européen qui vise à déréférencer les sites de vente en ligne en infraction avec les droits européens. Face au développement de ces plateformes, ces mesures sont-elles suffisantes ? Faut-il davantage responsabiliser le consommateur qui cherche en premier lieu à faire des économies ? Ou plutôt augmenter la pression sur les sites de e-commerce ? Avec : • Audrey Millet, historienne, chercheuse à l'OsloMET et au Laboratoire d'anthropologie du travail à l'Université de Bologne. Elle étudie les liens entre le «made in Italy» et le crime organisé. Autrice de L'Odyssée d'Abdoul - Enquête sur le crime organisé (Les Pérégrines, 2024) • Mathilde Pousseo, déléguée générale du collectif Ethique sur l'étiquette. Un entretien avec Najet Benrabaa, correspondante de RFI à Medellin, en Colombie, où Temu est la deuxième application la plus utilisée en Colombie. En fin d'émission, la chronique Voisins connectés d'Estelle Ndjandjo, sur l'évolution des sociétés africaines mondialisées à travers les écrans, les réseaux sociaux et la technologie. Aujourd'hui, on regarde dans le rétroviseur de la révolution capillaire du cheveu afro. Comment prendre soin de ses cheveux texturés ? Une question qui a traversé plusieurs générations de blogueuses et de créatrices de contenu. Une révolution possible grâce à la révolution capillaire. Programmation musicale : ► Baise Le Monde – Orelsan ► Wicked (Remix) – SuperJazzClub feat. Cruel Santino.
La République démocratique du Congo donne le feu vert à de nouvelles exportations de cobalt, à compter du 16 octobre, après plusieurs mois d'interdiction. Le pays, principal producteur du métal bleuté utilisé dans les batteries électriques, opte pour un retour contrôlé sur le marché, via l'instauration de quotas d'exportation, jusqu'en 2027. L'option des quotas n'est pas une surprise, c'était une des quelques hypothèses étudiées par les analystes et experts du marché, qui planchaient depuis plusieurs mois sur des scénarios de reprise. Les opérateurs du secteur, qui vivaient dans l'angoisse de ce qu'allaient décider les autorités congolaises, sont désormais fixés, mais pas forcément soulagés. Les quotas autorisés par la RDC – 18 125 tonnes d'ici fin décembre et 96 600 tonnes les deux années qui suivent – ne vont pas augmenter sensiblement l'offre à court terme et sont inférieurs aux attentes. Leur application pose par ailleurs de nombreuses questions, y compris celle de la capacité du pays à mettre en place des contrôles stricts pour faire respecter les volumes alloués à chaque exportateur. À écouter aussiLe jour où les exportations de cobalt congolais reprendront... Déficit en vue, à court terme En février 2025, l'interdiction d'exporter a fait s'envoler les prix de tous les produits à base de cobalt : l'hydroxyde de cobalt exporté par le Congo a plus que doublé, et les prix des matériaux de batterie tels que le sulfate et le tétroxyde de cobalt ont atteint des sommets fin août, rapportent les analystes de Project Blue. Mais cette hausse n'était manifestement pas liée à un déficit de l'offre par rapport à la demande : grâce aux stocks hors de RDC, notamment ceux d'Afrique du Sud, de Zambie et de Malaisie, les raffineries chinoises ont en effet pu continuer à s'approvisionner. Aujourd'hui, elles ne tournent plus à pleine capacité et les stocks d'hydroxyde commencent à être très serrés, pour ne pas dire inexistants, à en croire certaines sources. La pénurie qui n'a pas eu lieu en 2025 se profile donc pour 2026. L'ampleur du déficit varie selon les estimations, de 10 000 tonnes à plus de 60 000 tonnes. Et ce, « même en supposant une baisse de la demande et une croissance plus rapide de la production indonésienne », rapporte Chris Welch, analyste du marché du cobalt pour Argus Media, qui n'exclut pas un resserrement considérable du marché. À écouter aussiL'enfer du cobalt en RDC : l'envers de la transition énergétique Diminuer les stocks pour soutenir les prix L'objectif de la RDC est d'éviter le surplus de production de cobalt métallique en Chine, qui pèse sur les prix, explique l'expert. Le président de l'Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales et stratégiques du pays (ARECOMS) a confié à l'agence Bloomberg vouloir réduire les stocks mondiaux à l'équivalent d'environ un mois de demande, pas plus. Le choix de mettre en place des quotas à long terme et serrés montre que la RDC privilégie le soutien des prix au volume exporté, relève l'analyste d'Argus Media. Cette stratégie conforte également, via certaines des clauses prévues, la capacité de la RDC à influencer les cours mondiaux du cobalt, selon Ying Lu de Project Blue.
Depuis que la Chine a imposé des contrôles très stricts à son exportation, le germanium a vu son prix flamber. Ce métal, utilisé, en minuscule quantité, dans les équipements militaires et les semi-conducteurs, atteint son plus haut niveau depuis quatorze ans. Aucun autre métal n'offre les mêmes propriétés que le germanium. Il faut désormais compter environ 5 000 dollars pour un kilo de germanium, contre 1 000 dollars en 2023, avant que la Chine n'impose ses restrictions, selon l'agence Fastmarkets. Les prix ont réellement explosé à partir de fin 2024, quand les exportations chinoises ont commencé à chuter sérieusement, rapporte le Financial Times. Certains experts n'excluent pas que des entreprises aient choisi de faire des stocks et provoqué une distorsion du marché, qui à son tour renforce la stratégie chinoise de restrictions. La plupart des usages industriels ne nécessitent que quelques grammes ou quelques nanogrammes de germanium. Aujourd'hui, « l'argument du prix n'est plus pertinent, la question est la disponibilité », pointe Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri). Pour cet analyste, il revient aux pays consommateurs de mettre en place avec les industriels une stratégie souveraine d'approvisionnement. L'offre disponible sur le marché a fondu. Des négociants qui achetaient 100 kg de germanium auparavant, racontent dans le Financial Times être obligés de se contenter de 10 kg. Selon plusieurs témoignages cités par le journal britannique, les États-Unis, qui ont importé l'année dernière pour 50 millions de dollars de germanium selon l'USGS, font face à une crise d'approvisionnement « désespérée ». À lire aussiLa Chine restreint les exportations de deux métaux rares Importations en chute aux États-Unis Le commerce du germanium a nettement ralenti. Les États-Unis, qui l'utilisent dans la fabrication des fibres optiques, des cellules infrarouges et des semi-conducteurs, ont vu leurs importations chuter de 40% pour les sept premiers mois par rapport à la même période en 2024. La situation ne devrait guère évoluer, car même si d'autres pays exportent du germanium issu du recyclage, comme le Canada ou encore la Belgique, « la Chine domine la production et n'a aucun intérêt à diminuer sa mainmise sur le secteur », résume Raphaël Danino-Perraud. En 2023, selon le site français MineralInfo, la Chine produisait plus de 94% du germanium raffiné. À lire aussiLes États-Unis devront se passer de gallium, germanium et antimoine chinois Une production liée au zinc Ces prix, qui crèvent le plafond depuis plusieurs mois, pourraient inciter les miniers à extraire plus de germanium, en théorie, mais le germanium est un co-produit du zinc essentiellement, il est donc tributaire de la demande et de la production de cet autre secteur. Les producteurs de zinc sont en tout cas très courtisés par les industriels. L'Américain Lockheed Martin a par exemple annoncé fin août un partenariat stratégique avec Korea Zinc, un groupe de métallurgie sud-coréen, pour sécuriser ses achats.
Les négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine se sont « très bien passées » lundi 15 septembre estime le président américain Donald Trump, après de nouvelles discussions tenues à Madrid, en Espagne. Mais avant un éventuel apaisement, la hausse des droits de douane entre les États-Unis et la Chine a des conséquences négatives pour d'autres régions, y compris l'Afrique. Les droits de douane américains (fixés pour l'instant à 30 % sur les produits chinois entrant aux États-Unis), tendent à ralentir l'activité en Chine. La production industrielle y a baissé le mois dernier. Si la guerre commerciale persiste, Pékin pourrait moins acheter que prévu en Afrique, estime Julien Marcilly, économiste en chef du cabinet Global Sovereign Advisory (GSA). « Si la Chine exporte moins vers les États-Unis, il est probable qu'elle importe moins de matières premières et de biens intermédiaires depuis le reste du monde, et donc en particulier de l'Afrique, explique-t-il. Un certain nombre d'économies africaines devraient ainsi être touchées négativement. » Les pays les plus exposés à cela sont plutôt des pays à faible revenu exportant des matières premières, comme le Niger, la République Démocratique du Congo, la Guinée ou la Sierra Leone. Ces perspectives négatives se présentent alors que l'Afrique est aussi déjà confrontée directement au protectionnisme de Donald Trump. Expiration de l'Agoa Avec le retour de Donald Trump à la Maison blanche, les pays africains font face à une hausse des droits de douane américains et l'expiration à la fin du mois de l'Agoa. Cet accord permettait depuis près de 25 ans à des pays africains d'être exemptés de droits de douane pour leurs exportations vers les États-Unis, sous certaines conditions. Commerce Chine-Afrique : qui gagne ? De nombreux pays pâtissent du protectionnisme états-unien et la Chine cherche à saisir cette opportunité pour approfondir ses liens avec le continent, dans le cadre d'une stratégie de diversification de ses partenariats. En juin, Pékin a ainsi annoncé supprimer les droits de douane pour vingt pays africains supplémentaires contre seulement une trentaine auparavant. La date d'entrée en vigueur de la mesure n'a pas été confirmée. D'après Julien Marcilly, qui vient de co-signer une étude sur le sujet, « le Zimbabwe, la Côte d'Ivoire, la Namibie, et dans une moindre mesure l'Afrique du Sud » pourraient en profiter plus que d'autres. « Cela peut atténuer les effets négatifs de la nouvelle politique commerciale américaine, mais ça ne les compense pas », nuance-t-il. À lire aussiLa suspension des droits de douane par la Chine peut-elle profiter aux pays africains? Éviter une nouvelle dépendance L'un des risques est aussi de faire naitre ou d'approfondir de nouvelles dépendances. Si le volume des échanges vers l'Afrique est minime pour la Chine, par rapport à d'autres régions du monde, le commerce avec Pékin peut être localement très important pour certains pays du continent. Beaucoup en ont conscience et cherchent de nouveaux partenaires, en particulier depuis le début de la guerre en Ukraine. Le Maroc, lui, s'est lancé depuis près de 20 ans et a investi par exemple pour développer son industrie locale. Le pays fabrique ainsi des voitures du groupe Renault, pour son marché national et principalement pour l'Europe. Se diversifier prend donc du temps. Pour l'instant, la situation profite plutôt à la Chine, devenue première partenaire commerciale de tous les pays du continent sauf le Lesotho et l'Eswatini. La balance est favorable à Pékin. Les exportations chinoises vers l'Afrique ont encore augmenté cette année.
Dans une récente étude, l'OCDE apporte de nouvelles perspectives sur le commerce alimentaire en Afrique de l'Ouest. Alors que les chiffres officiels l'estiment à 1,7 milliard de dollars par an, la compilation de plusieurs bases de données sur le commerce non enregistré - tels que les études nationales et le travail réalisé par le Comité inter-État de lutte contre la sécheresse au Sahel - montre qu'il s'élève au moins à 10 milliards. Un niveau qui vient bousculer les idées reçues sur les échanges de denrées dans la région. Le suivi des denrées et des prix, c'est le métier de Mouhamadou Ndiaye, le coordinateur du Réseau des systèmes d'information des marchés en Afrique de l'Ouest, dont l'un des défis au quotidien est d'apprécier les marchandises non enregistrées. « Nous qui sommes dans les marchés, nous savons qu'effectivement, il y a ces produits. Dans les marchés, vous pouvez juste connaître le niveau d'approvisionnement, connaître les prix, décrit cet expert. Mais savoir exactement les tonnages, c'est très difficile. Bien sûr, cela a un impact sur la sécurité alimentaire parce que très souvent, certains pays, y compris aujourd'hui, interdisent à certaines denrées de quitter leur territoire. » Ce travail de compilation inédit dresse un portrait différent de celui communément admis du commerce alimentaire dans la région. Il montre notamment une diversité de marchandises alimentaires plus importante et un commerce largement répandu entre l'ensemble des États de la zone, et pas seulement entre les États frontaliers, bilan qui change la donne lorsque vient le temps de faire des choix. « Les décideurs politiques, et même les acteurs privés, ont une relative méconnaissance d'où se situent les opportunités de marché régional, parce qu'on n'a pas de données comme on peut en avoir dans d'autres régions du monde sur la taille réelle des importations alimentaires et d'où elles proviennent, autrement dit combien rapporte le Nigeria ou le Bénin par produit. Donc c'est aussi ça l'enjeu : pouvoir avoir de meilleures informations pour guider les politiques de soutien de promotion des exportations, par exemple, que des pays mettent en œuvre », détaille Alban Mas Aparisi, économiste en charge du travail sur la transformation des systèmes au Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest de l'OCDE et auteur du rapport. Prenant l'exemple du Nigéria, il montre que celui-ci passe du rang de huitième à premier pays importateur régional, selon que l'on prend en compte les données officielles ou les données retravaillées par son étude. « Cela donne une idée decombien les données sont faussées », souligne-t-il. À lire aussiEurope-Nigeria, l'axe du blé se renforce mais jusqu'à quand? Le commerce intrarégional en Afrique de l'Ouest se révèle donc beaucoup plus important que ce qu'en disent les statistiques officielles - c'est par exemple le cas des tubercules ou des céréales locales, qui en sont quasi absentes - avec des conséquences sur l'appréciation de la résilience alimentaire dans la Cédéao. « La question des interdictions aux exportations qui continuent de se produire dans la région est extrêmement contre-productives parce que cela nuit à la fois à la production locale et à la sécurité alimentaire de la région, en coupant les producteurs des marchés régionaux », alerte l'économiste du Club du Sahel. « Parce que s'il y a des interdictions mutuelles, les produits circulent moins, il y a moins de diversité, moins de disponibilité et aussi des prix plus élevés », poursuit-il. Près des deux tiers de la production alimentaire régionale - en excluant le cacao et la noix de cajou, cultures de rente et majoritairement destinées à l'exportation - seraient ainsi en réalité déjà destinées aux pays de la Cédéao. Pour consulter le rapport : Le commerce alimentaire intrarégional en Afrique de l'Ouest : Nouvelles données, nouvelles perspectives. À lire aussiLe fonio en Guinée: une culture qui a la peau dure
L'Afrique du Sud n'a toujours pas obtenu d'accord avec Washington, et ses exportateurs subissent les 30% de droits de douane américains. Pour limiter l'impact, le gouvernement mise sur la diversification des marchés et propose d'assouplir les règles de concurrence afin de permettre aux entreprises de collaborer à l'export. Les 30 % de droits de douane américains poussent l'Afrique du Sud à diversifier ses exportations. Le département du commerce a mis en place un bureau d'assistance pour aider les entreprises à regarder vers de nouveaux marchés, en Asie ou au Moyen-Orient, explique Willem Van Der Spuy, directeur général des exportations. « Il y a un dicton qui dit : "Ne laissez jamais une bonne crise se perdre". Le gouvernement sud-africain travaille déjà depuis un certain temps à la diversification. Notre préoccupation aujourd'hui, c'est de l'accélérer. Cela veut dire se pencher sur des solutions qui, jusque-là, étaient en arrière-plan. Prendre des décisions que nous aurions peut-être dû prendre plus tôt… » À la conquête de nouveaux marchés Parmi ces décisions, le département du Commerce propose une exemption sur les exportations – un amendement qui permettrait aux entreprises sud-africaines de collaborer sans enfreindre les lois sur la concurrence. « Nous avons des règles très strictes en matière de coopération entre entreprises, détaille Willem Van Der Spuy. Nous avons donc décidé que, pour aider réellement les entreprises à pénétrer les marchés internationaux – en particulier si elles doivent pénétrer de nouveaux marchés, il serait plus facile de les laisser collaborer. Pour partager les informations, réfléchir à des infrastructures communes pour les exportations, expédier certains produits ensemble. Cela nous permettra d'être plus compétitifs. De réaliser des économies d'échelle aussi, parce qu'il pourrait y avoir une commande importante qui ne pourrait être honorée par une seule entreprise, mais plutôt par deux ou trois. » À lire aussiDroits de douane américains : les pays et les producteurs d'Afrique craignent les conséquences Pour comprendre l'impact de cette exemption, direction la fédération des entreprises de la sidérurgie. Un secteur qui emploie des centaines de milliers de personnes, moteur de l'économie sud-africaine, particulièrement touché par ces nouvelles taxes. « Sur les 1 300 entreprises que l'on représente, la moitié a répondu à notre enquête. Voici le résultat : 50 % de ces entreprises sont affectées par les droits de douanes, directement ou indirectement », explique Tafadzwa Chibanguza est le président de la fédération SEIFSA. Alléger les règles pour renforcer la compétitivité Ce projet d'exemption est une bonne initiative, selon elle, même si « ça aurait déjà dû être la norme – notre façon de faire du commerce. Le problème de l'Afrique du Sud, c'est que nous sommes toujours guidés par des événements, on réagit à des urgences. Et on voit que notre droit de la concurrence a tendance à trop privilégier la législation, plutôt que de s'intéresser vraiment à notre compétitivité. Je sais que la frontière est très floue. Parce que pour créer de la concurrence dans l'économie, oui, il faut sûrement empêcher les monopoles, avec des lois. Mais l'accent devrait être mis sur notre compétitivité réelle plus que sur une législation stricte. Donc oui, il faut laisser les concurrents collaborer ! » Mais le processus législatif risque d'être long. En attendant, le gouvernement travaille à un paquet d'aides économiques pour les petites entreprises. Et espère toujours conclure un accord avec Washington.
Aux États-Unis, la production pétrolière bat des records, dépassant les 13 millions de barils par jour en 2024. Pourtant, les grandes compagnies annoncent des suppressions massives d'emplois et un recentrage stratégique. Un paradoxe qui illustre les tensions économiques, sociales et politiques du secteur. ConocoPhillips a récemment annoncé la suppression d'environ 3 000 postes, soit un quart de ses effectifs. Une décision qui n'est pas isolée. Chevron prévoit également de réduire de 15 à 20 % ses emplois d'ici 2026. Du côté des services parapétroliers, le leader SLB est lui aussi engagé dans une vaste réorganisation. Ces annonces interviennent alors même que les États-Unis confortent leur position de premier producteur mondial, devant l'Arabie saoudite et la Russie. À lire aussiPétrole: Chevron rachète Hess, un méga deal qui change la donne mondiale Produire plus, mais gagner moins Ce paradoxe s'explique d'abord par la baisse continue du prix du baril. Les volumes produits augmentent, mais si le prix unitaire chute, les marges s'effondrent mécaniquement. Dans ce contexte, les majors revoient leurs investissements à la baisse, d'autant que les coûts d'exploitation grimpent. Autre facteur: la vague de fusions-acquisitions qui a marqué le secteur. ExxonMobil a absorbé Pioneer, Chevron a repris Hess et ConocoPhillips a racheté Marathon. Ces opérations entraînent des synergies mais aussi des doublons, synonymes de suppressions d'emplois. Un secteur sous pression et à haut risque La stratégie de rigueur n'est pas sans conséquences. Sur le plan opérationnel, les coupes dans les effectifs pourraient faire perdre des compétences clés aux entreprises. Sur le plan social, certaines régions comme Houston, très dépendantes du pétrole, redoutent des tensions liées aux licenciements. Le secteur doit aussi composer avec les enjeux politiques et climatiques: produire plus tout en réduisant les émissions, un équilibre complexe et dépendant du pouvoir en place. Enfin, le risque financier reste majeur. L'OPEP+, qui régule l'offre mondiale, demeure l'arbitre du marché. Si l'organisation décide d'augmenter sa production, les marges américaines pourraient être encore plus fragilisées. À lire aussiPourquoi les géants pétroliers pourraient nuire aux ambitions de Donald Trump
Confrontée à des droits de douane punitifs de 50% imposés par les États-Unis sous l'impulsion de Donald Trump, l'Inde a choisi de ne pas riposter frontalement. Le gouvernement de Narendra Modi déploie une stratégie intérieure : alléger la fiscalité pour soutenir la consommation et amortir le choc sur la croissance. Les nouvelles taxes américaines résonnent comme une onde de choc pour les industriels indiens. 50% sur chaque produit importé d'Inde. Ces surtaxes douanières menacent les exportations, avec à la clé des risques de baisse de la production, de suppressions d'emplois et, en bout de chaîne, d'un ralentissement de la croissance. Déjà en repli par rapport à 6,5% l'an dernier, celle-ci pourrait s'affaiblir encore. Face à cette pression, New Delhi cherche à rassurer à la fois les entreprises et les consommateurs. Une réforme fiscale pour redonner du pouvoir d'achat La réponse de Narendra Modi passe par une refonte de la taxe sur les biens et services (GST). Actuellement structurée en quatre tranches – 5%, 12%, 18% et 28% – et jugée lourde administrativement, elle serait simplifiée en deux paliers : 5% pour les biens essentiels et 18% pour la majorité des autres produits. Avec moins de paperasse pour les entreprises et des prix allégés pour les ménages, le gouvernement espère un effet de relance rapide. Les économistes estiment que cette réforme pourrait ajouter 0,6% au PIB, soit plusieurs dizaines de milliards de dollars. Mais elle priverait l'État d'au moins 16 milliards de dollars de recettes fiscales annuelles, selon HSBC. Un pari fiscal et diplomatique risqué Ce manque à gagner inquiète particulièrement les États indiens, qui en supporteraient plus de 70% et réclament des compensations. Pour équilibrer la réforme, le gouvernement prévoit un taux de 40% sur les produits de luxe et de « péché » tels que le tabac ou les voitures haut de gamme. Au-delà de la relance interne, cette politique vise aussi à attirer des investissements étrangers indispensables au développement du pays. Reste que ce pari fiscal est risqué : il engage l'équilibre budgétaire, institutionnel et diplomatique de l'Inde, et pourrait influencer sa place sur la scène mondiale dans les années à venir. À lire aussiDroits de douane: les produits indiens désormais taxés à 50% à leur entrée aux États-Unis
La Tanzanie a annoncé fin juillet une interdiction pour les ressortissants étrangers de posséder ou gérer des entreprises dans plusieurs secteurs. La directive provoque un tollé chez son voisin, le Kenya. Alors que Dodoma dit vouloir défendre ses intérêts économiques, Nairobi estime que cette nouvelle mesure va à l'encontre des principes de la Communauté des États d'Afrique de l'Est, dont les deux pays sont membres. Salons de beauté, boutiques de souvenirs, transferts de monnaie sur mobile : en tout, 15 secteurs sont concernés par cette nouvelle directive en Tanzanie. Elle vise à protéger les Tanzaniens de la compétition étrangère. Mais elle provoque la grogne du voisin kényan. L'Association des conducteurs du Kenya dit avoir reçu des appels inquiets, notamment de la part des guides touristiques : « Ils font partie de la liste des emplois désormais interdits pour les étrangers, précise Peter Murima, président de cette association professionnelle. Or, nous avons beaucoup de guides qui travaillent autour de la frontière, dans les parcs de Serengeti en Tanzanie ou Amboseli au Kenya. Dans le secteur du transport aussi, nous avons eu des retours de membres qui dénoncent le fait d'avoir déjà été visés par des contrôles superflus de la part des forces de l'ordre. » Frein aux investissements en Tanzanie ? Au-delà des petits entrepreneurs kényans, les conséquences de cette mesure pourraient être plus larges. « C'est le signal qu'envoie cette nouvelle mesure qui est très important, souligne James Shikwati, directeur de l'Inter Region Economic Network, un think tank économique basé à Nairobi. Ce sont les petites entreprises qui sont visées, mais les grandes compagnies observent tout cela et s'en inquiètent. La confiance s'érode et cela pourrait freiner les investissements du Kenya vers la Tanzanie. » Décision politique Cet économiste y voit aussi une décision politique, avant les élections d'octobre prochain en Tanzanie. Les autorités kényanes, elles, ont dénoncé une mesure qui va à l'encontre de la Communauté des États d'Afrique de l'Est (EAC) et de son Protocole de marché commun. Nairobi a toutefois assuré ne pas réciproquer pour l'instant, pour donner une chance au dialogue. « Rivalité par intermittence » Avec le Kenya, qui se plaint aussi de frais de visas pour ses ressortissants souhaitant faire du business en Tanzanie, les tensions ne sont pas nouvelles. « Le Kenya et la Tanzanie ont toujours entretenu une sorte de rivalité par intermittence, rappelle James Shikwati. La Tanzanie a eu un président radical, Magufuli, qui était davantage tourné vers l'intérieur dans ses politiques économiques. Il a notamment chassé les investisseurs étrangers du secteur minier, de certains emplois. Or, son ancienne vice-présidente est la présidente actuelle. » L'EAC a rappelé dans un communiqué que les États partenaires du Protocole de marché commun s'étaient engagés à « promouvoir l'intégration régionale en supprimant les obstacles au commerce, aux services et aux investissements ».
Kantamanto est l'un des plus grands marchés de vêtements de seconde main du monde. En grande partie ravagé par un incendie en janvier, ce véritable poumon économique de la capitale du Ghana, Accra, a commencé à reprendre vie après une reconstruction express. Ce mardi 26 août, une cérémonie célèbre sa résurrection, mais les quelque 30 000 commerçants, eux, ont repris le travail il y a déjà plusieurs mois. Pour trouver la boutique de Bismarck Oppong, il faut déambuler quelques minutes dans la myriade d'allées que compte le marché de Kantamanto, réparties sur quatre hectares de marché de plein air à Accra, la capitale du Ghana. Voilà 14 ans que le commerçant s'est spécialisé dans la vente de jeans de seconde main. Une affaire littéralement partie en fumée il y a huit mois, lors de l'incendie de janvier 2025. « Quand le drame est survenu, nous n'avons rien pu faire. Mais après le désastre, on a pu rassembler quelques ressources, histoire de ne pas repartir de zéro. Maintenant, on espère juste pouvoir améliorer notre situation », se souvient Bismarck Oppong. Plus de place mais moins de clients Plus de trois millions de dollars : c'est qu'a donné la fondation Or, une ONG qui travaille avec les commerçants de Kantamanto pour reconstruire le marché. Un travail titanesque réalisé en l'espace de deux à trois mois pour les échoppes. Les travaux sont toujours en cours pour l'électricité. De retour dans sa boutique, Bismarck Oppong est particulièrement satisfait du réaménagement des allées. « Je préfère largement l'agencement de ce marché comparé à l'ancien : les démarcations, par exemple. Avant, on n'avait pas beaucoup d'espace. Mais maintenant, on a beaucoup plus de place. Les tentures aussi, avant, elles étaient plus basses, mais on les a relevées », se réjouit-il. Un marché plus agréable et accessible mais qui attire cependant moins de clients. « Il y a moins de clients, parce qu'après qu'il a brûlé, ils ne savent pas que l'on a rouvert », constate Judith Djoka. Arrivée du Togo il y a sept ans pour travailler comme vendeuse de vestes et de vêtements professionnels, elle n'a jamais connu une affluence aussi faible. « C'est un peu compliqué, déplore-t-elle. On achète des produits, mais les clients n'achètent pas. On ne gagne pas comme avant. » La reconstruction en bois « n'est pas idéale » Pour la vendeuse, il faut impérativement faire de la publicité pour attirer, à nouveau, les clients à l'intérieur du marché – et ainsi pouvoir y écouler les 15 millions de vêtements d'occasion qui y arrivent chaque semaine. Une tâche qui incombe à la Kantamanto Obroniwawu Business Association (Koba), la nouvelle association des vendeurs de vêtements de seconde main de Kantamanto. Un autre enjeu demeure : celui de l'amélioration de la sécurité incendie. Si certains commerçants ont bel et bien reçu une formation ainsi que des extincteurs, les 5 000 boutiques du marché ont été reconstruites en bois. « C'est vrai que ce n'est pas l'idéal, reconnaît Manu Adutwum Atta, le secrétaire général de la Koba. C'est une mesure temporaire. Mais il s'agit du gagne-pain des gens ici. Si on avait attendu de construire des infrastructures permanentes, ils n'auraient pas pu survivre. Mais c'est quelque chose que nous avons en tête pour le futur. » L'association des commerçants se donne cinq ans pour réfléchir à une reconstruction du marché qui serait, elle, plus pérenne. À lire aussiLe Ghana devient le premier pays africain à garantir la traçabilité du bois exporté vers l'UE
Les membres de la diaspora camerounaise sont parmi les plus motivés à investir au pays. Pour les orienter au Cameroun et leur permettre d'éviter les pièges, des entreprises et des plateformes de conseil ont vu le jour. Son stand est très visité au salon de la diaspora camerounaise, près de Paris. Frank Kengné a investi dans le solaire au Cameroun. Il a aussi créé une plateforme de conseil, Diaspora Impact Business, et rédigé un guide, 55 idées de business. Il conseille à la diaspora camerounaise d'aller au-delà de ses investissements habituels. « Ou ils font de l'immobilier, ou ils sont dans l'agriculture ou les projets avicoles, constate l'entrepreneur. Pourtant, il y a beaucoup d'autres secteurs où il y a beaucoup de besoins, mais où il y a moins de monde. Par exemple, dans le traitement des déchets. L'énergie, je pense que si vous faites le tour, je suis le seul qui en parle. L'eau, il n'y a presque personne. Donc sur les besoins primaires, en fait, il y a beaucoup d'investisseurs qui ne s'y intéressent pas. » Tiers de confiance L'entrepreneur aide aussi les investisseurs dans le délicat suivi à distance. « On a tissé un réseau de partenaires, explique Frank Kengné, que ce soient des comptables, des notaires, des avocats. J'ai mes propres équipes sur place aussi, qui montent des projets, qui les suivent. On a essayé justement de tisser un réseau de tiers de confiance. » Des bureaux pour atterrir Fidéliser des équipes reste difficile, confie l'investisseur, et l'administratif au Cameroun est un défi pour les entrepreneurs de la diaspora. Pour leur faciliter la tâche, la société accélératrice d'entreprises Brain Booster leur réserve un espace dans ses locaux de Yaoundé. « C'est un service spécial qui permet justement à quelqu'un de la diaspora d'arriver au Cameroun avec sa valise, d'avoir un bureau, une interconnexion internet, l'électricité 24 heures sur 24, et aussi d'avoir toutes les informations nécessaires pour pouvoir ouvrir son entreprise, explique la co-fondatrice, Christelle Mekuate. Par exemple, que demande le guichet unique de création d'entreprise ? Si par exemple, j'ai un problème comptable, comment est-ce que je dois faire ? Quelles sont les aides de l'État à disposition pour la diaspora pour leur faciliter les importations ? » Un frein majeur Le principal frein aux investissements de la diaspora demeure cependant la non-reconnaissance par le Cameroun de la double nationalité, juge Rebecca Enongchong, qui a patiemment bâti le succès de sa société Appstech : « ll y a des personnes qui veulent investir au Cameroun et ils sont dans la loi comme des étrangers. Ils payent le visa pour aller investir. Ils n'ont pas le droit d'avoir du foncier, ils ne peuvent pas acheter un terrain à leur nom. Et donc, il y a encore ces freins institutionnels qui existent. Cette double nationalité, elle est vraiment importante si on veut que la diaspora revienne, si on veut qu'elle investisse. » Malgré son enthousiasme, la diaspora ne participe qu'à hauteur de 1,5% à la richesse du Cameroun, alors qu'au Sénégal, sa contribution est de 10%. À lire aussiLa diaspora investit: au Burkina Faso, Raïssa et Stéphane explorent la filière du beurre de karité
« Dans mon Chinatown », c'est le nom de notre série d'été sur RFI. On vous emmène explorer les quartiers chinois des grandes villes du monde. Aujourd'hui, direction Lagos au Nigeria où la présence de ressortissants chinois remonte à 1930. Plus de 40 000 Chinois y vivent aujourd'hui : employés des grandes entreprises publiques chinoises hyperactives dans les secteurs du pétrole, du gaz et de la construction, entrepreneurs privés qui exportent, voire fabriquent au Nigeria des produits manufacturiers... Quel est l'impact économique, social et culturel de cette présence chinoise ? De notre correspondant au Nigeria, Le téléphone collé à l'oreille, Eric Ni est un brin agacé. Autour de lui, les membres de la troupe de danse Huaxing s'activent pour placer les dernières chaises en plastique. Dans quelques instants, une opération caritative qu'Eric co-organise avec le consulat général de Chine démarre dans cette école, à l'extrême ouest de Lagos. Eric donne ses dernières instructions en pidgin nigérian : « Cette façon de parler, je l'ai apprise en vivant ici avec mes amis nigérians. Oui, moi, je vis et je côtoie les gens d'ici. Le Nigeria, c'est ma seconde patrie. Cela fait vingt-trois ans que je suis ici. Et je suis venu pour faire des affaires. Je suis dans le secteur de la chaussure. On a désormais ouvert une usine de fabrication de chaussures. Mais vous savez, l'économie en ce moment n'est pas bonne. Mais on continue d'y croire. » Comme Eric Ni, un peu plus de 40 000 Chinois seraient enregistrés auprès de leurs autorités consulaires. Investisseurs, ingénieurs, techniciens, commerciaux, ou bien manœuvres... Les profils des Chinois de Lagos sont très diversifiés. Et surtout, la majorité d'entre eux ne se concentre pas dans une zone particulière de la mégapole. Adetoro Bnawo, directeur de l'unité langue chinoise au département linguistique de l'université de Lagos, explique : « La plupart des Chinois qui s'installent dans les quartiers de Lagos essaient, d'une manière ou d'une autre, d'avoir un impact sur les écoles publiques. Ils vont voir les rois locaux. Ils leur rendent hommage. Certains membres de leur communauté de Festac vont jusqu'à se rendre dans les hôpitaux. Et ainsi, ils proposent la technologie chinoise afin d'aider certains patients, par exemple ceux qui souffrent de cataracte. » Loi Eng Koon dirige une imprimerie. En juin 1990, cette ancienne distributrice de produits électroniques quitte Singapour pour fabriquer des CD et DVD à Lagos. Et même si cette mégapole est considérée comme l'une des pires du monde en termes de confort de vie, Loi s'y sent à l'aise : « Il se peut que de nombreux médias parlent des aspects négatifs de Lagos. Voir, c'est croire. Si vous respectez la personne en face de vous, vous serez respecté. » Avant de s'enraciner à Lagos, Loi Eng Koon a tenté de faire des affaires dans au moins 35 pays africains, sans succès. En 2014, elle revend ses parts dans son entreprise originelle de Singapour. Loi se lance alors dans l'imprimerie, notamment numérique. Et aujourd'hui, de son bureau, cette femme d'affaires chinoise pilote elle-même son équipe de 25 salariés à 100% nigérians : « Même lorsque je voyage, je surveille leur travail à chaque seconde. Et parfois, ils sont très négligents. Ils commettent des erreurs qui m'obligent à les punir en leur retirant une partie de leur salaire. Lorsqu'ils font du bon travail, ils sont récompensés. » Et malgré une balance commerciale très favorable à leur pays natal, et donc source potentielle d'envies et de frustrations, les Chinois de Lagos, à l'instar de Loi Eng Koon, s'adaptent avec méthode, mêlant extrême rigueur, sobriété et humanisme dans un Nigeria toujours secoué par des crises multiples. À lire aussiEn 2025, la Chine a investi 39 milliards de dollars en Afrique, dont 21 au Nigeria
L'entrée en vigueur de la plupart des nouveaux droits de douane imposés par les États-Unis à leurs partenaires commerciaux, c'est aujourd'hui, jeudi 7 août 2025. Quel est l'impact de ces surtaxes pour le continent africain ? Y a-t-il des pays qui risquent d'entrer en récession ? « Oui », répond l'économiste Lionel Zinsou, qui a été Premier ministre du Bénin. Aujourd'hui, avec le grand banquier rwandais Donald Kaberuka, Lionel Zinsou est le patron de « South Bridge », en français, « Le Pont du Sud », une société de conseil financier. Il livre son expertise au micro de Christophe Boisbouvier. RFI : Est-ce que ces surtaxes américaines risquent de ralentir la croissance du continent africain ? Lionel Zinsou : Très faiblement, en fait. En revanche, ça va impacter quelques pays et spectaculairement l'Afrique du Sud. Mais ça ne concerne pas tout le continent. 25 pays africains devraient être touchés par ces augmentations de taxes. Quelles sont à vos yeux les pays qui vont être le plus impactés ? L'Afrique du Sud d'abord, c'est ça ? Oui, L'Afrique du Sud… Certains pays qui avaient vraiment orienté leur commerce extérieur avec une grande confiance vers les États-Unis, comme le petit Lesotho. Au fond, tous ceux qui sont un peu plus industrialisés que les autres et qui avaient à exporter des produits d'une grande valeur, par exemple les exportations automobiles de l'Afrique du Sud, ça, ce sont des exportations à très forte valeur ajoutée, et c'est ça qui va être le plus impacté. Plus vous êtes industrialisé, plus vous allez en souffrir. On se souvient de la rencontre glaciale à la Maison Blanche entre Donald Trump et Cyril Ramaphosa. Est-ce que les mesures douanières contre l'Afrique du Sud n'ont pas un caractère politique ? Si, certainement. Derrière la sanction de 30 % de droits de douane, alors que pour les autres pays, c'est ou 10% ou 15%, il y a eu une fixation politique à l'évidence sur l'Afrique du Sud, très probablement liée à des sujets non-africains. Par exemple, le fait que l'Afrique du Sud ait traîné Israël devant la Cour pénale internationale avec un assez grand succès diplomatique. C'est probablement une rétorsion, un petit peu dans la même logique que pour le Brésil. Mais en Afrique du Sud, cela va avoir un impact. C'est un des pays qui ont malheureusement une croissance faible. Donc, ça risque effectivement de les mettre en récession. Cela étant, il y a des remèdes quand même à cette situation, parce que vous avez sans doute vu la réaction de la Chine. La Chine, aujourd'hui, elle importe surtout de l'Afrique, non pas des biens à forte valeur ajoutée et manufacturés, mais vraiment des matières premières. Et les Chinois ont une opportunité de commencer à acquérir des produits à valeur ajoutée venant d'Afrique. L'autre remède, c'est la zone de libre-échange continentale. On est en train de négocier, de faire tomber toutes les barrières douanières à l'intérieur du continent. Et donc les Africains commerçant avec les Africains, ça, ça va être à la fois un facteur de croissance significative et un remplacement pour les pays les plus industrialisés. Donc l'Afrique du Sud, qui est déjà un grand fournisseur du reste de l'Afrique, va l'être encore un peu plus. Parmi les pays les plus touchés par les mesures de Washington, il y a les producteurs d'acier et d'aluminium. Est-ce que l'Algérie et l'Égypte ne risquent pas d'être très impactées ? Alors, comme vous l'avez souligné, c'est quand même essentiellement un mouvement politique et vous savez que l'Égypte est un peu exonérée. Donc, avec l'Égypte, pour des raisons géopolitiques, c'est probablement plus confortable qu'avec l'Algérie. Mais si vous prenez un pays comme le mien qui va être taxé à 10 %... Le Bénin… Oui. Sur le textile. Alors c'est important parce que, après tout ce qui est produit de matières premières brutes, le textile, en fait, c'est ce qui avait fait le plus de progrès dans les échanges entre l'Afrique et les États-Unis. À raison de l'Éthiopie, mais aussi aujourd'hui de pays comme le Togo, le Bénin, qui ont de plus en plus de valeur ajoutée sur le textile. Mais vous voyez, quand vous achetez un polo de luxe à 100 € ou 100 $, il est sorti d'usine et monté sur un bateau à Cotonou à 10 $. Quand on va mettre 10 %, ça veut dire que ça va augmenter d'un dollar sur votre facture à vous, client, de 100 $. Parce que, en réalité, une très grande partie de la valeur ajoutée est faite dans le pays d'accueil. Et donc c'est aux États-Unis, les frais de marketing, les taxes américaines. Il y a aussi tous les intermédiaires, les transports, etc. Donc, il faut faire un tout petit peu attention. Ça ne va pas complètement désorganiser les marchés. Mais si vous exportez une voiture haut de gamme, japonaise ou allemande, qui vient des usines d'Afrique du Sud, c'est une tout autre affaire. Parce que là, pour le coup, la valeur ajoutée, elle vient d'Afrique. Ce ne sont pas les intermédiaires qui en prennent la plus grande partie. Et là, vous allez avoir un arrêt de la production, du chômage, etc. Mais il y a bien pire, évidemment. Le fait que les Américains, qu'ils aient supprimé l'aide alimentaire et sanitaire, ça, c'est encore plus grave. Parce que la fermeture de l'aide publique de l'USAID, notamment humanitaire, là, il y a mort d'homme. Ce qui est un peu différent des droits de douane. Et donc, politiquement, on voit bien qu'il va y avoir un coût politique pour les États-Unis.
Entrés en vigueur ce jeudi 7 août à minuit, les droits de douane voulus par Donald Trump marquent une nouvelle phase de son agenda protectionniste. Mais, alors qu'ils étaient initialement pensés comme temporaires, leur efficacité fiscale les rend de plus en plus incontournables. À tel point qu'il pourrait devenir politiquement et budgétairement impossible de les supprimer. Présentées comme un moyen de rééquilibrer les échanges commerciaux et de protéger les industries américaines, les mesures tarifaires américaines marquent une nouvelle étape du virage protectionniste des États-Unis. Mais contrairement aux promesses de campagne du président, revenir en arrière s'annonce désormais très compliqué. En cause : les recettes générées. En 2024, avant le retour de Trump à la Maison Blanche, les recettes douanières s'élevaient à 78 milliards de dollars. En seulement sept mois, elles ont déjà atteint 152 milliards. Une dynamique qui, selon les analystes, pourrait rapporter plus de 2 000 milliards de dollars en dix ans. Dans un contexte de déficit budgétaire chronique, cette rentrée d'argent est vitale. Le secrétaire au Trésor Scott Bessent rappelle d'ailleurs que ces taxes représentent désormais 4,5% du budget fédéral. Avec une dette nationale colossale et des réductions d'impôts récemment votées par le Congrès, Washington a besoin de trouver des financements – et les droits de douane répondent parfaitement à cette nécessité. À lire aussiDroits de douane: Donald Trump gagne-t-il vraiment la guerre commerciale? Une dépendance budgétaire qui s'installe Cette nouvelle donne budgétaire complique la donne pour Donald Trump et ses successeurs. Car en renforçant leur poids dans le budget fédéral, les droits de douane deviennent presque incontournables. Difficile de les supprimer sans creuser davantage le déficit, ou sans devoir envisager des coupes budgétaires et des hausses d'impôts, politiquement explosives. Le cercle est vicieux : les futurs dirigeants, qu'ils soient démocrates ou républicains, auront peu de marge de manœuvre. D'autant plus que ces mesures sont devenues un pilier pour certains secteurs industriels américains, qui comptent désormais sur ce bouclier tarifaire pour maintenir leur compétitivité. Supprimer ces droits de douane, ce serait aussi bouleverser des chaînes d'approvisionnement entières, avec un coût économique non négligeable. Mais tout cela a un prix, et ce sont souvent les ménages les plus modestes qui le paient. Car des produits importés plus chers signifient des prix de vente plus élevés dans les rayons. Or, ce sont précisément ces foyers qui consacrent la plus grande part de leurs revenus aux biens de consommation concernés par les surtaxes. La question qui se pose désormais aux autorités américaines est claire : jusqu'à quand maintenir ces taxes ? Sont-elles viables à long terme ? Et surtout, sont-elles réellement aussi efficaces que le prétend Donald Trump ? Une chose est sûre, si elles rapportent gros au Trésor, leur coût social pourrait, lui aussi, s'alourdir dans les années à venir. À lire aussi«Les droits de douane ne permettent pas à eux seuls de réindustrialiser les États-Unis»
Avant la guerre, le textile syrien était reconnu à travers le monde pour sa qualité, en particulier pour son coton. Le secteur, pilier de l'économie, pesait 12% du PIB. À Alep, la capitale économique, le textile représente 75% de la production et emploie 300 000 personnes. Mais les entreprises ont été, elles aussi, touchées par la guerre et le racket organisé par le régime Assad. Aujourd'hui, la levée annoncée des sanctions internationales redonne espoir aux acteurs de la filière qui rêvent de redevenir la locomotive du développement de la Syrie. De notre envoyée spéciale à Alep, À Cheikh Najjar, la zone industrielle d'Alep, des entrepôts calcinés côtoient des manufactures reconstruites. Pendant la guerre, la région a été au cœur des combats entre les rebelles et le régime Assad soutenu par son allié russe. À la tête de l'entreprise de textile Al Faisal, Bassam Dawalibi a dû rebâtir son usine en 2017. Celle-ci emploie aujourd'hui 150 personnes et produit 10 tonnes de fil par jour à partir de matières synthétiques importées de Chine, qui ont remplacé le coton syrien. « La matière première que nous utilisons, c'est du polyester qui est fabriqué à partir de pétrole. Malheureusement, la production locale de coton s'est effondrée avec la guerre et on ne pouvait pas s'en procurer facilement. Nous espérons qu'à l'avenir, nous pourrons revenir au coton », explique Bassam Dawalibi, directeur financier de l'entreprise Al Faisal. Avant la guerre, la Syrie était pourtant le troisième producteur de coton au monde. Depuis la chute du régime, les nouvelles autorités libéralisent l'économie à tout va. Les droits de douane ont été réduits et les textiles turcs et chinois inondent le marché, au grand dam de Bassam Dawalibi. Sans de telles mesures, le directeur s'inquiète de devoir plier bagage : « La production nationale fait face à une concurrence injuste et désavantageuse des importations et cela n'a pas été réfléchi. Je souhaite que le gouvernement augmente les droits de douane sur les produits étrangers pour protéger l'industrie locale. » À Alep, les souks pluri-centenaires ont été endommagés ou détruits à 60% d'après l'Unesco. Dans les rues épargnées, la vie reprend, mais les affaires tournent au ralenti. « Actuellement, la situation est en dessous de la moyenne financièrement. Sauf pendant les fêtes ou les saisons où les proches vivant à l'étranger envoient de l'aide. Sinon, il n'y a rien », se désole Ahmad Sawwas, vendeur de vêtements au souk d'Alep. Sur les étals, quelques produits chinois, mais principalement des vêtements assemblés en Syrie à partir de fibres ou de tissus importés. Ici, beaucoup espèrent que la levée des sanctions permettra de relancer la culture du coton syrien et de faire revenir les entrepreneurs en exil. À lire aussiSyrie: «Ils ont déplacé tous les Bédouins» de Soueïda, même ceux qui n'étaient pas impliqués dans les combats
Repoussés, renégociés... Les nouveaux droits de douane américains portant sur des produits brésiliens exportés entrent en vigueur ce mercredi 6 août 2025. Ils illustrent les tensions croissantes entre les États-Unis et le Brésil autour du sort judiciaire de l'ancien président Jair Bolsonaro. Et leurs conséquences sont déjà visibles dans le pays. Alors qu'ils entrent ce mercredi 6 août 2025 en vigueur, la presse brésilienne fait le point sur les conséquences que vont avoir les 50% de surtaxes imposés par Donald Trump sur les produits brésiliens. Le média en ligne G1 s'inquiète. Le café n'est toujours pas exempté de ces droits de douane, alors qu'il s'agit du principal produit agricole brésilien vendu aux États-Unis. Selon le média, les pertes, seulement pour le café, pourraient dépasser les 481 millions de dollars. De son côté, le média local NSC Total, basé à Florianópolis, fait le point sur les conséquences déjà visibles dans l'État de Santa Catarina. De nombreuses entreprises locales, de meubles et de produits en bois, destinaient près de 100% de leur production au marché américain. Selon NSC Total, certaines d'entre elles ont déjà commencé à licencier des travailleurs. Face à ces conséquences en chaîne, le quotidien conservateur de l'État du Paraná, Gazeta do Povo, critique le manque de réponse concrète de Lula. Et tente la comparaison : «Les taux appliqués aux produits brésiliens sont plus du double de ceux appliqués aux dictatures de gauche et ouvertement anti-américaines comme le Venezuela et le Nicaragua.» La pression s'accroît sur les Haïtiens qui tentent de fuir la guerre Dans son édition du jour, le média dominicain El Diario Libre évoque «la tragédie haïtienne qui se poursuit dans l'indifférence internationale». Mardi (5 août 2025), le gouvernement dominicain a annoncé avoir expulsé 31 462 Haïtiens au mois de juillet 2025. C'est le résultat du combat du président Luis Abinader contre l'entrée illégale des Haïtiens dans son pays. Le quotidien liste les «rafles, expulsions, suspension de la délivrance de visas et renforcement de la présence militaire à la frontière entre les deux pays, où il a fait ériger un mur». Selon El Diario Libre, cela porte à plus de 215 000 le nombre total d'Haïtiens renvoyés dans leur pays par les autorités dominicaines en 2025. Et le quotidien illustre cette politique avec une photo, celle d'un convoi de camions de la Direction générale de la migration dominicaine : 3 camions qui se suivent, pareils à des prisons sur roues. À l'intérieur, on perçoit des Haïtiens menés à la frontière. Les violences sexuelles comme arme de guerre en Haïti En Haïti, plusieurs ONG et institutions internationales ont tiré la sonnette d'alarme sur les conditions de vie des jeunes filles et des femmes dans le pays. Depuis l'assassinat du président Jovenel Moïse en 2021, une grande partie du pays est sous l'emprise de gangs armés qui utilisent le viol et les violences sexuelles comme arme de guerre. Nemo Lecoq-Jammes s'est entretenue avec Diana Manilla Arroyo, cheffe de mission de l'ONG Médecins sans Frontières à Haïti. Elle supervise la clinique Pramem à Port-au-Prince, une clinique gynécologique spécialisée dans l'accueil des filles et des femmes victimes de violences sexuelles. Le feuilleton du redécoupage électoral au Texas se poursuit En fin de semaine dernière, des élus démocrates de la Chambre des représentants texane avaient quitté l'État. Ils voulaient empêcher le vote d'un redécoupage de la carte électorale qui pourrait faire basculer cinq circonscriptions démocrates en faveur des républicains. Et le feuilleton s'accentue, puisque les démocrates commencent à évoquer un redécoupage de leurs propres États. Pour Ken Martin, président du Comité national démocrate, le parti doit changer de stratégie. «Ce n'est plus le Parti démocrate de votre grand-père qui apportait un stylo pour se battre face à un couteau. C'est un nouveau parti démocrate, couteau contre couteau. Et nous allons combattre le feu par le feu», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Selon la chaîne de télé NBC, le gouverneur californien Gavin Newsom envisage un référendum cet automne. Sa proposition de redécoupage lui permettrait de récupérer 5 sièges républicains. Pour Politico, Gavin Newsom surfe sur la volonté des militants de voir les démocrates s'opposer sérieusement aux Républicains. Le média politique américain voit aussi dans cette prise de position de Newsom une tribune qui pourrait être favorable, avant sa probable candidature à la présidentielle américaine de 2028. Tensions diplomatiques entre la Colombie et le Pérou Les tensions resurgissent autour de l'occupation des îles de Santa Rosa, situées au milieu du fleuve Amazone. Elles sont disputées depuis des années, et avaient même entraîné un conflit armé entre les deux pays dans les années 1930. La souveraineté du territoire est revendiquée par le Pérou, qui a récemment intégré ces îles dans son district fédéral. Mais pour le président colombien, Gustavo Petro, le gouvernement péruvien s'est emparé de territoires appartenant à la Colombie. Une déclaration qui n'a pas plu aux Péruviens. Pour le quotidien El Comercio, Gustavo Petro a créé un conflit diplomatique «pour cacher la crise qui touche son gouvernement». De son côté, le quotidien colombien El Tiempo évoque des changements du cours de l'Amazone. De nouvelles îles sont apparues au gré des mouvements du fleuve. Et selon le quotidien, cela devrait ouvrir des discussions diplomatiques sur la question de l'occupation. Mais, pour El Tiempo, ces discussions doivent se tenir loin des micros et des réseaux sociaux. Les Argentins se passionnent pour leurs fonds marins Depuis la semaine dernière, des centaines de milliers d'Argentins sont suspendus à la retransmission, en direct, des images d'un robot sous-marin. Une équipe de scientifiques explore pour la première fois le canyon sous-marin de Mar del Plata. Précisions de Théo Conscience, le correspondant de RFI à Buenos Aires. Journal de la 1ʳᵉ En Guadeloupe, l'enseignement agricole est menacé. Le sénateur Victorin Lurel lance l'alerte.
Le secteur du luxe traverse une période délicate. Ralentissement des ventes, chute des bénéfices, recul des achats touristiques : les géants comme Kering ou Prada sont touchés de plein fouet. Analyse d'un été difficile pour une industrie longtemps considérée comme à l'abri des crises. C'est un fait bien connu : le tourisme est vital pour le secteur du luxe. L'été représente une période stratégique, car les touristes étrangers, notamment les plus aisés, réalisent une grande partie de leurs achats à l'étranger. Que ce soit à Paris, Milan ou Tokyo, ils y recherchent à la fois une expérience authentique et un effet de change favorable pour éviter les taxes locales. En 2024, les ventes de produits de luxe avaient bondi grâce à un dollar fort – les Américains se ruant sur les boutiques européennes – tandis que les Chinois profitaient d'un yen historiquement faible pour faire leurs emplettes au Japon. Mais cette dynamique s'est inversée : le yen se redresse, le dollar faiblit. Résultat, le pouvoir d'achat touristique s'effondre, entraînant un net recul des ventes. À lire aussiL'industrie du luxe à un tournant de son histoire Les chiffres sont sans appel pour les grandes marques Le groupe Kering est l'exemple le plus marquant de cette tendance. Son bénéfice a plongé au premier semestre 2025, et ses ventes ont fortement reculé. Même constat chez Prada, dont les ventes ont chuté de 2 % sur la même période. Gucci, marque phare du groupe Kering, enregistre quant à elle une baisse de 26 % sur un an. Ce repli s'explique également par des causes plus structurelles. En dix ans, les prix ont considérablement augmenté, poussant même les consommateurs fortunés à se montrer plus regardants. Car oui, le client du luxe cherche aussi un bon rapport qualité-prix. Et sans avantage tarifaire à l'étranger, il n'y voit plus l'intérêt d'y faire ses achats. À lire aussiLe secteur du luxe, victime de la guerre commerciale de Donald Trump Des réponses face à une crise durable La conjoncture mondiale n'arrange rien. Instabilité économique, tensions géopolitiques, droits de douane américains sur les produits européens désormais portés à 15 %. Tout cela pèse lourdement sur les perspectives du secteur. L'imbroglio des négociations entre Bruxelles et Washington n'a fait que renforcer l'incertitude. Face à ces défis, les groupes réagissent. Chez Kering, un plan de relance est en cours avec notamment l'arrivée d'un nouveau directeur général – Luca de Meo, ancien patron de Renault – et un nouveau directeur artistique chez Gucci. Plus globalement, les maisons de luxe ont compris qu'elles ne pouvaient plus se reposer uniquement sur la puissance de leur logo ou les hausses de prix. L'heure est au renouveau : retravailler l'expérience client, réenchanter l'image de marque et surtout, recréer le désir d'achat afin que les clients sortent leurs cartes bancaires !
Grâce à la signature d'un décret imposant des surtaxes à plusieurs dizaines de pays, Donald Trump s'affiche en vainqueur d'une guerre commerciale qu'il a lui-même déclenchée. Mais derrière cette démonstration de force, les effets réels restent à nuancer, notamment pour les Américains eux-mêmes. Donald Trump a de nouveau frappé fort. Le président américain a signé, le 1er août, un décret imposant de nouveaux droits de douane sur les exportations de dizaines de pays vers les États-Unis. Parmi les plus touchés : l'Union européenne et le Japon, avec une surtaxe de 15%, le Canada avec 35% et même jusqu'à 39% pour la Suisse. Cette victoire a été préparée depuis janvier dernier, lorsque Trump évoquait des hausses de droits allant jusqu'à 60%. Une stratégie de rapport de force assumée : menacer fort pour mieux obtenir un accord – et surtout, à l'avantage des États-Unis. Résultat : les principaux partenaires commerciaux ont cédé, signant des engagements économiques massifs, comme 750 milliards de dollars d'achats d'hydrocarbures par l'Union européenne ou des commandes militaires japonaises. À lire aussiQuels pays ont trouvé un accord avec Donald Trump sur les droits de douane? Des marchés rassurés, des alliés résignés Malgré la brutalité apparente de cette annonce, les marchés ont bien réagi. À Tokyo, la Bourse est restée stable. Signe que ces nouveaux droits de douane ont été accueillis comme un moindre mal, un compromis acceptable au regard de ce qui aurait pu être une guerre commerciale ouverte. Et c'est aussi ce que revendique la Maison Blanche : « Restructurer le commerce mondial au bénéfice des salariés américains ». Mais au-delà de la communication politique, cette nouvelle donne fragilise durablement les équilibres commerciaux internationaux, et consacre un virage vers un protectionnisme assumé par Washington. À lire aussiDroits de douane, barrières non tarifaires, mesures de rétorsion: les mots du protectionnisme Une victoire économique en trompe-l'œil ? À court terme, ces taxes douanières représentent une manne fiscale importante pour les États-Unis. Elles remplissent les caisses de l'État et renforcent l'image d'un président défenseur des intérêts nationaux. Mais sur le moyen et long terme, le tableau s'assombrit. Des études montrent que les consommateurs américains paieront l'addition : les produits importés deviendront mécaniquement plus chers, alimentant une inflation déjà tendue. Contrairement aux affirmations de Trump, ce ne sont pas les exportateurs étrangers qui paient, mais bien les ménages américains, qui verront leurs dépenses augmenter. Les économistes évoquent déjà un effet boomerang possible, tant sur l'inflation que sur la croissance. La victoire affichée aujourd'hui pourrait bien se transformer, dans quelques mois, en revers économique. À lire aussiDroits de douane: Donald Trump annonce 25% sur les produits indiens à compter du 1er août
Donald Trump a annoncé que les États-Unis imposeront 50% de droits de douane sur une grande partie des produits importés du Brésil, à partir du 6 août 2025. Un coup dur pour la plus grande économie sud-américaine. «Un grand sentiment de frustration». Voici la réaction à chaud du président de l'Association brésilienne des producteurs de sucre, rapportés par la Folha de Sao Paolo. Renato Cunha a accompagné la délégation parlementaire aux États-Unis cette semaine pour essayer d'obtenir un accord, mais impossible : «il y avait un mépris total, personne ne nous a vraiment accueillis, commente l'entrepreneur. Car il ne s'agit pas d'une décision commerciale, mais politique, venant du président». Ces droits de douane sont les plus sévères imposées au Brésil en 200 ans de relations diplomatiques, pointe le journal O Globo, et le secteur agricole est le plus durement touché - le secteur bovin a déjà perdu 1 milliard de dollars dans les six derniers mois de tarifs douaniers et demande déjà le soutien du gouvernement fédéral. Mais le journal de Rio voit aussi la bouteille à moitié pleine : «700 produits ont été exclus de tarifs, soit 43% du total des exportations», dont une grande partie du secteur manufacturier. Le cours en bourse du constructeur brésilien d'avions Embraer a ainsi grimpé de 10% hier (30 juillet 2025) après avoir été exclu de la hausse des droits de douane, gagnant plus de 600 millions d'euros. Le gouvernement brésilien n'a toutefois pas dit son dernier mot «L'attaque contre le Brésil aura une réponse judiciaire», assure une éditorialiste du quotidien O Globo. Le décret qui impose des droits de douane ainsi que les sanctions contre le juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes se basent sur de prétendues atteintes aux droits humains contre l'ancien président Bolsonaro, «ce qui n'est pas justifié», assure la chroniqueuse. Le Brésil pourrait ainsi saisir la justice américaine, ou faire recours devant la justice internationale. Ce qui est sûr, conclut-elle, c'est que «l'extrême droite brésilienne, cachée derrière cette mesure, reste en mode coup d'État et n'a pas honte de se battre pour la soumission du pays». Le Chili est soulagé Les produits à base de cuivre doivent en effet être taxés de 50% à partir du 1er août 2025, mais pas la matière première. Énorme soulagement pour le Chili, qui est le premier producteur et exportateur de ce métal au monde. Le quotidien El Mercurio estime que le répit ne pourrait toutefois n'être que temporaire, car 15% de taxes pourraient encore être imposés dès 2027. L'incertitude et l'imposition des tarifs sur les tuyaux et autres produits en cuivre a quand même entraîné une chute de 21% du cours du métal à la bourse de New York, rapporte le journal Tercera. Le coût de ces droits de douane se fait sentir aux États-Unis Cela a été annoncé mercredi par l'énorme groupe Procter et Gamble, une référence pour les produits de première nécessité comme le liquide vaisselle, le dentifrice et le détergent - la multinationale augmentera ses prix de 2.5% en moyenne, sur un quart de ses produits dès le mois d'août, rapporte le Washington Post... Ceci en partie à cause des droits de douane d'un milliard de dollars qu'il prévoit chaque année. La chaîne de grande distribution Walmart, elle, prévoit des augmentations pour les produits fabriqués en Chine, comme les articles pour bébés, les ustensiles de cuisine et les jouets. Les droits de douane de 50% sur l'acier et l'aluminium entraîneront aussi une hausse des coûts des emballages alimentaires et des boissons, comme les boîtes de café et les canettes de bière. Tout devrait y passer, donc. Les consommateurs américains comprennent qu'ils vont payer, rapporte le quotidien de Washington, et ils constituent des stocks de détresse avant la rentrée scolaire. Panique et incertitude s'installent dans les rayons de supermarchés. Il est donc de plus en plus difficile de savoir qui va bénéficier de cette guerre commerciale lancée par Donald Trump. En Argentine, la recherche scientifique subit les coupes budgétaires du président ultra-libéral Javier Milei Déjà affaiblie par des coupes budgétaires massives et une chute des salaires, la recherche est à nouveau visée par un décret limitant les compétences de sa principale agence de financement. Face à une fuite inédite des cerveaux, la communauté scientifique alerte sur les conséquences d'un véritable « scientificide ». Reportage de Lucas Lazo dans le laboratoire de neuroscience de l'Université de Buenos Aires. En Haïti, l'organisation des États d'Amérique présente une nouvelle feuille de route pour la sécurisation de Haïti. Le rédacteur en chef du quotidien Le Nouvelliste, Franz Duval, offre une analyse critique et dénonce le peu de moyens proposés pour la sécurisation de l'île, qui est le problème principal pour les habitants ? Aux États-Unis, un redécoupage électoral controversé. Les républicains sont lancés dans une grande opération de redécoupage électoral entre le Texas et la Californie, dans le but d'essayer de gagner jusqu'à cinq sièges lors des prochaines élections de mi-mandat, l'année prochaine (2026). Une opération qui fait débat, nous raconte notre correspondante Loubna Anaki.
En Corée du Sud, les touristes américains achètent en masse des produits de beauté coréens avant que leurs prix n'explosent aux États-Unis à cause des tarifs douaniers souhaités par le président Donald Trump. À partir du 1er août, tous les produits coréens sont imposés de 25% de droits de douane à leur arrivée aux États-Unis. De notre correspondant à Séoul, Panique à l'approche de la mise en place des tarifs douaniers américains le 1er août. Si l'industrie coréenne va en pâtir – notamment les secteurs de l'automobile et de la sidérurgie, tous deux frappé de 50% de droits de douane –, du côté des consommateurs américains, on s'inquiète de la montée des prix de la K-beauty, les produits de beauté coréens, imposé à 25% de droits de douanes. Liah Yoo est une influenceuse beauté américaine. Dans une vidéo à ses followers, elle explique les conséquences de la politique commerciale américaine sur les produits cosmétiques en provenance de Corée du Sud : « À partir de maintenant, vous verrez beaucoup de marques augmenter leur prix. Ce n'est pas par cupidité, mais c'est inévitable. La nouvelle politique commerciale annoncée par le président Donald Trump va changer beaucoup de choses. Beaucoup d'Américains aiment la K-beauty, car elle n'est pas chère, mais je ne sais pas combien de temps elle pourra le rester avec la mise en place de cette politique commerciale très prochainement. » Taylor Bosman, autre influenceuse beauté américaine, a trouvé la parade. Acheter en gros avant que les prix n'explosent : « Je ne sais pas ce qui se passe avec ces tarifs, personne n'y comprend rien. J'ai entendu des rumeurs sur la manière dont cela allait affecter le prix des produits de beauté coréens aux États-Unis. L'avenir est incertain, mais ce dont je suis sûre, c'est que je ne veux pas passer à côté de mes produits préférés. Alors, j'ai commandé à l'avance tout ce dont j'ai besoin pour ma routine quotidienne. » Dans le quartier commercial animé de Myeongdong à Séoul, les voyageurs du monde entier viennent chaque jour dans les boutiques de cosmétiques faire leurs emplettes avant de retourner chez eux. « Je voulais faire un stock avant de repartir, explique ainsi une touriste, les bras chargés de sacs. Je veux acheter en gros pour ne pas avoir à revenir. Les Coréennes ont vraiment une peau incroyable que tout le monde veut imiter, je pense. » Plusieurs centaines de dollars d'achats, une valise pleine de crèmes, masques et fonds de teint : de quoi tenir quelques mois et économiser avant la mise en place des droits de douanes américains le 1er août. À lire aussiLes Nord-Coréens de la génération Z connaissent les codes
Les taux d'intérêt vont-ils baisser aux États-Unis ? Le comité de politique monétaire de la réserve fédérale américaine (la banque centrale du pays), se réunit mardi et mercredi à Washington pour actualiser (ou pas) ses taux directeurs. N'en déplaise au président Donald Trump, les économistes ne s'attendent pas à ce que ces taux baissent. Généralement, la Réserve fédérale laisse entendre en amont si elle prévoit de modifier ses taux. Elle n'a pas donné d'indices en ce sens lors de la dernière réunion de son comité de politique monétaire en juin. Les investisseurs ne s'attendent donc pas à une baisse des taux directeurs ce mercredi. Ces derniers sont d'actuellement entre 4,25 et 4,5%, environ deux fois plus que dans l'Union européenne par exemple. Inflation L'une des principales missions de la Réserve fédérale, en plus de la maîtrise du chômage, est de garder des prix stables. Or la politique protectionniste de Donald Trump et ses hausses de droits de douane tirent les prix vers le haut : l'inflation aux États-Unis reste ces derniers mois au-dessus de la barre des 2% fixée par la Fed. Diminuer les taux maintenant pourrait encourager la hausse des prix. C'est pourquoi la Fed s'est refusée à le faire pour l'instant, au grand regret du président américain Donald Trump. Le milliardaire, de retour à la Maison Blanche depuis janvier, estime que des taux directeurs plus faibles permettraient aux États-Unis de payer moins d'intérêts sur le remboursement de leur colossale dette publique. Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump se plaignait déjà des taux directeurs de la Réserve fédérale, mais ces derniers mois, il a intensifié ses critiques, jusqu'à se rendre en personne au siège de la Fed jeudi 24 juillet, pour faire pression sur le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell. « J'adorerais qu'il baisse les taux d'intérêt », lui a-t-il dit devant la presse, en lui assénant une grande tape dans le dos. Incertitudes des droits de douane Donald Trump a même menacé de le limoger, après l'avoir lui-même nommé à ce poste (en 2017). Ces menaces répétées ne plaisent pas beaucoup aux marchés financiers, qui voient dans l'indépendance de la Fed une garantie de stabilité de l'économie. Mais la procédure pour évincer Jerome Powell serait longue et difficile, et risquerait de fragiliser la confiance dans l'économie américaine, alors Donald Trump a renoncé. « Ce n'est pas nécessaire » de l'évincer, estimait-il jeudi 24 juillet aux côtés de l'intéressé. « Car je pense qu'il va prendre la bonne décision. Peut-être un peu tard, mais il va prendre la bonne décision », a déclaré le président des États-Unis. La « bonne décision », selon lui, serait de ramener à seulement 1,5% seulement les taux directeurs dès maintenant. Une telle baisse a peu de chances d'intervenir dans l'immédiat. Les décisions de la Réserve fédérale dépendront en partie des droits de douane décidés par Donald Trump. Un accord de principe a été conclu dimanche entre Donald Trump et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, visant à taxer à hauteur de 15% les produits européens entrant sur le marché états-unien. Les négociations se poursuivent par ailleurs avec la Chine ce mercredi, pour prolonger l'accord trouvé précédemment. Elles patinent avec des dizaines d'autres pays, pour qui l'ultimatum a été fixé à vendredi 1er août, avec la menace de surtaxes allant jusqu'à 50%. Si la Maison Blanche mettait cette menace à exécution, cela risquerait, là-encore, d'alimenter l'inflation et ne plaiderait donc pas en faveur d'une baisse des taux. À moins d'un retournement du marché de l'emploi aux États-Unis, qui ne s'est pas produit pour l'instant.
Dans le supplément de ce samedi, direction l'Inde pour suivre la Kumbh Mela, pèlerinage qui pourrait être le plus grand rassemblement religieux de l'humanité, entre démesure et défi organisationnel pour son plus fervent promoteur, Narendra Modi. Puis, en deuxième partie, nous allons au Brésil voguer avec les derniers transporteurs de marchandises en voiliers traditionnels, moyen de transport qui tend à disparaître... (Rediffusion) La Kumbh Mela, grand-messe mystique, grands jeux politiques C'est un festival attendu depuis 144 ans. Ce sont les astres qui définissent le calendrier. Nous sommes en Inde et, depuis le 13 janvier, la Maha Kumbh Mela se poursuit sur les berges du Gange. Pour les fidèles hindous, durant 45 jours, se baigner dans le fleuve sacré, c'est l'assurance de sortir du cycle maudit des réincarnations. Il s'agirait du plus grand rassemblement de l'humanité. En tout cas, si on en croit Narendra Modi qui, depuis 2014, se pose en grand promoteur de l'hindouisme. Le Premier ministre indien a voulu en faire le plus démesuré, mais également le plus propre et le plus technologique des pèlerinages. Il y a la foi… mais cette Kumbh Mela, c'est aussi une gigantesque vitrine idéologique. ► « La Kumbh Mela, grand-messe mystique, grands jeux politiques », un Grand Reportage de Côme Bastin. Brésil : le transport de marchandises en voilier traditionnel, à bout de souffle Ils sont les derniers survivants d'une époque révolue. Dans la baie de Salvador de Bahia au Brésil, les Saveiros voguent toujours. Mais ils sont les derniers voiliers traditionnels en bois, à acheminer des matériaux de construction vers des rives difficilement accessibles. Ils ne sont plus qu'une dizaine à convoyer pierres, graviers et sable, à la force du vent. Ils étaient plus d'une centaine, il y a environ 60 ans, approvisionnant Salvador, la capitale régionale en produits agricoles. Routes et ponts ont eu raison de ce trafic. Et, au désintérêt général, s'ajoute l'impossibilité pour les charpentiers de marine de trouver les arbres nécessaires à l'entretien des bateaux. ► « Brésil : le transport de marchandises en voilier traditionnel, à bout de souffle », un Grand Reportage de Quentin Bleuzen.
Washington et Tokyo ont scellé, mardi 22 juillet, un nouvel accord commercial qui réduit les taxes douanières sur certains produits japonais, notamment les automobiles. Si les marchés saluent cette avancée, des tensions persistent sur l'acier, l'aluminium et le riz. L'annonce a été faite dans la nuit : les États-Unis et le Japon ont signé un accord commercial qualifié d'« énorme » par Donald Trump. En jeu : la réduction des droits de douane imposés aux produits japonais, notamment automobiles, qui passent de 25% à 15%. Une bouffée d'oxygène pour le Japon, quatrième économie mondiale, très dépendant de ses exportations vers les États-Unis. Washington, de son côté, consolide un partenariat avec un allié clé en Asie. Ce compromis était crucial pour les deux parties, tant les échanges commerciaux entre les deux pays sont fondamentaux à leur équilibre économique respectif. Pour Washington, il s'agit aussi de corriger une balance commerciale déficitaire. À lire aussiLe Japon pris en étau entre les États-Unis et la Chine L'automobile japonaise en tête des bénéficiaires Au cœur de l'accord : l'industrie automobile. Un tiers des exportations japonaises vers les États-Unis concerne ce secteur. La baisse de 10 points de taxe douanière est une excellente nouvelle pour les constructeurs nippons. Les marchés ne s'y sont pas trompés : la Bourse de Tokyo a bondi à l'ouverture, et les actions de Toyota, Honda ou Nissan sont toutes orientées à la hausse. Toyota enregistre même une progression de 15% depuis l'annonce. Cette décision permet aux constructeurs japonais de conserver leur compétitivité sur le marché américain, où chaque point de taxe représente plusieurs milliers de dollars par véhicule. Un soulagement important dans un contexte mondial incertain. Riz américain et tensions persistantes À lire aussiDroits de douane: entre le Japon et les États-Unis, des «progrès» mais pas encore d'accord Mais tout n'est pas réglé. Si le riz américain pourrait désormais pénétrer le marché japonais pour pallier une production nationale insuffisante, ce sujet reste sensible. Le riz est un symbole culturel et économique fort au Japon, et l'idée d'importer des produits étrangers inquiète les producteurs locaux. Autre sujet d'achoppement : l'acier et l'aluminium. Ces deux matières premières restent taxées à hauteur de 50%, preuve que l'accord commercial n'est que partiel. Enfin, ce compromis survient à un moment politiquement délicat au Japon : affaibli par des pertes électorales, le Premier ministre aurait utilisé la conclusion de l'accord comme ultime carte avant d'annoncer sa démission. Cet accord, fruit de la méthode musclée de Donald Trump, marque une nouvelle étape dans sa stratégie commerciale. Après le Japon, Washington poursuit ses négociations avec l'Union européenne et la Chine.
Le groupe pétrolier américain Chevron a finalisé l'acquisition de la compagnie Hess pour près de 60 milliards de dollars. Un rachat qui dépasse largement le cadre financier. Il redéfinit les équilibres énergétiques, renforce la position des États-Unis et propulse le Guyana, en Amérique du Sud, au rang de futur géant pétrolier, grâce à ses gisements offshores. C'est l'un des plus gros rachats du secteur énergétique de ces dix dernières années. Chevron, numéro deux du pétrole américain, a racheté la société Hess pour environ 60 milliards de dollars. Derrière cette opération titanesque, il ne s'agit pas simplement d'une fusion parmi d'autres, mais bien d'une manœuvre stratégique vitale pour Chevron, dont les réserves déclinaient dangereusement. En rachetant Hess, bien plus petite, Chevron met la main sur un tiers du gisement offshore géant de Stabroek, au large du Guyana. Un champ pétrolier qualifié de nouvel eldorado, avec plus de 11 milliards de barils enfouis sous les eaux. À titre de comparaison, cela représente l'équivalent de la consommation annuelle de pétrole de la France pendant vingt ans. La production actuelle est déjà de 650 000 barils par jour, et devrait atteindre 1,2 million d'ici à 2027, soit 1 % de l'offre mondiale. À lire aussiLe Guyana, nouvel eldorado du pétrole Le Guyana, nouvel acteur-clé du pétrole mondial Grâce à ce gisement, Chevron retrouve une visibilité de production au-delà de 2030. Mais l'impact dépasse le cadre de l'entreprise. Pour les États-Unis, l'accès à un pétrole proche, hors des quotas de l'OPEP+, représente un atout stratégique majeur. Pour le Guyana, petit pays coincé entre le Venezuela et l'Atlantique, l'enjeu est colossal : il devient l'un des nouveaux poids lourds du pétrole mondial. Si l'on rapporte les réserves à sa population, elles sont comparables à celles de l'Arabie saoudite. Le pays est désormais au cœur d'un dispositif énergétique mondial, qui pourrait transformer durablement son économie, à condition de bien gérer cette manne. Pétrole contre climat : un équilibre fragile Mais ce rachat massif n'est pas sans controverse. Alors que les appels à la transition écologique s'intensifient face à l'urgence climatique, Chevron investit dans le fossile pour extraire davantage de pétrole. Un signal jugé contradictoire par certains observateurs. Les majors pétrolières, elles, avancent un argument : le pétrole extrait au Guyana serait moins polluant grâce aux techniques modernes et permettrait de financer des investissements dans le renouvelable. Reste que dans cette course au pétrole du futur, entre logiques industrielles, géopolitiques et contraintes climatiques, c'est un nouvel équilibre énergétique mondial qui se redessine sous nos yeux. À lire aussiInvestir dans le renouvelable ou pas, le dilemme des compagnies pétrolières
Le 24 juillet 2025 est prévu, à Pékin, un sommet entre la Chine et l'Union européenne, initialement planifié pour célébrer le 50è anniversaire des relations diplomatiques entre les deux blocs. Le climat est tendu. Alors que l'agressivité commerciale de Donald Trump aurait pu encourager un rapprochement prudent entre Pékin et Bruxelles, c'est le contraire qui se passe. Les points de convergence sont quasi-inexistants, mais les litiges foisonnent. Sur le plan commercial d'abord avec une relation économique gravement déséquilibrée en faveur de Pékin et un environnement des affaires en Chine qui s'est largement politisé au fil des ans. Récemment et tandis que l'UE fait face à un déficit commercial énorme de 357 milliards de dollars avec la Chine, la présidente de la Commission européenne a accusé Pékin d'inonder le marché mondial avec une surcapacité subventionnée et d'utiliser sa position dominante sur les terres rares comme une arme. Il y a aussi les tensions géopolitiques mondiales : l'alignement de Pékin sur les vues de la Russie en Ukraine, son soutien à l'Iran au Moyen-Orient, ses claires intentions à l'égard de Taiwan, ses prédations économiques en Europe et en Afrique, son expansion maritime en mer de Chine. Que peut-on attendre de ce sommet ? Jusqu'où peut aller l'escalade commerciale ? L'Europe est-elle en mesure d'imposer une ligne commune vis-à-vis de la Chine ? Et quelles sont les marges de manœuvre dans un monde de plus en plus polarisé ? Regard avec nos invités : Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman Laurent Malvezin, chercheur associé à l'Institut Thomas More en charge de la Chine Marc Julienne, directeur du Centre Asie de l'IFRI, l'Institut Français des Relations Internationales.
