CHRIS - POP CULTURE & COMICS

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Avec POP CULTURE & COMICS, Chris explore la bande dessinée américaine et ses dérivés dans la culture populaire. chrisstup.substack.com

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    • Apr 11, 2025 LATEST EPISODE
    • monthly NEW EPISODES
    • 12m AVG DURATION
    • 52 EPISODES


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    Latest episodes from CHRIS - POP CULTURE & COMICS

    SPIDER-GIRL ET MARVEL COMICS 2 : LA DRÔLE D'HISTOIRE DE LA FILLE DE SPIDER-MAN

    Play Episode Listen Later Apr 11, 2025 16:14


    “Et si les choses s'étaient passées différemment ?”, voilà une question que les amateurs et les amatrices de comic books adorent se poser. Si vous aimez les théories plus ou moins éclatées autour de nos super-héros préférés, le sujet d'aujourd'hui est pour vous, car il va être question de What If…?, de Spider-Girl et de l'initiative Marvel Comics 2 !Les comics recommandés dans cet épisode :* Spider-Girl - L'Intégrale 1998-1999 - Panini ComicsD'autres comics Spider-Man à découvrir chez Panini Comics :* Spider-Man par David Michelinie et Todd McFarlane - Omnibus* Spider-Man par Todd McFarlane - Omnibus* Spider-Man par David Michelinie et Erik Larsen - Omnibus* Spider-Man 2099 - Omnibus* Spider-Man par Roger Stern - Omnibus* Ultimate Spider-Man - Tome 1 - Omnibus* Ultimate Spider-Man - Tome 2 - Omnibus* Miles Morales : The Ultimate Spider-Man - Omnibus* Spider-Man : Bleu - Édition Définitive* Spider-Man : L'Histoire d'une Vie* Spider-Man : Spider-Verse* Spider-Man : Spider-Island* Ben Reilly - Spider-Man : En Quête d'Humanité* Nous sommes les Spider-Men* Je suis Spider-Man - Édition AnniversaireRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.Soutenez-moi sur Ulule à partir de 1€ par mois ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    L'HÉRITAGE DE DAREDEVIL : JUSTICE, FOI ET VENGEANCE CHEZ MARVEL COMICS

    Play Episode Listen Later Mar 26, 2025 24:54


    Qu'est-ce qui peut bien pousser un avocat malvoyant à revêtir un costume de Diable pour combattre le crime, une fois la nuit tombée ? De sa création par Stan Lee et Bill Everett à The Man Without Fear de Frank Miller, en passant par Daredevil : Born Again, dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur l'histoire de L'Homme-Sans-Peur et sur ce qu'il représente chez Marvel Comics !Les comics recommandés dans cet épisode :* Daredevil par Frank Miller - Tome 1 - Marvel Poche / Panini Comics* Daredevil par Frank Miller - Omnibus - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : Born Again - Frank Miller et David Mazzucchelli - Must-Have - Panini Comics* Daredevil : Born Again - Frank Miller et David Mazzucchelli - Édition Prestige - Panini Comics* Daredevil : Jaune - Édition Définitive - Jeph Loeb et Tim Sale - Panini Comics* Daredevil : Father - Joe Quesada - Must-Have - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : Sous l'Aile du Diable - Kevin Smith et Joe Quesada - Panini Comics* Daredevil par Brian Michael Bendis et Alex Maleev - Tome 1 - Panini Comics* Daredevil par Ann Nocenti et John Romita Jr. - Omnibus - Panini Comics* Daredevil par Mark Waid & Chris Samnee - Tome 1 - Omnibus - Panini Comics* Daredevil par Mark Waid & Chris Samnee - Tome 2 - Omnibus - Panini Comics* Daredevil : End of Days - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : Shadowland - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : Déchéance - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : Redemption - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil / Echo : Quête de Vision - Marvel Comics / Panini Comics* Je suis Daredevil - Édition Anniversaire - Marvel Comics / Panini ComicsRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.Soutenez-moi sur Ulule à partir de 1€ par mois ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    MAXIMUM CARNAGE : MINIMUM SPIDER-MAN

    Play Episode Listen Later Feb 28, 2025 13:19


    Aux côtés de Batman et Superman, Spider-Man est sûrement l'un des super-héros les plus populaires de tous les temps, et sans doute le personnage de comics préféré d'une bonne partie d'entre vous. Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS on revient sur le crossover Maximum Carnage, ou comment l'Homme-Araignée a été utilisé à tort et à travers par Marvel Comics durant les années 1990 !Les comics recommandés dans cet épisode :* Spider-Man : Maximum Carnage - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man : La Dernière Chasse de Kraven - Marvel Comics / Panini ComicsD'autres comics Carnage à découvrir :* Carnage : Black, White & Blood - Marvel Comics / Panini Comics* Je suis Carnage - Marvel Comics / Panini Comics* Absolute Carnage : Le Roi de Sang - Marvel Comics / Panini Comics* Venom & Carnage : Symbiosis Necrosis - Marvel Comics / Panini ComicsD'autres comics Venom à découvrir :* Venom - Tome 1 - Marvel Comics / Panini Comics* Venom - L'Intégrale 1984-1991 - Marvel Comics / Panini Comics* Venom - L'Intégrale 1991-1993 - Marvel Comics / Panini Comics* Venom : Agent Venom - Marvel Comics / Panini ComicsD'autres comics Spider-Man à découvrir :* Spider-Man par David Michelinie et Todd McFarlane - Omnibus* Spider-Man par Todd McFarlane - Omnibus* Spider-Man par David Michelinie et Erik Larsen - Omnibus* Spider-Man 2099 - Omnibus* Spider-Man par Roger Stern - Omnibus* Ultimate Spider-Man - Tome 1 - Omnibus* Ultimate Spider-Man - Tome 2 - Omnibus* Miles Morales : The Ultimate Spider-Man - Omnibus* Nous sommes les Spider-Men* Je suis Spider-Man - Édition AnniversaireRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    GARÇONNES : LES AUTRICES OUBLIÉES DE LA BANDE DESSINÉE !

    Play Episode Listen Later Feb 14, 2025 11:42


    La bande dessinée est l'un des nombreux prismes au travers desquels nous pouvons esquisser un portrait de notre monde, présent ou passé. Et une page de BD en dit parfois implicitement plus long sur la société dans laquelle elle a été écrite et dessinée que n'importe quelle chronique qui se voudrait factuelle. Aujourd'hui, on revient sur Garçonnes : les Autrices Oubliées des Années Folles, de Trina Robbins, chez Bliss Éditions.Les ouvrages recommandés dans ce podcast :* Garçonnes : Les Autrices Oubliées des Années Folles - Trina Robbins - Bliss Éditions* Last Girl Standing - Trina Robbins - Bliss ÉditionsRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    GREEN LANTERN / GREEN ARROW : L'INJUSTICE SOCIALE CHEZ DC COMICS

    Play Episode Listen Later Jan 29, 2025 14:02


    Monstres géants, robots extraterrestres, savants fous mégalomanes, pendant de nombreuses années, les super-héros et les super-héroïnes de nos bandes dessinées préférées ont fait régner la justice en affrontant toutes sortes de dangers plus excentriques les uns que les autres, défendant par la même occasion l'image d'une Amérique unie contre des menaces extérieures. Mais qu'en est-il à leur retour sur Terre ? Leurs combats changent-ils vraiment le monde dans lequel vivent leurs concitoyens ? Aujourd'hui, fini le rêve américain, on revient sur Green Lantern / Green Arrow de Dennis O'Neil et Neal Adams, chez DC Comics !Les comics recommandés dans cet épisode :* Green Lantern / Green Arrow par Dennis O'Neil et Neal Adams - Urban ComicsD'autres comics Green Arrow à découvrir :* Green Arrow : The Longbow Hunters par Mike Grell - Urban Comics* Green Arrow (New 52) par Jeff Lemire et Andrea Sorrentino - Urban Comics* Dawn of Green Arrow & Black Canary - Tome 1 - Urban Comics* Green Arrow : Année Un par Andy Diggle et Jock - Urban ComicsD'autres comics Green Lantern à découvrir :* Green Lantern : Emerald Twilight - Urban Comics* Green Lantern : Terre Un - Tome 1 - Urban Comics* Blackest Night - Tome 1 - Urban Nomad* Blackest Night - Tome 2 - Urban NomadRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    ROBOCOP VERSUS TERMINATOR : LA GUERRE DES MACHINES EN COMICS !

    Play Episode Listen Later Dec 22, 2024 10:42


    Bande dessinée, cinéma, jeu vidéo : il n'est pas rare que les différents courants de la Pop Culture s'entremêlent. Et le sujet qui nous intéresse aujourd'hui en est justement une parfaite démonstration ! Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur l'affrontement entre deux icônes de la science-fiction avec Robocop versus The Terminator par Frank Miller et Walter Simonson, chez Dark Horse Comics !Les comics recommandés dans cet épisode :* Robocop versus The Terminator - Dark Horse Comics / VestronD'autres comics Robocop et Terminator à lire chez Vestron :* Robocop : Citizen Arrest* Terminator : Le Jour d'Après* Terminator : Tempest* Terminator : 2029-1984 - Première Partie* Transformers VS TerminatorD'autres comics de Frank Miller à découvrir :* Ronin - DC Comics / Urban Comics* Batman : The Dark Knight Returns - DC Comics / Urban Nomad* Batman : The Dark Knight Returns - DC Comics / Urban Comics* Batman : Année Un - Frank Miller et David Mazzucchelli - DC Comics / Urban Nomad* Batman : Année Un - Frank Miller et David Mazzucchelli - DC Comics / Urban Comics* Daredevil : Companion - Omnibus - Marvel Comics / Panini Comics* Daredevil : L'Homme Sans Peur - Must Have - Marvel Comics / Panini Comics* Elektra renaît à la Vie - Marvel Comics / Panini Comics* 300 - Dark Horse Comics / Huginn & Muninn* Sin City - Tome 1 - Édition Collector - Dark Horse Comics / Huginn & Muninn* Sin City - Tome 1 - Dark Horse Comics / Huginn & MuninnD'autres comics de Walter Simonson à découvrir :* Ragnarök - Tome 1 - Black River Comics* Ragnarök - Tome 2 - Black River Comics* X-Factor - L'Intégrale 1986 - Marvel Comics / Panini Comics* X-Factor - L'Intégrale 1987 - Marvel Comics / Panini Comics* X-Factor - L'Intégrale 1988 - Marvel Comics / Panini Comics* X-Factor - L'Intégrale 1989 - Marvel Comics / Panini ComicsRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    YOUNGBLOOD : ROB LIEFELD EN MODE EXTRÊME !

    Play Episode Listen Later Dec 15, 2024 20:14


    Les comics de super-héros du début des années 1990 ont mauvaise réputation. Pour certains et certaines, il s'agit même des pires comic books jamais publiés. Mais est-ce vraiment le cas ? Et surtout, au-delà des clichés habituels, que faut-il retenir des publications de cette époque ? Aujourd'hui, on revient sur Rob Liefeld, son label Extreme Studios et ses héros de Youngblood !Les comics recommandés dans cet article :Deadpool par Rob Liefeld :* Deadpool - Intrégrale 1991-1994 - Marvel Comics / Panini Comics* Deadpool : Badder Blood - Marvel Comics / Panini ComicsDes comics qui fleurent bon les 90's à découvrir sans attendre :* Spawn - Tome 1 - Nouvelle Édition - Delcourt* WildC.A.T.s Origines - Tome 1 - Urban Comics* WildC.A.T.s Origines - Tome 2 - Urban Comics* WildC.A.T.s Evolution - Urban Comics* CyberForce - Tome 1 - Reflexions* CyberForce - Tome 2 - Reflexions* CyberForce - Tome 3 - Reflexions* The Maxx - Tome 1 - Reflexions* The Maxx - Tome 2 - Reflexions* The Maxx - Tome 3 - Reflexions* The Authority : Les Années StormWatch - Tome 1 - Urban Comics* The Authority : Les Années StormWatch - Tome 2 - Urban Comics* The Authority - Tome 1 - Urban Comics* The Authority - Tome 2 - Urban Comics* Fantastic Four : Les Nouveaux Fantastiques - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man par Todd McFarlane - Omnibus - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man : Tourments - Todd McFarlane - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man par David Michelinie et Erik Larsen - Omnibus - Panini Comics* Spider-Man : La Vengeance des Sinister Six - Erik Larsen - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man : Maximum Carnage - Marvel Comics / Panini Comics* X-Men par Jim Lee et Chris Claremont - Marvel Comics / Panini Comics* X-Factor par Peter David - Tome 1 - Omnibus - Marvel Comics / Panini ComicsRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    THE AUTHORITY : LES SUPER-HÉROS SANS DIEU NI MAÎTRE

    Play Episode Listen Later Nov 28, 2024 17:53


    The Authority, une équipe de super-héros pas comme les autres qui a révolutionné le monde des comics à l'aube des années 2000. Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur l'histoire des personnages du label WildStorm : Jenny Sparks, Jack Hawksmoor, Midnighter, Apollo, L'Ingénieure, le Docteur et Swift ; et sur la façon dont Warren Ellis et Mark Millar ont drastiquement changé notre vision des justiciers costumés ! Les comics recommandés dans cet épisode :StormWatch et The Authority chez Urban Comics :* The Authority : Les Années StormWatch - Tome 1* The Authority : Les Années StormWatch - Tome 2* The Authority - Tome 1* The Authority - Tome 2Planetary chez Urban Comics :* Planetary - Tome 1* Planetary - Tome 2* Planetary - Tome 1 - Urban Nomad* Planetary - Tome 2 - Urban NomadD'autres comics qui fleurent bon les 90's à découvrir sans attendre :* Spawn - Tome 1 - Nouvelle Édition - Delcourt* WildC.A.T.s Origines - Tome 1 - Urban Comics* WildC.A.T.s Origines - Tome 2 - Urban Comics* WildC.A.T.s Evolution - Urban Comics* CyberForce - Tome 1 - Reflexions* CyberForce - Tome 2 - Reflexions* CyberForce - Tome 3 - Reflexions* The Maxx - Tome 1 - Reflexions* The Maxx - Tome 2 - Reflexions* The Maxx - Tome 3 - ReflexionsRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    L'ÉTRANGE CRÉATURE DU LAC NOIR VIT TOUJOURS !

    Play Episode Listen Later Oct 28, 2024 16:58


    Dracula, le monstre de Frankenstein, la Momie, ou encore l'Homme Invisible, autant de personnages de fiction qui ont participé à élever les fondations de notre culture populaire. Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur L'Étrange Créature du Lac Noir et sur ses incursions dans le monde de la bande dessinée ! Les comics recommandés dans cet épisode :L'univers Universal Monsters chez Skybound Entertainment :* L'Étrange Créature du Lac Noir vit toujours ! - Urban Comics* Dracula - Urban ComicsD'autres comics horrifiques classiques à découvrir pour aller plus loin :* Marvel Horror - Omnibus - Panini Comics* Marvel Horror, Le Retour - Omnibus - Panini Comics* Le Tombeau de Dracula - Volume 1 - Omnibus - Marvel Comics / Panini Comics* Werewolf by Night - Intégrale 1971-1973 - Marvel Comics / Panini Comics* Alan Moore présente Swamp Thing - Tome 1 - DC Comics / Urban Comics* Swamp Thing : La Créature du Marais - Bernie Wrightson et Len Wein - DC Comics / Urban Comics* The Vault of Horror - EC Comics / AkileosEt un peu de déco, avec ce magnifique buste de L'Étrange Créature du Lac Noir !Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    JOHN BYRNE : L'HOMME QUI RÉINVENTE LES SUPER-HÉROS !

    Play Episode Listen Later Oct 18, 2024 20:55


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, je reviens sur la carrière d'une légende de la bande dessinée américaine : John Byrne ! De ses premiers travaux sur Iron Fist et les X-Men chez Marvel Comics à la création des Next Men chez Dark Horse, en passant par Alpha Flight et sa modernisation de Superman avec The Man of Steel, John Byrne a profondément marqué le Neuvième Art par son approche unique. Qu'il s'agisse des Fantastic Four, de She-Hulk, ou encore de Namor the Sub-Mariner, cet artiste iconoclaste s'est approprié les plus grandes figures des comic books de super-héros !Les comics recommandés dans cet épisode :Les premiers travaux de John Byrne chez Marvel Comics :* Iron Fist - L'Intégrale 1974-1975 - Marvel Comics / Panini Comics* Iron Fist - L'Intégrale 1976-1977 - Marvel Comics / Panini Comics* The Champions - L'Intégrale 1975-1978 - Marvel Comics / Panini Comics* Spider-Man Team-Up - L'Intégrale 1976-1977 - Marvel Comics / Panini Comics* Marvel Two-in-One - L'Intégrale 1979-1980 - Marvel Comics / Panini Comics* Avengers - L'Intégrale 1979 - Marvel Comics / Panini Comics* X-Men - L'Intégrale 1979 - Marvel Comics / Panini Comics* X-Men : La Saga du Phénix Noir - Marvel Comics / Panini Comics* X-Men - L'Intrégrale 1981 - Marvel Comics / Panini Comics* Captain America - l'Intégrale 1980-1981 - Marvel Comics / Panini ComicsLes Fantastic Four par John Byrne :* Fantastic Four par John Byrne - Omnibus - Tome 1 - Marvel Comics / Panini Comics* Fantastic Four par John Byrne - Omnibus - Tome 2 - Marvel Comics / Panini ComicsAlpha Flight par John Byrne :* Alpha Flight - L'Intégrale 1978-1984 - Marvel Comics / Panini Comics* Alpha Flight - L'Intégrale 1984-1985 - Marvel Comics / Panini Comics* Alpha Flight - L'Intégrale 1985 - Marvel Comics / Panini ComicsSuperman par John Byrne :* Superman Chronicles 1987 - Volume 1 - DC Comics / Urban Comics* Superman Chronicles 1987 - Volume 2 - DC Comics / Urban Comics* Superman Chronicles 1987 - Volume 3 - DC Comics / Urban Comics* Superman Chronicles 1988 - Volume 1 - DC Comics / Urban Comics* Superman Chronicles 1988 - Volume 2 - DC Comics / Urban ComicsShe-Hulk par John Byrne :* She-Hulk par John Byrne - Omnibus - Marvel Comics / Panini ComicsNamor, the Sub-Mariner par John Byrne :* Namor, the Sub-Mariner - Omnibus - John Byrne et Jae Lee - Marvel Comics / Panini ComicsNext Men par John Byrne :* Next Men - Tome 1 - Dark Horse Comics / Delirium* Next Men - Tome 2 - Dark Horse Comics / Delirium* Next Men - Tome 3 - Dark Horse Comics / Delirium* 2112 - Prologue à Next Men - Dark Horse Comics / DeliriumD'autres travaux de John Byrne à découvrir :* Marvel Universe par John Byrne - Omnibus - Marvel Comics / Panini Comics* La Légende de Darkseid - Contient Legends #1 à #6 - DC Comics / Urban Comics* Multiversity présente Terre-38 - Contient Superman & Batman : Generations - DC Comics / Urban Comics* Hellboy - Édition Spéciale 30ème Anniversaire - Dark Horse Comics / DelcourtRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    JUSTICE LEAGUE vs GODZILLA vs KONG : LE CROSSOVER COLOSSAL !

    Play Episode Listen Later Aug 14, 2024 11:41


    Depuis toujours, les fans adorent comparer leurs super-héros préférés et imaginer quel personnage pourrait ressortir vainqueur en cas d'affrontement. Et bien, croyez-moi, avec le comic book que voici, vous allez en avoir pour votre argent ! Aujourd'hui, on se penche sur le cas d'un crossover pour le moins inattendu, qui marque la rencontre entre la Justice League de DC Comics, le Roi des Monstres Godzilla et le toujours très romantique Kong de Skull Island ! Les comics recommandés dans cet épisode :Pour vous faire votre propre avis sur Justice League VS Godzilla VS Kong :* Justice League VS Godzilla VS Kong - Brian Buccellato, Christian Duce et Tom Derenick - DC Comics / Legendary / Urban ComicsPour découvrir la Justice League à moindre coût :* Justice League (New 52) - Tome 1 - Geoff Johns et Jim Lee - DC Comics / Urban NomadD'autres comics Godzilla à découvrir :* Godzilla : Half-Century War - James Stokoe - IDW Publishing / Vestron* Godzilla VS Mighty Morphin Power Rangers - Cullen Bunn et Freddie Williams II- Vestron* Godzilla : Gangsters & Goliaths - John Layman et Alberto Ponticelli - IDW Publishing / Vestron* Godzilla : Legends - IDW Publishing / Vestron* Godzilla : Rage Across Time - IDW Publishing / Vestron* Godzilla : Cataclysm - Cullen Bunn et Dave Wachter - IDW Publishing / VestronPour aller plus loin avec Godzilla et les Kaijū :* Godzilla : La Grande Histoire du Roi des Monstres - Skipper Graham - Huginn & Muninn* Kaiju-Rama : Les Plus Belles Affiches de Godzilla et des Monstres Japonais - John Prate - Omake BooksRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux. Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    QUEL AVENIR POUR LA BANDE DESSINÉE ?

    Play Episode Listen Later Jul 16, 2024 16:10


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on fait le point sur un vaste sujet : l'avenir de la bande dessinée ! Le Neuvième Art est-il condamné à disparaître ? Voici une sélection de BD à découvrir pour se convaincre du contraire !Les ouvrages recommandés dans cet épisode :* Demon Days - Peach Momoko - Marvel Comics / Panini Comics* Demon Wars - Peach Momoko - Marvel Comics / Panini Comics* Birdking - Tome 1 - Crom et Daniel Freedman - Dark Horse Comics / Les Humanoïdes Associés* Hoka Hey ! - Neyef - Label 619 / Rue de Sèvres* Yojimbot - Tome 1 - Sylvain Repos - Dargaud* Evol - Tome 1 - Atsushi Kaneko - Delcourt / Tonkam* Barbaric - Tome 1 - Michael Moreci, Nathan Gooden et Addison Duke - Vault Comics / Urban Comics* COPRA - Tome 1 - Michel Fiffe - Image Comics / Delirium* Là où gisait le corps - Ed Brubaker et Sean Phillips - Image Comics / DelcourtRetrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu !Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    ALAN MOORE AVANT WATCHMEN

    Play Episode Listen Later Jul 8, 2024 18:18


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, je reviens sur les débuts d'un scénariste légendaire de la bande dessinée britannique et américaine, derrière Watchmen, La Ligue des Gentlemen Extraordinaires, ou From Hell : Alan Moore ! De ses travaux pour 2000AD à Swamp Thing chez DC Comics, en passant par l'indispensable V pour Vendetta ou l'avant-gardiste Miracleman ! Les comics recommandés dans cet épisode : Les premiers travaux de Alan Moore chez 2000AD : * Alan Moore : Les Années 2000AD - Future Shocks - Delirium * Skizz en Terre Étrangère - Alan Moore et Jim Baikie - Delirium * La Ballade de Halo Jones - Alan Moore et Ian Gibson - Delirium Alan Moore chez DC Comics et Vertigo : * Alan Moore présente Swamp Thing - Tome 1 - Urban Comics * Alan Moore présente Swamp Thing - Tome 2 - Urban Comics * Alan Moore présente Swamp Thing - Tome 3 - Urban Comics * Les Derniers Jours de Superman - Alan Moore, Curt Swan, Dave Gibbons et Rick Veitch - Urban Comics * Alan Moore présente DC Comics - Urban Comics * V pour Vendetta - Alan Moore et David Lloyd - Vertigo / Urban Comics * V pour Vendetta - Alan Moore et David Lloyd - Vertigo / Urban Nomad * Watchmen - Alan Moore et Dave Gibbons - Urban Comics * Watchmen - Alan Moore et Dave Gibbons - Urban Nomad Les beaux omnibus consacrés au travail d'Alan Moore chez Panini Comics : * Miracleman - avec Garry Leach, Alan Davis et John Totleben - Panini Comics * Captain Britain - avec Alan Davis, Chris Claremont, Jamie Delano et Grant Morrison - Panini Comics Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    NICK ADAMS : LE REBELLE DE LA SCIENCE-FICTION

    Play Episode Listen Later Jul 1, 2024 16:27


    Quel est le point commun entre James Dean, Elvis Presley, Frankenstein et Godzilla ? Et bien, aussi étrange que cela puisse paraître, ils ont tous côtoyé à un moment ou à un autre le même individu, dont vous ignorez peut-être l'existence, malgré son parcours aussi sulfureux qu'étonnant. Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur la vie tumultueuse d'un comédien à la carrière atypique : Nick Adams. Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    LES TRANSFORMERS SONT DE RETOUR !

    Play Episode Listen Later Jun 17, 2024 12:46


    Les Transformers comptent parmi les figures incontournables de la Pop Culture. Et si l'évocation des robots transformables de Hasbro vous fait penser à des jouets, à des films, ou à des dessins animés, il ne faut pas oublier l'importance capitale qu'a pu jouer l'industrie du comic book dans le développement de cette licence phare. Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur le retour fracassant des Transformers par Daniel Warren Johnson ! Les comics recommandés dans cet épisode : Découvrir les Transformers de Daniel Warren Johnson et l'Energon Universe : Transformers - Daniel Warren Johnson - Skybound Entertainment / Urban Comics  Void Rivals - Robert Kirkman et Lorenzo De Felici - Skybound Entertainment / Urban Comics Les comics Transformers chez Vestron : Transformers : La Série Originale de Marvel Comics Transformers : The Movie - L'adaptation du film de 1986 Le superbe artbook Transformers Legacy Star Trek VS Transformers My Little Pony / Transformers : Friendship in Disguise Transformers / Retour vers le Futur Transformers VS Terminator Les autres travaux de Daniel Warren Johnson : Wonder Woman : Dead Earth - Daniel Warren Johnson - DC Comics / Urban Comics Jurassic League - Daniel Warren Johnson et Juan Gedeon - DC Comics / Urban Comics Do a Powerbomb ! - Daniel Warren Johnson - Image Comics / Urban Comics  Murder Falcon - Daniel Warren Johnson - Image Comics / Delcourt  Beta Ray Bill : Étoile d'Argent - Daniel Warren Johnson - Marvel Comics / Panini Comics  Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu !Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    COMICS : PATRIMOINE ET TRÉSORS OUBLIÉS

    Play Episode Listen Later Jun 10, 2024 14:49


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, je reviens sur des trésors, parfois injustement oubliés, du patrimoine de la bande dessinée américaine ! Les comics recommandés dans cet épisode : The Maxx, aux Éditions Reflexions : * The Maxx - Tome 1 - Sam Kieth et William Messner-Loebs - Image Comics / Editions Reflexions * The Maxx - Tome 2 - Sam Kieth et William Messner-Loebs - Image Comics / Editions Reflexions * The Maxx - Tome 3 - Sam Kieth et William Messner-Loebs - Image Comics / Editions Reflexions Nexus, chez Delirium : * Nexus - Omnibus Volume 1 - Mike Baron et Steve Rude - Dark Horse Comics / Delirium * Nexus - Omnibus Volume 2 - Mike Baron et Steve Rude - Dark Horse Comics / Delirium JSA Chronicles, chez Urban Comics : * Justice Society of America Chronicles 1999 - James Robinson et David S. Goyer - DC Comics / Urban Comics * Justice Society of America Chronicles 2000 - Geoff Johns et David S. Goyer - DC Comics / Urban Comics * Justice Society of America Chronicles 2001 - Geoff Johns et David S. Goyer - DC Comics / Urban Comics Les autres classiques méconnus à découvrir chez Urban : * Camelot 3000 - Mike Barr et Brian Bolland - DC Comics / Urban Comics * American Flagg - Howard Chaykin - Urban Comics Les pépites de Marvel à retrouver chez Panini Comics : * L'Escadron Suprême : Le Programme Utopie - Mark Gruenwald et Bob Hall - Marvel Comics / Panini Comics * Tomb of Dracula - Omnibus Volume 1 - Gerry Conway, Marv Wolfman et Gene Colan - Marvel Comics / Panini Comics * Marvel Horror - Omnibus - Collectif - Marvel Comics / Panini Comics * Marvel Horror : Le Retour - Omnibus - Collectif - Marvel Comics / Panini Comics * Captain Britain - Omnibus - Alan Moore, Alan Davis et Jamie Delano - Marvel Comics / Panini Comics * Namor - Omnibus - John Byrne - Marvel Comics / Panini Comics * Dazzler - L'Intégrale 1980-1982 - Tom DeFalco et John Romita Jr. - Marvel Comics / Panini Comics * Killraven - L'Intégrale 1973-1982 - Don McGregor et Philip Craig Russell - Marvel Comics / Panini Comics Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    RIDE THE (GREEN) LIGHTNING : L'ALBUM LE PLUS RARE DE METALLICA ?

    Play Episode Listen Later Jun 3, 2024 10:36


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, je reviens sur l'étonnante histoire de la version verte de l'album Ride the Lightning de Metallica, distribuée en France par Bernett Records ! Comment cette erreur d'impression a donné naissance à l'un des objets de collection les plus rares et recherchés liés à ce groupe mythique ?Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    COMICS : AUX SOURCES DE LA FICTION POPULAIRE

    Play Episode Listen Later May 22, 2024 19:35


    Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, je reviens sur la façon dont la littérature pulp a influencé nos univers fictionnels préférés. De H.P. Lovecraft à Robert E. Howard, en passant par Edgar Rice Burroughs, comment Conan le Barbare, Tarzan, ou encore Zorro ont inspiré la bande dessinée américaine, jusqu'à devenir eux-mêmes des héros de comic books ?Les comics recommandés dans cet épisode :* Kadath, L'Inconnue - H.P. Lovecraft, Florentino Flórez, Guillermo Sanna et Jacques Salomon - Ablaze / Black River * Les Chefs-d'Œuvre de Lovecraft : L'Appel de Cthulhu - Gō Tanabe - Ki-oon* Conan le Barbare : Liés à la Pierre Noire - Jim Zub et Roberto De La Tore - Titan Comics / Panini Comics * Les Secrets de l'Acier - Roy Thomas - Neofelis Éditions * Doc Savage : L'intégrale 1975-1976 - Doug Moench, John Buscema et Tony Dezuniga - Marvel Comics / Curtis Magazines / Neofelis Éditions * Bloodstar - Richard Corben - Delirium* Tarzan - Joe Kubert - DC Comics / Delirium * Tarzan : Les Années Comics - Russ Manning / Graph Zeppelin* Zorro : D'entre les morts - Sean Gordon Murphy - Massive Publishing / Urban Comics * Zorro : D'entre les morts - Version N&B - Sean Gordon Murphy - Massive Publishing / Urban Comics* Zorro : D'entre les morts - Masterclass Edition - Sean Gordon Murphy - Massive Publishing / Urban Comics* Supergirl : Woman of Tomorrow - Tom King et Bilquis Evely - DC Comics / Urban Comics Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute !Mes réseaux sociaux.N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu !Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    CANNIBAL CORPSE : DEATH METAL, CENSURE & COMICS

    Play Episode Listen Later May 15, 2024 12:42


    L'art et la censure ne font jamais bon ménage. Et c'est particulièrement vrai quand on parle de l'histoire de la bande dessinée américaine et de musiques extrêmes. Alors, quand les deux se rencontrent, ça ne peut qu'effrayer les puritains de tout poil ! Dans cet épisode de POP CULTURE & COMICS, on revient sur les visuels traumatisants des albums du groupe de Death Metal Cannibal Corpse et sur l'artiste qui en est à l'origine : Vince Locke ! Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    FAUT-IL FORCER LES GENS À LIRE DES COMICS ?

    Play Episode Listen Later May 8, 2024 16:44


    Dans cet épisode, je reviens sur la difficulté d'accès à la bande dessinée américaine et à la culture comics en France. Les comics recommandés dans cet épisode : * Ultimate Spider-Man - Brian M. Bendis et Mark Bagley - Marvel Pocket / Panini Comics * Ultimates - Mark Millar et Bryan Hitch - Marvel Pocket / Panini Comics * The Boys - Garth Ennis et Darick Robertson - Dynamite / Panini Comics * Batman : Un Long Halloween - Jeph Loeb et Tim Sale - DC Comics / Urban Comics * V pour Vendetta - Alan Moore et David Lloyd - Urban Nomad / Urban Comics * Nou3 - Grant Morrison et Frank Quitely - Urban Nomad / Urban Comics * Mister Miracle - Tom King et Mitch Gerards - DC Comics / Urban Comics * Superman Red Son - Mark Millar et Dave johnson - DC Comics / Urban Comics * Planetary - Warren Ellis et John Cassaday - Urban Nomad / Urban Comics * Watchmen - Alan Moore et Dave Gibbons - DC Comics / Urban Comics Les articles de Comicsblog avec Xavier Guilbert, à consulter pour les chiffres du marché des comics en détails : * Comics en France en 2023 : Ce que nous disent (vraiment) les chiffres du marché * Comics en France en 2023 : Non, le marché n'est pas en péril Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    LES SUPER-HÉROS ONT-ILS ENCORE QUELQUE CHOSE À RACONTER ?

    Play Episode Listen Later May 1, 2024 17:42


    Dans cet épisode, je reviens sur la prétendue lassitude du public envers les super-héros, et je vous parle de mes lectures récentes qui pourraient bien vous donner envie de laisser une nouvelle chance au genre super-héroïque ! Les comics recommandés dans cet épisode : Titans - Tom Taylor et Nicola Scott - DC Comics / Urban Comics E-Ratic - Kaare Andrews - AWA Studios / Black River Doctor Strange : Fall Sunrise - Tradd Moore - Marvel Comics / Panini Comics Demon Days - Peach Momoko - Marvel Comics / Panini Comics The Blue Flame - Christopher Cantwell et Adam Gorham - Vault Comics / 404 Graphic COPRA - Michel Fiffe - Image Comics / Delirium Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    CHUCK NORRIS KARATE KOMMANDOS CHEZ MARVEL COMICS

    Play Episode Listen Later Apr 19, 2024 9:47


    La bande dessinée américaine regorge d'étrangetés et de pépites plus ou moins inattendues. Parmi celles-ci, un pur produit des années 1980 : l'adaptation en comic book du dessin animé Chuck Norris Karate Kommandos, ou les aventures de Chuck Norris chez Marvel Comics ! Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    chez mes marvel comics parmi chuck norris chuck norris karate kommandos
    MES PREMIERS COMICS !

    Play Episode Listen Later Apr 1, 2024 14:45


    Dans cet épisode, je vous parle de mes premiers comics et je vous raconte comment j'ai découvert la bande dessinée américaine au début des années 1990 ! De Strange à Conan le Barbare, en passant par Picsou et les Tortues Ninja, je reviens sur les premières heures de mon parcours de lecteur ! Au programme : nostalgie et anecdotes d'un autre temps ! Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute ! Mes réseaux sociaux. N'hésitez pas à partager cet épisode s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    COPRA : L'APOGÉE DES SUPER-HÉROS !

    Play Episode Listen Later Dec 14, 2023 7:35


    Depuis de nombreuses années, j'ai tendance à dire que tout a été fait en matière d'histoire de super-héros. Et qui aurait pu croire qu'un comic book sorti de nulle part allait me donner tort ? Aujourd'hui, on parle de COPRA par Michel Fiffe. Je ne vais pas y aller par quatre chemins : la série de comics dont je vais vous parler me semble largement sous-estimée de manière générale, et plus particulièrement par les lecteurs français, qui sont totalement passés à côté de la pépite qu'est COPRA. Réparer cette injustice me paraît essentiel, et j'espère que la lecture de cet article vous donnera envie de plonger dans ce qui est sûrement la meilleure chose qui soit arrivée au comic book de super-héros ces derniers temps. Les gens aiment qu'on leur raconte la même histoire encore et encore, autant pour se rassurer en validant leurs propres connaissances que pour mieux s'offusquer d'être pris pour des idiots, et je ne compte plus le nombre de fois où j'ai été confronté à ce paradoxe. D'un côté, une partie du public se plaint de la redondance et du manque d'originalité des comics de super-héros, de l'autre, les tentatives de certains auteurs pour surprendre le lectorat ou sortir des sentiers battus, que ce soit graphiquement ou scénaristiquement, sont souvent victimes de réceptions désintéressées, voire hostiles. Ainsi, les lecteurs et les lectrices qui déplorent l'immobilisme du genre super-héroïque sont aussi souvent ceux qui l'entretiennent, par un fanatisme borné ou bien tout simplement par manque de curiosité. Heureusement, il arrive que des artistes visionnaires fassent prendre au médium des virages novateurs qui définissent de nouveaux standards, sans pour autant renier leur héritage. C'est le cas de Michel Fiffe, né en 1979 à La Havane, qui commence à se faire connaître au début des années 2010 en réalisant de courtes histoires autour de Savage Dragon, le héros de Erik Larsen, chez Image Comics. En 2012, il débute, en autoédition sur son label Copra Press, la publication de COPRA, série dont il est à la fois le scénariste et le dessinateur, qui va rapidement recevoir d'excellentes critiques de la part de la presse et des sites web spécialisés en comic books. En 2014, il écrit les douze numéros de All-New Ultimates de Marvel Comics et travaille ensuite sur Bloodstrike, spin-off de Younglood de Rob Liefeld ; G.I. Joe : Sierra Muerte, une relecture bad-ass de la licence de Hasbro chez IDW ; et réalise plusieurs variant covers pour Valiant Comics et Dark Horse. Le succès de COPRA permettra même aux lecteurs de redécouvrir l'une de ses œuvres de jeunesse, réalisée entre 2005 et 2008 : Panorama, récit mêlant chronique adolescente et body-horror, sélectionnée au Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême en 2022. Dans COPRA, sa création phare, une équipe hétéroclite de mercenaires dotés de super-pouvoirs intervient dans les situations les plus désespérées, et ses membres ne tirent aucun honneur public de leurs actes héroïques. Parmi les agents les plus emblématiques de COPRA, on trouve Lloyd, combattant aguerri et tireur émérite ; Gracie, une ancienne mannequin star de série B, mais aussi athlète confirmée experte en corps-à-corps ; Wir, à la fois geek et ex-délinquant ayant fabriqué une colossale armure hi-tech, véritable arme de guerre ambulante ; Rax, justicier originaire d'une autre dimension et doté d'une tenue lui conférant un pouvoir considérable ; Guthie, une dure à cuire dont la force surhumaine lui permet de tenir tête à des êtres divins ; ou encore Xenia, une jeune femme qui peine à accepter l'étendue de ses pouvoirs occultes. Tous des archétypes, pour ne pas dire des ersatz, de personnages célèbres, mais dont on comprend rapidement que leur fibre super-héroïque est aussi erratique que la cohésion de la troupe qu'ils forment. Après avoir posé le décor, Fiffe prend le temps de développer chaque personnage individuellement, offrant soudainement bien plus de profondeur à des héros et des héroïnes qui semblaient très secondaires au départ. Les membres de COPRA ne sont pas des super-héros. Dans la veine d'une Doom Patrol ou d'une Suicide Squad, les protagonistes de Fiffe sont des gueules cassées et des freaks à mille lieues des justiciers et justicières classiques que l'on retrouve chez les Avengers ou dans la Justice League. Écorchés-vifs ou survivants victimes de leur propre statut, ils sont aussi très différents les uns des autres, pour ne pas dire incompatibles les uns avec les autres. Pourtant, Fiffe réussit avec beaucoup de talent à articuler leurs relations et met en place une dynamique de groupe tout à fait efficace, ce qui reste un exercice complexe, même pour des auteurs confirmés travaillant chez Marvel ou DC Comics. Fiffe mélange, puis avale d'un seul bloc une quantité phénoménale de références, les digère, les régurgite et nous les renvoie à la face sans sommation. Dans COPRA se côtoient les explosives visions cosmiques de Jack Kirby, le mysticisme misanthropique de Steve Ditko, et la fureur graphique de Frank Miller, pour un résultat qui ne cesse de gagner en qualité au fur et à mesure des numéros, l'artiste affinant peu à peu son propre style pour créer des scènes toujours plus spectaculaires et brillantes dans leur conception. Certains personnages, notamment ses super-vilains, arborent des looks aussi déstructurés qu'improbables, qui défient les lois de la géométrie et de la physique de notre monde réel. Des transgressions permises par la bande dessinée, et pourtant rarement osées par les dessinateurs des publications mainstream. Grâce à ce parfait amalgame d'influences, nourrit de près d'un siècle de comics de super-héros, COPRA peut revendiquer être l'apogée du genre, mais aussi du format comic book, car Fiffe, dans son découpage, joue autant avec le fond qu'avec la forme standardisée des planches pour pousser la narration graphique à un niveau bien trop rare dans la bande dessinée américaine. Étant fan de comics depuis mon plus jeune âge, j'y vois un véritable accomplissement. Comme si le créateur derrière cette BD avait su capter tout ce qu'on aime dans les histoires de super-héros et l'avait porté à maturation pour en donner sa propre version : plus folle, plus dure, et parfois pratiquement extatique. Ce n'est pas très étonnant, dans le sens où, en tant que fils d'immigrés cubains, Fiffe s'est lui-même servi de ses lectures de jeunesse pour s'imprégner de la culture des États-Unis, ce qui, par certains aspects, rejoint la façon dont nous sommes nous-mêmes, en France, exposés au soft power américain et marqués par ses codes les plus forts depuis notre plus tendre enfance. C'est finalement l'une des grandes forces de COPRA : ne pas tenter de singer les classiques en espérant rivaliser avec eux, mais bel et bien proposer une vision nouvelle, par un auteur qui a lui-même dû trouver sa place dans un système qui n'était absolument pas le sien à l'origine. Et si l'incomparable style graphique de Fiffe demandera peut-être un petit temps d'adaptation à une partie des lecteurs, l'effort minime pour accéder à son univers sera rapidement récompensé. Si des pierres angulaires de la bande dessinée de super-héros telles que Watchmen pouvaient déjà être vues comme un couronnement du genre, COPRA compte indéniablement parmi les quelques modèles qui incarnent l'aboutissement moderne de la formule, dont il irradie un amour viscéral hyper-communicatif. Un point culminant qui n'est peut-être que temporaire, mais qui, malgré sa coriace confidentialité auprès du grand public, saura sans aucun doute marquer les esprits des auteurs de demain qui feront évoluer les récits super-héroïques vers de nouveaux horizons. Pour faire simple : si vous trouvez que les comics de super-héros d'aujourd'hui sont mauvais, c'est peut-être tout simplement parce que vous ne lisez pas les bons ! Si vous voulez découvrir COPRA, rendez-vous sur le site de Delirium ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    ROM : LE JOUET DE MARVEL COMICS !

    Play Episode Listen Later Dec 1, 2023 11:11


    Une figurine futuriste qui devient contre toute attente la star d'un comic book ?  Aujourd'hui, on parle de ROM, le chevalier de l'espace ! Les super-héros de la bande dessinée américaine et les produits dérivés, c'est une vieille histoire. Dès 1940, soit deux ans après sa première apparition dans Action Comics #1, Superman a droit à une adaptation en feuilleton radiophonique, mais également à une figurine à son effigie, produite par la société Ideal ! Si cette poupée de bois dotée d'une cape en tissu est simpliste, pour ne pas dire rustique, dans sa conception, elle reste cependant la première figurine de super-héros jamais fabriquée à grande échelle. Dans les années 1960, les avancées technologiques permettent de concevoir des jouets toujours plus perfectionnés. C'est notamment le cas avec les G.I. Joe de Hasbro, considérés comme les premières action figures, qui vont révolutionner le monde du jouet avec leurs poses réalistes et leurs accessoires inspirés d'armes ou de véhicules bien réels. Du côté des héros de comic books, le fabricant américain Mego obtient, en 1971, à la fois les droits des personnages de Marvel et de DC Comics et produira plusieurs dizaines de poupées articulées qui font aujourd'hui le bonheur des collectionneurs. Dès lors, les super-héros ne quitteront plus les magasins de jouets, de la gamme Secret Wars de Mattel en 1984, aux figurines Batman de Kenner surfant sur le succès de ses adaptations au cinéma ou de la série animée de Bruce Timm, en passant par les figurines de Toy Biz, tirées des séries animées consacrées à Spider-Man ou aux X-Men, dans les années 1990. Mais, comme vous pouvez l'imaginer, au milieu de ces réussites, on trouve aussi quelques tentatives plus ou moins fructueuses de faire cohabiter héros de plastique et héros de papier… C'est notamment vrai pour ROM the Space Knight, initiative commune de la société Parker Brothers et de Marvel Comics lancée en 1979. Si le personnage jouit encore aujourd'hui d'une forte popularité ; entretenue par une fanbase restreinte, mais fidèle ; son histoire reste un cas à part qui mérite d'être raconté. À l'orée des années 1980, les jouets embarquant de l'électronique ont le vent en poupe. Espérant surfer sur ce courant naissant, Scott Dankman, Richard C. Levy, et Bryan L. McCoy imaginent une figurine de robot à l'aspect humanoïde dotée d'effets sonores et lumineux qu'ils nomment COBOL, en référence au langage de programmation informatique du même nom. La société Parker Brothers, jusqu'alors spécialisée dans les jeux de société et derrière des licences connues de tous, comme le Cluedo ou le Monopoly, voit dans ce jouet ultramoderne l'occasion de conquérir un nouveau marché. Après avoir retravaillé le design et changé le nom en ROM ; acronyme de Read-Only Memory, sonnant bien mieux pour le grand public ; Parker décide de lancer la production de cette figurine en ménageant les coûts, afin d'éviter de perdre trop d'argent si le succès n'est pas au rendez-vous. Résultat : les économies et le manque d'expérience de Parker Brothers dans ce domaine font de ROM une figurine aussi avant-gardiste qu'imparfaite. Si elle est la première à embarquer autant d'électronique, proposant des fonctionnalités inédites pour l'époque, elle est également de conception assez médiocre, ce qui lui vaudra le droit d'être durement critiquée dans Time Magazine, qui annonçait qu'elle finirait rapidement sous un canapé, au milieu des moutons de poussière… Cachant une pile 9 volts dans son réacteur dorsal, ROM possède deux LED rouges à la place des yeux, un respirateur électronique produisant des “sons réalistes”, mais aussi trois accessoires lumineux : un analyseur, un traducteur et un neutraliseur, chacun ayant son utilité, bien entendu. Possédant autant de points d'articulation qu'une poupée Barbie, ROM sera intégré à la gamme Action Man de Palitoy au Royaume-Uni, mais peinera à se faire une place sur le marché américain. Avec moins de trois-cent-mille exemplaires vendus, Parker considérera cette incursion dans le monde de la figurine articulée comme un échec et abandonnera définitivement la ligne, sans jamais l'avoir étendue. Si McCoy rejette la responsabilité de ce fiasco sur le packaging peu accrocheur et la mauvaise communication de Parker Brothers, on ne peut pourtant pas reprocher à l'entreprise qui distribuait à cette époque le célèbre Scrabble, de ne pas avoir tout tenté pour promouvoir son robot. Car, si le jouet n'a pas su séduire les enfants, il n'en va pas de même pour la bande dessinée produite de décembre 1979 à février 1986 par Marvel Comics, à la demande de Parker. Quelques mois plus tôt, Bill Mantlo a convaincu l'éditeur en chef de Marvel Comics, Jim Shooter, d'acquérir la licence des jouets Micronauts, commercialisés aux États-Unis par Mego, pour en tirer une série de comic book. Dessinée par Michael Golden, Micronauts va connaître cinquante-neuf numéros et recevra le prix Eagle Award de la meilleure nouvelle série lors de la British Comic Art Convention de 1979. Considéré par Shooter comme apte à donner vie aux jouets dans des bandes dessinées, Mantlo, connu pour être le co-créateur de Rocket Racoon et de Cloak & Dagger, se voit donc octroyer le poste de scénariste sur ROM, tandis que le dessinateur Sal Buscema, qui a notamment œuvré sur Avengers ou Hulk, se charge de la partie graphique. Pour assurer la promotion de la figurine hi-tech de Parker, Bill Mantlo va devoir créer tout un background en partant de pratiquement rien. En premier lieu, ROM n'est plus un simple robot, mais plutôt un cyborg, un être vivant d'apparence humaine transformé en machine ultra perfectionnée. Issu de la rayonnante et très avancée civilisation Galadorienne, ROM est un chevalier de l'espace, chargé de pourchasser les Spectres Noirs, des créatures métamorphes dissimulées parmi les différentes populations de notre univers. Révélés par l'analyseur du champion de Galador, ces Spectres Noirs, ou Dire Wraiths en version originale, sont ensuite bannis dans une autre dimension grâce à son neutraliseur, tandis que son traducteur lui permet d'échanger avec les différents individus qui croisent son chemin. Vous l'avez compris, Bill Mantlo use des maigres éléments qui accompagnent la figurine articulée de Parker Brothers pour monter de toutes pièces une intrigue digne d'un film de science-fiction produit en plein maccarthysme. Heureusement pour nous, cette chasse aux créatures maléfiques infiltrées est loin d'être aussi simpliste que l'on pourrait le croire. Premièrement, la nature des Spectres Noirs, révélée par l'analyseur de ROM, reste totalement inconnue des humains. Ainsi, à leurs yeux, le justicier paré de chrome n'est ni plus ni moins qu'un extraterrestre impitoyable, exécutant leurs semblables en les désintégrant. Le Galadorien est donc considéré comme une menace par la presse, mais aussi par les autres héros Marvel qu'il va croiser au fil de ses aventures, comme Namor, Shang-Chi, ou encore le duo formé par Power Man et Iron Fist. Si cette intégration totale du personnage à l'univers de la Maison des Idées finira par se révéler problématique, elle permet dans un premier temps de donner beaucoup de relief à ROM. S'il est un cyborg bardé de gadgets électroniques, prétendument inarrêtable et indestructible, Mantlo et Buscema vont s'évertuer à entretenir un certain mystère autour de ses origines, en distillant les informations de façon sporadique, mais aussi à le mettre très souvent en mauvaise posture. La tension qui résulte de ces péripéties, associée au statut du personnage ; différent de celui des super-héros Marvel plus classiques, pour lesquels on ne s'inquiète déjà plus vraiment à l'époque ; accroît significativement l'attachement du lecteur pour ROM, ce qui participera assurément à la longévité de la série. Avec le temps, le ton devient plus adulte, le protagoniste plus violent, et l'ambiance beaucoup plus lourde, voire horrifique, si bien qu'en France, dans les pages du mensuel Strange, où elle est publiée depuis le numéro 133 en 1981, la série ROM sera souvent censurée et retouchée pour ne pas attirer les foudres du comité de censure des publications destinées à la jeunesse. Outre des thématiques tournant autour du rôle messianique du héros, de son sens du sacrifice et de la façon dont il est rejeté par ceux qu'il vient protéger, la série Marvel abordera également l'humanité perdue de son personnage principal, son sens du devoir et des responsabilités, et plus globalement la question du vivre-ensemble. Avec soixante-quinze numéros au total ; dont les derniers seront dessinés par Steve Ditko, l'un des artistes majeurs de Marvel Comics ; ROM est un parfait exemple de la façon dont la Maison des Idées a su miser sur de nombreuses licences, plus ou moins prometteuses, durant les décennies 70, 80 et 90. Après La Planète des Singes et Star Wars, et avant les G.I. Joe, les Transformers, les Sectaurs, les Dino Riders, l'Agence tous risques, Indiana Jones, Barbie, Alf, les Power Rangers, ou même les Bisounours, la série de Bill Mantlo et Sal Buscema s'inscrit dans une longue tradition de publications Marvel exploitant des marques pour des durées plus ou moins longues. Ce qui est remarquable avec ROM, c'est que le comic book aura longtemps survécu à la figurine dont il devait faire de la réclame et lui aura même créé tout un univers, ce que Parker n'avait pas su faire pour vendre son jouet. Car, le fabricant de jeux de société n'avait sûrement pas compris que, bien au-delà des sons et des lumières, c'est avant tout à l'imagination des enfants qu'il faut savoir faire appel pour leur donner envie de jouer. Aussi, leur robot raide comme la mort pouvait bien s'époumoner dans son respirateur, et épuiser la totalité de sa pile 9 volts en clignotant par toutes les extrémités, jamais cela n'aurait pu égaler toute la créativité des artistes qui se sont investis pour donner du corps et de l'esprit à ce bonhomme en plastique. En 1991, Parker est racheté par Hasbro, qui cédera la licence à l'éditeur IDW Publishing, aux côtés d'autres célèbres marques de jouets lui appartenant, comme M.A.S.K., Transformers ou G.I. Joe. Une nouvelle série de comics, lancée en 2016, va devoir réécrire toute la mythologie du personnage, car si le héros est bien la propriété de Hasbro, tout le lore développé par Bill Mantlo appartient à Marvel Comics. Pendant très longtemps, cet imbroglio juridique va rendre impossible toute réimpression des épisodes de ROM publiés par Marvel, mais également des numéros d'autres séries de l'éditeur dans lesquels le chevalier de l'espace faisait une apparition. Un casse-tête éditorial qui prend fin en 2023, quand Marvel trouve un accord avec Hasbro, et annonce dans la foulée la ressortie de la série en format omnibus, avec un premier volume compilant les vingt-neuf premiers numéros, dont la sortie est prévue pour janvier 2024. Le Time Magazine a eu tort, on se souvient encore de ROM, le chevalier de l'espace. Peut-être pas autant que de Goldorak ou de Musclor, et plus comme d'un héros de comics que comme d'un jouet novateur un peu trop en avance sur son temps, mais il n'a pas disparu. Et c'est très certainement en partie grâce au travail de Bill Mantlo et Sal Buscema. Gravement blessé après avoir été renversé par un chauffard, jamais identifié, en 1992, Bill Mantlo aura attendu de nombreuses années, et la sortie des Gardiens de la Galaxie au cinéma en 2014, pour recevoir la reconnaissance que lui devait Marvel Comics. À l'heure ou ROM revient sur le devant de la scène, s'offrant à une nouvelle génération de lecteurs et apportant avec lui rumeurs et bruits de couloir autour d'éventuels projets d'adaptations au cinéma, espérons que les éditeurs, les studios, mais aussi le public, sauront faire preuve d'un peu moins d'ingratitude à l'égard de ceux qui ont modelé son univers. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! 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    LA PREMIÈRE SUPER-HÉROÏNE DE COMICS ET SON ÉTRANGE CRÉATEUR !

    Play Episode Listen Later Nov 24, 2023 11:06


    L'Histoire de la bande dessinée américaine fourmille d'anecdotes plus ou moins inattendues, mais l'histoire que je vais vous raconter compte incontestablement parmi les plus bizarres qu'il m'ait été donné d'entendre. Aujourd'hui, on parle de Fletcher Hanks et de ses créations à la limite du surréalisme… Avec la sortie du premier numéro de Action Comics en 1938, la bande dessinée américaine connaît un véritable cataclysme. Superman, le premier super-héros moderne, est un succès éditorial instantané et le format comic book s'impose définitivement dans les kiosques. Si les créateurs de l'Homme d'Acier, Jerry Siegel et Joe Shuster, auront bien du mal à faire reconnaître leurs droits sur le personnage et la pléthore de produits dérivés qui en seront tirés, ils n'en sont pas moins à l'origine d'une tendance qui va faire des émules. Les gamins veulent des justiciers costumés dotés de super pouvoirs ? Et bien, on va leur en donner ! En l'espace de quelques semaines, tous les éditeurs ou presque se mettent à commander aux artistes qui travaillent pour eux des histoires de super-héros. Et si Batman, Wonder Woman, The Flash, Captain Marvel ou Namor the Sub-Mariner sont parvenus jusqu'à nous, parfois au prix de changements drastiques, vous vous doutez bien qu'une bonne partie des créations de l'époque n'ont pas connu la même longévité. Si Black Cat, Green Lama, Doll Man, Black Terror ou Blue Bolt n'ont pas autant marqué l'histoire des comics que Captain America ou Green Lantern, et ce malgré quelques tentatives isolées de les réanimer, il existe d'autres personnages, bien plus exotiques encore, que le grand public a totalement oublié aujourd'hui. Parmi les proto-super-humains des comic books, la justicière Fantomah est tout à fait remarquable. Apparue dans Jungle Comics #2 en février 1940 sous la plume d'un dénommé Barclay Flagg, chez l'éditeur Fiction House, Fantomah est parfois considérée comme la véritable première super-héroïne, devançant ainsi la célèbre Wonder Woman de William Moulton Marston et Harry G. Peter, apparue dans All-Star Comics #8 en octobre 1941. Cette réputation reste largement sujette à débat, étant donné que Fantomah n'est ni la première protectrice de la jungle ; Rima the Jungle Girl étant apparue bien avant elle ; ni la première à posséder sa propre série, ce titre revenant à Sheena, Queen of the Jungle ; ni le premier personnage féminin à posséder un semblant de super pouvoirs, L'Oiselle du français René d'Anjou ayant pris son envol dès 1909. Si Fantomah peut prétendre à ce statut, c'est parce qu'elle est le premier personnage féminin apparu directement dans une bande dessinée américaine à englober plusieurs caractéristiques super-héroïques, comme des pouvoirs surhumains paranormaux ou une transformation physique comparable à une sorte d'identité secrète. Bien que ses aventures ne soient pas précisément localisées, l'héroïne défend son royaume, très largement fantasmé, de pilleurs occidentaux malintentionnés, abattant son courroux sur ceux qui voudraient profaner son sauvage sanctuaire. À la découverte des surprenantes aventures de Fantomah, on serait en droit de se demander pourquoi son créateur, Barclay Flagg, n'est pas resté dans l'histoire comme Jack Kirby, Stan Lee, ou Will Eisner. Et bien, tout simplement parce que Barclay Flagg n'existe pas. Il s'agit en fait de l'un des nombreux pseudonymes utilisés par l'un des plus mystérieux auteurs de comics du XXe siècle : Fletcher Hanks. Pendant des décennies, Fletcher Hanks est resté l'une des plus grandes énigmes de la bande dessinée américaine, jusqu'à ce que l'auteur Paul Karasik ne se lance dans une incroyable enquête qui l'a mené jusqu'à rencontrer le fils du dessinateur, Fletcher Hanks Jr., au début des années 2000. Ainsi, tout ce que l'on sait, ou presque, de Fletcher Hanks est issu du témoignage de son fils. Né en 1887, Fletcher Hanks grandit à Oxford, dans le Maryland, dans un environnement rude et violent. Gâté par sa mère, qui lui paie des cours de dessin par correspondance, Fletcher gagne sa vie en peignant des fresques chez de riches clients du coin, mais dépense tout son argent dans l'alcool, au détriment de sa famille, allant jusqu'à participer à des beuveries qui s'avérèrent mortelles pour certains de ses camarades de boisson ! Mari violent et père de quatre enfants, Hanks abandonne le domicile conjugal vers 1930, dérobant au passage les économies de son fils de 12 ans... Fletcher ne refait surface qu'en 1939, en tant que dessinateur de comic book et créateur de Stardust, chez Fox Features Syndicate. Stardust the Super Wizard, apparu dans Fantastic Comics #1 en décembre 1939, met à l'amende pratiquement tous les autres super-héros de la bande dessinée américaine. Personnage mesurant au moins deux mètres cinquante de haut, omniscient, omnipotent, invulnérable, et doté d'une interminable liste de super-pouvoirs défiants toutes les lois de la physique, s'allongeant au fil des épisodes selon les envie de Hanks, ce surhomme venu d'une lointaine planète apparaît dans le ciel pour venir faire triompher la justice dans un monde gangréné par la trahison et la corruption. Dès les premiers épisodes de Stardust, on voit en filigrane les différentes obsessions de Fletcher Hanks, à travers des thématiques qui reviendront inlassablement dans pratiquement chacune de ses histoires : sa véritable fixation autour de la figure du traître ; qui porte généralement ce vice jusque dans ses traits physiques, à la limite de la difformité ; mais aussi la punition impitoyable et systématique de ces derniers par un justicier tout-puissant. Les univers développés par Hanks, sous couvert de pas moins d'une dizaine de pseudonymes, sont un mélange d'extravagance régressive et de concepts pseudo-scientifiques paradoxalement en avance sur leur temps. Ainsi, son univers de science-fiction très pulp, ouvertement inspiré du Flash Gordon de Alex Raymond, présente autant d'appareils de télécommunication avant-gardistes que de martiens grotesques, tout droit sortis d'un cartoon. Ceci est particulièrement visible dans son autre création présente au sommaire du premier numéro Fantastic Comics, Space Smith, qu'il signe cette fois-ci sous le nom de Hank Christy. Un aventurier de l'espace, accompagné de son assistante Dianna, qui vit diverses aventures plus ou moins hallucinées dans un cosmos totalement chimérique. Il utilisera une recette très similaire pour son personnage de Whirlwind Carter, dans Daring Mystery #4, en mai 1940 chez Timely Comics, qui bien que n'ayant eu droit qu'à deux aventures, a tout de même la particularité d'être considéré comme un personnage de l'univers Marvel. Parmi les autres héros de Fletcher Hanks, on compte Big Red McLane, apparu dans Fight Comics #1 en janvier 1940, et dont il signe alternativement les épisodes Chris Fletcher ou Charles Netcher, une série mettant en scène des bagarres de bûcherons, sans doute assez proche de l'ambiance de sa vie à Oxford. Ici, il est de nouveau question de traîtrise et de brigandage, mais dans le monde du bûcheronnage qui, convenons-en, est assez inhabituel dans les comic books. Toujours en janvier 1940, Hanks, sous le pseudo de Henry Fletcher, dessine Tabu, Wizard of the Jungle, dans Jungle Comics #1, une sorte de proto-Animal Man, capable d'imiter les animaux. On retrouve plusieurs similitudes entre Tabu et Fantomah, dont la première aventure est publiée le mois suivant. Pinacle de l'exotisme : dans le deuxième numéro de Planet Comics, en février 1940, on découvre l'unique épisode de Tiger Hart, un guerrier vivant sur Saturne, une planète qui se révèle être similaire à la Terre au Moyen-Âge. Là encore, le décor est aussi fantastique que fantasmé, gloubi-boulga de mythes chevaleresques et de fantasy pulp. Parfois comparés à de l'art brut et empreints de surréalisme, sans pour autant pouvoir être rattachés à ce courant, mais aussi influencés par Chester Gould, le créateur de Dick Tracy, les travaux de Fletcher Hanks sont facilement reconnaissables grâce à son style graphique si particulier, ce qui aura justement permis de les regrouper, malgré ses multiples alias. Si son trait peut être jugé naïf et très cru, Hanks a pourtant suivi une formation au cours de laquelle il a démontré son talent pour le dessin. On peut donc supposer que le rendu visuel de ses productions n'a rien d'un hasard. Sans doute pensait-il, en partie à raison, que ces bandes dessinées s'adressaient aux enfants, et donc qu'elles devaient être simplistes pour être comprises par les plus jeunes. Il en va de même pour ses récits, souvent alambiqués, dans lesquels il expose une vision très personnelle des châtiments qui doivent être réservés à des malfaiteurs dont la fourberie n'a souvent d'égal qu'une manifeste débilité. Les méchants sont des traîtres perfides qui n'ont pour seule motivation que la destruction du monde ou l'enrichissement personnel, tandis que les héros sont des êtres supérieurs invincibles, quasi-divins, fléaux implacables anéantissant les scélérats, non sans les avoir humiliés au passage. Il est intéressant de souligner que Fletcher Hanks faisait tout lui-même, du scénario à la colorisation, avec un rythme de travail visiblement soutenu, et rendait ses travaux dans les temps, ce qui plaisait bien évidemment beaucoup aux éditeurs. On aurait pu croire que l'artiste derrière la première super-héroïne de la bande dessinée américaine était un homme conscient des problèmes de son temps, mais, à en croire le témoignage de son fils, Fletcher Hanks était un sale type. Après un dernier épisode de Stardust, dans Big Three Comics #2, paru durant l'hiver 1941, il disparaît du jour au lendemain de l'industrie des comic books, exactement comme quand il avait abandonné sa famille des années auparavant. S'il subsiste quelques traces de ses activités à Oxford à la fin des années 1950, on ne sait pratiquement rien du reste de la vie de Fletcher Hanks, retrouvé mort de froid en 1976 sur un banc public à New-York. Passé de vie à trépas dans la solitude et la misère, Hanks a peut-être finalement été lui-même victime de la fatalité qui s'abattait sur les crapules que combattaient ses héros. Considéré par certains comme le “Ed Wood des comics”, avec seulement une cinquantaine d'histoires à son actif, Fletcher Hanks, ou Barclay Flagg, ou Henry Fletcher, reste un artiste dont les travaux, remplis de colosses surpuissants et de vilains difformes, témoignent d'une époque où il n'existait aucune norme, ni pratiquement aucun code, pour les comics de super-héros. Il en résulte des illustrés primitifs, aussi cruels que candides. Le tardif regain d'intérêt pour ses travaux ; initié notamment par Jerry Moriarty, professeur à la School of Visual Arts de New-York et grand collectionneur, puis par Art Spiegelman, qui a réédité une histoire de Stardust the Super Wizard dans sa revue RAW en 1980 ; a mené l'artiste Paul Karasik à approfondir le parcours de Fletcher Hanks et à compiler son œuvre au cours d'un fastidieux travail de recherche. L'absence de témoins survivants de l'époque et la carrière éclair de Hanks, auxquels il faut ajouter le peu de souvenirs que Fletcher Hanks Jr. avait de son père, n'ont pas facilité sa démarche, mais Karasik est parvenu à publier plusieurs ouvrages chez Fantagraphics, en 2007 et en 2009, puis Turn Loose Our Death Rays and Kill Them All ! The Complete Works of Fletcher Hanks en 2016, disponible en français aux éditions Actes Sud, qui m'a été très précieux pour vous raconter cette histoire. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    JACK KIRBY ET LES AVENTURES OUBLIÉES DE GREEN ARROW

    Play Episode Listen Later Nov 10, 2023 11:01


    Si je vous demande de penser à un super-héros de chez DC Comics, il y a fort à parier que Batman, Superman ou Wonder Woman vous viendront à l'esprit avant Green Arrow. Aujourd'hui, on parle justement des aventures de Green Arrow par Jack Kirby, qui n'ont pas du tout plu à DC Comics ! La période séparant l'Âge d'Or de la bande dessinée américaine de l'Âge d'Argent est aussi riche que troublée. Après la Seconde Guerre mondiale, les ventes des titres mettant en scène super-héros et super-héroïnes déclinent aux États-Unis. Les justiciers costumés n'ont plus la côte, et le genre super-héroïque, jusqu'alors prédominant, est peu à peu remplacé par d'autres. La romance, l'horreur, le western et la science-fiction évincent les ersatz de Superman et de Batman des kiosques à journaux, tandis que leurs modèles peinent à garder la tête hors de l'eau, et que les artistes doivent s'adapter pour continuer à gagner leur croûte. Dès 1947, Joe Simon et Jack Kirby, déjà derrière la création de Captain America, avaient pressenti la transmutation du marché avec leur titre Young Romance, présentant des aventures sentimentales prétendues réelles, participant grandement à l'évolution des tendances. Mais s'estimant de plus en plus spoliés par les éditeurs, Simon et Kirby décident de lancer leur propre maison d'édition, Mainline Comics, en 1953. Au programme : quatre titres surfant chacun sur un grand courant de l'époque. Malheureusement pour eux, ils ont assurément choisi le pire moment possible pour initier leur projet. À partir de 1950, l'éditeur EC Comics, avec à sa tête Bill Gaines, s'est engagé dans une surenchère d'horreur gore et de violence morbide pour attirer les jeunes lecteurs en manque de sensations fortes, appâtés par des couvertures toujours plus choquantes. Généralement accolées à un discours politique et social, certes implicite, mais extrêmement critique envers la fameuse “American way of life”, les histoires de EC Comics deviennent pour certains et certaines l'incarnation du danger représenté par la bande dessinée, qui pervertirait la jeunesse en la poussant au crime. La panique morale autour des comics de crimes et d'horreur, entretenue par des figures publiques comme le politicien Estes Kefauver et le psychiatre Fredric Wertham, devenu célèbre chez les fans de super-héros pour son livre Seduction of the Innocent, mènera à la création du Comics Code Authority, et surtout à une crise éditoriale majeure, qui verra disparaître près des deux tiers des bandes dessinées publiées à l'époque. Et qui dit moins de comics commercialisés dit moins de travail pour les imprimeurs et les distributeurs. Ce marché fragilisé, dont les différents acteurs font faillite les uns après les autres, couplé à des soucis juridiques avec leur précédent employeur, Crestwood Publications, forcera Jack Kirby et Joe Simon à baisser le rideau de Mainline en 1956, avec seulement quelques publications concrètes au compteur. Cet échec aura épuisé les deux artistes sur tous les plans et émoussé leur longue et solide collaboration. Tandis que Joe Simon décide de quitter le monde du neuvième art pour celui de la publicité et de la presse magazine, Jack Kirby rejoint les rangs de National Comics, qui deviendra DC Comics, avec une toute nouvelle série de science-fiction : Challengers of the Unknown. Une série souvent attribuée au seul génie de Kirby, mais sans doute nourrie de ses derniers échanges avec Joe Simon, et également des idées du scénariste Dave Wood, l'un des créateurs de Animal Man. 1956 est une année charnière pour le genre super-héroïque, la banqueroute de Mainline coïncidant fortuitement avec le retour des héros costumés sur le devant de la scène, en partie à l'initiative de DC Comics. Dans le quatrième numéro du périodique Showcase, l'éditeur présente une nouvelle version de son bolide écarlate, The Flash. Le succès est au rendez-vous, et si le retour en grâce des surhommes costumés va prendre encore quelques années, DC va amorcer un rafraîchissement créatif et éditorial de plusieurs de ses super-héros, dont bon nombre sont cantonnés à des anthologies comme World's Finest, Adventure Comics ou More Fun Comics, faute d'intérêt du lectorat. C'est notamment le cas de Green Arrow, présent à la fois au sommaire de World's Finest Comics depuis 1941 et de Adventure Comics depuis 1946. Il faut dire que le personnage, loin d'avoir rencontré le succès d'un Batman ou d'un Superman, n'a jamais eu droit à une publication à son nom, et a moins souvent l'honneur d'être représenté en couverture. Créé en 1941 par le scénariste Mort Weisinger et le dessinateur George Papp dans les pages de More Fun Comics #73, ce héros à gadget, expert en archerie, s'inspire à la fois de Batman, de Robin des Bois et du serial The Green Archer, diffusé dans les cinémas américain à partir de 1940. C'est dans More Fun Comics #89, publié en 1943, que les origines de Green Arrow et de son sidekick adolescent Speedy nous sont racontées pour la première fois. Oliver Queen, collectionneur d'armes et d'objets des peuples natifs américains, rencontre Roy Harper, un jeune orphelin élevé par une tribu amérindienne isolée après un crash d'avion dont il est le seul survivant. Après avoir déjoué les plans de pilleurs d'antiquités, nos deux héros, tous deux archers accomplis, décident de faire équipe pour combattre le crime, finançant leur croisade avec l'or d'un trésor qu'ils ont découvert dans la réserve indienne. Une origin story qui n'a pas grand-chose à voir avec celle que nous connaissons actuellement, mais on va y revenir. En 1946, le personnage et son acolyte sont transférés de More Fun Comics à Adventure Comics, où son co-créateur George Papp dessinera pendant de nombreuses années ses aventures, accompagné du scénariste Ed Herron, notamment considéré comme le créateur de Red Skull dans les pages de Captain America. Seulement, en 1958, quand George Papp succède à John Sikela au dessin sur Superboy, Green Arrow se trouve dépourvu de dessinateur attitré. L'éditeur Jack Schiff, connaissant les capacités de productions de Jack Kirby sur Challengers of the Unknown, lui propose de reprendre le titre. Kirby n'a alors jamais lu une seule aventure de Green Arrow, mais il a besoin d'argent, alors il accepte et lit quelques épisodes fournis par Schiff pour se faire une idée. Peu convaincu par les illustrés en question, Jack Kirby se dit qu'il pourra quand même faire quelque chose du personnage, pour peu qu'on lui laisse un peu de liberté. Et si cela va s'avérer beaucoup plus difficile qu'il le croit, l'artiste va quand même donner un sacré coup de jeune à Oliver Queen. La première histoire de Green Arrow dessinée par Kirby paraît dans Adventure Comics #250, durant l'été 1958. Écrite par Bill Finger, le co-créateur de Batman, “The Green Arrows of the World” nous permet de découvrir que l'archer vert n'est pas le seul justicier à utiliser un arc et des flèches, bien au contraire. Ayant fait des émules partout sur la planète, Oliver Queen reçoit la visite de différents homologues venus du Japon, de France, ou encore du Mexique. Il y a là un recyclage évident d'une thématique déjà exploitée par Batman quelques années plus tôt, notamment avec l'épisode intitulé “Batmen of All-Nations”, publié en 1955. C'est à partir du numéro suivant, avec “The Case of the Super-Arrows”, que la patte de Jack Kirby commence réellement à se faire sentir. Flèche Verte et Speedy s'y aventurent sur un territoire jusqu'alors rarement exploré au cours de leurs péripéties, celui de la science-fiction. Durant onze épisodes ; écrits alternativement par Ed Herron et Dave Wood, et largement enrichis par les idées de Jack Kirby ; le personnage de Green Arrow s'éloigne peu à peu de l'univers dans lequel il macère depuis sa création pour explorer d'autres mondes et d'autres dimensions, comme dans l'histoire “Prisoners of Dimension Zero”, dont la publication en deux parties est plutôt avant-gardiste pour l'époque. Avec “Green Arrow's First Case”, dans Adventure Comics #256, Jack Kirby et Ed Herron revisitent les origines du super-héros de Star City, oubliant son côté Robin des Bois et son rapport plus que discutable aux natifs américains pour en faire une sorte de Robinson. Désormais, le playboy milliardaire Oliver Queen est devenu Green Arrow après être tombé par-dessus bord lors d'un voyage dans les mers du Sud. Parvenant à atteindre Starfish Island, un îlot vierge et hostile, Oliver y survit en recyclant ses anciens vêtements pour se confectionner un équipement et devient un excellent archer à force d'entraînement. Il utilise alors la végétation pour se fabriquer une nouvelle tenue, ce qui permet de justifier la couleur verte de son accoutrement de vigilant masqué une fois revenu à la civilisation. Il y a quelque chose de particulièrement symbolique dans cette nouvelle origin story, où un jeune occidental fortuné quitte son costume pour renouer avec la nature et repartir à zéro autant humainement que socialement. Certes, la recette n'est pas des plus surprenantes, mais ça sonne toujours mieux que de s'enrichir en volant le patrimoine amérindien, si bien que cette version restera la base de toutes les réécritures suivantes, jusqu'à aujourd'hui. Contrairement à ce à quoi on pourrait s'attendre, les responsables éditoriaux de DC Comics ; Mort Weisinger, le co-créateur de Green Arrow, en tête ; n'apprécient pas du tout l'approche de Jack Kirby. Pour eux, le personnage n'a rien à faire dans des récits de science-fiction et, pour d'obscures raisons, ils préfèrent visiblement conserver son statut de "sous-Batman avec un arc". Kirby se fâche finalement avec Jack Schiff, pour une sombre histoire autour du strip Sky Masters, publié dans la presse, et c'est Lee Elias, connu pour ses provocantes couvertures gores chez Harvey, qui le remplace pour dessiner Green Arrow. Jack Kirby retourne chez Atlas, qui prendra très bientôt le nom de Marvel Comics, et ne remettra plus les pieds chez DC Comics avant 1970, pour développer son Quatrième Monde dans des séries comme Superman's Pal Jimmy Olsen, New Gods, ou Mister Miracle, y réutilisant notamment des concepts esquissés dans ses épisodes de Green Arrow. À partir de 1961, avec Stan Lee et Steve Ditko, Kirby va œuvrer à la création de pratiquement toutes les figures majeures de l'univers Marvel, qui continuent de nos jours à vivre moult aventures sur le papier et remplissent les salles de cinéma de blockbuster en blockbuster, depuis plus de deux décennies. L'artiste s'en donnera à cœur joie dans les pages des Fantastic Four ; sorte d'évolution super-héroïque des Challengers de l'Inconnu ; ou de Thor, dans lesquelles la célèbre "Méthode Marvel" de Stan Lee lui laissera une très grande autonomie créative. Que seraient devenus Green Arrow et l'univers DC à l'orée du Silver Age si le Roi des Comics était resté chez l'éditeur ? Se souviendrait-on d'Oliver Queen autrement que comme d'un second couteau utilisant des flèches-gadgets un brin kitsch ? Malgré les travaux de Neal Adams et Dennis O'Neil, de Mike Grell, Phil Hester, Kevin Smith, Jock, ou Jeff Lemire, et la longévité non négligeable de la série télévisée Arrow de la CW, l'archer vert reste, encore de nos jours, loin derrière la sainte trinité de DC comics en termes de renommée et d'impact sur la culture populaire. Pourtant, découvrir, ou redécouvrir, les aventures de Green Arrow, c'est aussi traverser les différentes périodes de l'histoire des comic books et en appréhender les tentatives et les tendances sous un autre jour. Une expérience que je vous recommande si vous voulez ajouter une corde à votre arc ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    QUAND CHAIR DE POULE MÉPRISAIT LES FANS DE COMICS...

    Play Episode Listen Later Oct 31, 2023 9:57


    Chair de Poule est une licence mythique pour beaucoup de lecteurs passionnés d'horreur, mais vous souvenez-vous de la fois où la série de livres de R.L. Stine s'est attaquée aux fans de super-héros ? Aujourd'hui, on parle de L'Attaque du Mutant ! Dans les années 1990, avant que Harry Potter ne devienne un phénomène convertissant par dizaines les gamins à la lecture, Chair de Poule, de l'Américain Robert Lawrence Stine, a profondément marqué toute une génération de lecteurs en culottes courtes. Il faut dire que l'auteur n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'il est déjà l'homme derrière Fear Street, une collection de livres pour ados dont les récits sont plus gores et violents que ce qu'il proposera par la suite. Débutée en 1992 aux États-Unis, Goosebumps, traduit littéralement en Chair de Poule chez nous, est une série littéraire aux thématiques horrifiques visant un jeune public, à partir de neuf ans. La version française arrive dès 1995 dans les librairies, et le succès est immédiatement au rendez-vous. Pantins maléfiques, loups-garous, masques hantés, créatures cachées dans les placards et sous l'évier, la galerie de monstres plus ou moins originaux peuplant les romans de R.L. Stine a sans doute traumatisé certains et certaines d'entre vous. Si vous faites partie de celles et ceux qui ont grandi avec Chair de Poule, vous vous souvenez sûrement de son adaptation télévisée. Diffusée à partir de la rentrée 1997 sur France 2, elle compte en tout quatre saisons, pour un total de soixante-quatorze épisodes, adaptant plus ou moins fidèlement les ouvrages de Stine. L'arrivé de Chair de Poule dans l'Hexagone concorde avec un certain emballement médiatique et commercial autour de la fête d'Halloween ; cette fameuse fête américaine, qui en fait, paraît-il, n'est pas vraiment d'origine américaine, mais nous, “on est français, on va quand même pas fêter ça”, comme dirait ton vieux tonton alcoolisé ; qui s'accompagne d'un accroissement du nombre d'émissions spéciales gentiment effrayantes destinées aux mioches, dont je faisais partie. Car, me situant pile-poil dans la tranche d'âge visée par la licence à l'époque, et déjà très friand de films d'horreur et de monstres en tout genre, j'ai dévoré une bonne partie des livres et religieusement suivi la diffusion de chaque épisode en rentrant de l'école. Mais l'une des histoires de Chair de Poule allait tout particulièrement faire écho pour le jeune lecteur que j'étais. S'il y a bien un sujet dont les fans de comics aiment entendre parler, encore plus que des comic books, c'est d'eux-mêmes. Leur propre condition les passionne et la façon dont elle peut être représentée, tant dans les médias que dans la fiction, est une source infinie de débats plus ou moins constructifs. Et je dois vous avouer que j'échappe rarement à cette règle. Alors que la fin du XXe siècle approchait, le jeune lecteur de comics que j'étais, éperdument fasciné par les aventures de Wolverine ou des Fantastic Four, ne manquait jamais le moindre sujet traitant de sa passion, même s'il s'agissait d'un reportage de quelques minutes à la télévision. Cela impliquait aussi chez moi un grand intérêt pour tout contenu un tant soit peu méta, abordant de façon plus ou moins sérieuse la thématique super-héroïque et mettant en scène des personnages ou des situations tournant autour des comics et de leur contenu. Remettons-nous dans le contexte : nous sommes avant l'an 2000, la majeure partie des blockbusters adaptés de comic books n'en étaient qu'à l'état de projet et internet était encore loin d'être arrivé dans tous les foyers. Ainsi, tout ce qui pouvait avoir à voir de près ou de loin avec les comics était bon à prendre et, de toute évidence, L'Attaque du Mutant était une histoire faite pour moi. Publié en 1994 aux États-Unis et en 1996 en France, L'Attaque du Mutant, ou Attack of the Mutant dans sa version originale, est le vingt-cinquième livre de la série de R.L. Stine. On y découvre Skipper, un gamin d'une dizaine d'année, grand amateur de comics. Plutôt paresseux quand il s'agit d'étudier à l'école, au grand désespoir de ses parents, Skipper est tout particulièrement fan du plus terrible des super-vilains : le Mutant Masqué, un dangereux métamorphe pouvant aussi bien imiter les individus que les objets. Collectionneur méticuleux, Skipper ne rate aucun numéro des méfaits du Mutant. Le dernier en date a une portée historique, car on y découvre pour la première fois le quartier général du malfaiteur surhumain. Alors qu'il prend le bus pour se rendre chez le dentiste, Skipper entame une conversation avec Libby, une jeune fille de son âge qui semble très intéressée par les bandes dessinées. Bien que leurs goûts diffèrent sur certains points, notamment la passion de Skipper pour le Mutant Masqué, les deux pré-ados sympathisent, si bien que Skipper rate son arrêt. Descendant dans un quartier qu'il connaît mal, Skipper fait soudain face à un immeuble bien étrange, copie conforme du repère secret du Mutant ! Obnubilé par cette découverte, il va revenir explorer les lieux en compagnie de Libby, pensant dans un premier temps que le créateur du Mutant ; Jimmy Starenko, référence évidente à l'artiste Jim Steranko ; avait pu s'inspirer de ce bâtiment pour sa BD, et même qu'il travaillait peut-être dans ces locaux, y dessinant ses planches des aventures du Mutant Masqué. Mais, quand il reçoit un nouveau numéro du Mutant Masqué dans lequel il apparaît en personne, Skipper commence à douter. Où se situe la frontière entre la fiction et la réalité ? Le Mutant Masqué est-il réel ? Et, si oui, doit-il venir en aide au héros Galloping Gazel, un justicier doté d'une hyper-vitesse retenu prisonnier au QG du Mutant ? Prenant son courage à deux mains, Skipper part affronter le super-vilain, et découvre finalement que Libby et lui ne font qu'un ! Le Mutant, en quête d'un nouvel adversaire, a décidé qu'un fan aussi pointu que Skipper était une proie idéale. Le jeune garçon apprend qu'en passant la porte du bâtiment, il est instantanément devenu un personnage de comic book et il va finalement profiter de ce nouveau statut pour piéger le Mutant Masqué et en venir à bout. L'histoire se conclut sur une fin ouverte typique des récits d'épouvante, laissant entendre que Skipper est peut-être vraiment devenu un super-héros : Elastic Boy. Peut-être plus que le roman, c'est surtout la version télévisée qui m'a marqué à l'époque. Ayant les honneurs d'un double épisode au cours de la deuxième saison de la série télé Chair de Poule, L'Attaque du Mutant avait totalement séduit le petit fan de comics que j'étais déjà. Pourtant, aujourd'hui, avec un peu de recul, le roman et son adaptation sont surtout une série de clichés un peu lourds autour de la bande dessinée américaine de super-héros. Bien que l'on ne puisse pas vraiment attribuer à R.L. Stine un discours orienté quant aux comic books ; l'auteur n'ayant visiblement ni l'objectif de les dénigrer, ni celui de les défendre ; la galerie de personnages de L'Attaque du Mutant est une collection de stéréotypes comme on oserait plus en faire. Skipper est une véritable caricature : gamin bedonnant au physique disgracieux et au ton assez insupportable, il prend de haut quiconque critique ses BD préférées et est donc ostracisé par les autres enfants. Ses résultats scolaires sont médiocres, sans doute car sa passion passe avant les études, et ses parents ne se privent pas de lui rappeler que les comics sont des lectures abrutissantes qui vont lui faire rater sa vie. Notre héros tombe donc sans aucun problème dans le guet-apens tendu par le super-vilain, qui profite de sa crédulité et de son manque de relations sociales pour l'attirer en prenant les traits d'une femme fatale de dix ans. Le Mutant Masqué est l'archétype même du criminel diabolique dont la seule motivation est de faire le mal sans aucune raison particulière, et son adversaire Galloping Gazelle, interprété par Adam West, alias Batman dans la série TV de 1966, est clairement un imbécile incapable du moindre acte de bravoure rationnel. Pourtant, il est difficile de savoir si Stine se moque réellement des fans de super-héros et de leurs idoles, ou s'il en profite seulement pour user et abuser des clichés qui entourent le médium en grossissant le trait au maximum, peut-être pour mieux souligner leur absurdité. Et puis, à titre tout à fait personnel, je dois admettre que je me reconnaissais un peu dans Skipper, ce gamin pas très populaire qui emmerdait absolument tout le monde avec sa passion imbitable et à la limite de l'ésotérisme pour le commun des mortels… Quoi qu'il en soit, malgré le fait que R.L. Stine considère L'Attaque du Mutant comme l'un des livres les plus surprenants de la série Chair de Poule, il est aussi l'un des moins appréciés du public, sans doute car assez éloigné du reste des romans. Son univers, tournant autour des comics, ne parle pas forcément aux gamins qui n'en sont pas connaisseurs et ses personnages aux costumes bariolés sont bien loin des figures horrifiques classiques telles que les momies ou les loups-garous. Mais cette histoire conserve pourtant quelques qualités tout à fait remarquables, comme celle de jouer très intelligemment avec la frontière entre l'imaginaire et réalité en ménageant brillamment le suspense, ou d'initier mine de rien les plus jeunes au méta et à la façon dont une fiction peut traiter d'elle-même et des œuvres qui l'inspirent. On notera que L'Attaque du Mutant a été adaptée en jeu vidéo en 1997. Un produit dérivé assez exotique qui résume parfaitement le phénomène culturel Chair de Poule. Si Chair de Poule jouit encore d'un succès certain aujourd'hui ; en témoigne une nouvelle adaptation sur Disney+, mais également des comics, parus chez IDW aux États-Unis ; l'œuvre de R.L. Stine est surtout une magnifique démonstration de la façon dont les codes de l'horreur, genre habituellement réservé aux adultes, peuvent être inculqués aux enfants. Loin des paniques morales et des ligues de parents en colère, il faut se rappeler que les êtres humains que nous sommes aiment se faire peur et que les enfants n'échappent pas à cette règle. Pour peu qu'ils soient accompagnés et guidés dans leurs découvertes, plutôt que d'être éduqués à craindre et à rejeter ce que leurs parents ne peuvent pas ou ne veulent pas comprendre, il n'y a aucune raison de ne pas les laisser frissonner de temps en temps. Il en va de même pour la bande dessinée, n'en déplaise aux géniteurs de Skipper, qui n'est en aucun cas la lecture abêtissante que certains combattent encore, plutôt que de l'intégrer comme une culture à part entière aux programmes scolaires. Et puis, avoir quelques bases en comics de super-héros, ça pourrait vous servir, le jour où vous oublierez de descendre du bus… N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute en cliquant ici ! 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    LE MASQUE DE LA MORT ROUGE : SACRÉE SOIRÉE !

    Play Episode Listen Later Oct 18, 2023 11:50


    Tel est pris qui croyait prendre, voilà qui pourrait être la morale d'une histoire d'Edgar Allan Poe, ou de cet article. Aujourd'hui, on parle d'Edgar Allan Poe et de son influence sur la bande dessinée américaine ! Quand je me suis dit qu'il serait amusant de vous parler du Masque de la Mort Rouge et de ses adaptations en comic books, je n'imaginais pas dans quelle spirale infernale je venais de tomber… Car, si l'Américain Edgar Allan Poe, né à Boston en 1809, est incontestablement l'un des pères de la littérature fantastique et horrifique moderne, il est aussi l'inspirateur d'une quantité absolument titanesque de bandes dessinées plus ou moins fidèles à ses œuvres. Publiée pour la première fois en 1842 dans Graham's Magazine, puis traduite en français par Charles Baudelaire dans le recueil Nouvelles Histoires Extraordinaires en 1857, The Masque of the Red Death, de son titre original, est une nouvelle s'inscrivant dans la tradition du roman gothique.  Dans cette courte histoire, la Mort Rouge, une maladie proche de la peste, aux effets visibles désastreux et à la mortalité fulgurante, décime brutalement toute la population d'une contrée. Le Prince Prospero, un homme de pouvoir dans la région, invite un millier de nobles dans son palais au cœur d'une abbaye fortifiée, interdisant à quiconque d'entrer ou de sortir, afin d'éviter toute intrusion d'une personne malade. Bien que barricadés, les convives de Prospero ne manquent de rien, ni de nourriture, ni de divertissements en tout genre.  Après plusieurs mois d'enfermement, un bal masqué est organisé et Prospero fait décorer chaque salle de sa demeure d'une couleur différente. Les six premières sont respectivement bleue, pourpre, verte, orange, blanche, et violette, les vitres des fenêtres de chaque pièce laissant passer une lumière dont la couleur est identique à celle des murs. Mais la septième chambre fait exception. Entièrement noire, elle est éclairée d'une lumière rouge, et on y trouve une énorme horloge sonnant à chaque heure d'une façon plus pesante. Lors de la fête, aux douze coups de minuit, un étranger grand et décharné, au masque semblable au visage d'un cadavre, et entièrement vêtu de rouge, se mêle à la foule, errant au milieu des danseurs. Prospero, en colère face à ce costume qu'il prend pour une provocation, demande à ce que l'étranger soit arrêté, puis pendu ! Mais nul n'ose l'interpeller pendant qu'il traverse le palais. Prospero se jette alors sur lui, poignard à la main. Mais, comme foudroyé, il s'écroule sans vie, tandis que les convives constatent que la créature n'est autre la Mort Rouge incarnée, avant de mourir un à un. Si la morale de cette histoire n'est jamais explicitement donnée par Edgar Allan Poe, on y voit souvent une allégorie de l'inéluctabilité de la mort. La Mort Rouge ; peut-être inspirée de la tuberculose dont souffrait Virginia, l'épouse de Poe ; se propage de façon inarrêtable, y compris entre les murs du lieu où la noblesse se croyait à l'abri. Aucun stratagème ne permet d'y échapper et vouloir la contrôler est aussi vain qu'illusoire, tandis que son avancée inexorable nous est rappelée par chaque sonnerie du carillon, qui laisse derrière lui un silence de mort, avant que l'activité des invités ne reprenne peu à peu. L'autre interprétation que l'on peut en faire est plus sociale, car Le Masque de la Mort Rouge met en exergue le dédain des riches et des puissants qui festoient à l'abri, alors que les pauvres et les paysans sont exterminés par la maladie. Mais le répit des privilégiés est de courte durée, car leurs richesses et leur condition sociale ne les prémunissent pas de trépasser dans les mêmes circonstances que les indigents. La nouvelle d'Edgar Allan Poe va inspirer un sacré paquet d'œuvres au fil des années : du Fantôme de l'Opéra de Gaston Leroux à l'univers de Donjons & Dragons, en passant par un skin pour le personnage de Faucheur dans le jeu vidéo Overwatch, mais aussi des ballets, des chansons, de nombreux films, et même des comics. Car, en plus de leur influence plus que conséquente sur la Pop Culture telle que nous la connaissons aujourd'hui, les écrits de Poe ont souvent été repris, de façon plus ou moins assumée, par la bande dessinée américaine. En ce qui concerne The Masque of the Red Death en particulier, on dénombre plusieurs dizaines d'adaptations sur le papier, parfois littérales et parfois beaucoup plus libres. Si je ne vais pas toutes les citer, certaines méritent qu'on s'y attarde, notamment celles publiées par Marvel Comics, éditeur étonnamment attaché aux travaux du romancier. Dès 1952, dans les pages du quatrième numéro de Adventures Into Weird Worlds, Bill Everett, l'artiste derrière Namor the Sub-Mariner et co-créateur de Daredevil avec Stan Lee, s'inspire du Masque de la Mort Rouge dans la courte histoire "The Face of Death", qui modernise le cadre et les protagonistes dans un style typique des comic books horrifiques pré-Comics Code. Le lecteur y est interpellé comme si cette situation pouvait réellement lui arriver, et la thématique sociale opposant l'aristocratie au petit peuple est remplacée par une rivalité amoureuse. En 1961, dans Strange Tales #83, Steve Ditko, qui deviendra plus tard l'un des pères de Spider-Man et du Docteur Strange, dessine "Masquerade Party". Là aussi, la nouvelle originale de Poe est largement modernisée, encore une fois sous le prisme d'une romance qui tourne mal, mais avec une chute beaucoup moins morbide, la censure du Comics Code Authority étant passée par là entre-temps. L'histoire sera réimprimée bien plus tard, dans Chamber of Chills #16, en 1975. Huit ans plus tard, en 1969, le scénariste Roy Thomas et le dessinateur Don heck présentent une nouvelle adaptation, "The Day of the Red Death", dans laquelle un Stan Lee transformé en narrateur à la manière du Gardien des Comptes de la Crypte nous raconte cette fois-ci une version futuriste du Masque de la Mort Rouge, mais remarquablement fidèle à l'esprit de l'originale en comparaison des publications précédentes. Plus récemment, toujours chez Marvel, l'anthologie en trois numéros Haunt of Horror, parue en 2006 sous son label MAX et dessinée par Richard Corben, a confirmé le curieux lien existant entre le nouvelliste et la Maison des Idées. Puisque l'on parle de Richard Corben, cet artiste complet, véritable légende de la bande dessinée américaine, va, tout au long de sa carrière, lier son travail aux œuvres d'Edgar Allan Poe.Dès 1974, il adapte The Raven, dans le numéro soixante-sept de Creepy. Il réalisera en tout trois versions dessinées de ce poème narratif, la dernière en date, publiée en 2013 par Dark Horse Comics, figurant au sommaire d'un numéro contenant également son adaptation du Masque de la Mort Rouge. Qu'il illustre directement les textes de Poe ou qu'il s'en nourrisse pour ses propres créations, Corben partage avec lui son amour des ambiances angoissantes et des univers vaporeux. Son style graphique se prête parfaitement aux cadres pratiquement oniriques des nouvelles, mais aussi à leurs révélations finales choquantes et à leur suggestivité parfois perturbante. Il est incontestablement l'un des auteurs de bande dessinée qui a le mieux capturé l'essence des écrits d'Edgar Allan Poe et, si ses travaux vous intéressent, l'intégralité de ses histoires publiées par Dark Horse est disponible en français en un seul volume intitulé Esprit des Morts, chez Delirium. Mais, bien avant Corben, d'autres artistes ont cherché à adapter plus fidèlement The Mask of the Red Death. En 1964 sort ce qui est sûrement l'adaptation cinématographique la plus célèbre de la nouvelle, réalisée par Roger Corman, avec Vincent Price dans le rôle de Prospero. Afin de transformer ce court récit de quelques pages en un long-métrage d'une heure trente, de nombreux éléments sont ajoutés pour préciser le contexte et donner du corps à l'intrigue. Prospero y est montré comme un individu détestable et violent, terrorisant la population vivant autour de son palais et vouant même un culte à Satan. Le culte satanique de Prospero est d'ailleurs omniprésent dans le film, alors que Poe n'en fait jamais mention dans son histoire, et le tout est agrémenté d'une rivalité amoureuse entre Juliana, la compagne de Prospero, et Francesca, une jeune femme kidnappée dans un village ravagé par le prince qui espérait ainsi éviter la propagation de la Mort Rouge. L'ensemble correspond quand même assez bien au texte original dans l'idée, même si l'interprétation sociale y est plus forte et si la figure féminine de Francesca apporte également son lot d'hypothèses, totalement inexistantes chez Poe. Le Masque de la Mort Rouge est le septième film d'un cycle qui en compte huit en tout, tous réalisés par Roger Corman entre 1960 et 1965, d'après les histoires d'Edgar Allan Poe. Et outre le statut culte de ce portage sur grand écran, il a la particularité d'avoir été adapté en comic book par l'éditeur Dell Comics. Cette adaptation, dessinée par Frank Springer, un artiste très prolifique chez Dell et que l'on retrouvera plus tard sur les séries Dazzler ou G.I Joe chez Marvel, est un travail de commande à caractère promotionnel typique de l'époque, mais reste plutôt agréable à lire.  On notera qu'en 1989, Corman a produit un remake de son propre film, avec Adrian Paul, alias Duncan MacLeod dans la série télévisée Highlander, dans le rôle de Prospero, pour un résultat beaucoup moins mémorable. Il faut finalement attendre 1967, dans les pages du douzième numéro du magazine Eerie, pour voir la première adaptation en bande dessinée vraiment fidèle à la nouvelle d'Edgar Allan Poe, écrite par Archie Goodwin et dessinée par Tom Sutton. Le format magazine adopté par Warren Publishing permettait à l'éditeur de passer outre les restrictions du Comics Code Authority, et donc de montrer beaucoup plus de scènes gores et scabreuses. Le style de Tom Sutton marche vraiment très bien dans ce type de récit qui, bien qu'horrifique, conserve des outrances grand-guignolesques. Il a d'ailleurs consacré une bonne partie de ses travaux à des comics d'horreur, à quelques remarquables exceptions, comme son intervention sur pratiquement tous les numéros de la série Star Trek publiée par DC Comics entre 1984 et 1988. L'autre adaptation marquante en provenance de chez Warren se trouve dans Vampirella #110, paru en 1982. Rich Margopoulos et Rafael Aura León y présentent une version également très fidèle au texte original, dont certaines cases flirtent gentiment avec l'érotisme. Ces deux histoires ont été réimprimées de nombreuses fois par la suite, et comptent parmi la multitude d'exemples de la façon dont l'œuvre de Poe a inspiré toute une génération de scénaristes et d'illustrateurs qui participent au regain d'intérêt pour l'épouvante classique et l'horreur gothique à partir de la seconde moitié du vingtième siècle. Au-delà des adaptations de ses œuvres, Edgar Allan Poe est avant tout un personnage historique majeur pour la culture des États-Unis, si bien qu'on le retrouve parfois mis en scène comme un personnage de fiction, de façon plus ou moins sérieuse, dans à peu près tout et n'importe quoi : de South Park aux Beetleborgs, en passant par les Simpson et Sabrina, l'Apprentie Sorcière. Évidemment, les comic books n'échappent pas à cette étrange coutume et le poète apparaît ainsi dans un nombre conséquent de publications. Dans le deuxième numéro de l'anthologie horrifique Spellbound, paru en 1952, il est transformé en vilain qui torture un acteur dans une mise en scène macabre digne d'un film de la saga Saw. Chez DC Comics, il croise la route de super-héros comme Superboy et The Atom, tandis que le vingt-sixième numéro de la série Ghosts, publié en 1974, va jusqu'à réinventer les causes de sa mort, restées troubles jusqu'à aujourd'hui. Enfin, avec ses séries Snifter of Terror ou Snifter of Blood, AHOY Comics revisite les classiques de l'écrivain sous un jour plus moderne, et parfois parodique, derrière des couvertures hommages aussi inattendues qu'amusantes. Une utilisation pas toujours du meilleur goût, mais qui révèle à quel point il a influencé par bien des façons les auteurs et les artistes derrière nos bande dessinées préférées, ces derniers nourrissant un besoin quasi-viscéral de lui rendre hommage d'une manière ou d'une autre. Honnêtement, en me lançant dans l'écriture de cet article, je ne m'attendais pas à avoir autant de choses à vous raconter. Et tout ça en ne traitant que d'une seule histoire écrite par Edgar Allan Poe, et pratiquement uniquement par le prisme de ses adaptations en comics… C'est dire quel terrier de lapin sans fond peut devenir le moindre sujet lié à la Pop Culture, au sens très large du terme, pour peu que l'on prenne la peine de se questionner sur chaque élément laissé çà et là par les différents acteurs de son développement… Alors, au regard de la ribambelle de productions tirées du Masque de la Mort Rouge, ma conclusion est la suivante : à quoi que Prospero ait pu espérer échapper en s'enfermant dans son palais, ce n'était assurément pas la postérité. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute en cliquant ici ! 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    COMMENT SHE-HULK A CASSÉ MARVEL COMICS ?

    Play Episode Listen Later Oct 4, 2023 14:59


    Comment She-Hulk a-t-elle définitivement modifié la perception de la réalité dans l'univers Marvel à cause d'une publicité pour un parfum qui n'a jamais existé ? Aujourd'hui, je m'intéresse à une histoire que vous pensez sûrement connaître, mais qui vous réserve encore bien des surprises ! GIRLS GONE GREEN  Nous sommes en 1979, et la série télévisée L'Incroyable Hulk, avec Lou Ferrigno et Bill Bixby, cartonne sur le petit écran. Le producteur Kenneth Johnson ; déjà derrière le spin-off de L'Homme qui valait Trois Milliards, Super Jaimie ; et Stan Lee, que l'on ne présente plus, ont alors la même idée : offrir à L'Incroyable Hulk une série dérivée mettant en scène un personnage féminin. Voulant assurer les arrières de Marvel Comics en matière de propriété intellectuelle, Stan Lee prend les devants et demande au dessinateur John Buscema de l'aider à créer une version féminine de Hulk. C'est ainsi que Jennifer Walters apparaît en novembre 1979 dans le premier numéro de The Savage She-Hulk. Bruce Banner, alias Hulk, fugitif traqué par toutes les polices, débarque à Los Angeles pour retrouver sa cousine Jennifer, devenue avocate, dans l'espoir d'obtenir son aide. Après lui avoir raconté comment il a été irradié par sa propre création, la bombe gamma, qui a fait de lui un monstre incontrôlable, Banner apprend que sa cousine défend un voyou mêlé malgré lui aux malversations du caïd Nicholas Trask. Or, ce fameux Trask compte bien faire taire la jeune avocate, et envoie ses hommes de main pour l'assassiner. Grièvement blessée par balle, Jennifer ne doit son salut qu'à une transfusion sanguine de fortune effectuée par son cousin Bruce, avec son propre sang radioactif. Ainsi, quand Trask envoie de nouveau ses larbins pour définitivement éliminer Jennifer en convalescence à l'hôpital, ces derniers ont la mauvaise surprise de la voir se transformer en géante musculeuse à la peau verte ! She-Hulk est née ! Désormais dotée d'une force colossale et d'une résistance à toute épreuve quand elle se transforme, tout en étant beaucoup moins bestiale que son cousin, Jennifer va prendre goût à cette nouvelle condition, si bien qu'elle restera sous sa forme de She-Hulk la majeure partie du temps. Utilisant ses pouvoirs pour combattre l'injustice et venir en aide aux plus faibles, elle va, sous la plume de David Anthony Kraft et le crayon Mike Vosburg, enchaîner les aventures super-héroïques, mais aussi sentimentales. Annulée après seulement vingt-cinq numéros, The Savage-Shulk est une série largement mésestimée, principalement en ce qui concerne le travail du scénariste David Anthony Kraft, qui adopte rapidement un ton très moderne dans le traitement de l'héroïne, en faisant un personnage qui assume sans complexe son statut hors-normes et ne manquant pas d'aplomb quand il s'agit d'imposer ses choix. De ce fait, bien que rarement cité, The Savage She-Hulk mérite que vous y jetiez un œil, car ce comic book a plutôt bien vieilli. C'est d'ailleurs au cours de ses premières tribulations que Jennifer Walters rencontre Ben Grimm, alias La Chose, des Fantastic Four, donnant naissance à une amitié qui mènera notre géante de jade à rejoindre l'équipe de Reed Richards en remplacement de Grimm après les événements du crossover Secret Wars en 1984. Et si l'hypothétique spin-off télévisé ne verra finalement jamais le jour, She-Hulk va faire son petit bonhomme de chemin dans l'univers Marvel, rejoignant notamment les Avengers et croisant régulièrement la route de son cousin Bruce. YOU'RE KIDDING, RIGHT ? Malgré cela, She-Hulk conserve pour beaucoup de lecteurs l'image d'une énième version féminine d'un héros masculin, comme Ms Marvel et Spider-Woman chez Marvel, ou Supergirl chez DC Comics. Mais tout cela va radicalement changer grâce à un artiste : John Byrne. Figure incontournable de la bande dessinée américaine, ayant œuvré sur les X-Men ou Alpha Flight chez Marvel, sur Superman et Wonder Woman chez DC, et à l'origine de créations originales comme les Next Men chez Dark Horse, John Byrne a littéralement transformé de nombreuses icônes des comics dans les années 1980 et 1990. Visionnaire, son travail est empreint de thématiques sociales, politiques et technologiques, précédant parfois de plusieurs années les tendances, sans oublier d'adjoindre un regard critique qui invite le lecteur à la réflexion. Aux commandes de la série Fantastic Four de 1981 à 1986, Byrne va y mettre en scène She-Hulk, et également lui consacrer un graphic novel en 1985, avant de prendre en main la série The Sensational She-Hulk à partir de 1989. Dès la couverture du premier numéro, Byrne annonce la couleur. Jennifer Walters s'y adresse directement au lecteur, menaçant de déchirer leur collection de comics X-Men s'ils n'achètent pas sa série. Le ton est donné : She-Hulk est devenu un personnage conscient de sa condition d'héroïne de comic book et elle va dorénavant régulièrement briser le quatrième mur. Le quatrième mur est une notion venant du théâtre, selon laquelle il existe un mur invisible séparant la fiction jouée sur scène et le public. Notamment théorisée par Denis Diderot en 1758 dans Le Discours sur la Poésie Dramatique, elle a ensuite été développée par de nombreux auteurs, principalement dans le théâtre réaliste, admettant qu'il est également possible aux personnages d'une pièce de passer outre ce quatrième mur pour s'adresser directement au spectateur, pour un aparté qui renforce l'aspect comique ou dramatique de la situation, par exemple. La notion de quatrième mur s'est ensuite élargie à d'autres supports, du cinéma au jeu vidéo en passant par la bande dessinée. L'un des premiers exemples concrets au cinéma est le film muet The Great Train Robbery, réalisé en 1903 par l'Américain Edwin S. Porter, se terminant par un plan extrêmement avant-gardiste dans lequel on peut voir un homme tirer en direction du public. Une scène qui a fait sensation lors des projections, effrayant même quelques spectateurs ! Parmi les nombreux personnages de film ou de série capables de briser ce quatrième mur, on pourra citer Néo dans Matrix ; Ferris Bueller, qui a ensuite inspiré la série télévisée Parker Lewis ne perd jamais ; mais aussi les Animaniacs ou encore Malcolm. Du côté des comics, on retrouve cette faculté à différents niveaux chez Howard the Duck, Deadpool, ou Animal Man. Bien entendu, l'objectif principal est de produire un effet sur le spectateur, généralement pour préciser un contexte, renforcer l'immersion, ou bien tout simplement pour le faire rire. Cette notion acquise d'être un personnage capable de passer outre le quatrième mur va permettre à peu près tout et n'importe quoi à Jennifer Walter au cours des soixante épisodes que compte The Sensational She-Hulk : interpeller les lecteurs, sauter de case en case et traverser les pages de publicités, menacer John Byrne lorsque les choix artistiques de ce dernier lui semblent mauvais pour les ventes de la série, et même assister au démontage du décor dans le tout dernier numéro, dont la couverture fait d'ailleurs écho à celle du premier. Un répertoire de gimmicks astucieux qui trouvent pour beaucoup leur source dans une rencontre que Jennifer va faire dans le quatrième numéro de The Sensational She-Hulk. GOLDEN AGE GUEST STAR  Si les débuts de la série jouent gentiment avec le quatrième mur ; comme lorsque She-Hulk reproche à Byrne de lui faire affronter les Toad Men, référence méta au deuxième numéro de The Incredible Hulk paru en 1962 dont elle se moquait en couverture ; le quatrième épisode place un nouveau personnage inattendu sur la route de notre héroïne : Louise Grant Mason. Louise explique à Jennifer que dans les années 1940, elle était Blonde Phantom, une justicière costumée combattant le crime. Blonde Phantom est un vrai personnage de bande dessinée, dont les aventures ont été publiées par Timely Comics, l'ancêtre de Marvel, à partir de 1946. Créée par le scénariste Al Sulman et par le dessinateur Syd Shores à la demande de Stan Lee qui trouvait que les publications Timely manquaient de super-héroïnes, elle fait sa première apparition dans All Select Comics #11, un périodique qui sera d'ailleurs renommé Blonde Phantom dès le numéro suivant. Secrétaire du détective Mark Mason, Louise Grant revêt un loup et une robe de soirée rouge du meilleur effet pour devenir la justicière Blonde Phantom et ainsi aider son patron à résoudre les affaires les plus corsées. Bien que dépourvue de super-pouvoirs, elle combat tour à tour d'anciens nazis, un inventeur monté sur des chaussures à ressorts, un savant fou venu du futur, et même son sosie remodelé par un chirurgienne peu scrupuleuse ! Alors qu'elle en pince pour Mark, Louise est totalement invisible aux yeux de ce dernier qui, ignorant la double identité de son employée, lui préfère Blonde Phantom. Une romance largement inspirée de la relation entre Loïs Lane et Clark Kent, pour ne citer que l'exemple le plus célèbre, et qui aura tendance à largement minimiser le rôle de Louise, systématiquement ramenée à sa condition d'assistante dans un monde gouverné par les hommes. Le personnage va rencontrer un certain succès, s'exportant dans les pages de Marvel Mystery Comics aux côtés de Captain America, Namor ou de la première Torche Humaine, mais aussi dans les comic books mettant en scène d'autres super-héroïnes du Golden Age, comme Sun Girl ou Namora. Et, sans trop s'avancer, on peut affirmer que Blonde Phantom est un personnage plutôt populaire chez Timely Comics à l'époque. La série Blonde Phantom va durer jusqu'au vingt-deuxième numéro, en 1949, avant que la publication ne soit finalement renommée Lovers, manifestation de la fin de l'âge d'or des super-héros costumés, peu à peu remplacés par des genres comme la Romance, le Western ou l'Horreur après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il faut donc finalement attendre 1989 pour revoir Louise Grant dans le quatrième numéro de The Sensational She-Hulk. Elle y apparaît plus âgée, et surtout, on apprend qu'elle s'est mariée avec Mark Mason en 1949, juste après l'arrêt de la publication de sa série, adoptant ainsi officiellement le nom de Louise Grant Mason. En discutant avec elle, Jennifer comprend qu'au fil du temps, Louise est devenue pleinement consciente d'être un personnage de bande dessinée et qu'elle est persuadée que si elle ne ressemble plus à la Blonde Phantom des années 1940, c'est parce que sa série a été annulée par l'éditeur. Oubliés du public, elle et Mark se sont alors mis à vieillir, jusqu'au moment où le décès de son mari l'a poussée à retrouver un emploi pour devenir un personnage secondaire de la série She-Hulk, et ainsi échapper au même destin funeste. On ne s'en rend pas forcément compte au premier abord, mais la théorie de Louise ; et donc, par extension, de John Byrne ; répond de façon assez brillante à la question récurrente du non-vieillissement des personnages de comics. Pour elle, les personnages ne vieillissent pas tant qu'ils apparaissent dans les comics, et cette explication très méta n'est finalement pas plus farfelue que celles qui se baseraient sur des temporalités plus ou moins compressées. Mais elle ouvre aussi la porte à une quantité infinie de mindfuck, car étant donné que Louise pense cela parce qu'elle a conscience d'être elle-même un personnage de comics, elle est peut-être finalement responsable de son propre vieillissement. Ça en devient vertigineux. SMELL LIKE BLONDE PHANTOM Mais notre histoire ne s'arrête pas là. Car Blonde Phantom elle-même possède une origine pour le moins étrange. En effet, si la super-héroïne apparaît bel et bien pour la première fois dans All Select Comics #11, un autre personnage a porté le même pseudonyme quelques semaines plus tôt dans un contexte totalement différent. Créée par Ruth Atkinson pour Timely Comics en 1945, Millicent Collins, alias Millie the Model, est un jeune mannequin dont les aventures, entre romance et humour, vont connaître une longévité assez exceptionnelle. Fruit des demandes de l'éditeur Martin Goodman, qui cherchait à surfer sur le succès des séries dérivées de l'univers de Archie publiées par son concurrent MLJ, Millie the Model va occuper les présentoirs des kiosques américains jusqu'en 1973, et va même connaître plusieurs spin-offs. Dans l'une des courtes histoires présentes au sommaire du deuxième numéro, paru en juillet 1946, Millie se voit confier la mission de poser pour une publicité vantant le mérite d'un tout nouveau parfum : le Blonde Phantom. Elle qui ne rêve que de gloire et de paillettes est alors totalement anonymisée derrière un masque et une robe noire à pois rouges, ne pouvant pas profiter des retombées du succès du fameux sent-bon pour faire décoller sa carrière ! Vous l'aurez compris, exception faite du cadre et des enjeux, cette Blonde Phantom ressemble drôlement à celle qui prendra conscience de son statut de personnage de comics quelques décennies plus tard. Qu'une justicière costumée apparue seulement à deux mois d'intervalle chez le même éditeur porte exactement le même nom et un costume vaguement ressemblant pourrait très bien être une amusante coïncidence, tout comme le fait que Millie et Louise partagent pas mal de points communs, dont celui d'être ignorées par un love interest qui est aussi leur supérieur hiérarchique. Mais les similitudes ne semblent plus si fortuites quand l'on découvre que Al Sulman, le co-créateur de la super-héroïne Louise Grant, relisait régulièrement de nombreux scripts pour Timely. Tandis que Ken Bald, dessinateur sur Millie the Model, comptait parmi les artistes au sommaire du numéro de All Select Comics où apparaît pour la première fois Blonde Phantom, cette fois au dessin des aventures de Miss America. Si l'on ne peut définitivement rien affirmer, on peut au moins supposer que l'idée d'une redresseuse de torts en tenue de gala traînait depuis quelque temps dans les cartons des équipes créatives de Timely Comics, et que la demande de Stan Lee a été l'opportunité de lui donner vie pour de bon. Une vie qui fut longue et bien remplie pour Louise Grant Mason, principalement parce que son retour dans les pages de She-Hulk va inspirer d'autres artistes. Car, comble du méta à la sauce Byrne : en sortant de sa retraite pour ne pas mourir oubliée du lectorat, Blonde Phantom est devenue elle-même responsable du renouveau de son statut au sein de l'univers Marvel et de l'enrichissement a posteriori de son background et de son passé de justicière. Steve Gerber et Buzz Dixon, remplaçant au pied levé John Byrne éjecté de The Sensational She-Hulk par un Tom DeFalco irascible, donneront à Louise une héritière costumée en la personne de sa fille Wanda, qui deviendra l'héroïne Phantom Blonde. Et la magie de la rétro-continuité lui permettra même de vivre des aventures à rebours, comme dans la mini-série Avengers 1959 de Howard Chaykin, parue en 2011. John Byrne reviendra finalement sur The Sensational She-Hulk, continuant de jouer avec les codes du comic book, comme le faisait Grant Morrison avec sa Doom Patrol à la même période, et livrant par la même occasion des couvertures désopilantes se rangeant parmi les meilleures de l'histoire de la bande dessinée américaine. Une bonne partie d'entre elles joue sur l'hypersexualisation de Jennifer qui, consciente de l'exploitation de son image par l'artiste, s'en plaint régulièrement. Une façon provocatrice de dénoncer ce phénomène particulièrement en vogue à partir des années 1980 et toutes les dérives autour du culte du corps qui l'accompagnent. Mais ceci est une tout autre histoire dont on reparlera peut-être une prochaine fois ! Personnage atypique dont le ton comique et introspectif est parfois mal compris, comptant parmi les dernières co-création de Stan Lee pour la Maison des Idées, imaginée avant tout à des fins mercantiles pour protéger les intérêts d'un éditeur dans une effervescence télévisuelle inachevée, puis redéfinie par un artiste précurseur qui a été jusqu'à donner un sens aux lois innées d'un genre, She-Hulk est un cas unique dans l'univers Marvel. Si les productions suivantes, comme les séries écrites par Dan Slott ou Charles Soule, ont souvent cherché à prolonger l'exercice initié par Byrne, le vent de fraîcheur apporté par The Sensational She-Hulk reste particulièrement osé et novateur de par ses possibles répercussions à grande échelle. Et quel que soit votre rapport à She-Hulk, le parcours de Jennifer Walters chez Marvel est à tout jamais le fruit d'un jeu d'influences au doux parfum d'imaginaire, auquel je vous recommande de jeter un œil ! 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    RECKLESS : LE COMICS QUI FRACASSE LE RÊVE AMÉRICAIN !

    Play Episode Listen Later Sep 17, 2023 7:53


    Une traversée des États-Unis post-guerre du Viêt Nam, dans un pays en pleine mutation et gangréné par les magouilles en tout genre, voilà ce que nous proposent Ed Brubaker et Sean Phillips dans leur nouvelle série phare. Aujourd'hui, je vous parle de mon coup de cœur du moment : Reckless ! Attention, cet article pourrait vous révéler certains éléments de l'intrigue ! Vous le lisez donc à vos risques et périls ! SECOURS FRATERNEL “Votre problème, c'est le nôtre !”, disait Régis Laspalès dans Ma Femme s'appelle Maurice, pièce de théâtre à succès adaptée au cinéma en 2002. Et bien, avec Ethan Reckless, c'est un peu la même chose : il règle vos problèmes en échange d'une rémunération plus ou moins conséquente. Composant avec son passé trouble d'agent infiltré travaillant pour le compte de la CIA ; dont il a gardé des cicatrices bien visibles sur le visage et une forme d'insensibilité émotionnelle ; et les milieux interlopes aux frontières très floues dans lesquels il évolue désormais, il crèche dans un vieux cinéma de Los Angeles : le El Ricardo. Quand quelqu'un a un problème, il laisse un message sur le répondeur d'Ethan, son assistante Anna filtre les appels, et parfois, ils décident de prendre l'affaire en main. C'est notamment le cas quand, en 1981, une ex-petite amie vient lui demander de l'aide pour récupérer ce qu'elle s'est approprié après un braquage. Rattrapé par des années de mensonges à flirter avec les interdits, Ethan s'embarque dans un road-trip vengeur, sur fond de trahison et de groupuscules radicaux. C'est sur ces bases que s'ouvre le premier tome Reckless, polar hard-boiled au rythme soutenu et à la tension permanente, qui enchaîne les rebondissements explosifs. Le deuxième tome, “L'Envoyé du Diable”, nous emmène en 1985, sur la piste d'une comédienne disparue dans d'étranges circonstances. Quand l'élue de son cœur demande à Ethan de retrouver sa sœur, qui s'est mystérieusement volatilisée alors qu'elle aspirait à faire carrière à Hollywood, notre détective de fortune remonte la piste d'un vieux film jusqu'aux plus sombres arcanes du show-business. Lui qui pensait avoir enfin trouvé l'amour et la sérénité, le voilà dans un milieu fait de faux-semblants, mais où le danger est bien réel. S'il y a bien une chose que nous confirme le tome suivant, “Éliminer les Monstres”, c'est qu'il est difficile d'avoir une vie privée quand on passe son temps à régler les problèmes des autres... Sollicité par un homme qui veut rendre justice à son défunt père, victime des malversations financières d'un magnat de l'immobilier, Ethan doit en parallèle composer avec la soif d'indépendance d'Anna, qui se lasse de sa vie au El Ricardo. Un volume qui permet d'en apprendre un peu plus sur le duo d'enquêteurs, sur leur rencontre, et sur leur état d'esprit. Dans “Ce Fantôme en Toi”, quand Ethan Reckless s'absente pour une affaire, Anna décide de s'aventurer seule dans la vieille demeure d'une ancienne star du cinéma d'horreur pour l'aider à prouver que son manoir n'est pas hanté ! Un quatrième tome qui se démarque des précédents et flirte avec le fantastique grâce à sa vieille bicoque qui cache un terrible secret, mon préféré pour le moment ! Le dernier volume en date, intitulé “Descente aux Enfers”, permet justement de découvrir ce qu'Ethan était parti faire pendant qu'Anna chassait les fantômes. Une fois encore, il est question de vengeance et de disparition, sur fond de dérives d'une communauté prônant une sexualité débridée. Un excellent cinquième tome qui fonctionne en diptyque avec le précédent et qui marque une fin de cycle pour Reckless, mais pas un point final, nous assure Ed Brubaker dans sa postface. Vous l'aurez peut-être compris, les albums de Reckless ont l'avantage d'être relativement indépendants les uns des autres, ce qui rend la série d'autant plus accessible. Chaque enquête conduit le lecteur dans un univers sordide et impitoyable, où l'ambiance capiteuse tranche avec une violence crue et les méthodes peu orthodoxes de son héros tête brûlée. Ce cocktail détonnant n'empêche pas une forme de mélancolie d'émaner de certains passages, tant la galerie d'hommes et de femmes brisés par les coups durs de la vie qui nous est présentée laisse un goût doux-amer après la lecture. Emprunt de la réalité sociale de l'Amérique des années 1980 et débordant de clins d'œil à la culture populaire, Reckless est une parfaite démonstration de la valeur sûre qu'est devenu le duo formé par Ed Brubaker et Sean Phillips pour la bande dessinée américaine. L'AMÉRIQUE, JE VEUX L'AVOIR…Car, ce cinéma transformé en quartier général, ce n'est pas un hasard. Reckless est bourré de références à la littérature pulp, aux films noirs et au cinéma d'épouvante, inspirées par les souvenirs de jeunesse de Ed Brubaker. Qu'il s'agisse des lectures du son père, ancien officier de marine, ou d'hommages à peine dissimulés à des séries télévisées comme Kolchak The Night Stalker, le scénariste puise dans son enfance et son adolescence passées à déménager d'une base militaire américaine à l'autre pour nourrir l'univers de Reckless. En choisissant de mettre en scène son héros dans une période s'étalant du milieu des années 1970 à la fin des années 1980, Brubaker revisite une époque charnière de l'histoire des États-Unis. Après la défaite au Viêt Nam, les USA abandonnent, pour un temps, leur politique interventionniste et se recentrent sur les problèmes internes au pays : une ère de changement durant laquelle l'image des hippies du Flower Power passe de celle de sympathiques pacifistes à celle de menaçants fanatiques à la solde de gourous terroristes. Sur le plan politique, les manœuvres malhonnêtes et l'impunité du président démissionnaire Richard Nixon conduisent, en 1977, à l'élection du démocrate Jimmy Carter, qui place les droits de l'Homme et l'ouverture diplomatique au centre de ses préoccupations. En 1981, alors que Carter brigue un second mandat, l'inflation et le chômage poussent finalement les Américains à se tourner vers le candidat républicain Ronald Reagan, ancien acteur dont l'action participera, par extension, à ancrer l'image du héros masculin suintant la testostérone dans la Pop Culture des années 1980. Autant de fluctuations collectives qui auront des effets individuels, tantôt bénéfiques, tantôt traumatisants. Les démons d'Ethan Reckless, ce sont les démons de l'Amérique : il doit faire face à son passé, à ses dérives violentes, régler les problèmes de ses concitoyens avec des méthodes parfois prohibées, et tout ça dans une certaine clandestinité. Reckless connaît ses semblables et ne fait confiance à personne, ou presque, et doit se méfier de tout et de tout le monde, au risque de voir le moindre écart de conduite de sa part immédiatement sanctionné par un tabassage en règle. Bien que Brubaker et Phillips dépeignent le climat social et politique des années 1980, la série aborde des problématiques intemporelles, comme le traitement réservé aux anciens militaires après leur service rendu à la nation, la corruption et les abus de pouvoir des puissants, ou les dérives comportementales et criminelles engendrées par l'abandon par l'État d'une partie de la population livrée à elle-même pour subvenir à ses besoins les plus essentiels. Lancée durant la pandémie et adoptant le format de Graphic Novel, plutôt que la classique prépublication en fascicules souples coutumière aux États-Unis, Reckless est une série mitonnée avec amour et assiduité par Ed Brubaker et Sean Phillips. La vision cinématographique de ce dernier, accompagné par son fils Jacob aux couleurs, fait d'ailleurs honneur au décor si particulier planté par Brubaker. Son trait, son découpage soigné et son sens des plans dignes des plus beaux films noirs jouant incontestablement dans la qualité du produit final. Avec cinq albums en deux ans, l'équipe créative a confirmé la maîtrise de son sujet en enchaînant les réussites sur le plan narratif, chaque volume se renouvelant juste assez pour habilement enrichir le background des protagonistes. Un résultat impeccable sur toute la ligne, qui utilise parfaitement les codes de la BD et du thriller, tout en brillant par son accessibilité sans faille. Je conclurai en disant tout simplement : lisez Reckless de Ed Brukaker et Sean Phillips, disponible en français chez Delcourt, et surtout, souvenez-vous que les problèmes des petites gens finissent bien souvent par être le problème de tous. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! 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    BRUTE FORCE : L'ÉCOLOGIE SELON MARVEL COMICS

    Play Episode Listen Later Sep 3, 2023 11:30


    Il arrive parfois que les comics décident d'embrasser de nobles causes. Mais pas toujours de la façon la plus judicieuse. Revenons à l'époque où Marvel pensait que la meilleure solution pour sauver la planète, c'était de filer des flingues aux dauphins… Si vous avez grandi durant les années 1980 et 1990, vous savez à quel point ces décennies symbolisent le règne des merdes en plastique. Depuis le succès colossal de Star Wars en 1977, et de la ligne de figurines commercialisée par Kenner, tous les fabricants de jouets cherchent la licence qui cartonnera auprès des gosses. Les Transformers et les G.I. Joe de Hasbro, les Cosmocats de LJN, les fameux Maîtres de l'Univers de Mattel, sans oublier le succès des Teenage Mutant Ninja Turtles de Playmates, autant de bonshommes en plastoc qui envahissent la chambre des enfants et vident le porte-monnaie des parents. Paradoxalement, tandis que la promotion de ces nouvelles figures de la Pop Culture est assurée par des dessins animés diffusés à la télévision, c'est aussi à cette période que diverses productions commencent à sensibiliser le jeune public à l'écologie. De Captain Planet à Widget, en passant par SOS Polluards et certaines séries de Tokusatsu, les messages incitant les enfants à protéger la nature et la vie sauvage sont partout. C'est en 1989, dans ce contexte qui mêle surproduction d'action figures et éveil quant à l'importance de notre environnement, que Marvel Comics demande au designer Charles Viola de concevoir des personnages qui pourraient devenir une ligne de jouets à succès. Fort d'avoir su adapter en comic book les G.I. Joe et les Transformers, et de l'accueil commercial, quelques années auparavant, de la gamme Secret Wars développée avec Mattel, l'éditeur américain est persuadé de pouvoir vendre les droits de ses nouveaux héros à un fabricant de jouets pour une petite fortune. Il faut dire que, même si on l'a un peu oublié aujourd'hui, il fut une époque où la Maison des Idées était experte en matière de partenariats plus ou moins pérenne : de ROM le chevalier de l'espace, avec Parker Brothers, à Dazzler en collaboration avec Casablanca Records, en passant par la Saga de Crystar, avec Remco, Marvel Comics a, notamment durant les années 1980, multiplié les coentreprises à double sens, pour le meilleur et pour le pire. Le premier numéro de Brute Force sort en juin 1990, soit trois mois avant la première diffusion de Captain Planet à la télévision et plus d'un an avant son adaptation en comic book par Marvel, qui ne connaîtra que douze numéros, mais c'est une tout autre histoire. Pourtant, Brute Force n'est pas véritablement une série initiatrice de tendance pour la bande dessinée américaine, le Animal Man de Grant Morrison la précédant de plusieurs années. Elle est néanmoins totalement dans l'air du temps en ce qui concerne ses thématiques, même si son approche est largement perfectible. Scénarisée par Simon Furman et dessinée par Jose Delbo, la mini-série en quatre numéros s'ouvre sur l'attaque d'un laboratoire de la société Multicorp, dans lequel travaille le scientifique Randall Pierce. Une équipe de clowns armés jusqu'aux dents, sans doute échappée du fast-food du coin, fait irruption alors que le docteur Pierce pratique une opération extrêmement délicate visant à sauver la vie d'un gorille en le transformant en cyborg. Après que le commando costumé ait pris la fuite en emportant avec lui l'animal amélioré, Randall Pierce s'empresse de prévenir son patron, Monsieur Frost, qui ne semble pas vraiment paniqué par la situation, et lui interdit formellement de prévenir la police. Après quelques tergiversations d'ordre moral et un échange avec son fils autour des responsabilités qui nous incombent vis-à-vis de notre belle planète bleue, le docteur Pierce décide finalement que le meilleur moyen d'aller sauver son gorille est de transformer d'autres animaux, innocents et en parfaite santé, en machines de guerre. Surfstreak le dauphin, Lionheart le lion, Soar l'aigle, Wreckless l'ours, et Hip Hop le kangourou, voilà les cinq animaux qui vont former une équipe d'un genre nouveau : Brute Force !Désormais dotés d'une intelligence supérieure et de la parole, équipés de lance-roquettes, de canons lasers, et capables de se transformer en véhicules, nos cyber-animaux sont donc envoyés en mission en dépit du bon sens, sans aucune précaution ou prise en considération des dommages qu'ils pourraient causer. Des débuts difficiles, presque burlesques, tant les membres de Brute Force peinent à coopérer. Entre leur incapacité à utiliser leur équipement et leurs caractères incompatibles, cette première mission est un semi-échec, puisqu'ils ne parviennent pas à récupérer le gorille, mais réussissent tout de même à protéger le village d'une tribu amazonienne d'un groupe paramilitaire qui voulait les exproprier. On découvre à la fin du premier numéro que les mercenaires en question portaient de l'équipement conçu par Multicorp, et que l'homme derrière les malversations criminelles qui ont mené au kidnapping du gorille n'est autre que son président : Monsieur Frost ! L'épisode se conclut sur la première apparition de l'équipe de super-animaux antagonistes créée par Frost pour tenir tête à Brute Force : Heavy Metal !Un requin, un rhinocéros, une pieuvre, un vautour, et le fameux gorille capturé plus tôt, de “vilains” animaux qui ont à leur tour été transformés en machines destructrices.Dans le numéro suivant, le docteur Pierce se questionne sur sa décision de transformer les membres de Brute Force, tandis que les animaux cybernétiques apprendront à leurs dépens que leur nouvelle condition inédite ne leur permettra pas de trouver facilement une place dans notre monde. On assiste au premier affrontement avec Heavy Metal, qui a pour objectif de faire couler un pétrolier, et Frost parvient finalement à faire arrêter Pierce, qu'il fait passer pour le méchant de l'histoire. Le troisième épisode alerte le jeune lecteur sur les dangers de la pollution, en mettant en scène une créature mutante transformée par un environnement toxique créé de toutes pièces par Frost comme une simulation de l'écosystème du futur. Et enfin, le quatrième et dernier numéro oppose les animaux de Brute Force à de faux activistes anti-nucléaire, qui s'avéreront être envoyés par Frost, avant leur affrontement final avec Heavy Metal. Brute Force parvient à arrêter Frost avec l'aide du docteur Pierce, et décident de continuer à travailler ensemble pour sauver la planète, malgré leurs différences. Ironiquement, cet ultime épisode se termine par “The Beginning”, ou “Le Commencement” dans la langue du docteur Klein, mais la suite des aventures de Brute Force va se faire attendre. Brute Force est une mini-série pleine de contradictions. Pensée pour parler à un jeune public ; elle devait dans un premier temps être publiée sur le label STAR de Marvel, regroupant les titres à destination des enfants ; elle adopte pourtant un ton acide qui se moque des multinationales et de la malbouffe, dénonce les prémices de ce que l'on appelle aujourd'hui le “greenwashing” et va jusqu'à traiter d'écoterrorisme. Mais, en parallèle, Brute Force passe totalement à côté de son message écolo sur de nombreux points, à commencer par la nature même de ses héros. Protéger la nature en transformant d'innocents animaux sauvages en armes de guerre destructrices, un non-sens total qui ne semble interpeller personne chez Marvel. Pas plus que de propager un message totalement idiot à base de “gentils” et de “méchants” animaux rempli de clichés éculés : le sympathique dauphin contre le vilain requin, l'aigle majestueux contre le vautour malfaisant, et ainsi de suite. Tout ça est justifié de façon plus ou moins implicite par une formule que l'on pourrait synthétiser en “c'est cool, donc ça passe”, une vision décérébrée - et typiquement américaine - dans laquelle la violence et les armes règlent pas mal de problèmes. Le scénariste Simon Furman et l'équipe éditoriale formée par Bob Budiansky, Tom Brevoort et Tom DeFalco se renvoient d'ailleurs volontiers la balle quand il s'agit de déterminer de qui vient telle ou telle idée. Un peu comme si assumer la paternité de Brute Force n'était pas la plus grande fierté de leur carrière, et on peut le comprendre. La série possède quand même quelques points fort remarquables, comme les dessins de l'Argentin Jose Delbo, qui avait déjà œuvré sur les adaptations en comics des Transformers et des Thundercats pour Marvel, mais aussi, dans un genre totalement différent, sur Wonder Woman chez DC Comics. L'artiste parvient de façon assez surprenante à donner un peu de crédibilité à ces personnages, mélanges improbables d'animaux réalistes et de robots aux points d'articulation similaires à ceux de figurines faites pour être moulées à la chaîne. L'ensemble est plutôt agréable graphiquement, tout en restant assez enfantin dans l'esprit. Le fond est loin d'être bête et la personnification des différents animaux est parfois intéressante, notamment quand il s'agit d'opposer leurs caractères distincts et leur soif de leadership. L'écriture très directe des personnages se heurte donc à un aspect visuel digne d'une série pour enfants des années 1980, si bien que l'on ne saisit plus vraiment quel est le public visé. Les aventures de nos animaux cybernétiques s'inspirent également de véritables catastrophes écologiques contemporaines de leur publication pour sensibiliser le jeune lectorat qui, avouons-le, est certainement passé à côté de toutes ces références bien trop sérieuses. Une dichotomie qui n'échappe finalement à personne une fois passées les portes des bureaux de Marvel Comics, dont la stratégie commerciale vis-à-vis des fabricants de jouets s'avère pour le moins bancale. Résultat : Brute Force tombe dans l'oubli pendant plus de vingt ans. Exception faite d'une équipe de monstres génétiquement modifiés créés par Arnim Zola et affrontant les Thunderbolts le temps de quelques épisodes, en 1999, il faut attendre 2014 pour revoir la Brute Force originale en action, dans les pages du premier numéro de Deadpool Bi-Annual. Engagé pour empêcher des militants écologistes de s'en prendre à un parc aquatique qui maltraite des animaux marins, le mercenaire provocateur va faire face aux défenseurs de la nature : les super animaux de Brute Force ! Un épisode assez réussi et plutôt amusant, qui assume pleinement le côté kitsch de ces animaux robotisés, et dont l'autodérision, Deadpool oblige, contraste fortement avec le ton presque grave de la mini-série d'origine. Quoi qu'on en pense, ce Deadpool Bi-Annual officialise le statut canonique de Brute Force au sein de l'univers Marvel, chose qui n'avait jamais été clairement établie auparavant, et ouvre la porte à l'utilisation de l'équipe dans d'autres histoires. En 2019, le one-shot Wolverine & Captain America : Weapon Plus éclaire le lecteur sur les individus améliorés de l'univers Marvel, notamment sur la création des animaux de Brute Force, mais aussi sur l'existence d'autres super-animaux liés au programme Weapon Plus, comme Weapon II, l'écureuil qui possède les mêmes pouvoirs que Wolverine… Et oui, tout est possible dans les comics. Le sujet des animaux modifiés par la science est d'ailleurs assez vaste dans la bande dessinée américaine. Rien que chez Marvel, on pourrait parler de Rocket Racoon, ou des Power Pachyderms, une équipe pour le moins étonnante constituée d'éléphants exposés aux radiations d'une bombe atomique avant leur naissance et ayant développé des super pouvoirs. Un seul numéro de cette étrange parodie a été publié en 1989, et il figure sûrement sur la liste des armes de guerre interdites sur le site d'Amnesty International. Dans un genre beaucoup plus moderne, We3 de Grant Morrison et Frank Quitely fait écho à Brute Force en racontant comment un chien, un chat et un lapin sont transformés en machines de guerre hi-tech. Une brillante mini-série, aux thématiques très actuelles, dont je vous recommande chaudement la lecture. Si j'ai voulu vous parler de Brute Force, au-delà de son aspect déconcertant, c'est parce que cette série est la preuve que l'on peut réfléchir de plein de façons différentes sur la BD, même quand l'objet de cette réflexion paraît totalement idiot au premier abord. Malgré ses motivations mercantiles et sa combinaison aliénée d'idées contradictoires, la mini-série de Furman et Delbo lance quelques pistes qui ne sont pas intéressantes et restent très pertinentes trois décennies plus tard, d'autant plus quand on l'analyse avec un regard critique quant aux desseins initiaux de Marvel. Qui aurait pu s'en douter en 1990, quand ça semblait normal de donner un bazooka à un ours ? Avant de terminer, si les thématiques soulevées par Brute Force vous intéressent, je vous recommande d'aller faire un tour sur le blog de Ecologeek, une véritable mine d'or en la matière ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu !Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement !Retrouvez le podcast POP CULTURE & COMICS sur toutes les plateformes d'écoute en cliquant ici !   Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    LES TORTUES NINJA : HISTOIRE(S) D'UNE MUTATION

    Play Episode Listen Later Jul 30, 2023 22:08


    Des tortues mutantes et adolescentes adeptes de l'art du ninjutsu ? Un drôle de concept qui cartonne depuis quarante ans ! L'occasion pour moi de revenir sur cette licence aussi culte que protéiforme ! WE STRIKE HARD, AND FADE AWAY… INTO THE NIGHT.Comics, jouets, dessins animés, jeux vidéo : quel que soit le support, il est pratiquement impossible que vous soyez passés à côté des Teenage Mutant Ninja Turtles, à moins d'avoir vécu dans les égouts ces quarante dernières années ! Comme beaucoup de succès story improbables, l'histoire des Tortues Ninja commence avec deux geeks fauchés : Kevin Eastman et Peter Laird. Ces deux jeunes artistes ont pour habitude d'échanger leurs idées dans l'appartement de Laird, transformé pour l'occasion en ce qu'ils appellent "Mirage Studios", un atelier nommé ainsi du fait de son existence toute relative. Un soir de 1983, Kevin Eastman dessine une tortue se tenant sur ses pattes arrière et maniant des nunchakus. Cette idée saugrenue amuse beaucoup les deux comparses qui décident de retravailler le concept, donnant naissance à quatre tortues, utilisant chacune une arme différente. En 1984, Eastman et Laird rassemblent leurs économies, empruntent de l'argent à l'oncle de Kevin et publient eux-mêmes le premier numéro de Teenage Mutant Ninja Turtles, tiré à 3000, 3250, ou 3275 exemplaires selon les sources. Le succès est au rendez-vous, puisqu'ils doivent bientôt réimprimer 6000, puis 35 000 copies de ce premier numéro. N'ayant absolument pas anticipé un tel accueil, et encore moins l'engouement des lecteurs qui en redemandent, les deux auteurs vont bientôt devoir imaginer une suite à ce qui devait être un one-shot. En quarante pages, le premier numéro pose les bases de tout un univers. Transformées par un étrange liquide mutagène, quatre petites tortues vont être entraînées à l'art ancestral du Ninjutsu par Splinter, un rat humanoïde, qui leur donne à chacune le nom d'un artiste de la Renaissance : Leonardo, Raphael, Donatello et Michelangelo. Ensemble, ils affrontent Shredder, terrible combattant à la tête du Clan des Foot, dont l'histoire est intimement liée à celle de Splinter. Réunis par leur amour de l'œuvre de Jack Kirby, et inspirés par les travaux de Frank Miller sur Ronin ou Daredevil, de Dave Sim et de son héros Cerebus, et par les New Mutants de Chris Claremont chez Marvel, Eastman et Laird n'hésitent pas à mélanger les influences, entre hommage et parodie, pour donner naissance à leurs Chevaliers d'Écaille. Ainsi, on trouve plusieurs points communs entre nos tortues préférées et Matt Murdock : elles sont transformées par un étrange produit chimique et affrontent par exemple le Clan des Foot, là où Daredevil tient tête à la secte de La Main. Quant à l'influence de Kirby, si elle est plus qu'évidente sur le plan graphique, elle est aussi distillée tout au long du développement du lore de la licence, qu'il s'agisse d'interventions extra-terrestres ou transdimensionnelles. Seuls aux commandes des premiers numéros de la série, Kevin et Peter vont alors alimenter une véritable mythologie autour des tortues, introduisant des personnages devenus incontournables comme April O'Neil et Casey Jones, des antagonistes mutants comme Leatherhead, ou encore les races extraterrestres des Utrom et des Triceratons. Ces derniers étant d'ailleurs, tout comme le personnage de Fugitoid, des créations de Mirage Studios antérieures aux Tortues Ninja. Le succès affiché par le comic book de Eastman et Laird et le foisonnant univers qui anime ses pages, mais aussi celles de son spin-off Tales of the Teenage Mutant Ninja Turtles et des Micro-Series, vont bientôt attirer l'attention de pas mal de monde et surcharger l'emploi du temps des deux amis qui recrutent alors Jim Lawson, Mark Martin, Michael Dooney ou encore Eric Talbot pour leur filer un coup de main. Des artistes qui vont, à leur tour, nourrir le déjà très riche background des TMNT de leurs créations. COWABUNGA ! Parmi les projets qui occupent le duo, il y a bien évidemment les produits dérivés. Après la sortie d'un jeu de rôle et de figurines en plombs vendues par Dark Horse Miniatures, c'est en 1987, alors qu'à peine une dizaine de numéros a été publiée, que la société Playmate Toys contacte Kevin Eastman et Peter Laird pour commercialiser une ligne de jouets dérivée des Tortues Ninja. Conscients du risque, ils misent sur la production d'un dessin animé pour booster la vente de figurines. À jamais ancrée dans la Pop Culture, la série s'adresse en priorité aux enfants et modifie de nombreux éléments de l'univers des tortues. Premièrement, si dans le comic book original, les tortues ont toutes un bandeau rouge, il est décidé de leur attribuer une couleur différente à chacune afin que les enfants puissent les identifier plus facilement. Les origines de Splinter sont revisitées : ici, il ne s'agit plus du rat compagnie de Hamato Yoshi, mais de Yoshi lui-même, transformé en rat par le mutagène. Le dessin animé introduit également de nouveaux personnages, comme Bebop et Rocksteady, ainsi que Krang, représentant de la race des Utrom, qui elle, existe bien dans les comics.Enfin, le point le plus important concerne de toute évidence les pizzas : c'est bel et bien le cartoon qui établit cette habitude alimentaire de Don, Raph, Leo et Mikey, qui est aujourd'hui indissociable de nos héros. Comme tout phénomène de société, les Tortues Ninja connaissent leur lot de paniques morales. Au Royaume-Uni, le titre Teenage Mutant Ninja Turtles est remplacé par Teenage Mutant Hero Turtles, le mot "ninja" étant jugé trop violent pour le jeune public. Les scènes où Michelangelo utilise son nunchaku sont également coupées, cette arme étant interdite en Angleterre. Ces quelques excentricités britanniques n'empêchent pas les Chevaliers d'Écaille de cartonner partout sur la planète : les figurines sont déclinées à l'infini et un jeu vidéo, aujourd'hui célèbre pour sa difficulté, sort sur Nintendo NES en 1989. La même année, l'éditeur Archie Comics, célèbre pour son personnage éponyme, lance Teenage Mutant Ninja Turtles Adventures, un comic book adaptant dans un premier temps la série animée, avant de développer son propre univers, dont certains éléments seront repris par la suite par l'univers classique des tortues.  On y découvre, par exemple, la première apparition sur le papier de Man-Ray, Mondo Gecko, et des Mutanimals. En à peine cinq ans, les Tortues Ninja sont passées d'une obscure création de deux passionnés de BD, à destination des amateurs de comics underground, à l'une des licences les plus bankables de la planète, star des cours de récré. Mais nos mutants mangeurs de pizza ne vont pas en rester là… En 1990, les Tortues Ninja connaissent leur première adaptation au cinéma, réalisée par Steve Barron, à qui l'on doit les clips vidéo pour Take On Me de A-Ha ou Africa de Toto. Réussissant l'exploit de piocher dans le meilleur des tout premiers numéros du comic book en y ajoutant une petite dose des éléments du dessin animé pour ne pas perdre les plus jeunes, il devient l'un des films indépendants les plus rentables de l'histoire, notamment grâce à l'incroyable travail du studio de Jim Henson, et enfonce définitivement le clou de la Turtlemania ! Pépite sombre influencée par le Batman de Tim Burton, brillant par ses cascades, ses bastons et son utilisation des practical effects, le film de Barron reste pour moi l'une des meilleures adaptations de comic book, captant à merveille l'esprit des TMNT tout en le rendant accessible au plus grand nombre. Un petit tour de force à l'heure où plusieurs versions des tortues, visant des publics très différents, cohabitaient déjà. Perdues entre le Ninja Rap de Vanilla Ice et la recette émoussée du voyage dans le temps ; qui, rappelons-le, est souvent synonyme d'une pénurie d'inspiration ; les deux suites, sorties respectivement en 1991 et 1993, peineront à réitérer l'exploit. Bien que pouvant être considérés comme de sympathiques divertissement, Les Tortues Ninja II et III marquent déjà un début d'essoufflement pour la licence, tout comme le spectacle musical “Coming Out of Their Shells”, sponsorisé par Pizza Hut entre 1990 et 1992. Un véritable essorage qui a aussi lieu du côté des jouets. Avec plus de quatre-cents figurines produites durant cet âge d'or, sans compter les véhicules, les tortues ont été remodelées à toutes les sauces : transformables, musiciennes, en monstres de Universal Studios, avec des cheveux colorés de Trolls, tirées des films ou en tenue de personnages de Star Trek… L'originalité des déclinaisons n'a d'égale que la frénésie commerciale qui la motive. GO NINJA, GO NINJA, GO ! Malheureusement pour Laird et Eastman, ce déclin des Tortues Ninja va aussi avoir lieu sur leur support d'origine : le papier. La série originale, qui prend fin en 1993 après soixante-deux numéros, est immédiatement suivie par une seconde série se présentant comme une suite directe, également publiée par Mirage Studios. Pilotée par Jim Lawson, cette seconde mouture tire sa révérence en 1995 après seulement treize numéros. L'effondrement du marché de la bande dessinée américaine et une inondation dans les locaux de Mirage Studios finissant d'achever la licence déjà exsangue à force d'être revisitée à toutes les sauces. À partir de cette date, les créateurs des Tortues Ninja s'éloignent radicalement. Eastman, qui vient de racheter le magazine Heavy Metal, homologue américain de notre Métal Hurlant national, a envie de travailler sur d'autres projets. Moins d'une année plus tard, sous l'impulsion de Erik Larsen, créateur de Savage Dragon et cofondateur de Image Comics, une troisième série est lancée. Aujourd'hui sous-titrée Urban Legends, et considérée comme non-canonique, cette série est bien connue des fans des TMNT pour prendre de nombreuses libertés et pour ne pas hésiter à transformer définitivement les Chevaliers d'Écaille, quitte à aller jusqu'à les mutiler ! Un parti-pris plutôt osé qui aurait pu raviver l'intérêt pour la licence auprès des lecteurs de comics, mais qui s'arrête en 1999 après vingt-trois numéros, le travail de Gary Carlson et Frank Fosco ne parvenant ni à convaincre les fans de la première heure, ni à attirer un nouveau public. La série sera pourtant réimprimée par IDW à partir de 2018, et l'éditeur permettra même à l'équipe créative originale de clôturer son histoire proprement avec trois épisodes inédits. En parallèle, la série animée débutée en 1987 s'arrête en 1996, avec 193 épisodes au compteur. Bien que largement édulcorée en comparaison du comic book d'origine, et diffusée en version censurée dans de nombreux pays pour paraître encore moins violente, elle reste l'un des piliers du succès et de la popularité des TMNT dans le monde, et à l'origine de l'expression culte “COWABUNGA !”, indissociable des tortues. Mais les Teenage Mutant Ninja Turtles ne disparaissent pas du petit écran pour autant. Dès 1997, Haim Saban, déjà connu pour avoir importé les Super Sentai japonais aux États-Unis avec la licence Power Rangers, s'empare des Tortues Ninja pour produire une série live, qui laisse suggérer à travers quelques décors et références qu'elle peut être considérée comme une suite de la trilogie sortie au cinéma. Malheureusement, Teenage Mutant Ninja Turtles : The Next Mutation s'avère bancale, plutôt cheap, et assez peu inspirée. Ici encore, Michelangelo est victime de l'étrange phobie de certains pays pour les nunchakus, ces derniers étant remplacés par des tonfas. April O'Neil et Casey Jones sont totalement absents et le Seigneur Dragon, créé spécialement pour la série, sert de principal antagoniste. Si une cinquième tortue nommée "Kirby", toujours en hommage à Jack Kirby, devait être au centre d'un quatrième film jamais produit, The Next Mutation introduit en la personne de Venus, une tortue femelle qui aurait été oubliée par Splinter et élevée en Chine. Un personnage régulièrement parodié, voire moqué, et qui résume à lui seul à quel point cette série est un enfer pavé de bonnes intentions. Annulée après une unique saison de vingt-six épisodes, The Next Mutation reste pour beaucoup de fans le chant de cygne avant une longue traversée du désert pour nos Chevaliers d'Écaille, qui peut tout de même se vanter de nous avoir offert le premier crossover entre les Power Rangers et les Tortues Ninja, dans le quatrième épisode de Power Rangers in Space. Chacun ses petits succès. En 2001, alors qu'il a entrepris de racheter les droits appartenant de son associé, Peter Laird, passablement désabusé par les égarements nés de la surexploitation de sa création, auxquels il a parfois participé, décide de reprendre les TMNT en main en compagnie de Jim Lawson. La publication d'une quatrième série débute chez Mirage, mais les temps ont changé. Sous l'impulsion d'éditeurs comme Dark Horse, Image Comics et Valiant, le secteur du comic book indépendant s'est largement industrialisé et a établi de nouveaux standards. Le succès d'antan n'est plus au rendez-vous, et le rachat, en 2009, de la licence Tortues Ninja par le groupe Viacom, va définitivement changer la donne. C'est le début d'une longue pause, encore d'actualité, pour Mirage Studios. L'accord stipule que Peter Laird ne pourra plus sortir que dix-huit comics par an pour terminer sa série en cours, et les projets d'adaptations seront désormais confiés à des filiales de Viacom, comme Paramount et Nickelodeon. Le XXIe siècle est d'ailleurs plus que chargé en matière d'adaptations pour les Tortues Ninja. En 2003, un nouveau dessin animé produit par 4Kids est lancé. Plus sombre et plus fidèle aux comics sur de nombreux points, il souffre pourtant de comparaison avec la première version animée de 1987, devenue l'image officielle des tortues dans l'esprit de nombreux fans. Après sept saisons, la série, en perte de vitesse, est clôturée en 2009 par le téléfilm Turtles Forever, qui fête le vingt-cinquième anniversaire de la licence en faisant se rencontrer les tortues 2003 et celles de 1987, offrant même une incursion dans l'univers du comic book original au spectateur. En 2007, un film TMNT entièrement en images de synthèse est écrit et réalisé par Kevin Munroe. S'il est présenté comme la suite de la trilogie de films live des années 1990, il assume assez peu ce statut dans les faits et n'a pas vraiment marqué le grand public. De 2012 à 2017, une troisième série d'animation est produite par Nickelodeon, et déjà, le look beaucoup plus cartoonesque des Chevaliers d'Écaille suscite quelques réactions de pseudo-puristes qui ne reconnaissent plus leurs tortues. Il faut dire que c'est sûrement la première fois que Donatello, Michelangelo, Raphael et Leonardo possèdent autant de signes pouvant les distinguer les uns des autres et des personnalités aussi affirmées. Brillant notamment par son casting de comédiens de doublage dans sa version originale, la série est plutôt bien accueillie par la critique et reste très plaisante à regarder. Il est évidemment impossible de parler des portages des Tortues Ninja à l'écran sans évoquer les deux films produits par Michael Bay, sortis en 2014 et 2016. Si cette nouvelle adaptation, réalisée par Jonathan Liebesman, a fait couler beaucoup d'encre, elle renoue pourtant avec quelques idées méconnues issues du comic book de Eastman et Laird, comme l'origine extraterrestre du fluide mutagène ayant transformé les tortues. Sa suite introduira Bebop, Rocksteady et Casey Jones, mais les deux films restent globalement mal-aimés par les fans de la première heure, sans doute en partie à cause des clichés entourant, à tort ou à raison, le cinéma de Michael Bay. Enfin, diffusée à partir de 2018, la série animée Rise of the Teenage Mutant Ninja Turtles, ou Le Destin des Tortues Ninja en version française, ne connaîtra que deux saisons avant d'être annulée. Un film Netflix, sorti en 2022, sert de conclusion à la série, tout en surfant, encore une fois, sur l'idée d'une sorte de multivers nourri de paradoxes temporels. Là encore, le design et la personnification des tortues vont faire débat, car tranchant drastiquement avec l'image classique des personnages. Il est pourtant intéressant de souligner que ces cinq visions à l'écran des TMNT, au ton et au public cible très différents, sont sorties sur une période s'étalant sur moins d'une vingtaine d'années. Une démonstration plutôt évidente que l'image ancrée par le dessin animé de 1987 et le film de 1990 est largement remise en question au cours des décennies suivantes. TURLTES IN TIME Mais revenons-en aux comics, si vous le voulez bien. En 2011, IDW obtient de Viacom le droit de publier une nouvelle série de comic book, qui se veut à la fois fidèle aux racines des Teenage Mutant Ninja Turtles et résolument moderne. Tom Waltz y œuvre comme scénariste, en compagnie de Kevin Eastman, le co-créateur des tortues, tandis que Dan Duncan, Mateus Santolouco, Sophie Campbell et Dave Wachter font partie des principaux artistes se succédant au dessin. En tirant dès le départ le meilleur des versions précédentes, la série IDW s'impose comme un point culminant pour la licence Teenage Mutant Ninja Turtles. On y retrouve les grands concepts des premiers arcs narratifs de Eastman et Laird, les personnages phares de la série animée comme Krang, Bebop et Rocksteady, et les Mutanimals apparus chez Archie, le tout associé à de véritables enjeux et à une approche plutôt sombre. Les origines de Leonardo, Raphael, Michelangelo, Donatello et Splinter sont étoffées, tout comme leurs liens avec le Clan des Foot. Beaucoup de personnages secondaires, comme Slash ou Old Hob, des Mutanimals, gagnent en profondeur et deviennent des acteurs à part entière d'un monde complexe où les alliances se font aussi vite qu'elles se défont. Sans aucune hésitation de ma part, il s'agit de l'un des meilleurs comic books des années 2010, avec une constance et une cohérence pour le moins brillantes compte tenu de sa longévité. Plus longue série TMNT jamais publiée, elle est devenue, en passant la barre symbolique des cent numéros en 2019, une pierre angulaire de ce que sont les Tortues Ninja aujourd'hui. Avec le retour sur la publication de Sophie Campbell en tant que scénariste au numéro 101, la série prend une nouvelle direction, tandis que Jennika, une cinquième tortue au bandeau jaune, fait son apparition. En parallèle, à la fin de l'année 2020, Peter Laird et Kevin Eastman se retrouvent pour The Last Ronin, une mini-série en cinq numéros, pensée par les deux auteurs, il y a déjà de nombreuses années, comme une fin possible aux Tortues Ninja. Un dystopie cyberpunk qui voit le dernier Chevalier d'Écaille partir en croisade contre la domination du Clan Foot pour venger ses frères disparus. Un nouvel hommage à peine dissimulé à Frank Miller et à son The Dark Knight Returns, qui avait littéralement fait chavirer la bande dessinée de super-héros en 1986. Si la publication de The Last Ronin est un brin chaotique aux États-Unis, le succès est au rendez-vous, si bien qu'une autre série tirée de cet univers intitulée The Last Ronin – The Lost Years est publiée en 2023, et qu'une suite et un projet de jeu vidéo sont également annoncés. Il est difficile, voire presque impossible d'être parfaitement exhaustif sur le sujet, tant il existe de produits dérivés et de versions, parfois très exotiques, des Tortues Ninja. Aussi, je ne passerai pas en revue tous les jeux vidéo adaptés de l'œuvre de Eastman et Laird, le quatuor ayant été présent à un moment ou un autre sur pratiquement toutes les consoles du marché. Je ne pourrais pas non plus lister toutes les licences qui, tous supports confondus, s'inspirent de près ou de loin, et parfois à la limite du plagiat, du succès des tortues : de Battletoads à Street Sharks, en passant par Biker Mice from Mars ou Extreme Dinosaurs. En ce qui concerne leurs aventures sur le papier, il devient de plus en plus difficile d'énumérer tous les crossovers au cours desquels les Tortues Ninja croisent des héros venus d'autres univers, de Batman à Usagi Yojimbo, des Power Rangers aux Ghostbusters, en passant par les gamins de Stranger Things ou les combattants de Street Fighter…  Je ne pourrais pas rendre hommage à tous les artistes qui, comme Richard Corben ou Michael Zulli, ont insufflé leur vision unique, et parfois bestiale, aux créations de Laird et Eastman. Et je ne reviendrais pas non plus en détail sur le foutoir sans nom entourant les droits des Teenage Mutant Ninja Turtles, une affaire qui, jusqu'à aujourd'hui, a compliqué bien des choses, comme la rediffusion ou l'édition sur support physique du dessin animé de 1987 dans son intégralité, par exemple. TURTLES DON'T DO DRUGS !  Mais alors, quelle recette, encore plus mystérieuse que celle du mutagène, se cache derrière le succès des tortues ? Je n'avais pas encore dit "Tortues Ninja" et vous fredonniez déjà le générique du dessin animé. C'est normal, c'est le pouvoir de la nostalgie ! Comme tout un tas de gens, vous avez sûrement découvert les Chevaliers d'Écaille avec cette série, et votre attachement à la version animée a peut-être tendance à provoquer chez vous un rejet de toutes les autres adaptations qui ont pu suivre. Pourtant, Teenage Mutant Ninja Turtles est l'une des rares licences à avoir autant d'interprétations différentes, l'histoire des tortues étant régulièrement revisitée, y compris par ses propres créateurs. Comme on a pu le voir, le succès n'a pas toujours été au rendez-vous pour les Tortues Ninja. Essoufflement au cinéma, échec sur le papier ou à la télé : dans leur course de fond pour gagner leur place sur le podium de la Pop Culture, les TMNT ont rencontré pas mal d'obstacles, quittant les sombres galeries des productions underground pour toucher un public toujours plus large, mais parfois aussi très ingrat. Et si, malgré le poids des années, les tortues continuent de parler aux jeunes et aux moins jeunes, avec plusieurs représentations qui cohabitent au même moment dans les pages des comics, sur les consoles de jeu et sur les plateformes de streaming, c'est sans doute grâce aux valeurs portées par la licence depuis ses origines.  Les liens du sang, la fraternité, l'entraide : ces principes de base, identiques quelle que soit la version des Tortues Ninja, font toujours écho quelque part en nous. On a tous été ado, et on a tous des liens forts avec quelqu'un que l'on considère comme un membre de notre famille, qu'il en fasse réellement partie ou non. Et au fond, c'est ça l'essence des Teenage Mutant Ninja Turtles. Qu'importe les difficultés que vous devez surmonter, dans les bons comme dans les mauvais moments, les membres d'une même famille doivent faire front commun pour avancer ensemble. Splinter sait qu'il peut compter sur ses fils ; Michelangelo, Leonardo, Raphael et Donatello savent qu'ils peuvent compter les uns sur les autres ; et April O'Neil sait qu'elle peut compter sur ses amis les tortues… Alors qu'une nouvelle adaptation animée débarque sur les écrans de cinéma, confirmant la règle de l'éternel recommencement, nos héros préférés changent une nouvelle fois d'apparence, mais propagent toujours le même message, universel et intemporel. Un peu comme si les chevaliers d'écailles ne pouvaient pas faire autre chose que de vivre avec leur temps. Avant de terminer, vous ne pouvez pas échapper à quelques conseils pour vous lancer dans la lecture des comics Tortues Ninja. Le meilleur point d'entrée actuellement est le premier tome de la collection Les Tortues Ninja L'Intégrale, qui permet de lire la série IDW de 2011 dans l'ordre chronologique, avec tous ses épisodes hors-série. Il s'agit de l'adaptation chez nous par HiComics de la IDW Collection publiée aux USA et incontestablement de l'un des meilleurs comics que vous puissiez lire en français. Pour moi, c'est absolument impossible de passer à côté. Si vous voulez revenir aux origines des tortues, HiComics propose de redécouvrir les premiers épisodes de Eastman et Laird publiés par Mirage Studios avec la collection Teenage Mutant Ninja Turtles Classics. Ici, c'est la fameuse Ultimate Collection de IDW qui est traduite en français, avec un contenu qui s'adresse aux lecteurs et aux lectrices plus aguerris et curieux de retrouver les racines indé de la série. Ça déborde de créativité et ça n'a rien perdu avec le temps. Si vous avez déjà quelques bases en matière de TMNT ; disons que vous avez grandi avec les films ou les séries animées, par exemple ; The Last Ronin est un récit complet de choix. Dynamique, rythmé, et plutôt novateur vis-à-vis de l'habituel statu quo, il ne pourra pas vous décevoir. Enfin, de son côté, l'éditeur Vestron a la bonne idée d'importer chez nous quelques pépites issues de l'univers des tortues, comme le frénétique Bodycount dessiné par Simon Bisley ou le déroutant Soul's Winter de Michael Zulli, mais aussi la série Archie Comics. De quoi ravir les complétistes et les curieux ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    QUAND DISNEY VOULAIT ADAPTER FINAL FANTASY !

    Play Episode Listen Later Jul 9, 2023 8:56


    Final Fantasy est l'une des plus grandes sagas de l'histoire du jeu vidéo, c'est un fait. Mais saviez-vous que bien avant Kingdom Hearts, Disney et Square se sont croisés pour un projet d'adaptation comme seule la bande dessinée américaine sait en proposer ? Aujourd'hui, on parle du comic book inachevé tiré de Final Fantasy ! Si le nom de Final Fantasy parle aujourd'hui à pratiquement tout le monde, ça n'a pas toujours été le cas. Lancée en 1987 au Japon, la licence va mettre un peu de temps pour se faire une place au-delà des frontières du pays du Soleil-Levant. Il faudra en effet attendre 1990 pour que le premier opus, sorti sur Nintendo NES, atteigne le marché américain, tandis qu'en France et en Europe, FFVII, sorti en 1997 sur Playstation, sera le premier épisode officiellement disponible, exception faite du spin-off Mystic Quest, sorti sur Game Boy en 1994. Bien que le premier épisode de la saga ai connu un succès non négligeable au pays de l'Oncle Sam, Final Fantasy II et III ne bénéficieront pas de localisation aux USA, et c'est ainsi que Final Fantasy IV, sorti en 1991 sur Super Famicom au Japon, est renommé Final Fantasy II pour l'arrivée de la cartouche Super Nintendo sur le sol américain la même année. Si vous avez suivi, c'est que vous êtes prêts pour la suite. Il n'est pas rare qu'une licence en vogue aux États-Unis, qu'il s'agisse d'un jeu vidéo, d'une ligne de jouets, d'un film, ou d'une série télé, ait droit à son adaptation sur le papier chez un éditeur de comics. Cette tendance est d'autant plus vraie à partir des années 1980, avec l'arrivée dans les rayons des comic shops de titres allant des Maîtres de l'Univers aux Transformers, en passant par Atari Force, G.I. Joe ou Cosmocats. Et il en va de même pour Indiana Jones, Alien, Predator, Robocop, et bien évidemment Star Wars, qui ont tous été convertis en comic book pour une durée plus ou moins longue, aux côtés d'autres franchises plus ou moins plébiscitées par les lecteurs, telles que Biker Mice from Mars, L'Agence Tous Risques, Double Dragon, The Real Ghostbusters, et même Chuck Norris Karate Kommandos… Si la qualité n'est pas toujours au rendez-vous, en démontre l'horrible Street Fighter chez Malibu Comics, c'est parce que, sans grande surprise, la motivation initiale est avant tout mercantile. En 1990, dans une démarche expansionniste, le groupe Disney Publishing Worldwide lance sa filiale Disney Comics, ayant pour objectif de continuer la publication de titres comme Uncle Scrooge ou Walt Disney's Comics and Stories ; déjà en cours depuis plusieurs années chez Gladstone Publishing, et avant ça chez Gold Key et Dell Comics ; et de lancer de nouvelles séries. Adepte d'une politique agressive, Disney Comics vise un développement un peu trop optimiste face à la réalité du marché en démultipliant les annonces de nouveaux labels, comme Hollywood Comics, qui aurait dû publier les adaptations en comic book des films produits par Hollywood Pictures, autre filiale de Disney. Mais Len Wein, co-créateur de Swamp Thing et de Wolverine, ne fait pas l'unanimité auprès des fans dans son rôle d'éditeur en chef de Disney Comics, et les ventes décevantes viennent rapidement saper les ambitions du groupe qui espérait pouvoir concurrencer Marvel et DC Comics dans la cour des grands. Ainsi, dès l'année 1991, une bonne partie des titres s'arrête et les projets de développement et autres labels, dont Hollywood Comics, sont abandonnés. Disney Comics disparaît pour de bon en 1993 et les séries survivantes sont de nouveau confiées à Gladstone Publishing. Un seul et unique titre aura été publié par Hollywood Comics : l'adaptation de Arachnophobia, film produit par Steven Spielberg. Mais il aurait pu en être autrement… En effet, voilà quelques années, le scénariste Kurt Busiek, célèbre pour son travail sur Marvels avec Alex Ross ou sur le crossover Justice League of America / Avengers avec le regretté George Perez, a révélé qu'il avait œuvré sur un projet pour le moins intriguant pour Hollywood Comics au début des années 1990 : l'adaptation en comic book de Final Fantasy. Pour remettre les choses dans leur contexte : Squaresoft avait pour idée de promouvoir la franchise auprès du public américain en s'appuyant sur une série de comics, et Kurt Busiek, déjà auteur depuis le début des années 1980, fut chargé de son écriture par Disney Comics qui, sans doute à la suite d'un jeu de rachats quelconque, avait obtenu les droits pour publier ladite série. À l'époque, le jeu vidéo est encore loin d'être une activité aussi démocratisée qu'aujourd'hui, de plus, seul le tout premier Final Fantasy est sorti aux États-Unis, et malgré un accueil favorable, il est évident que la popularité de la saga à travers le monde et la sacralisation de son lore ne sont en rien comparables à ce que nous pouvons connaître. Busiek commença donc à écrire une histoire prenant place dans l'univers du premier jeu, avant que Square ne demande finalement à l'auteur de totalement revoir sa copie pour placer l'intrigue dans l'univers de FFIV, dont la sortie est prévue au Japon et aux États-Unis pour l'année 1991. Un bon moyen de promouvoir la sortie de ce qui serait Final Fantasy II en Amérique du Nord. Après avoir reçu le maximum d'informations possible de la part de Square sur ce nouvel opus, Busiek se lance, et le scénario qu'il propose semble plaire au développeur nippon. Ce dernier, sûrement peu confiant quant à l'attrait des Américains pour le JRPG, considère que Busiek a les compétences pour rendre leur univers plus accessible aux USA et l'autorise même à “américaniser” le tout en renommant les personnages. La décision paraît douteuse, et presque suicidaire, à l'heure d'une Pop Culture mondialisée, mais elle est plutôt cohérente avec l'état d'esprit de l'époque. C'est l'artiste Dell Barras ; d'origine philippine, comme Alfredo Alcala ; fort d'un parcours de dessinateur, d'encreur et d'animateur, qui est choisi pour illustrer la série, tandis que Mike Mignola, qui deviendra mondialement célèbre en créant Hellboy, se chargera des couvertures de ce qui est initialement prévu comme une mini-série de quatre numéros. Mais lorsque Disney Comics frôle la banqueroute et abandonne le label Hollywood Comics, le projet Final Fantasy est mis au placard. Busiek estime qu'il avait sûrement terminé l'écriture de deux ou trois des quatre épisodes prévus, et que Barras avait dessiné au moins un numéro complet. Malheureusement, à l'exception d'un dessin promotionnel et de deux couvertures par Mignola, il ne subsiste aucun autre visuel connu de ce projet à ma connaissance. Est-ce une mauvaise chose ? Les adaptations de films ou de jeu vidéo en comics sont, il faut l'avouer, souvent médiocres, et les quelques exceptions qui vous viennent en tête ne font que confirmer cette règle immuable. Busiek n'avait de toute évidence pas pu jouer à Final Fantasy IV pendant qu'il écrivait son histoire, et si Square lui avait confié une bible de références pour lui permettre de travailler dans des conditions optimales, les libertés qu'on avait pu lui laisser pour adapter l'univers aux attentes du public occidental d'alors seraient sans doute très mal interprétées par les puristes d'aujourd'hui. Quand bien même on pourrait découvrir le premier épisode quasi-finalisé de cette mini-série, on ferait face à un pur objet de son époque, qui n'aurait aucun intérêt de nos jours, si ce n'est de provoquer quelques malaises dans l'assistance. Kurt Busiek, qui aurait pu rejoindre Squaresoft afin de participer à l'adaptation des prochains jeux Final Fantasy en occident, va finalement continuer sa carrière de scénariste de comics chez Marvel, avec le succès qu'on lui connaît. Comme quoi, un peu comme dans les RPG, l'avenir ne tient parfois qu'à une décision prise au bon moment… Final Fantasy IV arrive en novembre 1991 aux USA ; sous le titre de Final Fantasy II, donc ; dans une version légèrement modifiée. Les références religieuses sont gommées, tandis que l'ensemble est édulcoré pour éviter de choquer un jeune public, et la difficulté des combats est même revue à la baisse. Le soft restera une référence du jeu de rôles sur console, notamment pour son introduction du système Active Time Battle, qui pousse le joueur à rester impliqué pour avoir le meilleur timing durant les séquences de combat. Malgré le succès durable de la saga, il est assez étonnant de voir que là où des licences de fantasy comme Magic The Gathering, The Witcher ou Donjons & Dragons ont eu droit à de multiples versions plus ou moins pertinentes et réussies sur le papier, plus jamais aucun éditeur américain n'a tenté d'adapter Final Fantasy en comics. Il est probable que cela découle de la volonté de Square Enix de garder le contrôle sur la marque et de limiter les produits dérivés douteux pouvant dégrader l'image de sa poule aux œufs d'or auprès d'une communauté de fans aussi fidèles qu'exigeants. Enfin, à l'heure où l'hégémonie de Disney sur la culture populaire est plus affirmée que jamais, il est bon de se rappeler que cet empire du divertissement a aussi connu de véritables revers au cours de son existence. Si, à la même période, Valiant Comics, Dark Horse, ou Image Comics ont su profiter d'un contexte né de l'arrivée d'une nouvelle génération d'auteurs et d'une bulle spéculative à son paroxysme, Disney a littéralement raté le coche, son échec devançant de plusieurs années l'effondrement du marché de la bande dessinée américaine. Quand on sait que la multinationale a actuellement la main sur une partie des plus grandes licences de la planète, y compris celles de Marvel Comics, il y a de quoi trouver ça plutôt amusant… N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    CHACUN CHERCHE SON HULK !

    Play Episode Listen Later Jun 16, 2023 15:21


    Parmi les personnages colorés qui mettent le bazar dans les cases de nos comic books préférés, l'Incroyable Hulk, créé par Stan Lee et Jack Kirby en 1962, est sûrement celui dont les multiples mutations et interprétations sont les plus hétérogènes, mais aussi une magnifique démonstration de la façon dont les fans s'approprient les héros de papier. Aujourd'hui, on va parler de Hulk, mais pas seulement de Hulk. Et puis, quel Hulk, d'abord ? Occupe-toi de ton Hulk ! Ce qui m'a toujours laissé perplexe chez les amateurs de super-héros, c'est leur fascination pour l'échelle de puissance des personnages. Si elle est naturelle, elle est aussi et surtout très limitée et occupe bien trop de place dans les débats, au détriment de la profondeur des thématiques sociales, politiques et psychologiques qui entourent les héros de comics. Pour moi, l'infantilisation systématique des problématiques et des intrigues par une partie du lectorat et des prescripteurs amène à une vision biaisée du genre phare de la bande dessinée américaine. Malgré une lassitude de plus en plus palpable, les blockbusters de Marvel restent des valeurs sûres au cinéma, et on se demande souvent pourquoi le grand public ne s'intéresse pas plus aux comics dont ils sont issus. La réponse semble évidente quand on constate qu'une partie de ceux-là même qui devraient pousser les gens à en lire n'en renvoient que l'image d'une sorte de gigantesque bagarre permanente dont le seul enjeu serait de savoir qui est le plus fort. Cette attitude puérile des fans va souvent de pair avec un refus du changement et un rejet systématique de tout ce qui ne correspond pas à des standards esthétiques et scénaristiques induits de longue date. Pourtant, de façon tout à fait évidente, les produits issus de ces licences à l'aspect mercantile indéniable s'inscrivent dans la durée et doivent évoluer avec leur époque, sous peine de disparaître. C'est vrai pour les super-héros, et plus globalement pour toutes les figures de la Pop Culture. Par leur refus du changement, et leurs formulations abusives comme “mon Batman”, “mon Star Wars”, ou “mon Superman”, les puristes autoproclamés assassinent ce qu'ils aiment en cherchant à figer l'image totalement biaisée d'un personnage ou d'une licence, en interdisant indirectement l'accès à un nouveau public. Hulk est un exemple très parlant, car c'est sûrement l'un des héros Marvel qui a le plus changé entre les années 1960 et aujourd'hui, en comparaison de personnages comme Tony Stark ou Steve Rogers qui, s'ils ont tous les deux été développés de différentes façons, sont restés beaucoup plus proches de leurs caractéristiques d'origine. Aussi, quand le Marvel Cinematic Universe a adapté ces changements, certes plus abruptement que dans les comic books, une partie des spectateurs s'est plainte de ne plus retrouver “son” Hulk au cinéma. Un grief recevable face aux méthodes expéditives de Disney et Marvel, mais prenant parfois des proportions totalement ridicules, entre appels au boycott, véhémence disproportionnée, et association douteuse avec des discours prônant l'intolérance sous couvert du respect du matériau d'origine. Se plaindre de l'évolution du Hulk du MCU revient tout simplement à nier que le personnage n'a pas toujours été le même dans les comics. C'est le réduire à une masse de muscles décérébrée, un gros balourd tout juste bon à soulever des voitures et à traverser des murs. Évidemment, pour appréhender cela, il faut s'intéresser un minimum à l'histoire du personnage sur le papier et à ce qu'il représente dans l'univers Marvel. Il manque Hulk dans un coin… Hulk est un pur produit de son époque : l'Âge d'Argent des comics, une période où les super-héros reviennent sur le devant de la scène après une longue pause durant laquelle des genres comme l'horreur, la romance et une science-fiction héritière des pulp's les avaient supplantés. Aussi, Stan Lee et Jack Kirby en font rapidement une sorte de pot-pourri d'influences pop, qui va paradoxalement avoir du mal à trouver son public. Irradié par sa propre création, la bombe gamma, le scientifique Bruce Banner se transforme en une monstrueuse créature pratiquement invulnérable : l'incroyable Hulk ! Aidé par son sidekick de fortune, Rick Jones, et poursuivi par l'armée américaine, Banner cherche désespérément à retrouver son humanité tout en essayant de contrôler les pulsions destructrices de Hulk… Comme beaucoup d'autres héros de la Maison des Idées, Hulk reprend les caractéristiques du monstre made in Marvel. Avant d'être un justicier doté de pouvoirs surhumains, comme pouvaient l'être Superman et ses congénères durant le Golden Age, c'est surtout une victime des dérives de la science, incarnation de la peur de l'atome qui étreint la planète au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. À cette thématique propre à la Science-Fiction des années 1950 s'ajoutent deux influences classiques majeures : Frankenstein ou le Prométhée Moderne de Mary Shelley et L'Étrange Cas du Docteur Jekyll et de Mr Hyde de Robert Louis Stevenson. Deux classiques de la littérature gothique ou néo-gothique, faisant partie des fondements de la science-fiction et de l'horreur, qui ont façonné une bonne partie de notre culture populaire moderne. Là aussi, il est question des avancées et des dévoiements de la science, mais aussi de l'évolution de la psychologie et de la façon dont “l'anormal” est perçu en fonction des époques. Pour réhumaniser sa créature, Stan Lee va ajouter au drame de Banner une dimension de Soap Opera qui lui est chère, avec le personnage de Betty Ross. Avec cet amour rendu impossible par la transformation de Bruce Banner, pourchassé par le propre père de sa bien-aimée, la série Hulk gagne en profondeur et parle à un public plus large que celui des seuls amateurs d'aventures super-héroïques. Dès le début, Hulk est un personnage atypique, même pour Marvel Comics. Considéré comme une menace et condamné à la vie de fugitif, Bruce Banner est, bien plus que la Chose des Fantastic Four ou que Spider-Man, mal-aimé et craint par les simples mortels de l'univers Marvel. C'est peut-être à cause de ce statut hybride avant-gardiste, couplé à des affrontements avec des super-vilains assez quelconques, se résumant à des envahisseurs allégorie du Péril Rouge, que le personnage va peiner à rencontrer un lectorat conséquent. Lancée en 1962, Hulk est un échec et la série est annulée après seulement six numéros. Mais Marvel croit en son personnage et le colosse de jade va rapidement visiter les pages d'autres séries de l'éditeur, croisant la route des Quatre Fantastiques ou de l'Homme-Araignée et devenant l'un des membres-fondateurs des Avengers. Revenant dans ses propres aventures dès 1964 sous la plume du légendaire Steve Ditko, dans les pages de Tales to Astonish, Hulk partage le magazine avec Giant Man, puis avec Namor. Bill Everett, John Buscema ou encore Marie Severin vont ensuite se succéder au dessin, et en 1968, après cent-un numéros, le magazine est carrément renommé The Incredible Hulk. Il est intéressant de noter que durant cette période, même si Stan Lee reste crédité comme le principal scénariste, le personnage de Hulk est largement refaçonné par les différents artistes qui travaillent sur ses aventures. La raison même pour laquelle Banner se transforme en monstre varie d'un épisode à l'autre : s'il semble tout simplement se transformer à la tombée de la nuit, tel un loup-garou, dans ses premières aventures, ou même parfois de façon tout à fait injustifiée, on découvre peu à peu, dans les pages de The Avengers ou de Tales to Astonish, que le stress et la colère jouent un rôle prépondérant dans la métamorphose de Banner et dans sa maîtrise de celle-ci. En à peine deux ans, on passe donc d'un Hulk gris qui se transforme la nuit à un Hulk vert qui se transforme sous l'effet de la colère, et la bête pataude et massive des débuts, à mi-chemin entre King Kong et le Frankenstein de Boris Karloff, se mute peu à peu en créature impétueuse et beaucoup plus expressive.La nuit, tous les Hulks sont gris… L'année 1977 marque un nouveau départ pour Hulk. Si le personnage a eu droit à des adaptations en séries animées durant les années 60, 80 et 90, la série live produite par CBS reste sûrement son portage à l'écran le plus célèbre. Réalisé par le prolifique Kenneth Johnson, avec pour têtes d'affiche Bill Bixby dans le rôle de David Banner (renommé ainsi à cause d'un étrange cliché totalement homophobe) et le culturiste Lou Ferrigno dans celui du titan vert, le premier téléfilm diffusé en novembre 1977 va donner naissance à cinq saisons d'une série télévisée qui va faire monter en flèche la popularité du personnage auprès du grand public. N'échappant à aucun cliché de l'époque, la série L'Incroyable Hulk va ancrer l'image d'un Docteur Banner vagabond et victime de ses émotions, exacerbant les influences de Lee et Kirby, la série Le Fugitif et Frankenstein en tête.  Cette version de Hulk, cantonnant la créature à un rôle de brute incapable de s'exprimer autrement que par des grognements, a marqué les esprits pour longtemps, laissant faussement croire que le personnage n'avait pas plus de contraste que ça. Côté comics, de grands noms comme Len Wein, Bill Mantlo, Roy Thomas, Herb Trimpe, Sal Buscema, Roger Stern, ou encore John Byrne, rejoignent la liste des artistes et scénaristes qui interviennent pour un temps plus ou moins long sur la série. Si le fil conducteur d'un Bruce Banner en cavale, menace itinérante semant le chaos à travers les États-Unis, est conservé, The Incredible Hulk explore bien d'autres pistes issues de la Science-Fiction et du Fantastique pour relancer la machine au cours des années 1970 et 1980. L'alter ego de Banner y est également beaucoup mieux traité : contrairement à sa version télévisée, il est doué de parole et de pensée, et constitue un protagoniste à part entière, plutôt que d'être une sorte d'outil scénaristique légitimant les scènes d'action. À partir de 1987, le scénariste Peter David arrive sur la série pour un run qui va durer plus de dix ans et durant lequel il va développer de nombreuses facettes du personnage. Entouré de dessinateurs comme Todd McFarlane, Jeff Purves, Darick Robertson, Dale Keown, Liam Sharp, ou Mike Deodato Jr, Peter David va creuser les variantes existantes du colosse, ou en inventer de nouvelles. Du Hulk gris qui devient Joe Fixit ; au Maestro, dictateur d'un futur dystopique ; en passant par le Professeur Hulk ; Peter David met en évidence ce qui aura peut-être échappé à certains : quoi de mieux que Hulk lui-même pour incarner l'intérêt d'un comic book Hulk ? Sur la décennie où il officie, David fait alternativement de Hulk et de Banner les meilleurs alliés, mais aussi les opposés les plus parfaits, révélant une relation aussi complémentaire que conflictuelle entre l'homme et le monstre. La dimension dévastatrice du colosse n'est plus tant matérielle que psychologique et ses multiples personnalités amènent chacune de nouvelles forces et de nouvelles faiblesses à Banner, qui devient finalement un visage de Hulk parmi tant d'autres. Tel Bruce Banner, Peter David est aujourd'hui indissociable de Hulk. S'il est récemment revenu sur l'univers du personnage pour développer dans des mini-séries relativement dispensables les figures de Joe Fixit ou du Maestro, il reste comme celui qui aura su creuser la psyché de Banner et redéfinir Hulk pour restaurer son image tragique de victime des dérives de la science, captive d'un tumulte qui ne cesse de s'auto-alimenter. À la Banner ! Après avoir tué Betty Banner de la façon la plus traumatisante qui soit, Peter David quitte la série en 1999. Lui succéder n'est pas une mince affaire et bon nombre de scénaristes vont tenter de donner vie à leur vision de Hulk, tout en continuant à exploiter les pistes lancées durant la décennie précédente. Paul Jenkins, Jeph Loeb, Jeff Parker, ou encore Mark Waid vont ainsi œuvrer sur le personnage et développer son background, donnant naissance à des intrigues plus ou moins pertinentes et durables. À titre personnel, je citerais deux sagas particulièrement marquantes qui méritent que vous vous y penchiez, et ça, même si vous n'êtes pas un inconditionnel du colosse de jade. Planet Hulk, écrite par Greg Pak et publiée en 2006, renoue avec les origines nourries de Science-Fiction pulp du personnage, pour un résultat à mi-chemin entre John Carter d'Edgar Rice Burroughs et Ben-Hur. On y suit un Hulk exilé dans l'espace, embrassant une carrière de gladiateur sur une planète étrangère avant de finalement en devenir le héros, puis le souverain. Il s'agit incontestablement de l'un des arcs les plus épiques publiés par Marvel Comics, toutes séries confondues, ces dernières années et il est relativement accessible aux néophytes. Sa suite World War Hulk, se rapproche plutôt de la SF des années 1950, sorte de scénario catastrophe où le monstre arrivé de l'espace pour semer le chaos est remplacé par un Hulk revanchard venu régler ses comptes avec l'univers Marvel. Véritable coup de tonnerre à sa sortie en 2018, la série Immortal Hulk, de Al Ewing et Joe Bennett, revisite en cinquante numéros l'esprit torturé de Bruce Banner. Vision résolument moderne et horrifique du personnage, elle s'éloigne des poncifs super-héroïques et marque un retour aux sources du mythe, où Hulk devient une majestueuse et inquiétante créature crépusculaire, dans un univers que ne renieraient pas Clive Barker et John Carpenter. Flirtant parfois avec le gore et résolument adulte, tant dans le fond que dans la forme, sans oublier de faire quelques clins d'œil à la série de CBS qui permettent de boucler proprement la boucle, Immortal Hulk compte parmi les meilleures séries Marvel des années 2010. Cela ne peut que nous conforter dans l'idée que l'aura de la série TV de CBS, s'étendant bien au-delà de sa diffusion originale entre 1977 et 1982, et prolongée par plusieurs téléfilms jusqu'en 1990, a eu un impact, direct ou indirect, sur le contenu des comics Hulk. Si l'image que vous vous faites de Hulk est celle d'un colosse un peu crétin qui casse tout comme un enfant incontrôlable, c'est plus parce que ce cliché tenace a été imprimé dans votre tête par une série TV que parce que vous avez été au contact du personnage tel qu'il existe réellement dans les pages des comic books. À l'inverse, il est probable que pour tenter de ne pas rebuter un lectorat potentiel conquis par la télévision, Marvel et certains auteurs aient limité pendant longtemps les prises de risques sur le papier, en dénaturant le moins possible l'image du titan vert véhiculée par le biais du petit écran. L'emprise de la série avec Bill Bixby et Lou Ferrigno n'est plus aussi directe que dans les années 1980, mais elle est pourtant gravée dans l'inconscient collectif, transparaissant dans les films et les séries animées qui lui ont succédé, et une série aussi brillante que Immortal Hulk nous démontre que les auteurs d'aujourd'hui ont pleinement digéré cette influence pour en garder le meilleur. Si le Marvel Cinematic Universe, de L'Incroyable Hulk avec Edward Norton en 2008 à la série She-Hulk de 2022, en passant par Avengers et Thor : Ragnarok, s'est aléatoirement inspiré de façon plus ou moins efficace du Hulk des comics, il est, quoi qu'on en pense, représentatif des multiples visages du personnage. De façon plus globale, que ce soit sur le papier ou à l'écran, il est difficile, voire impossible, de définir clairement un seul et unique Hulk. Bien entendu, ce héros possède des caractéristiques immuables, mais entre le monstre nocturne de Stan Lee et Jack Kirby, évoluant dans le contexte de la Guerre Froide, le conquérant cosmique de Greg Pak, et le scientifique aux tendances schizophrènes héritées des travaux de Peter David et Al Ewing, qui est le véritable Hulk ? Cette approche comportementale du personnage, tantôt idiot du village, tantôt stratège dévastateur de mondes, va de pair avec une évolution de sa représentation graphique par les artistes. Hulk est-il une montagne de muscles en costard de gangster, un gladiateur à la tête d'une insurrection, un scientifique bodybuildé en débardeur, ou une créature reptilienne cauchemardesque qui hante l'esprit de Banner ? Peut-être même que pour quelqu'un, quelque part, le “vrai” Hulk est un tyran vieillissant ou un colosse à la peau bleue porteur d'un pouvoir cosmique… Reflet des angoisses et des obsessions de ses auteurs autant que du monde dans lequel il évolue, Bruce Banner compose depuis plus de soixante ans avec ses multiples alter ego pour son plus grand malheur, certes, mais aussi pour le plus grand plaisir des lecteurs. Chacun cherche son Hulk, et ce n'est pas près de s'arrêter… N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    VOLTAR : LA FANTASY PERDUE D'ALFREDO ALCALA

    Play Episode Listen Later Jun 9, 2023 6:43


    Aiguisez vos lames et sortez vos plus beaux casques à cornes, direction les terres sauvages et envoûtantes de l'Heroic Fantasy avec Voltar par Alfredo Alcala, une saga dans la plus pure tradition Sword & Sorcery du Conan le Barbare de Robert E. Howard ! La France cultive une vision assez nombriliste de l'art séquentiel. Quand on sait à quel point le Manga peut encore être méprisé par une partie des lecteurs et des spécialistes du médium, on imagine sans mal la vision réductrice qui existe vis-à-vis des productions venant de pays où le Neuvième Art est jugé, à tort, moins noble qu'en Europe. La préservation et la diffusion du patrimoine de la bande dessinée me semblent aujourd'hui indispensables pour faire vivre cette culture à l'échelle mondiale, et certains éditeurs réalisent un travail remarquable en la matière. C'est le cas de Neofelis Éditions qui nous propose de découvrir les épisodes de Voltar par Alfredo Alcala, publiés aux États-Unis entre 1977 et 1981. Cette intégrale regroupe le premier épisode de Voltar, paru dans le premier numéro de Magic Carpet, ainsi que les huit épisodes suivants parus dans The Rook chez Warren Publishing. On y suit les aventures du héros éponyme, champion du royaume d'Elysium au service du roi Antiochus, qui va devoir libérer sa contrée des hordes de kobolds du seigneur Magog, dont l'invasion préfigure l'Apocalypse. La quête de Voltar l'emmènera jusqu'aux profondeurs de la Terre, à la recherche d'un sauveur qui pourra libérer Elysium. Dans ce périple semé d'embûches à travers un monde hostile livré à des plaies ancestrales, Voltar va affronter les sombres sicaires de Magog, des cavaliers assassins vêtus de noirs qui ne sont pas sans rappeler les Nazgûls de l'univers de Tolkien, et de nombreuses autres créatures fantastiques. Graphiquement, Alcala, dont le style est ici à mi-chemin entre Frank Frazetta et Gustave Doré, propose des paysages démesurés qui invitent au voyage et à l'aventure. On est aspiré par son univers sombre et farouche, rempli de personnages héroïques et de monstres effrayants, et le grand format de l'album permet de profiter à fond de ses planches éblouissantes ! Cette ambiance de fin de monde, où un messie providentiel doit terrasser le malin et où le destin semble inexorable, fait sans doute écho à l'éducation d'Alfredo Alcala, mais aussi à l'histoire des Philippines. Pays très catholique occupé tour à tour par les Espagnols, les Américains, puis les Japonais, avant de connaître la dictature de Ferdinand Marcos, l'archipel Philippin possède une histoire mouvementée dont résulte un cocktail improbable de principes religieux et de culture pulp qui a sans doute influencé par bien des façons le travail de l'auteur. Cultivant un sens du sacrifice tout ce qu'il y a de plus biblique, le vaillant guerrier d'Alfredo Alcala ne recule devant rien pour accomplir sa mission, dans une démarche jusqu'au-boutiste qui rencontre la Fantasy du Seigneur des Anneaux et les mythes et légendes de l'Antiquité. Né en 1925 aux Philippines, Alfredo P. Alcala publie ses premiers travaux dès 1948. Artiste hétéroclite, il s'essaie autant aux histoires de Science-Fiction qu'à la Romance ou à l'Horreur. En 1963, il crée le personnage de Voltar, qui emprunte de toute évidence à l'œuvre de Robert E. Howard, créateur de Conan le Barbare, Kull le Conquérant et Solomon Kane. Ce héros d'une série de quarante-cinq épisodes ; dont on retrouvera le tout premier publié dans Alcala Fight Comix chez Craf Publishers aux Philippines au sommaire de l'intégrale de Neofelis ; répond aux codes classiques de l'Heroic Fantasy, et plus particulièrement du genre Sword & Sorcery. Comme Conan, Voltar est un valeureux combattant ne comptant que sur sa force et son courage pour affronter les forces du mal. Cependant, si le personnage fait parfois preuve de ruse et se montre impitoyable envers ses ennemis, il n'en reste pas moins fidèle à des principes quasi-chevaleresques et se comporte bien plus en héros modèle que le Cimmérien, beaucoup plus enclin aux beuveries et aux comportements irrespectueux envers les femmes que son homologue philippin…  En 1972, Alfredo Alcala commence à travailler comme dessinateur et comme encreur pour DC Comics, notamment sur des séries horrifiques comme House of Secrets, House of Mysteries ou The Unexpected. Pour le même éditeur, il officie également comme encreur sur la série Swamp Thing entre 1986 et 1990. Outre l'Horreur et ses dérivés, Alcala reste très lié au genre qui à fait sa popularité à l'international : l'Heroic Fantasy. En plus de participer à plusieurs numéros des séries Kull the Destroyer chez Marvel et Arak, Son of Thunder chez DC, il va surtout démontrer ses talents de dessinateur et d'encreur sur un grand nombre d'épisodes de Conan the Barbarian et The Savage Sword of Conan. Une forme de consécration pour celui qui a passé une grande partie de sa carrière philippine à mettre en scène les aventures d'un héros largement inspiré par celui de Howard et par les travaux de ses émules, qui firent les belles heures des pulp's durant la première moitié du vingtième siècle aux États-Unis. Aujourd'hui encore, les comics Conan publiés par Marvel pendant plus de vingt ans, dont les équipes créatives prestigieuses comptent des talents comme Roy Thomas, John Buscema, Earl Norem ou Marie Severin, méritent tout l'intérêt du public. Que ce soit pour le souffle épique des aventures qu'ils présentent ou l'adaptation et le développement de l'univers créé par Robert E. Howard pendant sa courte carrière plusieurs décennies auparavant. Par son travail sur l'une des licences stars des années 1980, Les Maîtres de l'Univers, Alcala marquera aussi l'esprit des plus jeunes en réalisant plusieurs mini-comics promotionnels distribués avec les figurines de la fameuse ligne de jouets de Mattel. Plus exotique encore, il encrera même plusieurs numéros de la série Scooby-Doo de Archie Comics, avant de prendre sa retraite en 1997.Décédé en l'an 2000, Alfredo Alcala aura collaboré avec les plus grands noms de la bande dessinée américaine sur des séries comme Hellblazer ou Kamandi, et son style unique, plusieurs fois récompensé, restera à jamais gravé dans l'histoire des comic books. Grâce à Neofelis Edition, qui nous offre ici un ouvrage à l'envergure patrimoniale essentielle, qui condense tout le pouvoir de la bande dessinée, l'œuvre d'Alfredo Alcala vit et pourra, je l'espère, toucher une nouvelle génération de lecteurs. Enfin, on ne peut qu'adresser un grand bravo à Tristan Lapoussiere pour son travail de recherche et de restauration, avec l'aide du fils d'Alfredo Alcala. La préface et la galerie de couvertures sont richement documentées et permettent d'en apprendre plus sur l'artiste et sur le contexte de publication de ses productions aux Philippines. Évidemment, si vous voulez en savoir plus sur cette intégrale Voltar, je vous conseille d'aller faire un tour sur le site de Neofelis pour soutenir leur démarche ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    SAGA : L'ÉPOPÉE ULTIME DE SPACE-FANTASY ?

    Play Episode Listen Later Apr 26, 2023 6:55


    Voilà près de trente ans que je lis des comics, et la série dont je vais vous parler aujourd'hui entre sans mal dans le top 3 de ce que j'ai pu lire de mieux dans ma vie. Oui, sur Internet, on adore faire des tops et des classements, alors qu'il n'y a pas plus inutile et subjectif quand on parle d'art. Mais vous avez saisi l'idée : le comic book qui nous intéresse est une véritable pépite : Saga de Brian K. Vaughan et Fiona Staples ! LÀ-HAUT, DANS LES ÉTOILES…Quand Star Wars rencontre Game of Thrones et Les Animaux du Bois de Quat'sous (si, si, je vous assure que le cocktail est valide), ça donne Saga, une série qui porte bien son nom et dont la publication a commencé en 2012 aux États-Unis chez l'éditeur Image Comics. Écrite par Brian K. Vaughan, déjà derrière le comic book à succès Y, Le Dernier Homme, et dessinée par Fiona Staples, Saga commence par la rencontre entre Alana et Marko. Elle est originaire de la planète Continent, dont la population ailée maîtrise une technologie très avancée, tandis que lui est natif de Couronne, le satellite naturel de Continent, dont le peuple, reconnaissable à ses cornes, pratique la magie. En conflit depuis de nombreuses années, les armées de Couronne et de Continent se livrent bataille partout où cela est possible, forçant chacun à choisir son camp à grands coups d'endoctrinement et de propagande. Capturé, Marko se voit emprisonné sur la planète Clivage, où Alana est désignée pour être sa surveillante. Mais de façon tout à fait inattendue, nos deux héros vont briser un véritable tabou en débutant une histoire d'amour. Forcés de prendre la fuite, le prisonnier et sa gardienne vont bientôt devenir la cible de toutes les attentions quand une nouvelle s'ébruite : Alana est enceinte et donc la preuve vivante que l'union entre les habitants de Couronne et ceux de Continent est possible… De leur amour défendu naît Hazel, une petite fille possédant à la fois des ailes, comme sa mère, et des cornes, comme son père. Principale narratrice de l'histoire, Hazel raconte dès lors au lecteur son périple en compagnie de ses parents, désormais considérés comme des traîtres et dont les têtes sont mises à prix. Leur voyage semé d'embûches est l'occasion pour nous de découvrir une foisonnante galerie de personnages à travers des mondes tantôt hostiles, tantôt merveilleux, où Hazel découvre, souvent malgré elle, la véritable nature et parfois les sombres motivations des gens qui l'entourent. Poursuivis et constamment sur le qui-vive, Alana, Marko et leur famille ne peuvent que trop rarement faire confiance à autrui, au risque de tout perdre et de semer le chaos sur leur passage. À l'image de l'univers de Star Wars, Saga brille par l'inventivité des concepts et des personnages présentés, chacun distillant un microscopique fragment d'un univers que l'on imagine sans limite. Les seconds rôles comme Le Testament, chasseur de primes accompagné de son Chat-Mensonge ; capable de déterminer si quelqu'un dit ou non la vérité ; ou bien le Prince Robot IV, chargé de poursuivre Alana et Marko au prix de son honneur, participent à la fois à la tension et au ton satirique de la série. Et si l'on sait ces personnages impitoyables et déterminés à tuer quiconque se mettra en travers de leur route, cela n'empêche pas les auteurs de les rendre attachants, et même de nous faire éprouver de l'empathie envers eux quand leur situation devient critique. Enfin, Hazel, qui reste l'héroïne servant de liant entre tous les autres protagonistes, va grandir au fur et à mesure que la série avance. De ses premiers jours à sa crise d'adolescence, elle est le fil conducteur des lecteurs et des lectrices de Saga, et décrit les événements vus de l'intérieur, avec l'impertinence propre à beaucoup d'enfants. Ce procédé, en plus d'apporter une touche d'humour parfois nécessaire face aux drames que traverse Hazel, aide beaucoup à l'implication et l'identification du lecteur. HAPPY TOGETHER ?Brian K. Vaughan considère lui-même Saga comme une allégorie de la création, comparant la naissance d'un enfant à la conception d'une bande dessinée, avec tous les défis que cela implique. Au fil des épisodes, on verra chaque intervenant ajuster les curseurs de sa propre existence pour mieux s'adapter aux autres et à un environnement en constante évolution, comme si se surpasser et devenir quelqu'un de meilleur était la seule option pour surmonter les difficultés du vivre-ensemble dans un espace infini. De son côté, Fiona Staples pioche dans diverses influences pour donner vie à l'univers de Saga. Impliquée dans le processus créatif de la série depuis le début, elle propose à travers ses planches des paysages colorés, oniriques, et parfois oppressants qui, là encore, invitent à la contemplation et à laisser dériver son imagination dans l'immensité du cosmos, à la rencontre des créatures fantastiques qui le peuplent. En 2018, après cinquante-quatre numéros, Vaughan et Staples annoncent faire une pause pour marquer la première moitié de la publication de la série, qui devrait donc compter cent-huit épisodes au total. En janvier 2022, Saga reprend, et je dois avouer que j'attendais ce retour avec impatience. Une fois encore, la série surprend tout en raccrochant brillamment les wagons, et ce malgré sa longue absence et un saut temporel conséquent dans le scénario. S'il ne fallait qu'une preuve du génie de Vaughan et Staples, elle est là. Si l'on cite notamment Star Wars parmi les grandes influences de Saga, ce n'est pas pour rien. Tout comme la création de George Lucas, la série de Brian K. Vaughan et Fiona Staples se place en héritière de la science-fiction issue des pulp's et des règles du Space Opera édictées par des auteurs et autrices comme Edgar Rice Burroughs, Edmond Hamilton, Leigh Brackett, Alex Raymond, et plus tard Frank Herbert. Dans le cas présent, on parlera même de Space Fantasy, car en plus des vaisseaux spatiaux et des voyages interplanétaires que leur présence implique, on trouve des éléments scénaristiques appartenant aux registres du Fantastique et de la Fantasy, comme de la magie, avec la langue bleue dérivée de l'espéranto utilisée par les habitants de Couronne, mais aussi des fantômes et autres entités surnaturelles. Au-delà de cette question de classification, finalement très secondaire, l'univers proposé par Vaughan et Staples parvient à être aussi cohérent que farfelu et sait se jouer des codes pour mieux distiller ses messages. Saga, c'est la petite histoire dans la grande, une rencontre anodine dans le marasme d'une guerre ancestrale subie par des peuples qui l'ont reçue en héritage. Évidemment, les parallèles avec des situations bien réelles ne manquent pas, et Vaughan et Staples ne se privent pas de souligner l'absurdité de tels conflits et des dérives politiques et éducatives qui en découlent. Ode à la tolérance, à la diversité des populations, des croyances, des pratiques et surtout des individus, Saga est sans doute le comic book qui porte l'un des discours les plus universels. Qu'il s'agisse d'amour, d'amitié, de confiance en soi et envers les autres, de la façon dont on doit affronter ses peurs et gérer ses frustrations, ou bien encore de la nature humaine dans ce qu'elle a de plus complexe, Saga est une série qui touche toujours juste, d'une façon ou d'une autre, et ça qui que vous soyez.  Si vous voulez découvrir Saga, qui restera pour moi l'une des meilleures bandes dessinées de tous les temps, la série est disponible en français chez Urban Comics. 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    CYBERFORCE : LA REVANCHE DES MUTANTS

    Play Episode Listen Later Feb 5, 2023 10:40


    Les histoires de super-héros ont parfois la réputation de se résumer à un enchaînement de bagarres et d'explosions dont les onomatopées bariolées cachent un manque manifeste de profondeur. Idée reçue ou fait avéré ? Voici une série culte parfaite pour trancher la question ! TAKE THAT DISK OUT OF YOUR MOUTH !Les années 1990 sont le pinacle d'un genre bien particulier de comic book : celui mettant en scène des anti-héros violents et immoraux. Initiée durant la décennie précédente, cette tendance atteint son paroxysme avec les publications de Image Comics comme Spawn, Youngblood, WildC.A.T.s, et celle qui nous intéresse aujourd'hui : CyberForce. La série, qui vient de fêter son trentième anniversaire, est de nouveau disponible en version française aux Éditions Reflexions, l'occasion ou jamais de revenir sur ce classique parfois mal-aimé ! Débutée comme une mini-série de quatre numéros en octobre 1992 et publiée sous le label Top Cow par Image Comics en collaboration avec Malibu Comics, CyberForce est une création du dessinateur Marc Silvestri, qui coécrit le scénario avec son frère Eric. On y découvre un groupe d'individus aux pouvoirs mutants améliorés cybernétiquement, manipulés à des fins criminelles via des “brain box”, et utilisés comme une troupe d'élite à la solde d'une organisation maléfique appelée Cyberdata. Parvenant à échapper au contrôle de leur geôlier tyrannique, certains de ces mutants prennent la fuite et fondent une équipe ayant pour objectif de contrecarrer les plans de Cyberdata : CyberForce. Le premier épisode de la série s'ouvre sur la fuite de Velocity, jeune femme dotée d'une célérité prodigieuse, poursuivie par un escadron de Cyberdata dirigé par Ballistic. Cette dernière, en plus de posséder une force surhumaine, manifeste une dextérité hors du commun avec les armes à feu, ne ratant pratiquement jamais sa cible. Alors que tout semble terminé pour Velocity, elle est miraculeusement sauvée par Ripclaw et Heatwave, deux membres de CyberForce, qui mettent en déroute Ballistic et son équipe avant de ramener la jeune mutante jusqu'à leur quartier général. En parallèle, on découvre les autres membres de CyberForce : Stryker, Cyblade et Impact, chargés d'assurer la protection d'un mutant briguant la place de maire. Évidemment, le candidat est la cible d'une tentative d'attentat, et nos héros vont devoir user de leurs pouvoirs pour le protéger. Le premier arc de la saga s'articule principalement autour la lutte entre CyberForce et Cyberdata pour s'approprier ou protéger Velocity, qui devient un point de repère récurrent pour le lecteur devant, tout comme elle, se familiariser avec ce monde rempli de surhommes. Lorsque CyberForce devient une série régulière, à la fin de l'année 1993, Image Comics propose un crossover entre les héros de Marc Silvestri et ceux de Jim Lee, les WildC.A.T.s. Cette rencontre intitulée “Killer Instinct” est l'occasion de découvrir que les deux équipes fonctionnent un peu en mode miroir, tout du moins à leurs débuts, ce qui n'a rien d'étonnant quand on connaît le parcours de leur créateur respectif chez Marvel. Dans les numéros suivants, Marc Silvestri reçoit l'appui prestigieux de Chris Claremont au scénario, avant de laisser sa place à David Finch au dessin, puis au scénariste Brian Holguin pour la majorité des épisodes suivants. Bien que la série des frères Silvestri introduise un nombre considérable de personnages en seulement quelques numéros, c'est bien autour de Heatwave, Cyblade, Stryker, Ripclaw, Impact, Velocity et Ballistic que celle-ci construit la plus grande partie de ses intrigues. Ces protagonistes, majoritairement calqués sur des archétypes super-héroïques déjà éculés à l'époque, rappellent fortement les X-Men de Marvel. Sans parler de copie ou de plagiat, le contexte dans lequel évoluent les héros mutants de CyberForce, celui d'une société hostile où différents points de vue s'opposent, ne peut que pousser le lecteur à comparer la série à celle des enfants de l'atome de la Maison des Idées. Il en va de même pour les relations tumultueuses entre certains personnages, qu'elles soient familiales ou amoureuses, qui se conforment à des clichés très convenus de la bande dessinée américaine, entre amours impossibles, passé trouble et culpabilité enfouie. Au-dessus de ce socle pour le moins conventionnel, on trouve quelques fulgurances propres aux productions des 90's qui, si elles peuvent paraître un peu ringardes aujourd'hui, restent pour les fans de la première heure de véritables friandises à l'instantané pouvoir régressif, qu'il s'agisse de Stryker et ses quatre bras (dont trois du même côté) ou de Ripclaw et ses griffes symbiotiques, évidente continuité du travail mené par Marc Silvestri sur Wolverine. Top Cow va exploiter le filon CyberForce en développant un univers étendu autour de l'équipe, avec des séries consacrées aux aventures en solo du charismatique et mystérieux Ripclaw ou avec Codename: Strykeforce, racontant les exploits de Stryker et de ses mercenaires d'élite. Rien de vraiment mémorable, tout comme les crossovers entre CyberForce et la Justice League of America en 2005, ou les X-Men en 2007, façon plutôt amusante de boucler la boucle pour les héros de Marc Silvestri. En 2012, pour fêter les vingt ans de CyberForce, Silvestri va relancer la série et revisiter sa propre création avec un reboot abandonnant le ton super-héroïque grim & gritty des origines pour des influences de science-fiction cyberpunk post-apocalyptique. Une relecture pertinente et beaucoup plus moderne, proche de la brillante série The Wild Storm de Warren Ellis et Jon Davis-Hunt, parue entre 2017 et 2019 chez DC Comics. I'M NOT PAID TO THINK !L'histoire de Top Cow et de CyberForce est intimement liée à celle de Image Comics. Image Comics né en 1992, lorsque Todd McFarlane, Marc Silvestri, Jim Lee, Rob Liefeld, Erik Larsen, Jim Valentino et Whilce Portacio quittent Marvel et DC Comics pour fonder leur propre maison d'édition. S'estimant spoliés par les Big Two qui, rappelons-le, restent propriétaire des créations de leurs employés, ces jeunes artistes décident, dès la fin de l'année 1991, de revendiquer un plus grand respect de leurs droits d'auteur. Malgré une tentative de médiation avec Terry Stewart, président de Marvel à l'époque, aucun accord satisfaisant ne sera trouvé, provoquant le départ des frondeurs. C'est un véritable coup de tonnerre pour le marché de la bande dessinée américaine. Au début des années 1990, McFarlane, Lee, Larsen, Liefield et Silvestri étaient aux commandes des séries les plus populaires de Marvel Comics : Spider-Man, les X-Men, X-Force, ou encore Wolverine. Des titres qui battent tous les records de vente et dont les multiples réimpressions et variant covers font le bonheur des spéculateurs. L'alliance formée par ces talents prometteurs enthousiasme les lecteurs, et le succès est immédiat. Lancés en 1992, les premiers numéros de Youngblood, Spawn, WildC.A.T.s et Savage Dragon sont de véritables réussites commerciales, et la volonté de conserver une forme d'univers partagé, notamment présente dans CyberForce, assure également la production de crossovers événementiels qui permettent une promotion croisée des titres. Ainsi, les premières publications Image sont écoulées à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires, le million étant même atteint pour les numéros 1 de Spawn et WildC.A.T.s, permettant au jeune éditeur de réaliser un véritable tour de force : dépasser les ventes DC Comics et se classer deuxième sur le marché, juste derrière Marvel. Évidemment, tout cela ne va pas durer. Dès 1993, l'explosion de la bulle spéculative entraîne une série d'événements qui mène même Marvel Comics aux portes de la faillite en 1996, mais c'est une autre histoire. Du côté de Image Comics, les ventes dégringolent également, mais ce sont surtout des soucis de gestion interne, dûs au manque d'expérience de l'équipe, qui vont mettre l'éditeur en difficulté. Tandis que Top Cow cartonne avec des séries comme Witchblade, The Darkness ou Fathom, les membres fondateurs de Image Comics vont prendre des directions différentes et l'univers partagé des origines va pratiquement disparaître quand Jim Lee rejoint DC Comics en 1998, emportant avec lui ses créations. Au début des années 2000, l'éditeur va peu à peu diversifier son offre en proposant des titres qui deviendront à leur tour des best-sellers, comme The Walking Dead, Invincible ou Saga. Il n'en reste pas moins que le catalogue des débuts de Image Comics propose quelques pépites particulièrement marquantes et dont l'aura trouve encore un écho non-négligeable aujourd'hui, notamment auprès des lecteurs qui étaient ados entre la fin des années 1980 et le début des années 2000. Évidemment, certains éléments scénaristiques, placés de façon pratiquement automatique à l'époque, ont très mal vieillis, et CyberForce ne fait pas exception. Entre ses héros dégoulinants de testostérone et ses héroïnes devant systématiquement répondre au cliché de la femme fatale ou de la jeune fille en détresse, hypersexualisée dans les deux cas, la série est définitivement pensée comme un produit de divertissement à destination des ados masculins nourris aux blockbusters de l'ère Reagan. Malgré un sous-texte affichant parfois des prétentions sociales et politiques qui ne sont que très rarement atteintes, CyberForce reste l'un de ces comic books “pop corn” qui brillent surtout et avant tout par leur partie graphique flamboyante. Sur ce point, le travail de Marc Silvestri est encore aujourd'hui un véritable plaisir pour les yeux, tant son sens de la dynamique et son talent pour concevoir des personnages iconiques sont efficaces. Ouvertement hérités de ses travaux sur les mutants de Marvel, les designs de Ripclaw, Ballistic ou Velocity permettent de comprendre leurs traits de caractère au premier coup d'œil et ancrent durablement ces protagonistes dans la mémoire du lecteur. Pur produit de son époque, mélange inattendu entre les X-Men et Universal Soldier avec Jean-Claude Van Damme, CyberForce est avant tout à découvrir aujourd'hui sous un jour patrimonial. Trente ans après sa première publication aux États-Unis, la série reste très présente dans la mémoire des fans de comics : madeleine de Proust pour les uns, nanar décérébré pour les autres, CyberForce est l'incarnation même de la recette qui a fait le succès de Image à ses débuts et synthétise à merveille le vent de révolte qui a poussé un groupe de jeunes auteurs à prendre son indépendance. Souvent accusée d'être simpliste, la série de Marc Silvestri est pourtant l'évidente allégorie du contexte de sa création. Comme si ses héros aux talents améliorés, transformés en machines par une entité malveillante tentaculaire ayant pour objectif de dominer le monde; et au nombre de sept, comme les fondateurs de Image Comics; n'étaient que le reflet de créateurs exploités par des sociétés de divertissement déshumanisées. Pour les curieuses et les curieux qui voudraient découvrir CyberForce, rendez-vous sur le site des Éditions Reflexions ! N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    BLOODSTAR : HÉRITAGE D'UN LOINTAIN FUTUR

    Play Episode Listen Later Dec 26, 2022 9:18


    Quand un artiste incontournable du monde des comic books entreprend d'adapter l'un des auteurs les plus influents de la Pop Culture, le résultat ne peut être qu'une fresque époustouflante porteuse d'un message qui traverse les âges. Un achèvement concrétisé par Bloodstar de Richard Corben, d'après Robert E. Howard. Le Choc des TitansLa route fut longue, sinueuse, semée d'embûches, faites de pentes et de rampes aux inclinaisons ahurissantes, mais il me semble que l'on peut désormais l'affirmer avec plus ou moins de certitude : la bande dessinée américaine n'est plus considérée comme une catégorie inférieure du neuvième art. En tout cas, plus autant qu'avant. Les mentalités évoluent, et les lecteurs comprennent depuis quelque temps l'importance de l'aspect historique et culturel de certaines publications. Les éditeurs aussi l'ont compris : entre les intégrales de Panini Comics, qui vont chercher de plus en plus de pépites jusqu'alors négligée du catalogue de Marvel; la collection Urban Cult, qui propose de redécouvrir Animal Man, Grendel ou encore Camelot 3000; Huginn & Muninn qui offrent enfin une édition honorable à Madman de Mike Allred en France; et même Reflexions, qui fête le trentième anniversaire de Image Comics en nous proposant les intégrales de CyberForce; on voit désormais fleurir dans nos bibliothèques des comics au format parfois luxueux, et reflétant toute la richesse du patrimoine de la bande dessinée américaine. S'il y a bien un éditeur français qui se plie en quatre pour réaliser un véritable travail de préservation de la BD anglo-saxonne, c'est Delirium. Aux côtés de Judge Dredd, de The Mask, ou des Nextmen de John Byrne, on trouve au catalogue de l'éditeur de véritables bijoux comme Nemesis de Pat Mills, Nexus de Mike Baron et Steve Rude, mais aussi une impressionnante collection dédiée au travail de Richard Corben. Récompensé à de multiples reprises pour son travail, Richard Corben est une figure incontournable de la bande dessinée indépendante américaine. Après avoir travaillé pour Warren Publishing et Métal Hurlant, Corben fondera son propre label : Fantagor Press, avant de collaborer avec les Big Two sur des séries comme Hellblazer, pour le label Vertigo de DC Comics, et des personnages comme Luke Cake ou le Punisher chez Marvel. Son trait particulièrement reconnaissable, ses univers à la fois exotiques et inquiétants, ses personnages aussi candides qu'abîmés, et un érotisme latent, parfois décrié, font de l'œuvre de Corben un ensemble riche mais homogène, qui dépeint le plus souvent un monde où règne la loi du plus fort. Avec Bloodstar, dont la première parution remonte à 1976 chez The Morning Star Press aux États-Unis, Corben adapte une nouvelle de l'incontournable auteur texan Robert E. Howard : La Vallée du Ver (The Valley of the Worm), publiée en 1934 dans le magazine Weird Tales. Né en 1906, Robert Ervin Howard est un écrivain très prolifique comptant parmi les pères fondateurs de la Fantasy moderne. Créateur de Solomon Kane, Kull, mais aussi, évidemment, de Conan le Barbare, qui deviendra son personnage le plus populaire et dont le succès sera longtemps entretenu par les comics et le cinéma. Ses histoires ont fait les belles heures des pulps, magazines bon marché très populaires aux États-Unis durant la première moitié du XXe siècle et dans lesquels de nombreux auteurs de science-fiction et de fantastique ont fait leurs débuts, de Isaac Asimov à Edgar Rice Burroughs, en passant par Philip K. Dick, Ray Bradburry ou Frank Herbert. En 1936, quand il apprend que sa mère atteinte de tuberculose, et dont il prend soin depuis de nombreuses années, ne sortira plus du coma, Howard, déjà dans un état dépressif sévère, se suicide d'une balle dans la tempe. Mort à seulement 30 ans, il laisse derrière lui un univers incroyablement riche et documenté, fruit d'un travail minutieux et acharné. Si on lui doit d'avoir défini le genre que l'on nomme aujourd'hui Sword & Sorcery, il aura également été l'auteur de nombreuses histoires de western, d'horreur et de sport, plus particulièrement sur le thème de la boxe. Société, tu m'auras pas !Contemporain de H.P. Lovecraft, Howard a entretenu avec ce dernier une correspondance aussi soutenue qu'amicale. Et bien qu'ils ne se soient jamais rencontrés, on peut parfois ressentir l'influence de l'un dans le travail de l'autre. Les deux auteurs possèdent pourtant des visions assez différentes du monde qui les entoure. Les écrits de Lovecraft sont le reflet des craintes et des fascinations, souvent complémentaires, de son temps. Ils traduisent sa peur de l'inconnu et son profond mal-être dans une société dont les évolutions le dépassent et le répugnent. Chez Lovecraft, la menace est extérieure, étrangère, tandis que Howard, lui, dépeint plutôt des civilisations qui, autrefois luxuriantes, sont sur le déclin. Dans ses récits, le monde s'effondre de l'intérieur. Si cela renvoie, comme chez Lovecraft, à une peur du changement, on peut y voir de façon plus pragmatique les inquiétudes d'un Américain moyen dans un pays qui fait face à une crise économique sans précédent tandis que l'ombre de la guerre se fait plus menaçante que jamais en Europe… De ce point de vue, les histoires de Robert E. Howard gardent une valeur intemporelle qui leur permet d'être encore très pertinentes aujourd'hui. Le lecteur peut facilement s'identifier à ses personnages, généralement des héros solitaires, évoluant dans des cités décadentes gangrenées par le crime et les croyances occultes, et inévitablement amené à user de la violence pour survivre dans un monde de plus en plus cruel. Quand chez Lovecraft, la vérité paraît être l'ultime menace qui rend fou quand on lui fait face, Howard voit surtout le danger dans l'autre. Dans ses récits, aider son prochain peut vous permettre de trouver un allié qui vous épaulera pour survivre dans un monde hostile, ou vous conduire à votre perte.  En ce sens, les univers de Robert E. Howard et de Richard Corben ne pouvaient que se rencontrer. Dans Bloodstar, on suit le périple du personnage du même nom, guerrier d'une tribu d'Aesirs qui va devoir surmonter de nombreuses épreuves. Entre de sanglantes guerres tribales, des bêtes sauvages affamées et son amour impossible pour la femme promise à son nouveau chef, qui l'amènera à être exilé, Bloodstar n'aura de cesse de prouver sa bravoure et sa dévotion envers les personnes qu'il aime, jusqu'à un ultime affrontement avec une effroyable créature surgie des profondeurs de la Terre. Au fil des pages, Richard Corben esquisse une désolation onirique, un monde futuriste sauvage qui, un peu comme dans Hawkmoon de Michael Moorcock, a régressé après une succession de cataclysmes et dans lequel l'être humain cède à ses pulsions les plus barbares. Dans ces paysages farouches et anxiogènes, l'artiste n'est pas un explorateur, c'est un guide : à travers ses jeux d'ombres et de lumières, il nous emporte dans un univers dont la poésie n'a d'égal que la brutalité et on comprend très vite que personne ne peut y vivre en sécurité très longtemps. Il existe cependant plusieurs différences entre la nouvelle originale de Howard et son adaptation par Richard Corben, principalement parce que Corben développe beaucoup plus le caractère des personnages secondaires et ajoute une véritable romance entre Bloodstar et Helva, qui n'était même pas nommée dans La Vallée du Ver. L'aspect post-apocalyptique du récit est également un ajout propre à Bloodstar, même s'il rejoint la pensée collapsologiste de Howard et respecte sa vision des dérives sociétales, des difficultés de la vie en communauté à l'impact de l'homme sur son environnement. Bloodstar, c'est aussi une histoire d'héritage. Là où le héros de la nouvelle de Robert E. Howard semblait se souvenir de ses vies passées le temps d'un songe, Richard Corben transpose cette notion dans une relation père-fils inachevée, une brillante synthèse de la façon dont les mythes classiques ont inspiré la littérature populaire, qui a elle-même nourri la bande dessinée. Une thématique d'autant plus symbolique quand on sait que cette œuvre, vendue par son premier éditeur comme l'un des tous premiers romans graphiques, aurait pu tomber dans l'oubli et ne jamais nous parvenir. Il aura en effet fallu près de dix ans pour réunir et restaurer les planches de Corben afin d'offrir une réédition digne de ce nom à Bloodstar. Un travail opiniâtre de Laurent Lerner, José Villarrubia et de toute l'équipe de Delirum, pour redonner vie à cette œuvre, quatre décennies après son édition française en couleurs chez les Humanoïdes Associés, dans une version en noir et blanc plus respectueuse de ce que Richard Corben considérait comme l'un de ses travaux préférés. L'ouvrage est complété par une préface de François Truchaud, traducteur spécialiste de Robert E. Howard, malheureusement décédé en 2020, tout comme Richard Corben. On trouve également en fin de volume une galerie de planches originales qui régalera les amateurs du style inimitable de l'artiste. La démarche de préservation du patrimoine de la bande dessinée cultivée par Delirium est essentielle et elle trouve un véritable écho auprès du lectorat, en témoigne le succès du financement participatif sur KissKissBankBank qui a collecté plus de dix fois la somme de son objectif initial pour la réédition du livre. Un héritage culturel et artistique, voilà ce qu'est Bloodstar. Un témoignage du lien naturel existant entre les pulps et les comics, et de la portée universelle du message qui peut être contenu dans toute fiction, au-delà des genres et des formats. Sans s'afficher comme une œuvre revendicatrice, le Bloodstar de Richard Corben porte des valeurs héritées des maîtres de la science-fiction et du fantastique tout en entraînant le lecteur dans un voyage qui invite à la réflexion sur notre monde et sur son évolution. Si vous voulez soutenir Delirium et son impressionnant travail éditorial, le mieux à faire est d'aller directement passer commande sur leur site !N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail, sans intermédiaire ni publicité, en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    ADOLF HITLER DANS LES COMICS

    Play Episode Listen Later Nov 12, 2022 14:53


    Aujourd'hui, on va se pencher sur un pan tout à fait particulier de la bande dessinée américaine, à la fois politique, polémique et exotique : l'étrange habitude des auteurs de comics qui consiste à utiliser Adolf Hitler dans leurs histoires… Évidemment, au cas où vous en douteriez, il ne sera pas question de faire ici l'apologie d'un dictateur responsable de la mort de millions de personnes, ni du nazisme ou de l'intolérance sous toutes ses formes, mais bien de parler de comics. Pour recontextualiser un peu, Adolf Hitler est un dictateur ayant pris le pouvoir en Allemagne en 1933. Figure centrale de l'idéologie nazie, il instaure dans son pays un régime fasciste, raciste, homophobe et antisémite, avant de mener une campagne militaire à visée expansionniste dans une bonne partie de l'Europe, à l'origine de la Seconde Guerre Mondiale. Responsable de l'extermination de dizaines de millions de personnes, le Troisième Reich dirigé par Hitler sera l'un des régimes les plus meurtriers et liberticides du XXe siècle, avant d'être définitivement renversé par les alliés en 1945.Évidemment, je vous la fais courte, premièrement car je ne suis pas prof d'histoire, et deuxièmement parce que j'ose croire que chacun et chacune d'entre vous est au courant des crimes atroces commis par l'Allemagne nazie et ses sympathisants. Mais il est quand même important de comprendre que pendant plusieurs années, Adolf Hitler, les nazis, et le Troisième Reich ont été une menace pour une grande partie des nations partout à travers le monde, y compris les États-Unis. Et cette époque coïncide justement avec l'explosion d'un genre à part entière au pays de l'Oncle Sam : le comic book de super-héros. Quand Superman apparaît pour la première fois dans le numéro 1 de Action Comics, en 1938, le monde n'est pas encore en guerre, mais la situation en Europe est déjà bien assez préoccupante pour que l'air du temps inspire les artistes de comics. Le monde a besoin de héros pour affronter des menaces toujours plus grandes, et l'invasion de la Pologne en 1939 va offrir des adversaires de choix aux super-héros américains qui se multiplient à vue d'œil. Rapidement, le régime nazi, ses soldats, et surtout ses espions, se révèlent être de parfaits antagonistes pour les histoires de justiciers costumés. Dès octobre 1939, le deuxième numéro de Marvel Mystery Comics nous raconte comment The Angel a sauvé la population polonaise des bombardements allemands. Puis en juin 1940, Adolf Hitler apparaît en personne, sans toutefois être nommé, dans la toute première, mais aussi l'unique aventure de Marvel Boy, créé par le duo formé par Joe Simon et Jack Kirby. Le début d'une très longue liste d'apparitions dans les pages de nos comic books préférés. Je vous le dis tout de suite : il me sera impossible d'être exhaustif, car Adolf Hitler apparaît littéralement dans plusieurs centaines de comic books, parfois le temps d'une case, parfois en tant qu'antagoniste principal, et ce qui est sûr, c'est qu'aucun autre personnage historique ne possède une carrière comparable dans la bande dessinée américaine, encore plus quand on se souvient que l'on parle quand même d'un dictateur génocidaire. La parution de Captain America Comics #1, en décembre 1940, a marqué l'histoire et les lecteurs en montrant sur sa couverture la sentinelle de la liberté en train de mettre une bonne grosse droite au Führer. Héros patriotique par excellence, inspiré par le succès de The Shield, un personnage de l'éditeur MLJ apparu quelques mois plus tôt, Captain America incarne le tournant pris par les États-Unis durant l'année 1941, alors que le pays prépare son entrée en guerre qui semble désormais inévitable. Ce tournant est particulièrement visible dans les comic books : une bonne partie des super-héros du Golden Age vont traverser l'Atlantique pour combattre les soldats allemands, et parfois Hitler en personne. C'est le cas du Captain Marvel de Fawcett, de Namor the Sub-Mariner, de Superman, de The Flash, de Blue Beetle, du premier Human Torch, mais aussi de Black Terror, ou encore du premier Daredevil publié par Lev Gleason. En parallèle, des magazines réunissant plusieurs super-héros, comme Young Allies, All Winners ou Master Comics, multiplient les interventions de leurs personnages sur le vieux continent pour tenir tête aux nazis dans des aventures qui verront naître quelques super-vilains aussi saugrenus que dans l'air du temps, comme Captain Nazi, et tout cela avant même que les États-Unis ne prennent part au conflit mondial pour de bon, en décembre 1941. Hitler et ses soldats seront aussi moqués et parodiés dans une quantité non-négligeable de titres humoristiques, ou ridiculisés par les alliés dans des titres publiant des histoires de guerre, alors qu'au même moment, certains artistes sont mobilisés en Europe pour affronter les nazis, dans des combats bien réels, cette fois. Si ces publications peuvent sembler naïves, elles sont pourtant  l'expression d'une tendance propagandiste absolument assumée par la bande dessinée américaine de l'époque, encourageant les lecteurs en âge de s'engager à aller combattre les nazis, et ceux qui ne peuvent le faire à soutenir l'effort de guerre, notamment en achetant des “war bonds”, équivalent des obligations de guerre en France, pour financer la campagne militaire contre les forces de l'Axe. Après la mort de Hitler et la victoire des Alliés en 1945, une page se tourne pour nos super-héros préférés. Si pendant la Seconde Guerre Mondiale, le marché des comics était à son apogée, tout comme le genre super-héroïque, et que Adolf Hitler représentait de toute évidence le grand méchant idéal, ne pouvant être surpassé par une autre menace réelle ou fictive, l'après-guerre s'avère bien plus complexe. Le genre peine à se renouveler, le public se tourne vers d'autres types de récits de romance, de western, d'horreur ou de science-fiction. Plus légères, moins terre-à-terre, ces histoires tranchent de façon nette et définitive avec la propagande militariste de la première moitié du Golden Age et invitent à l'évasion, loin des champs de bataille. Oh, bien sûr, les super-héros ne disparaissent pas pour autant. Une poignée d'entre eux subsiste, mais ils rencontrent quelques difficultés quand il s'agit de trouver un adversaire à leur taille. Une aspiration qui mènera généralement les justiciers et justicières costumées sur le terrain de la science-fiction, et même parfois de l'épouvante. Durant cette période, les auteurs ont tendance à restreindre l'aspect politique des super-héros, tout du moins au premier degré, mais quelques exceptions confirment la règle, comme Captain America qui, en bon patriote, affronte le temps de quelques numéros des espions communistes dans des aventures inspirées par la chasse aux rouges encouragée par le Maccarthysme. Des histoires revues et corrigées par Marvel depuis, qui nourriront quelques arcs narratifs autour des individus ayant remplacé Steve Rogers durant son séjour dans la glace… En parlant de réécrire l'histoire, c'est à partir des années 1960 que l'utilisation d'Adolf Hitler dans les comics devient aussi intéressante qu'inattendue. Le dictateur est mort, sa dépouille a été détruite par les Soviétiques, mais son fantôme va faire les belles heures de la bande dessinée américaine.  Parmi les premières séries du Silver Age à utiliser de façon notable et régulière le personnage de Hitler, on peut mentionner Sergeant Fury and his Howling Commandos chez Marvel, dont le premier numéro paraît en 1963, et dans laquelle l'équipe d'élite de Nick Fury combat les nazis en Europe durant la Deuxième Guerre Mondiale. Sans en avoir l'air, les aventures du Sergent Fury et de ses hommes vont développer un riche background à l'univers Marvel, en donnant un passé de nazi à certains super-vilains que les Fantastic Four ou les Avengers affrontent en parallèle dans leurs propres séries. Car c'est toujours en 1963 que Hitler refait surface chez Marvel, et cette fois-ci dans une histoire de super-héros se déroulant à l'époque contemporaine de sa parution, dans Fantastic Four #21. On y découvre le personnage du Hate Monger, étrange individu encapuchonné haïssant les étrangers, et doté d'un rayon de haine lui permettant de transformer n'importe qui en forcené. À la fin de l'épisode, on apprend avec stupeur que ce fameux Hate Monger n'est autre que… Adolf Hitler ! Même si le mystère demeure, dans un premier temps, quant à l'authenticité de l'identité de ce super-vilain, on découvrira ensuite que le Hate Monger est en fait le fruit du travail du scientifique nazi Arnim Zola, qui est parvenu a transférer la conscience du dictateur dans le corps d'un clone juste avant sa mort. Une saga qui s'étend sur plusieurs années, puisque les détails du procédé ne seront révélés qu'en 1980, dans Super-Villain Team-Up #17 ! L'autre série Marvel qui réécrit l'histoire, c'est The Invaders, publiée à partir de 1975 et s'étalant sur quarante-et-un numéros dans sa première mouture. Équipe formée par Captain America, Bucky, Namor le Prince des Mers, l'androïde Jim Hammond, alias Human Torch, et son sidekick Toro, les Invaders revisitent les combats menés par les super-héros du Golden Age durant la Deuxième Guerre Mondiale. Affrontant également Hitler et divers super-nazis, tels que Master Man, les Invaders sont à l'origine de plusieurs retcons, des corrections de la continuité de l'univers de façon rétroactive, chez Marvel. On y verra par exemple le Führer invoquer Thor, le dieu du Tonnerre, pour combattre Captain America et ses coéquipiers, à une époque où ce dernier n'était pas encore devenu l'alter ego de Donald Blake. Dans What If ? #4, paru en 1977, l'un des rares What If ? considérés comme canoniques, on apprend par exemple que c'est le premier Human Torch en personne qui aurait tué Adolf Hitler dans son bunker avant qu'il n'ait le temps de se suicider. Une révélation qui pourrait se raccrocher aux propos passés de Jim Hammond, lors de son retour dans le vingt-quatrième numéro de Young Men, en 1953. Vous l'aurez compris, dans les comics, le puzzle formé par l'alliance de l'histoire et de la fiction est parfois très complexe. Bien que les séries de guerre ne soient plus franchement le genre dominant durant l'Âge d'Argent et l'Âge de Bronze de la BD américaine, on pourra aussi noter des apparitions du Führer dans plusieurs numéros de G.I. Combat et de Weird War Tales, chez DC Comics, durant les années 70 et 80. Le cinquante-huitième numéro de Weird War Tales, série mêlant très efficacement guerre et horreur avec des histoires à chute dans la tradition de EC Comics, nous raconte par exemple comment Hitler a en fait échappé à la mort en 1945 pour se réveiller un millénaire plus tard. Dans le numéro 89, c'est à une armée de primates conditionnés par les nazis que le lecteur doit faire face, tandis que dans le numéro 108, un camp de prisonniers tenu par les nazis est la cible d'un commando constitué d'un vampire, d'un loup-garou et du monstre de Frankenstein ! Tout un programme, qui sera recyclé bien plus tard par DC lors de l'événement Flashpoint, avec la mini-série Frankenstein and the Creatures of the Unknown. Toujours chez DC Comics, le All-Star Squadron, qui compte dans ses rangs des héros comme Hawkman, Hawkgirl, le premier Atom, Johnny Quick ou encore Liberty Belle, va, au cours des soixante-sept épisodes parus entre 1981 et 1987, croiser à plusieurs reprises la route d'Adolf Hitler. Cette série sans doute inspirée du concept des Invaders chez Marvel, mais dans la longue tradition super-héroïque de DC Comics héritée du Golden Age, est une assez bonne démonstration de la façon dont la bande dessinée américaine va, d'une façon tout à fait méta qui lui est propre, réécrire à la fois sa propre histoire et l'histoire de la Seconde Guerre Mondiale dans le but de fournir un divertissement super-héroïque aussi efficace que détaché de toute forme de réalisme. À la même période, mais avec une approche pratiquement opposée, l'éditeur publie les aventures beaucoup plus dramatiques du Unknown Soldier, anonyme défiguré durant la guerre du Pacifique usant de ses talents en déguisement pour infiltrer les lignes ennemies. Dans le deux-cent-soixante-huitième et dernier numéro de sa série, le personnage ira jusqu'à s'introduire dans le bunker secret d'Hitler pour éliminer le despote et prendre sa place pour induire l'armée allemande en erreur aux dernières heures de la bataille de Berlin. Comme chez Marvel avec Human Torch, les super-héros américains s'attribuent ici le rôle de sauveurs absolus qui, plus qu'ayant contribué à la victoire des Alliés, ont carrément été débusquer le leader nazi jusque dans son repère pour le tuer de leurs mains ! Tout un symbole, mais aussi une vision très autocentrée du rôle des États-Unis dans le conflit. Comme je le disais, il m'est impossible d'être exhaustif, Adolf Hitler apparaissant dans une quantité astronomique de comic books, des années 1940 à nos jours. On le retrouve dans Hellboy, dans Savage Dragon, dans l'excellente série Über, mais aussi de façon plus surprenante sur la route des Tortues Ninja, et même le temps de deux épisodes complètement lunaires de la série Turok de Valiant Comics. Je vous épargne la lecture de la série éponyme en six numéros parue chez Elvifrance en 1978, “Hitler”, qui s'inspire des théories autour de la survie du tyran après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, sans prendre aucune précaution vis-à-vis des faits historiquement prouvés. Mais je vous recommande de jeter un œil au O.M.A.C. de John Byrne chez DC Comics, brillante mini-série de 4 numéros parue en 1991, dans laquelle le héros carbonise littéralement Hitler. Alors, est-il finalement possible de considérer Hitler comme un personnage de comics à part entière ? Difficile de le nier tant son rôle compte pour certains éditeurs. Le Baron Zemo, HYDRA, et bien évidemment le terrible Crâne Rouge sont autant de figures liées de près ou de loin à l'existence d'Adolf Hitler et des nazis dans l'univers Marvel. Tout ça soulève d'ailleurs plusieurs problématiques assez intéressantes : par exemple, est-il moralement acceptable de se promener dans la rue avec un t-shirt aux couleurs de l'organisation HYDRA ? Est-ce une bonne idée d'acheter une figurine de Red Skull à ses gosses ? Le divertissement a-t-il pris le pas sur le contexte et l'idéologie de ces personnages ? Adolf Hitler a, qu'on le veuille ou non, un statut unique. Il est incontestablement l'un des pires criminels de l'histoire moderne, si ce n'est l'incarnation du mal absolu pour plusieurs générations d'auteurs, de dessinateurs et de lecteurs partout à travers le monde. De ce fait, son utilisation dans la fiction ne possède pour ainsi dire aucun élément de comparaison valable et peut avant tout être vue comme une façon d'exorciser la douleur et la peine causées par ses agissements. En montrant Hitler frappé, ridiculisé et mis au tapis par un coup de poing bien placé donné par l'un de nos héros préférés ou l'une de nos héroïnes favorites, les artistes de comics dédramatisent à leur façon en reforgeant l'histoire de la Seconde Guerre Mondiale sous un jour moins sombre, tout en transmettant les valeurs de tolérance et de justice chères au genre super-héroïque. On peut aussi déceler dans tous ces récits de fictions l'expression d'une forme de crainte du retour du fascisme et des extrêmes sur le devant de la scène politique, et ça dès les années 1960, alors que certaines catégories sociales jusqu'alors réduites au silence parviennent enfin, et non sans mal, à avoir voix au chapitre. De toute évidence, aussi triste que cela puisse être, la libération de la parole de gens opprimés pour leur orientation sexuelle, leur religion ou leur couleur de peau, appelle généralement à des réactions toujours plus spectaculaires de la part de ceux qui cultivent l'intolérance et font en sorte que les discriminations systémiques persistent. Pour moi, c'est une partie de ce qui est symbolisé par le retour de Hitler dans la bande dessinée américaine du Silver Age. Quand, en 1963, le Hate Monger utilise son rayon pour pervertir la population, puis révèle son vrai visage une fois démasqué, celui de la haine débridée incarnée, on peut y voir la métaphore des défenseurs du ségrégationnisme qui militent pour le maintien d'une différence de traitement entre blancs et noirs à l'époque dans le pays. Quand Hitler émerge d'un long sommeil entouré de fidèles prêts à le servir par-delà la mort et les âges, dans Weird War ou dans les pages de Turok, c'est une nouvelle fois un message d'alerte qui est envoyé au lecteur : même lorsque le mal dort depuis très longtemps, on trouvera toujours quelques imbéciles pour le réveiller bien volontiers. Évidemment, je ne livre ici qu'une interprétation globale, et assurément un peu simpliste, de récits qui, en fonction de leur ton et de leur époque de production, mériteraient d'être décryptés un à un. Mais ce qu'il faut retenir, c'est que bien au-delà de l'aspect exotique, et parfois comique, de l'utilisation de Adolf Hitler comme personnage de comic book, il y a un fond. Un fond social et politique qui permet finalement de chasser quelques vieux démons tout en faisant en sorte que tout un chacun soit au fait de leur existence pour mieux les empêcher de revenir. N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Merci pour votre soutien en tant que souscripteurs ! C'est aussi grâce à vous que cet article existe ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    POLYBIUS : LE JEU VIDÉO QUI REND FOU !

    Play Episode Listen Later Oct 20, 2022 7:56


    Portland, Oregon, 1981. Les jeunes accros à la salle d'arcade tombent comme des mouches, rendus fous par un nouveau jeu hypnotique : Polybius. Mythe ou réalité ? Remontons ensemble aux racines de cette légende urbaine née à l'âge de pierre du jeu vidéo… Pour comprendre les origines du mythe de Polybius, il faut revenir quelques années en arrière, à l'époque où le commun des mortels découvre le jeu vidéo comme un phénomène de société. Dans les années 1980, les salles d'arcades permettent aux joueurs d'avoir accès à des jeux aux graphismes et aux sons inenvisageables pour les premières consoles de salon et les premiers ordinateurs personnels. Leur fréquentation atteint des records et pousse bien évidemment les médias à s'emparer du sujet. Au Japon, les jeux comme Space Invaders connaissent un succès colossal, au point où la petite monnaie dépensée par les joueurs pour payer leurs parties est acheminée par camions entiers chaque jour. Pac-Man, Donkey Kong ou encore Asteroids sont parmi les titres les plus célèbres de l'époque. Des jeux de scores à la durée de vie pratiquement illimitée, à l'origine des premières compétitions de jeu vidéo, bien avant que le terme “e-sport” ne rentre dans le langage courant, mais aussi, comme toute nouveauté qui se respecte, au cœur de différentes polémiques à base de dépendance et d'abrutissement des masses. Étrange paradoxe : ces débats autour d'un loisir ludique et interactif demandant de l'implication au joueur seront menés pour la plupart à la télévision, moyen de divertissement passif par excellence. C'est dans ce contexte d'effervescence tout particulier que serait apparue, en 1981, une borne d'arcade unique en son genre : Polybius. Mise à disposition des joueurs dans une salle d'arcade de Portland, cette machine noire énigmatique, proposant un jeu à la difficulté élevée et aux graphismes très en avance sur leur temps, ne restera accessible que quelques semaines. Et pour cause, Polybius aurait tout bonnement mis en danger la santé de ceux qui s'aventuraient à mettre une pièce dans son monnayeur. Insomnies, hallucinations, amnésie, le tout accompagné d'une rapide et forte dépendance, tels sont les effets de Polybius sur les jeunes joueurs de Portland. Un jeune homme de 13 ans aurait même été victime d'une crise d'épilepsie. Mais les faits mystérieux autour de cette attraction éphémère ne s'arrêtent pas là. On raconte que des hommes en noir seraient, à plusieurs reprises, venus collecter des données sur la borne. Celle-ci servirait d'ailleurs à diffuser des messages subliminaux, peut-être dans le but de recruter des joueurs dans les rangs de la CIA, ou d'expérimenter de nouvelles techniques de manipulation de masse. Si vous n'aviez jamais entendu parler de Polybius avant aujourd'hui, ce qui est peu probable tant cette légende urbaine a été citée et détournée dans la Pop Culture, je me vois au regret de vous annoncer que cette histoire est assurément fausse. Il n'existe aucune trace concrète de Polybius. Et un peu comme pour tous les mythes, ses origines ne sont pas définies très clairement et c'est sans aucun doute ce qui fait sa renommée. Les premières mentions du jeu, au-delà du simple bouche à oreille, seraient apparues au milieu des années 1990 sur le réseau Usenet, avant que l'histoire ne soit largement reprise sur les forums Internet un peu avant l'an 2000.  Le mythe de Polybius a principalement été entretenu par des individus qui n'avaient d'autres preuves à avancer que leur prétendue bonne foi. Parmi eux, Kurt Koller, fondateur du site Coinop.org, sur lequel la borne ne sera référencée qu'en 1998. Durant plusieurs années, Koller entretiendra la réputation sulfureuse du jeu, jusqu'à ce qu'en 2006, un dénommé Steven Roach déclare être l'un des concepteurs derrière Polybius, avec sa société Sinneschlössen. Problème : les propos de Roach, tout comme son CV et les activités de sa soi-disant entreprise Sinneschlössen, sont invérifiables. Malgré plusieurs enquêtes très sérieuses sur le sujet, personne n'a jamais réussi à réunir les pièces du puzzle Polybius afin de donner un peu de crédibilité aux différents témoignages, rarement concordants. D'ailleurs, Koller lui-même accusera Roach d'être un affabulateur et on peut se dire que quand les deux sources censées être les plus fiables s'accusent mutuellement de mentir, c'est plutôt mal barré… Alors, Polybius est-il canular monté de toutes pièces ou un pot-pourri de légendes urbaines ? Nourries par les fantasmes hérités de la Guerre Froide et du projet MK-Ultra de la CIA, qui visait à contrôler les esprits en usant de l'hypnose, de psychotropes et d'autres joyeusetés, Polybius est une sorte de panique morale à retardement mêlée à une creepypasta. Comme pour tout ce qui fut nouveau en son temps, de Donjons & Dragons au Heavy Metal, en passant par les comics, les jeux vidéo provoquèrent rapidement une levée de boucliers totalement disproportionnée à l'impact réel qu'ils pouvaient avoir sur la jeunesse. Premièrement, il faut rappeler que dans les années 80 et 90, la salle d'arcade est une forme de sanctuaire, un lieu magique pour les ados, mais aussi inquiétant qu'exotique aux yeux des parents, où le timer des machines remplace le temps affiché par la pendule. Un contexte presque mystique qui devient le terreau parfait pour une fable hors-normes. Il faut également ajouter que pendant leur âge d'or aux États-Unis, comme tous les lieux populaires et très fréquentés où circulent de l'argent, les salles d'arcades sont propices aux débordements de certains tenanciers peu scrupuleux. Des dérives qui expliquent la mise sous surveillance de certaines salles suspectées de trafiquer les machines pour gagner plus d'argent sur le dos des jeunes. On est bien loin des Men in Black, mais ça aura suffi nourrir les théories les plus folles… Aussi, il n'est pas abusif de penser que les quelques cas documentés de jeunes gens pris de vertiges, de malaises ou de vomissements après avoir tenté de battre des records lors de marathons vidéoludiques dans les années 1980 ont servi de base à la légende de Polybius. Puis, comme pour tout bon mythe urbain livré à lui-même, chaque nouveau conteur est venu ajouter une couche d'éléments plus étranges ou époustouflants les uns que les autres jusqu'à ce que l'histoire frôle carrément le surnaturel. Mais ici, la partie folklorique qui fait de Polybius une légende urbaine a pour spécificité d'avoir surtout été développée par des joueurs eux-mêmes, plutôt que par des détracteurs du jeu vidéo. Plus que la volonté d'effrayer le quidam moyen pour le faire partir en guerre contre ce loisir, ou de satisfaire les médias en quête de sensationnalisme, il semblerait que Polybius soit plutôt là pour asseoir une forme de mythologie du jeu vidéo, comme si ce divertissement possédait un passé sombre et interdit que le néophyte ne pourrait jamais atteindre. Une recette d'autant plus efficace et fonctionnelle au début des années 2000, lorsque beaucoup de gamins, moi y compris, pouvaient grâce à internet explorer le passé de leurs passe-temps préférés. Comme pour le Bigfoot ou le Monstre du Loch Ness, le mythe s'est peu à peu transformé en business. Outre de nombreuses versions plus ou moins crédibles se revendiquant comme semblables à ce qu'était “l'authentique” Polybius, il existe plusieurs hommages basés sur les souvenirs, toujours sujets à caution, de joueurs qui auraient utilisé la borne d'arcade originale. Évidemment, il faut avant tout voir dans tout ça un bon moyen de s'amuser en entretenant une légende urbaine qui aura su trouver sa place dans la Pop Culture, des Simpson à la série Loki du MCU, en passant par le comic book Polybius Dreams, paru en 2017 chez Hypnotic Dog Comics… Portail électronique vers d'autres réalités, expérience du gouvernement américain pour laver le cerveau des ados, dérive d'une technologie mal maîtrisée… Encore des années plus tard, les quelques faits tragiques avérés autour des salles d'arcades, racontant le décès de joueurs cherchant à atteindre le high score, sont la source inépuisable des théories les plus alambiquées. De quoi faire rêver, ou plutôt cauchemarder, le joueur intrépide qui sommeille en chacun de nous. Pour plus d'informations, je vous renvoie vers l'article extrêmement complet né de l'enquête de la journaliste Cat DeSpira, publié en 2015. N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! 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    TOMB OF DRACULA CHEZ MARVEL COMICS

    Play Episode Listen Later Sep 29, 2022 11:58


    On a tendance à l'oublier, mais avant de voir ses licences adaptées à tour de bras au cinéma, Marvel Comics a longtemps appliqué l'exacte recette inverse en adaptant sur le papier les films du moment et autres classiques de la science-fiction ou du fantastique. Et parmi les nombreuses séries, parfois éphémères, qui verront le jour grâce à cette pratique, il en est une que les mordus de comic books n'ont pas oublié ! BEWARE ! BEWARE !Le vampire est sans conteste l'une des figures les plus populaires de la fiction moderne. Des jeux de rôles se déroulant dans le Monde des Ténèbres, en passant par Castlevania, les romans d'Anne Rice, Buffy contre les Vampires, ou même Twilight, on pourrait littéralement passer la journée à énumérer les œuvres de la Pop Culture qui tournent autour du mythe de cette créature revenue d'entre les morts pour sucer le sang des vivants ! Le bestiaire folklorique et fantastique a toujours été une source d'inspiration pour les auteurs et, bien évidemment, le vampire n'y fait pas exception. Créature crépusculaire intimement liée aux croyances religieuses, le vampire moderne est une sorte de pot-pourri d'influences qui inspire crainte et fascination, pouvant se révéler tout aussi sournois que bestial, tout aussi séduisant qu'effrayant. Si des entités assimilables à des vampires existent dans pratiquement tous les folklores de la planète, c'est surtout à partir du dix-huitième siècle que l'image du vampire telle que nous la connaissons se propage dans la culture populaire. Se nourrissant principalement des légendes d'Europe Centrale, puis de récits fantastiques comme Le Vampire de John William Polidori, et bien entendu Dracula de Bram Stocker, le cliché du gentleman encapé sortant de son cercueil à la nuit tombée pour s'abreuver du sang de jeunes vierges sans défense n'a depuis lors plus jamais quitté l'imaginaire collectif. Pour beaucoup d'entre nous, c'est justement Dracula, paru en 1897, qui reste la référence en matière d'histoire de vampire, même s'il est très probable que vous connaissiez mieux cette œuvre de Bram Stocker à travers son nombre incalculable d'adaptations que dans sa forme originale de roman. Et si Dracula a effectivement été adapté maintes fois au cinéma, il a bien plus souvent été plagié, transformé et détourné, que ce soit par des cinéastes peu scrupuleux voulant contourner les droits d'auteurs, ou par divers cartoons parodiant les gimmicks du Prince des Ténèbres. Mais alors, comment le personnage de Dracula a fini par atterrir dans les pages d'une publication Marvel Comics ? Et bien disons qu'il s'agit de l'addition d'un heureux concours de circonstances et d'une bonne dose d'opportunisme. J'ai déjà eu l'occasion d'en parler : à partir du milieu des années 1950, la censure s'abat sur la bande dessinée américaine par le biais du Comics Code Authority. Outre bon nombre de règles concernant le sexe, la nudité et la violence, le code interdit également les vampires, les loups-garous et autres morts-vivants qui pourraient donner des cauchemars aux enfants. Seulement, au début des années 1970, l'ambiance est plus détendue, les États-Unis changent, et le Code va connaître quelques assouplissements, notamment en ce qui concerne l'horreur. Les loups-garous et les vampires obtiennent de nouveau le droit d'apparaître dans les  histoires, à condition d'être traitées de façon classique, tels qu'ils peuvent être représentés dans les romans de la littérature fantastique, qui sont alors considérés comme une forme de caution. Une règle assez absurde que les éditeurs vont s'empresser de tourner à leur avantage, à défaut de pouvoir ouvertement la contourner. Ainsi, à peine quelques mois après cette mise à jour du Code, Morbius apparaît dans les pages du cent-unième numéro de The Amazing Spider-Man. Surnommé “le Vampire-Vivant”, le personnage est déjà une forme de pied-de-nez au Comics Code, et son statut assez flou de super-vilain costumé victime de ses propres expériences lui permettra de passer assez facilement entre les mailles du filet de la censure. Pour continuer à alimenter cette nouvelle vague horrifique permise par le relâchement des censeurs, Marvel ne va pas aller chercher bien loin. Puisque le Code réclame un traitement “classique” des monstres de fiction, pourquoi ne pas tout simplement aller chercher Dracula, le monstre de Frankenstein et le Loup-Garou, que tout le monde connaît grâce au cinéma, et qui ont l'avantage d'être tombés dans le domaine public quelques années plus tôt ? Un choix doublement économique, puisqu'en plus d'éviter un fastidieux processus de création pour donner vie à de nouveaux personnages, il évite également à Marvel d'avoir trop d'efforts à faire pour les promouvoir. À l'époque, les films de la Hammer avec pour vedette Dracula ou la créature de Frankenstein sont encore largement plébiscités par le public et ont même l'avantage d'adopter le fameux style d'horreur gothique attendu par le Comics Code Authority, pratiquement une aubaine pour la Maison des Idées qui va profiter de tout ça sans que ça ne lui coûte un centime en droits d'adaptation. Si aujourd'hui, je me concentre sur la série Tomb of Dracula, il faut quand même souligner que l'éditeur va rapidement essorer le filon, puisqu'en seulement quelques mois, on va voir débarquer dans son catalogue le loup-garou Jack Russel, d'abord dans Marvel Spotlight, puis dans sa propre série Werewolf by Night, le monstre de Frankenstein, puis The Living Mummy dans les pages de Supernatural Thrillers, et enfin la Légion des Monstres, une équipe composée de plusieurs de ces créatures. Finalement, ce regain d'intérêt pour l'horreur dans les comic books aura permis à Marvel d'ajouter à moindre frais à son bestiaire une galerie de personnages exploitables à l'infini et dont les univers étendus respectifs auront un véritable impact sur le développement de son macrocosme : sans Werewolf by Night, pas de Moon Knight, par exemple.  RAINING BLOOD Le premier numéro de Tomb of Dracula paraît à la fin de l'année 1971. Il est écrit par Gerry Conway et dessiné par Gene Colan qui œuvrera sur l'intégralité des 70 numéros, ce qui est assez rare pour être signalé. La composition de l'équipe créative variera légèrement durant les premiers mois de parution, voyant Archie Goodwin, puis Gardner Fox s'occuper de l'écriture, avant de se stabiliser au septième épisode avec l'arrivée du scénariste Marv Wolfman Parmi les autres acteurs majeurs de Tomb of Dracula, on pourra citer l'éditeur Roy Thomas et l'encreur Tom Palmer, dont les noms restent fortement liés au succès de la série. Dans le premier épisode, on découvre Frank Drake, qui hérite d'une maison de famille assez particulière située en Transylvanie : le château du Comte Dracula en personne ! En effet, Frank est un descendant de Dracula et il va avoir la joie et l'honneur de rencontrer son aïeul, ramené à la vie accidentellement après un long sommeil. Le vampire s'empresse de boire le sang de Jeanie, la petite amie de Frank, et dès le numéro suivant, ce dernier n'aura pas d'autre choix que de tuer lui-même sa bien aimée transformée en créature de la nuit par la morsure du Comte. Des évènements dramatiques qui conduisent Frank à se lancer à la poursuite de son ancêtre suceur de sang. Une quête dans laquelle il sera bientôt rejoint par Rachel Van Helsing, elle-même descendante du célèbre chasseur de vampires, et par Blade, qui fait sa première apparition dans le dixième épisode de Tomb of Dracula. L'univers du Dracula de Marvel s'étoffe rapidement, puisque le Comte trouvera des ennemis récurrents et même quelques alliés au fil de ses aventures, avant de devenir la vedette d'autres publications : d'abord avec le magazine en noir et blanc Dracula Lives ! en 1973, dont le format échappant au Comics Code Authority permettait aux auteurs d'aller plus loin dans l'horreur et la suggestivité, puis dans Giant-Size Chillers, rapidement renommé Giant-Size Dracula, dans lesquels Roy Thomas, Gene Colan et une longue liste d'auteurs enrichissent le background du vampire en prenant plus ou moins de liberté vis-à-vis du mythe original. En France, Tomb of Dracula a été publié chez Aredit, au même titre que Werewolf by Night ou Frankenstein, aux côtés d'autres personnages comme Swamp Thing et The Demon de Jack Kirby, dans la collection Comics Pocket. Des périodiques estampillés “Bandes dessinées pour adultes” qui, entre censure et redécoupage pour faire s'harmoniser les planches originales au petit format des revues, ne faisaient pas toujours honneur au matériau d'origine, il faut l'avouer.  L'une des particularités de la version de Dracula à laquelle nous nous intéressons aujourd'hui est d'avoir été complètement intégrée à l'univers Marvel, obtenant une place à part entière au sein de la Maison des Idées. Sans surprise, le Prince des Ténèbres va donc croiser et affronter Jack Russell, alias Werewolf by Night, mais aussi toute la galerie des héros Marvel dont l'exotisme tranche un peu plus avec sa Transylvanie natale, de l'Homme Araignée dans le premier numéro de Giant-Size Spider-Man en 1974 au Silver Surfer dans le cinquantième numéro de Tomb of Dracula… L'arrêt de la série en 1979, après soixante-dix numéros, est de courte durée. Seulement quelques semaines plus tard, Tomb of Dracula revient dans un format magazine sous le label Curtis de Marvel, échappant encore une fois à la censure. Le personnage est ensuite régulièrement utilisé par Marvel, comme dans les pages de Thor et Docteur Strange, puis en 1991 sous le label Epic, et jusqu'à récemment dans les pages de Deadpool ou de certaines séries mutantes de la Maison des Idées, dans une version correspondant mieux à l'air du temps. Évidemment, je ne survole ici que les utilisations de Dracula par Marvel, le Prince des Ténèbres ayant été largement exploité par divers éditeurs au fil des années dans des productions plus ou moins romanesques, comme le lunaire Dracula versus Zorro chez Topps en 1993, ou Superman vs Dracula en 2002 chez DC Comics… Plus curieux encore, en 1980, Tomb of Dracula sera adapté en film d'animation pour la télévision par la société japonaise Toei. Un long-métrage de quatre-vingt dix minutes qui s'inspire des grandes lignes de la série de comic books et qui ne présente pas d'autre intérêt que d'être un honnête OVNI parmi les nombreuses adaptations tirées des publications Marvel Comics. Si l'intrigue de Tomb of Dracula a tendance à se répéter et que certains retournements de situation, tels que les multiples résurrections de Dracula, sont un peu tirés par la cape, l'un des principaux attraits de la série reste incontestablement l'évolution du personnage titre, à la fois antagoniste et élément central des histoires racontées. Après un premier arc très classique, fidèle aux clichés des histoires de vampires telles que l'on peut les voir au cinéma, on sent que Wolfman et Colan se réorientent peu à peu vers une recette plus proche des productions habituelles de Marvel. Dracula devient, tant bien que mal, le héros de sa propre histoire et doit faire face à des menaces qui remettent en cause son statut de prédateur ultime, tout en continuant à échapper aux chasseurs de vampires qui en ont après lui depuis des siècles. Si on ne s'attache pas vraiment à Dracula, qui reste prêt à tout, y compris à tuer, pour arriver à ses fins, on vibre tout de même au rythme de ses aventures. Un programme riche en évènements improbables qui n'accuse pourtant que très peu le poids des années, sûrement parce que l'ambiance originale de la série, nourrie des classiques horrifiques du dix-neuvième siècle, entretient la crédibilité d'un univers fantastique hors du temps pouvant se permettre de prendre quelques libertés en matière de cohérence sans jamais tomber dans le ridicule. Finalement, cette adaptation à la sauce Marvel rejoint sans difficulté la très longue liste des œuvres exploitant l'inépuisable filon Dracula tous supports confondus, en y ajoutant un aspect sériel et un point de vue quasi super-héroïque typique de la bande dessinée américaine. Tomb of Dracula n'est clairement pas le premier comic book auquel on pense, et encore moins la première série Marvel qui vient à l'esprit, mais elle conserve un véritable intérêt patrimonial tant dans sa conception que dans son contenu. C'est pour cela que je ne peux que vous recommander la lecture des omnibus parus chez Panini Comics, volumes imposants et de grande qualité, dont l'existence est à saluer tant ils jouent un rôle dans la représentation de la diversité de la bande dessinée américaine sur le marché français. Et si vous cherchez un point d'accès à moindre coût, le volume de la collection Marvel Décennies consacré aux années 1970 et à la Légion des Monstres vous permettra d'appréhender plus globalement le traitement de l'horreur chez Marvel à l'époque. N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! 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    ANIMAL MAN PAR GRANT MORRISON

    Play Episode Listen Later Aug 24, 2022 9:26


    Chez bon nombre de lecteurs et de lectrices de comics, la simple évocation du nom de Grant Morrison provoque un achat compulsif d'une forte quantité d'aspirine et je ne saurais leur donner totalement tort. Mais parmi ses nombreux travaux subsiste au moins un titre aussi réussi qu'accessible. ET LE TIGRE EST EN TOI ! Être un super-héros, c'est plus qu'un simple mode de vie, et n'est pas Batman ou Wonder Woman qui veut. Buddy Baker, alias Animal Man, en sait quelque chose. Doté de l'étonnant pouvoir de s'approprier les facultés des animaux qu'il croise, il a pratiquement toujours été relégué parmi les seconds couteaux de l'univers de DC Comics. Difficilement pris au sérieux, tant par ses pairs que par le public, Buddy jongle entre une carrière d'acteur qui peine à décoller, un statut de justicier que personne ne respecte vraiment et une vie de bon père de famille un peu à côté de la plaque. Cette condition de héros has-been, tant sur le papier qu'au yeux des lecteurs, deviendra une force sous la plume d'un auteur devenu incontournable : Grant Morrison. Né en 1960 à Glasgow, Grant Morrison débute sa carrière d'auteur dans le milieu de la bande dessinée britannique indépendante, puis oeuvre notamment sur la série de comic book Doctor Who, tout en réalisant plusieurs séries pour le magazine 2000AD. Après avoir vu plusieurs de ses propositions de scénarios refusées, il finit par attirer l'attention de DC Comics. Car suite au succès critique de Watchmen d'Alan Moore et Dave Gibbons, l'éditeur est en quête de sang neuf au Royaume-Uni, espérant tirer parti d'un vivier de jeunes auteurs audacieux cultivant un ton provocateur pour dépoussiérer certaines de ses productions. Grant Morrison rejoint donc la liste des scénaristes qui participent à la “British Invasion” du marché des comic books américain à la fin des années 1980 et propose à DC de revisiter un personnage qui l'a, pour une raison inexpliquée, particulièrement marqué durant sa jeunesse : Animal Man. Apparu pour la première fois en 1965 dans le cent-quatre-vingtième numéro de la revue Strange Adventures, sous les plumes de Dave Wood et Carmine Infantino, Animal Man se rapproche dans sa conception originale de personnages comme Hank Pym, alias Ant-Man, chez Marvel. Il s'agit de héros créés dans un contexte de science-fiction propre aux années 1950 et 1960, mais qui ne deviendront des super-héros que quelques temps plus tard, profitant du fait que le genre ait particulièrement le vent en poupe durant le Silver Age. Irradié par un objet d'origine extraterrestre, Buddy Baker se voit octroyer la faculté de copier les capacités physiques des animaux. Une origin story qui sera remaniée quelques fois par la suite, mais qui reste plus ou moins fidèle à cette idée dans les grandes lignes. Un an après sa première apparition, il obtient enfin un costume bariolé de justicier ainsi qu'un alias : A-Man, pour Animal Man, évidemment. Globalement, les aventures d'Animal Man au sein de l'univers DC restent longtemps anecdotiques, comme en 1980, dans les numéros 267 et 268 de Wonder Woman, lorsqu'il aide l'amazone dans son combat contre des bandits Marseillais entre deux bains de soleil au bord de la Méditerranée. Oui, il y a des choses qui ne s'inventent pas… En 1985, DC Comics fait table rase du passé avec un crossover à l'ampleur inédite jusqu'alors : Crisis on Infinite Earths. L'occasion de remettre sur le devant de la scène, pour quelques pages au moins, des personnage secondaires comme Animal Man. Intégré à une équipe appelée les Forgotten Heroes, aux côtés de Rick Flag et de Rip Hunter, Buddy Baker va donc participer au combat contre l'Anti-Monitor avant d'obtenir sa propre série en 1988, justement scénarisée par Grant Morrison. Pour Morrison, hériter d'un personnage aussi secondaire n'a rien d'une punition, bien au contraire. L'éditeur ne place que peu d'espoir dans Animal Man, certains lecteurs ignorent jusqu'à son existence, et il est jugé ringard par ceux qui s'en souviennent. En d'autres termes, tout le monde se fiche bien de savoir ce que l'auteur britannique va faire de Buddy Baker, et cette liberté est incontestablement l'un des leviers qui transformera une série que personne n'attend en œuvre culte. ÇA CARTOON ! Grant Morrison va donc saisir la balle au bond et profiter du désintérêt général envers Animal Man pour établir un parallèle des plus malins entre fiction et réalité, sorte de pied dans la porte orientant sa série dans des sphères encore inexplorées. Puisque le héros est has-been aux yeux des lecteurs, pourquoi ne pas faire de lui un has-been dans ses propres aventures ?! La crédibilité de Buddy Baker dans ses missions de justicier sera systématiquement remise en question par ses interlocuteurs, qui iront jusqu'à le confondre avec d'autres super-héros. Par exemple, quand Buddy prendra conscience de la souffrance animale et décidera de devenir végétarien, il devra faire face au scepticisme de sa propre famille et mener un combat sur un nouveau front. Se posant comme un adversaire naturel des chasseurs de dauphins et de l'expérimentation animale, Animal Man aura, une fois encore, beaucoup de difficultés à être pris au sérieux tant cette lutte est encore considérée comme l'élucubration de quelques illuminés à l'époque, bien avant l'apparition d'internet et la dénonciation à grande échelle de la maltraitance animale résultant de leur exploitation par l'industrie. Cet aspect totalement avant-gardiste dans la caractérisation d'un super-héros est d'ailleurs le reflet des propres convictions de Grant Morrison. Si l'image ringarde du héros exploitée dans sa propre série est un premier coup de marteau donné au quatrième mur, l'expérience va aller beaucoup plus loin. Ayant pensé son récit initial comme une mini-série de quatres numéros, car persuadé d'être rapidement remercié pour ses services, Morrison, accompagné de Charles Truog aux dessins, se trouve presque pris au dépourvu lorsqu'on lui demande de continuer Animal Man. Le cinquième épisode intitulé “The Coyote Gospel” devient donc une sorte d'exercice de style dissimulé, mix improbable de parabole religieuse et de l'univers des Looney Tunes. Morrison se dit que, foutu pour foutu, autant se faire plaisir et aller au bout de ses idées. Un angle d'attaque plus qu'avisé, car il marquera à jamais l'histoire de la bande dessinée américaine, donnant ses lettres de noblesse à cette série sur laquelle personne ne misait. De numéro en numéro, Buddy Baker va prendre conscience de sa condition de héros de fiction, de l'existence des lecteurs, voyager entre les différents plans de la réalité, y entrer en contact avec d'autres versions de lui-même, et même rencontrer son propre auteur. Une introspection souvent dure, parfois violente moralement, qui provoque chez le lecteur une empathie inattendue envers un personnage imaginaire. Peut-être le vrai coup de maître de cette série.  Morrison et Truog vont outrepasser les barrières de la créativité et exploser les codes de la bande dessinée de super-héros, se moquer des dérives absurde de la tendance “grim & gritty” qui règne dans les années 1980 en transformant leur héros en vengeur vêtu de noir, et démontrer avec un talent indiscutable que l'art séquentiel est sûrement celui qui laisse le plus de liberté aux artistes, pour peu qu'ils ne soient pas bridés par des pressions commerciales ou politiques. Autrement dit, quand on laisse les auteurs s'exprimer comme ils l'entendent, sans les étouffer sous une censure sociale ou religieuse et des contraintes économiques, ils livrent le meilleur d'eux-mêmes. Mais y a-t-il encore quelqu'un pour en douter ?Impossible, enfin, d'évoquer Animal Man sans parler des incroyables couvertures de Brian Bolland, artiste au trait chirurgical, jouant à la perfection avec les espaces vides et les ombres, et mettant en scène des personnages aux expressions viscérales. Incontestablement l'un des points forts du périodique et une éblouissante galerie qui conserve toute sa puissance malgré le poids des années. Grant Morrison quitte la série après vingt-six issues, laissant sa place à Peter Milligan. Elle est ensuite reprise par le duo formé par Tom Veitch et Steve Dillon jusqu'au cinquantième numéro, puis par Jamie Delano, déjà scénariste sur Hellblazer. En 1993, le cinquante-septième numéro est le premier publié sous le label Vertigo de DC Comics, sous la direction de Karen Berger, mais ceci est une autre histoire… De son côté, Morrison va poursuivre son parcours chez DC Comics avec son indispensable passage sur la Doom Patrol, The Invisibles pour Vertigo, puis il reprendra la Justice League avant d'aller faire un tour chez Marvel avec les New X-Men. Après l'arrêt de la série Vertigo en 1995, Animal Man fera un retour remarqué sous la plume du scénariste Jeff Lemire à l'occasion de reboot New 52 de DC Comics, dans une série brillante fonctionnant de pair avec le Swamp Thing de Scott Snyder. Entre une relecture méta des origines et du statut des justiciers costumés, et un happy end aussi déchirant qu'intelligent, le run de Morrison sur Animal Man fait partie de ces œuvres qui décortiquent le mythe super-héroïque à cœur ouvert, dans ce qu'il a de plus symbolique, mais aussi de plus touchant. Un comic book novateur et plus pertinent que jamais qui a participé à structurer une nouvelle ère, souvent cité par les passionnés, mais désespérément oublié par un grand public qui doit absolument le découvrir. Évidemment, après tout ça, je ne peux que vous conseiller de vous jeter sur la série Animal Man de Grant Morrison, disponible en deux tomes chez Urban Comics dans une très belle édition ! N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    NEW MUTANTS : CONCENTRÉ D'ADOLESCENCE

    Play Episode Listen Later Aug 7, 2022 9:09


    L'adolescence est une période aussi compliquée qu'inspirante, terreau d'une multitude de fictions, y compris pour le genre super-héroïque. Mais parmi les œuvres qui s'en nourrissent, rares sont celles qui peuvent se vanter de flirter avec la perfection. BACK TO SCHOOL Les années 1980 sont souvent considérées comme un tournant pour la bande dessinée américaine. Watchmen, The Dark Knight Returns, Crisis on Infinite Earths, l'incontournable Maus de Art Spiegelman, ou même les Tortues Ninja et Secret Wars sont autant d'exemples cités comme des pierres angulaires d'un nouvel âge pour les comics.Si certains pensent aussi à Camelot 3000, American Flagg, ou à une tripotée de titres issus ou inspirés de la bande dessinée indépendante britannique, les X-Men de Chris Claremont n'arrivent que bien plus tard en tête, peut-être à cause de son statut de série plus classique et installée, publiée par Marvel Comics. Pourtant, nombreux sont les lecteurs littéralement traumatisés par la saga du Phénix Noir, y compris en France suite à sa publication dans Spécial Strange chez Lug. Le run long de seize ans de Claremont sur la série consacrée aux X-Men contient de nombreuses pépites, dont le fond est encore incroyablement pertinent quarante ans plus tard, mais ce n'est rien par rapport à la maîtrise dont il va faire preuve sur une autre série : les New Mutants. Apparus en 1982 dans un graphic novel signé Chris Claremont au scénario et Bob McLeod au dessin, avant d'avoir droit à leur propre série dessinée Sal Buscema puis Bill Sienkiewicz, Les Nouveaux Mutants comptent à l'origine dans leurs rangs Rocket, Solar, Karma, Wolfsbane et Psyche, rejoints plus tard par Magik, Shadowcat, ou encore Cypher et Warlock. Si leurs aventures super-héroïques restent assez classiques et largement calquées sur le modèle de celles de leurs aînés les X-Men, cette équipe d'ados, créée à la demande de l'éditeur en chef Jim Shooter, brille surtout et avant tout par la caractérisation de ses personnages. Fragiles, manquant d'assurance et soumis aux questionnements que connaissent tous les adultes en devenir, il est très facile pour les jeunes lecteurs de s'identifier à eux ou bien, pour les plus âgés, d'y voir un écho à leur propre jeunesse.  Rahne Sinclair, alias Wolfsbane, ou Félina en VF, est par exemple chassée comme une sorcière pour sa lycanthropie. Danielle Moonstar, qui a grandi dans une réserve amérindienne, reste très méfiante à cause des discriminations dont elle a souffert, ce qui aura un véritable impact sur la difficulté qu'elle rencontre pour contrôler ses pouvoirs. Bobby Da Costa quant à lui, a beau être originaire d'un milieu aisé, la découverte de ses pouvoirs mutants en fera un paria contraint de fuir son propre pays. Des traits de caractères qui font partie des composantes essentielles de la définition de ce qu'est un super-héros depuis le Silver Age, comme lorsque Stan Lee et Steve Ditko décrivait le jeune Peter Parker comme le souffre-douleur du lycée devant veiller sur sa tante malade.À titre personnel, je pense que les premiers épisodes de New Mutants sont parmi les comic books les mieux écrits des années 1980, loin devant certains classiques que je citais tout à l'heure. Fin, inspiré par les débats qui agitent la société, et même parfois clairement avant-gardiste, le comic book de Claremont traite avec beaucoup de justesse de la façon dont on peut être rejeté pour sa différence. Les membres des New Mutants ne sont en effet pas tant de jeunes surdoués dotés de super-pouvoirs que des adolescents mis au ban de la société pour leur origine ethnique, sociale, ou leur parcours de vie. Ils vont devoir apprendre à vivre en groupe, à s'entraider malgré des conflits internes amplifiés par leur mode de vie quasi autarcique et vont comprendre, au fil des épisode, que ces pouvoirs qui les rendent effrayant pour le commun des mortels ne les empêchent pas d'être aussi sensibles que n'importe quel être humain face à la solitude et aux traumatismes. Un message de fond qui parle à des milliers de jeunes aux États-Unis, mais aussi partout à travers le monde, et ça de façon absolument intemporelle. L'autre qualité remarquable de la série, c'est sa facilité d'accès qui en fait un point d'entrée idéal, même quatre décennies après sa parution. Outre une certaine aisance à s'identifier aux héros de la série que j'ai déjà évoquée, les premiers épisodes sont restés très actuels et font encore parfaitement l'affaire comme première lecture pour aborder les comic books de super-héros. La plume de Claremont a ce petit plus qui permet à ses histoires d'échapper aux affres du temps, faisant des Nouveaux Mutants l'une des meilleures représentations de l'adolescence dans les pages des comics, et peut-être même dans la fiction en général. Après cinquante-quatre numéros, au cours desquels il aura fait de Magneto, l'ennemi juré des X-Men, le mentor de l'équipe et opposé nos héros à Legion, le propre fils de Charles Xavier, Chris Claremont quitte New Mutants pour laisser sa place à Louise Simonson, qui avait déjà démontré son talent et sa maîtrise des jeunes super-héros chez Marvel avec Power Pack. Malheureusement, même si Simonson saura aussi marquer les esprits avec un remaniement de l'équipe impliquant la mort de l'un de ses membres, la série peine à se renouveler avec le temps et cherchera un second souffle en suivant la tendance dominante des années 1990 consistant à mettre sur le devant de la scène des héros bad-ass plus prompt à la bagarre qu'à de grands monologues. BAD TO THE BONES Le quatre-vingt-sixième épisode marque l'arrivée au dessin de Rob Liefeld et du personnage de Cable, qui deviendra le leader de l'équipe, jusqu'au centième et dernier numéro de New Mutants. Cable est d'ailleurs un personnage passionnant de par son rôle et son statut. À la fois combattant, messie, et même parfois gourou, il représente un véritable tournant pour les séries mutantes de Marvel. Le quatre-vingt-dix-huitième épisode entrera quant à lui dans l'histoire pour contenir la première apparition du mercenaire provocateur Deadpool, qui deviendra une véritable poule aux œufs d'or pour l'éditeur. En ce début des années 90, les X-Men sont la licence phare de la Maison des Idées, jusqu'à l'apogée marquée par l'adaptation cinématographique sortie en 2000. Les séries et mini-séries mutantes sont démultipliées et si New Mutants s'arrête après cent numéros, c'est pour mieux revenir quelques mois plus tard sous un nouveau nom : X-Force. Cette fois-ci, le ton est radicalement différent, et si l'euphorie du moment qui fait la part belle aux spéculateurs assure des chiffres de vente record, on est bien loin du fond social et politique défini par Claremont des années plus tôt. Les débuts sont fastes mais le succès s'avère très vite artificiel, d'autant que les héros de X-Force seront dès 1994 supplantés dans leur rôle de teenagers de service par Generation X. Avec le recul, et même si je reste un fan comme tant d'autres sur qui la nostalgie opère parfois, ces épisodes au parfum d'actioner décérébré ont beaucoup moins bien vieilli que les premiers numéros de New Mutants. Sûrement parce que Claremont ne développait pas ses personnages comme des super-héros, mais avant tout comme des individus fragiles et victimes de leur situation. Ce qui va cruellement manquer aux différentes versions consécutives de X-Force, condamnées à rester des sortes de variantes bad-ass d'aspirants X-Men à qui l'équipe originale ne laissera que trop rarement la porte ouverte. Et même si certains personnages fondateurs des New mutants sont devenus des acteurs capitaux de Marvel Comics, l'essence même de la série originale a fini par se perdre entre les différentes tentatives de reboot et de relaunch qui ne font que singer une recette aujourd'hui devenue classique, et reprise avec beaucoup plus de succès par des comic books comme Harbinger de Joshua Dysart chez Valiant Comics. Évidemment, je ne peux pas parler des New Mutants sans évoquer leur adaptation au cinéma, longuement attendue et repoussée un nombre incalculable de fois pour finalement sortir dans une indifférence générale, en pleine pandémie mondiale. Plusieurs fois remanié et appuyé par une promotion surprenante empruntant à celle des films d'horreur, ce long-métrage a, si j'ose dit, vendu la peau de l'ours avant de l'avoir filmé, jusqu'à devenir une arlésienne que l'on ne pensait jamais voir après le rachat de la Fox par Disney. Pourtant, le résultat s'est avéré étonnamment plaisant et même carrément réussi en ce qui concerne son respect du matériau d'origine. En s'inspirant principalement de l'arc du Demon Bear de Claremont et Sienkiewicz, le film développe brillamment des personnages fragiles en pleine crise d'adolescence qui devront surpasser la crainte de leurs propres pouvoirs pour affronter une menace qui se nourrit avant tout du manque de confiance en soi de chacun. Je vous invite vraiment à voir ou revoir New Mutants et à lui donner une chance, car il ne mérite définitivement pas le désintérêt dont il a été victime à sa sortie. Conçu comme un comic book pour les ados, mais devenu un éternel standard du genre, The New Mutants est une vraie leçon, tant dans son fond que dans sa forme. Un incontournable qui mérite sans aucun doute sa place parmi les œuvres cultes de la bande dessinée américaine et dans votre bibliothèque ! Vous pouvez retrouver la série originale de Chris Claremont en intégrales chez Panini Comics, et je ne peux que vous en recommander la lecture. N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    NEXUS : PEINE DE MORT ET RÊVES HUMIDES

    Play Episode Listen Later Jul 23, 2022 10:48


    Si je vous dis 1981, vous pensez peut-être à l'abolition de la peine de mort. Et bah pas pour tout le monde, et surtout pas les tyrans intergalactiques ! DREAM IN BLUEEn matière de bande dessinée, et de Pop Culture au sens large, briser les codes est un défi constant et bon nombre d'auteurs s'y sont surtout cassé les dents ! Ainsi, quand en 1981 débarque Nexus, de Mike Baron et Steve Rude, chez Capital Comics, il est fort probable que quelques malheureux n'y aient absolument pas prêté attention. Après tout, des histoires avec types en moule-burnes qui volent dans l'espace et balancent des rayons lasers à tour de bras, il y en a plein ! Et puis, à l'heure où Frank Miller pousse Daredevil dans ses retranchements de super-héros urbain, confronté à une société gangrénée par le crime, qui s'intéresse encore à ces histoires de planètes lointaines et de vaisseaux spatiaux ? Bon, okay, là, je suis totalement de mauvaise foi, car on est seulement quelques mois après la sortie de L'Empire Contre-Attaque, mais, revenons-en à Nexus. Si les androïdes rêvent de moutons électriques, de quoi peuvent bien rêver les super-héros cosmiques ? Et bien de dictateurs à renverser, évidemment !Horatio Hellpop, alias Nexus reçoit, lors de mystérieux rêves, la mission d'éliminer divers despotes sanguinaires et autres meurtriers de masse sévissant dans l'univers. N'étant libéré de ces angoissantes visions nocturnes qu'une fois la tâche accomplie, il peut cependant compter sur une colossale puissance pour parvenir à ses fins. Au fil de ses aventures, il ramène avec lui plusieurs réfugiés fuyant ces dictatures fraîchement renversées sur la lune d'Ylum, son sanctuaire, qui se transforme peu à peu en une société multiculturelle. Nexus va donc, au fur et à mesure qu'il fait tomber les régimes totalitaires, fonder sa propre nation et être contraint à jouer ponctuellement les chefs d'états, alors qu'il n'en a absolument aucune envie. Les réfugiés d'Ylum, qui voient en Horatio un sauveur tout puissant, placent de grands espoirs en sa personne, et tout en le respectant, attendent aussi de lui qu'il les représente et les écoute, quitte parfois à lui imposer une forme de pression populaire comme on pourrait le faire avec un homme politique. En plus de ce statut de leader non désiré, notre héros doit composer avec les terribles cauchemars récurrents qui désignent ses prochaines cibles et toute une série de menaces toutes plus étonnantes et vicieuses les unes que les autres, mais je vais y revenir un peu plus tard ! Car avant d'explorer en détails certains concepts de l'univers de Nexus, il me faut bien évidemment vous présenter les deux artistes derrière celui-ci ! Né en 1949 dans le Wisconsin, Mike Baron commence sa carrière dans les années 1970 en écrivant des nouvelles de science-fiction avant de faire ses premiers pas dans l'industrie des comics chez Kitchen Sink Press, dans le premier numéro de Weird Trips Magazine, consacré à, je cite : “la drogue, le sexe, l'occulte et les OVNIS”. Au fil des ans, il a travaillé pour de nombreux éditeurs et créé un paquet de personnages originaux. Parmi ses travaux les plus populaires, on peut citer le super-héros The Badger, dont les aventures mêlent politique et écologie sur un ton qui oscille entre drame et parodie du genre. Chez Marvel, il développera largement le background du Punisher, et travaillera ponctuellement sur des héros comme Batman ou Deadman chez DC Comics. Steve Rude est également né dans le Wisconsin, en 1956. Son style reconnaissable entre mille, héritage d'une bande dessinée typiquement américaine et de l'illustration d'actualité et publicitaire de la première moitié du XXème siècle se rapproche, par certains aspects, des productions européennes. À mi-chemin entre des dessinateurs italiens comme Aurelio Galleppini ou Raffaele Carlo Marcello et l'école de la ligne claire de Hergé. Rude va, tout en consacrant une grande partie de son temps à Nexus, réaliser une multitude de variant covers pour les éditeurs américains. Très attaché à son justicier cosmique, il entretient depuis longtemps maintenant le projet d'une adaptation animée pour laquelle il n'existe jusqu'à présent qu'une courte bande promotionnelle de 2 minutes. TURNING POINTAvec le recul des années, Nexus représente un véritable tournant pour la thématique super-héroïque dans la bande dessinée indépendante américaine. Contrairement à l'impression que pourrait nous donner certains discours, le comic book indépendant n'est pas né avec Image Comics au début des années 1990, et encore moins avec des succès plus récents comme The Walking Dead. En fait, on peut même affirmer que le comic book indépendant a pratiquement toujours existé aux États-Unis, tout simplement parce que son statut varie en fonction du marché que l'on qualifiera de mainstream, et majoritairement porté par Marvel et par DC. Si on pourrait se risquer à considérer certaines publications EC Comics et les Bibles de Tijuana comme des formes de comic book proto-indé, car en réelles opposition avec les codes établis, et même carrément hors-la-loi dans certains cas, c'est surtout dans la deuxième moitié du XXème siècle que l'on assiste à une véritable explosion des productions dites underground. Dès les années 50 grâce à l'influence du magazine Mad, bien entendu, mais aussi dans les années 60 et 70 avec des figures reconnues comme Art Spiegelman, Trina Robbins, ou encore Robert Crumb ! Inspiré par la contre-culture, les cartoons, la drogue, ou encore la libération sexuelle et employant surtout un ton beaucoup plus cru et personnel que ce qui pouvait être présenté aux lecteurs de l'époque. Et c'est sans compter sur l'influence des artistes internationaux sur le marché américain. En 1975, les français de Métal Hurlant vont montrer un autre visage de la bande dessinée européenne, loin de l'asexué Tintin et des personnages à gros nez d'Astérix et Obélix. Et deux ans plus tard, le magazine britannique 2000 AD va enfoncer le clou en proposant des récits survitaminés réalisés par une génération d'auteurs dont le cynisme et l'acidité vont totalement révolutionner les productions américaines dans les années qui vont suivre. Tout ça pour vous dire que, déjà à cette époque, la bande dessinée a été triturée dans tous les sens et c'est de plus en plus compliqué d'espérer innover dans ce medium. Alors comment et pourquoi Nexus peut-être considéré comme un aboutissement du genre ? Et bien premièrement en se nourrissant des classiques de la science-fiction tout en se payant le luxe d'être en avance sur son temps. En s'inspirant du travail d'artistes comme Alex Toth, Jack Kirby ou Wally Wood, des comic books de science fiction des années 1950, et même plus largement des références incontournables de la SF, tous supports confondus, de Flash Gordon à Star Trek, Rude et Baron font de Nexus une sorte de space opera super-héroïque ultime. Le résultat est à mi-chemin entre l'univers coloré et un brin désuet les pulp's et un pot-pourri de concepts et de fulgurances créatives héritées des courants artistiques et de la libération des mœurs des 70's.  J'ai aussi vu chez Nexus une critique de l'interventionnisme typique des États-Unis. Cette habitude qui consiste à aller foutre la merde dans un endroit où la situation était déjà bien pourrave, sous prétexte d'y jouer un rôle de libérateur en mission divine, mais principalement pour servir des intérêts économiques et géopolitiques, quitte à tout bonnement abandonner la population locale à son triste sort une fois l'objectif initial atteint. Dans les comics de super-héros, c'est quelque chose que l'on va par exemple retrouver chez les Avengers de Marvel, et que Warren Ellis poussera à son paroxysme pour mieux le parodier dans sa série The Authority à partir de 1999, dans laquelle on suit un groupe de surhommes renversant les dictatures à tours de bras, sans se soucier des conséquences à l'échelle mondiale. Alors, je ne sais pas si Rude et Baron ont réellement pensé les missions de leur exécuteur intergalactique comme une parabole de l'interventionnisme yankee, mais le statut quasi-messianique de Nexus, tant dans la façon dont il se voit attribuer lesdites missions que dans l'attente des peuples opprimés envers lui, y font écho d'une façon où d'une autre. L'autre point remarquable dans Nexus, c'est que tout en s'appropriant une partie des codes classiques que genre super-héroïques, notamment via le costume de son héros, la série permet pourtant à celui-ci de transgresser l'une des règles maîtresses respectée par la majorité des justiciers costumés à l'époque : on ne tue pas. Car oui, de Batman à Superman, en passant par Spider-Man ou Daredevil, les super-héros ont une règle d'or : ils ne tuent pas. C'est comme ça ! FOR WHOM THE BELL TOLLSHéritée des restrictions du Comics Code Authority, ce principe est d'autant plus intéressant à étudier quand on se souvient que les États-Unis sont l'un des rares pays occidentaux à encore appliquer la peine de mort dans certains états. Étrange paradoxe, donc, que de faire appel à des super-justiciers symboles de l'échec d'un système judiciaire et social dépassé par la criminalité, tout en leur demandant d'appliquer une justice plus clémente que celle en vigueur en temps normal. Si cette règle à tendance à disparaître dans les années 1980, pour pratiquement s'inverser dans la décennie suivante qui fait la part belle aux anti-héros ultra-violent comme Spawn ou Wolverine, Nexus fait partie des premiers exemples de personnage traité comme un héros alors qu'il est ouvertement chargé d'exécuter des êtres vivants. Certes, ceux qui lui sont désignés comme cibles dans ses rêves sont les pires ordures de la galaxie, et on a un peu de mal à ressentir de l'empathie pour eux, mais il n'empêche que tout cela nous renvoie à des débats bien réels et encore actuels autour de la peine de mort, y compris en France, alors qu'elle a été abolie chez nous il y a plus de 40 ans ! Attention, l'angle adopté par la série n'a rien à voir avec un débat de comptoir au PMU du coin, puisqu'ici on s'intéressera plus aux états d'âmes d'un bourreau désigné malgré lui par une puissance supérieure que sur ce qui justifierait ou non la mise à mort de quelqu'un pour ses crimes. Comme dans les missions conférées par son statut de chef d'état quasi-accidentel, Horatio Hellpop doit parfois faire face aux attentes des opprimés quand il endosse le costume de l'exécuteur Nexus. Sauf que l'on comprend qu'il ne prend aucun plaisir à tuer et que cette action lui permet avant tout de se libérer de ses effrayants cauchemars. Aussi, être sollicité pour devenir une sorte de tueur à gages, et ça même si on lui demande d'éliminer quelqu'un de vraiment mauvais, va s'avérer être en totale opposition avec ses principes moraux. Car c'est bien de morale et d'héritage dont il est question dans la série de Mike Baron et Steve Rude. Quels paramètres poussent le héros à redéfinir ses propres limites en fonction des situations et de son histoire personnelle et familiale ? Comment doit-il gérer son statut non-désiré de justicier et de leader, et surtout, comment va-t'il y arriver sans renier ses principes et ses engagements ? Autant de questions qui donnent un ton politique, social, mais aussi fondamentalement humain à cette série, lui permettant de rester pertinente plusieurs décennies après la parution de son premier numéro. Et, il est bon de le préciser, Nexus recevra pas moins de 6 Eisner Awards entre 1988 et 2008, attestant d'une reconnaissance évidente et solide du travail de ses auteurs. Comme nous le savons tous, ce qui définit réellement un super-héros, et plus largement un personnage de comic book, ce ne sont ni ses incroyables pouvoirs, ni une puissance illimitée qui lui permet de surpasser le commun des mortels, mais bel et bien les enjeux moraux, sociaux, et parfois psychologiques qui se cachent derrière son costume bariolé. Et sur ce point, Nexus fait carton plein. Mais rassurez-vous, comme toute bande dessinée, ça reste aussi très divertissant au premier degré et c'est disponible en français chez Delirium dans une très belle édition ! N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    RORSCHACH : ENCORE UNE SUITE À WATCHMEN ?!

    Play Episode Listen Later Jun 20, 2022 7:26


    Dans l'épisode d'aujourd'hui, je reviens sur la série Rorschach de Tom King et Jorge Fornés, disponible en français chez Urban Comics dans la collection Black Label de DC Comics. N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Mes autres travaux autour de Watchmen : L'analyse du comic book en vidéo : La critique de Doomsday Clock en vidéo : Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    NAMOR THE SUB-MARINER : L'HÉRITAGE CHEZ MARVEL

    Play Episode Listen Later Apr 7, 2022 9:06


    Après la lecture de la première intégrale consacrée au personnage, parue récemment chez Panini Comics, j'ai eu très envie de vous parler de Namor, le Prince des Mers. Sous l'Océan… Bien que relégué au second rang des figures de l'univers Marvel, tant en termes de publications que d'actualité au cinéma, on a tendance à oublier que The Sub-Mariner est l'un des tous premiers super-héros de la Maison des Idées, créé, tout comme Captain America ou le premier Human Torch, sous l'ère Timely. Né sous la plume de Bill Everett en 1939, le grand public le découvre dans le tout premier numéro de Marvel Comics. Dès sa première apparition, Namor évolue entre deux eaux, tant sur le plan individuel que social. Fils d'un humain et d'une atlante, il se présente plutôt comme un anti-héros, farouche guerrier tenant tête aux humains pour défendre son royaume sous-marin. Pourtant, lorsqu'il obtient sa propre série en 1941, le Prince des Mers met de côté, pour un temps, sa haine de l'humanité toute entière afin d'affronter Hitler et les forces de l'Axe qui menacent Atlantis. Sur ce point, Bill Everett devance d'ailleurs de plusieurs mois l'entrée en guerre des États-Unis, tout comme ses confrères Joe Simon et Jack Kirby avec leur premier numéro de Captain America. Un élan patriotique qui va pousser l'antipathique Sub-Mariner à trouver quelques alliés à la surface pour dégommer du nazi et lui permettre récolter les honneurs dûes aux combattants de la liberté américains. Souffrant, comme une grande partie de ses pairs costumés, du déclin du genre super-héroïque après-guerre dans la bande dessinée américaine, le Sub-Mariner aura été l'un des personnages les plus populaires du Golden Age. Namor gardera cependant un rapport distant aux habitants de la surface, les voyant systématiquement comme une menace pour son peuple. Une caractéristique qui va être exacerbée lorsque le personnage réintègre l'univers Marvel dans le quatrième numéro de Fantastic Four, en 1962. Retrouvé amnésique par Johnny Storm, le Prince des Mers recouvre la mémoire au contact de l'eau et décide de retourner à Atlantis, où il découvre que son royaume a été détruit par les essais nucléaires menés par les humains. Séparé de son peuple parti en exode, Namor devient fou et décide de réveiller une gigantesque créature marine pour détruire New-York en représailles. Mis en déroute par les Fantastiques, il jurera de se venger, non s'en s'être entiché d'un considérable béguin pour Sue Storm au passage. Si les Fantastic Four auront plusieurs occasions d'affronter le Sub-Mariner, présenté dans un premier temps comme un vilain, son statut va rapidement évoluer. Dans le septième numéro de Daredevil, paru en 1965, Namor devient soudainement bien plus procédurier et s'en va quérir les services de l'avocat Matt Murdock pour faire valoir les droits de son peuple auprès des habitants de la surface. Tout ne se passe pas vraiment comme prévu, mais c'est l'occasion de découvrir qu'au sein même de son royaume, cet individu métis, ressemblant plus à un être humain qu'à un Atlante, est loin de faire l'unanimité. S'il est respecté en tant qu'héritier du trône, il est aussi au centre de nombreux complots de ses opposants visant toujours, à plus ou moins long terme, son élimination. Son pouvoir est régulièrement contesté, justement du fait de son métissage. Et c'est une piste que Stan Lee, très attaché au héros, va explorer dans les nouvelles aventures en solo de Namor, dans Tales to Astonish. Namor, Gloire & Beauté Comme toujours chez Stan Lee, il y a un mélange improbable de sitcom et de tragédie grecque. Mais le contexte très particulier d'Atlantis, décor mystique et hors du temps, ne fait que l'amplifier. Namor est, de la même façon que bon nombre de super-héros, un digne descendant des dieux et des héros de la mythologie. Présenté dès ses débuts comme doté d'une force phénoménale, le Sub-Mariner est pratiquement invulnérable. Il peut affronter une dizaine d'individus à la fois et les faire virevolter autour de lui sans difficulté, écraser un scaphandre à mains nues, et même renverser un bâteau chargé d'hommes et de blindés à bout de bras. Une puissance colossale qui joue sur son caractère : fier, pour ne pas dire méprisant, y compris avec ses semblables, il présente une forte intolérance à la frustration, considérant que tout un chacun lui doit obéissance. Mais, se sentant traité comme un étranger partout où il passe, et cherchant désespérément à être digne de son trône, il est possible que son attitude épouvantable soit aussi l'expression d'un complexe d'infériorité lié à l'exigence à laquelle il s'assujettit lui-même.  Namor peut aussi être considéré comme le premier super-héros réellement capable de voler, au coude à coude avec son compère Human Torch.  En effet, à l'époque, les surhommes comme Superman ou Captain Marvel sautent très haut, mais ne volent pas. Le Sub-Mariner, lui, prend littéralement son envol dans le numéro un de Marvel Comics, à l'aide des petites ailes qu'il a aux chevilles. Cet attribut, symbole de son appartenance à la catégorie des mutants de l'univers Marvel, ne pourrait être que l'expression physique d'une forme de télékinésie, véritable source de son pouvoir. Mais pourtant, lorsqu'il en sera privé, durant le run de John Byrne dans les années 1990, il ne sera plus en mesure de voler, ce qui confirme leur réelle utilité. Quoi qu'il en soit, ces ailes sont une référence directe aux talaria du dieu Hermès, des sandales dotées de petites ailes. Sandales qui permettront à Persée, demi-dieu fils de Zeus et de l'humaine Danaé, de terrasser la gorgone Méduse, avant d'affronter un monstre marin et de devenir seigneur de son propre royaume. Ainsi, si on aurait facilement tendance à comparer Namor à Poséidon ou à Neptune d'un point de vue strictement symbolique, il emprunte surtout à Persée et à son descendant Hercule, tant par son histoire personnelle et les défis qui l'attendent que par ses capacités physiques surhumaines. D'ailleurs, le Prince des Mers aura directement affaire au dieu Neptune dans le soixante-quinzième numéro de Tales to Astonish, qui lui remettra son précieux trident après l'avoir exposé à de nombreuses épreuves. Ce qui renforce son caractère de héros mythologique devant accomplir un parcours initiatique avant de retrouver son trône. Parce que oui, comme dans tout bon mythe, il faut un usurpateur à affronter. Dans le cas de Namor, c'est Krang, son fidèle chef de guerre, qui finira par le trahir et l'emprisonner pour prendre le pouvoir. Pour couronner le tout, il faut bien évidemment une femme au milieu de tout ça, en la personne de Dorma. Désirant plus que tout conquérir le cœur du Prince des Mers, l'atlante va lui venir en aide et même se constituer prisonnière auprès de Krang pour protéger son bien-aimé, quitte à passer pour une traîtresse à ses yeux ! Un sens du sacrifice très romantique et désastreusement cliché, mais digne des meilleures tragédies classiques. S'il y a aussi un peu de mythe arthurien dans tout ça, on retrouve surtout dans la mise en scène de ces relations l'amour de Stan Lee pour les soap operas. Comme il l'a fait pour les Fantastic Four, Stanley Lieber apporte beaucoup d'humanité et de quotidien dans l'écriture de ses personnages, même quand il sont, comme ici, totalement en déphasage avec la réalité. Plus fort que Patrick Duffy ! Défenseur de son peuple, mais aussi des fonds marins, le Prince des Mers peut être perçu comme une sorte de proto-héros écologiste, même s'il lui arrive de manipuler les créatures marines comme un dresseur de cirque. Ce qui est sûr, c'est que le personnage porte un vrai message auprès du peuple de la surface et sensibilise, avec une manière forte qui lui est toute particulière, les êtres humains à l'importance de la préservation de l'océan et de sa faune. Si, encore une fois, Marvel n'est pas forcément avant-gardiste dans cette démarche, la Maison des Idées surfe sur les sujets de société qui animent cette période de Guerre Froide, où les gens comprennent que le nucléaire représente autant un danger pour leurs ennemis que pour eux-mêmes. Il n'y a pas plus politique que Namor qui est, tout comme T'Challa ou Fatalis, littéralement un homme politique. Souverain d'Atlantis, émissaire de son peuple, chef de guerre et diplomate, ses multiples statuts en font une véritable figure de la géopolitique made in Marvel. Souvent tiraillé entre le domaine subaquatique sur lequel il règne et ses origines humaines, il est tour à tour incompris des uns et des autres. D'abord ennemi des hommes, puis arme de propagande au premier degré durant la Seconde Guerre Mondiale, ennemi des communistes aux côtés de Captain America sous l'ère Atlas, puis Chef d'État luttant pour la reconnaissance de sa patrie pendant le Silver Age, Namor n'a jamais été un personnage neutre sur le plan politique. Le Submariner est un symbole du poids de l'héritage chez Marvel, tant dans ses aventures sur le papier sous la plume de Stan Lee que dans la façon dont la Maison des Idées l'a extirpé d'une profonde amnésie pour en fait un nouvel adversaire des Fantastiques. Chargé de l'histoire de l'éditeur, mais aussi de celle des États-Unis, de ses peurs, et de ses combats, le Prince des Mers représente autant une menace destructrice qu'un potentiel allié face à des dangers plus grands encore. Tour à tour rendu insupportable par son autosuffisance, attachant par sa quête de reconnaissance, voire amusant dans son décalage avec le monde des humains, le personnage est à bien des égards l'un des premiers anti-héros vraiment crédible de l'univers Marvel. Arrogant antagoniste envahisseur ou héritier d'un pouvoir que certains lui refusent, Namor est à mes yeux l'un des héros les plus riches et les plus complexes de l'éditeur et il me faudrait bien plus de temps pour en faire le tour en détail. Cependant, j'espère que ces quelques mots vous auront convaincu du profond intérêt que mérite le personnage et vous pousseront à vous jeter sur ses aventures ! N'hésitez pas à partager cet épisode sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    THE BATMAN : LE FILM QUI COCHE TOUTES LES CASES ?

    Play Episode Listen Later Mar 15, 2022 8:43


    Tout le monde a un avis sur The Batman de Matt Reeves, alors je vais modestement tenter de vous donner le mien en l'appuyant sur ma vision du Chevalier Noir, notamment en ma qualité de lecteur de comics. Attention, cet article contient quelques spoilers. Chacun cherche sa Chauve-Souris Tout ou presque va être dit sur ce film, et à peine quelques semaines après sa sortie, je ne suis déjà plus convaincu que vous conseiller de le voir ou non soit réellement pertinent. Je vais donc plutôt m'intéresser à son statut d'adaptation et à son rapport avec les bandes dessinées de DC Comics. Pour bien comprendre mon point de vue sur le film, il faut assimiler l'idée qu'il n'y a pas UN Batman. Comme pour toutes les figures incontournables de la Pop Culture, il existe avec l'Homme Chauve-Souris un phénomène d'appropriation chez le spectateur, découlant directement de son mode de consommation. En somme, en fonction de comment il l'a découvert et de comment il s'attache au héros et suit ses aventures, chacun aura SON Batman. C'est d'autant plus flagrant dans le cas de The Batman, dont le casting a été largement commenté, et décrié, sur les réseaux sociaux. On passera sur l'avis des pseudo-puristes, qui cachent leur racisme nauséabond derrière un soi-disant respect d'une œuvre originale, qu'ils n'ont jamais comprise, quand ils parlent du Commissaire Gordon ou de Catwoman, pour se concentrer sur le cas de Robert Pattinson, le nouveau Bruce Wayne. Jouer le nouveau Batman au cinéma, c'est un peu comme être choisi pour devenir le nouveau James Bond. Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, les polémiques et les débats qui en résultent ne sont pas spécialement liés aux réseaux sociaux : Michael Keaton en avait déjà fait les frais lorsqu'il a endossé le costume du héros pour le film de 1989. Seulement, la magie de Twitter permettant au premier quidam venu d'étaler sa profonde connaissance de n'importe quel sujet a été particulièrement remarquable quant au choix de Robert Pattinson comme acteur principal. On a pu voir fleurir divers slogans à base de “Pas mon Batman” ici et là, ce qui confirme de façon assez involontaire ce que je disais tout à l'heure : chacun s'approprie Batman à sa façon, et il peut donc en exister des visions en désaccord avec la votre. Si les réseaux sociaux condensent le profond esprit critique de ceux qui savent donner leur avis sur un film en le basant uniquement sur quelques visuels flous ou, au mieux, sur un trailer loin de tout révéler, pour moi, un film se juge avant tout sur pièce, dans son ensemble, et dans l'idéal dans une salle de cinéma. Et ici, aucun doute, c'est bien Batman que l'on voit à l'écran. Pattison s'efface, passant une bonne partie du film masqué, caché, reclus dans l'ombre, mettant de côté l'ego propre à tout comédien qui a si souvent saboté les portages de comics à l'écran. À aucun moment Pattison ne nous fait sortir du film en usant d'un gimmick attendu ou en mettant sa personne en avant. Il incarne son personnage, et plutôt brillamment. Il est à la fois un bon Bruce Wayne, tourmenté, jeune, mais pas totalement inexpérimenté, et un bon Batman, expressif malgré le masque et juste assez inquiétant pour ne gagner que difficilement la confiance de ses alliés, tout en étant à la fois autant moqué que craint par ses adversaires. Peut-être l'une des meilleures interprétations de l'orphelin milliardaire et de son alter-ego noctambule à l'écran. Créatures Sociales L'un des autres points forts du film, au-delà de son héros très bien campé, c'est sa représentation de l'ordre social et criminel de Gotham City. L'écosystème de la ville et sa vaste galerie de personnages sont introduits naturellement, sans que rien ne soit appuyé, et sans que le spectateur ne se sente pris de force par la main. L'ambiance d'une Gotham au bord de la crise, délaissée par les puissants et rongée par le mensonge se ressent et transpire tristement de réalisme. C'est d'ailleurs sur ce mensonge ambiant que se construit le personnage du Riddler, devenu une sorte de tueur du Zodiac parvenant à fédérer derrière lui une communauté de fidèles grâce à internet. Cette relecture du super-vilain, particulièrement d'actualité à l'heure du darknet et des dérives complotistes sur les réseaux sociaux, est d'autant plus efficace qu'elle amène à une vraie réflexion sur “la vérité”, que chaque personnage manipule pour arriver à ses fins.Tout ceci conduit plus globalement à la question d'un “masque social”. Celui de Batman, évidemment, mais aussi celui de chacun des habitants de Gotham City, du procureur corrompu à la serveuse qui en savait trop. Au crépuscule, Gotham et ses citoyens se transforment, un peu comme si la ville révélait son véritable visage tandis que Bruce Wayne dissimule le sien pour exprimer sa vraie nature. Le rapport de force entre Batman et le Riddler est distillé juste ce qu'il faut pour que l'on puisse comprendre leur psychologie respective et ce qui en a finalement fait des opposés. On devine par exemple que chacun a légèrement surestimé son adversaire, tout en négligeant une somme de détails qui l'empêche d'obtenir une victoire totale. Cette relation subtile est peut-être l'une des meilleures portées à l'écran en ce qui concerne le Chevalier Noir, qui doit faire preuve de tous ses talents pour espérer vaincre un criminel déterminé, aux motivations bien plus profondes que le simple appât du gain. Là encore, c'est l'une des grandes forces du Batman des comics qui prend vie au cinéma, permettant au film de dépasser le statut de simple blockbuster d'action pour lorgner du côté du thriller et du film noir. Un aspect ouvertement assumé, tout comme son inspiration du cinéma de David Fincher, et porté par une photographie soignée et un travail d'éclairage à mille lieues de la majorité des divertissements actuels, dont la réalisation est parfois moins imaginative que celle d'un épisode de Dawson… Tout n'est pas parfait pour autant, et si le film adopte un visuel qui convient parfaitement à Batman et à Gotham City, on pourra lui reprocher son manque de plans iconiques, sans doute résultat d'une volonté de traiter ce qui aurait pu être épique de façon minimaliste pour rappeler que Bruce Wayne reste un être humain sous son costume. Enfin, si on évite avec soulagement une nouvelle version du meurtre du couple Wayne à la sortie du cinéma, The Batman s'entiche tout de même de quelques scènes pompeuses. Comme cette introduction forcée d'un Joker censé nous rappeler que ce Batman n'est plus un débutant et qu'il a déjà eu affaire au clown prince du crime, ou la scène de la torche, au symbolisme téléphoné et dans laquelle le comportement du héros, sauvant en priorité la maire et le fils de son prédécesseur, donne raison au Riddler qui accuse les plus riches d'être éternellement prioritaires. World's Greatest Detective  C'est la première fois que le Batman détective connu des lecteurs est aussi bien porté à l'écran. Quasi-inexistante dans les films précédents, cette caractéristique du héros de DC Comics est pourtant une composante essentielle depuis ses débuts, en 1939, dans le vingt-septième numéro de Detective Comics. Parfois oublié du public, l'aspect “enquêteur” de Batman est pourtant très présent dans ses aventures sur le papier, et c'est d'autant plus vrai dans la saga qui me semble être l'une des principales sources d'inspiration de The Batman : Un Long Halloween, écrit par Jeph Loeb et dessiné par Tim Sale. Dans ce récit en 13 épisodes, paru entre 1996 et 1997, Batman fait face au tueur Holiday, qui sévit uniquement les jours fériés. Plongeant au cœur des familles mafieuses de Gotham et mettant en scène une grande partie de la galerie de vilains de l'Homme Chauve-Souris, Un Long Halloween est un véritable polar, sombre et surtout principalement axé sur la résolution d'une série de crimes, bien plus terre à terre que la majorité des histoires de super-héros. C'est un comic book que l'on pourrait sans mal qualifier de “littéraire” et qui peut être une excellente porte d'entrée pour quiconque a déjà l'habitude de lire, mais rechigne à se confronter aux clichés du genre super-héroïque. Graphiquement, il faudra de toute évidence un temps d'adaptation au néophyte ou au lecteur de comics habitué à un trait plus scolaire que celui de Tim Sale. Et si l'aspect massif du bouquin compilé en version française chez Urban Comics pourra décourager au premier abord, gardez en tête que cette histoire est à lire en prenant le temps de s'y plonger comme dans un bon roman policier. Pour moi, l'œuvre de Jeph Loeb et Tim Sale est incontestablement l'une des meilleures histoires de Batman, et je vous en recommande la lecture sans aucune hésitation !  Bien sûr, il y a énormément de différences entre le long métrage de Matt Reeves et Un Long Halloween, mais à défaut d'être l'adaptation littérale d'une bande dessinée, The Batman a capté l'essence du personnage de Batman dans son entièreté, avec pour objectif d'en faire autre chose qu'un énième film de super-héros uniquement destiné à remplir les caisses d'un studio. Avec son ambiance pesante et immersive, son rythme soutenu malgré sa durée de pratiquement trois heures, et sa compréhension complète du Chevalier Noir et de son univers, The Batman se paie le luxe d'être à la fois un bon thriller, un bon film de super-héros et une bonne adaptation. Un carton plein rarement vu qui risque d'en faire une référence pour longtemps, bien au-delà du genre auquel il appartient. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    THE SUICIDE SQUAD : MISSION ACCOMPLIE !

    Play Episode Listen Later Feb 21, 2022 11:04


    Est-ce qu'on vous a déjà parlé des meilleures adaptations de comics à l'écran sorties dernièrement ? Si ce n'est pas le cas, pas d'inquiétude, on revient ensemble sur The Suicide Squad de James Gunn et sur son spin-off, la série Peacemaker ! Is this thing a dog ?! Ça fait bien longtemps que je n'attends plus rien des films de super-héros. Si le fan que je suis a pris beaucoup de plaisir à découvrir les personnages qu'il aime depuis l'enfance prendre vie en chair et en os sur grand écran, l'enthousiasme des débuts a laissé place à une forme de lassitude face à une recette sans saveur à base de copier-coller. Bien sûr, il y a toujours une petite scène qui fait le job par-ci par-là. Mais depuis quelques années, rares ont été les adaptations tirées de comics à réellement me divertir. C'est particulièrement vrai pour les films du Marvel Cinematic Universe, qui, bien que dotés de nombreuses qualités, semblent tous sortis d'un même moule. Si on ajoute aux intrigues linéaires et aux travers empruntés aux comics, comme la nécessité de préserver un perpétuel statu-quo, l'impression de savoir tout ce qui va se passer dans le film à cause d'une promotion hyper-agressive sur les réseaux sociaux et des spoilers qui inondent littéralement ceux-ci quelques heures après la sortie du film, autant vous dire que mon désintérêt total pour ces productions à grand spectacle est pratiquement acté. Je vous arrête tout de suite : je ne suis pas un “anti-Marvel”. Je lis des comics depuis bientôt 30 ans, j'aime ces personnages et leur univers, et je comprends totalement ce qui plaît au public dans ces longs métrages. Seulement, peut-être parce que je suis un lecteur de comics de longue date, je sais aussi que pour une bonne histoire de super-héros, il y en a cinquante oubliables. Les films n'échappent pas à cette règle, et c'est une raison supplémentaire pour vous parler de The Suicide Squad, tout en vous épargnant les spoilers, bien entendu. J'ai décidé de vous parler du film sans rentrer dans les détails pour une bonne raison : le plaisir de la découverte, devenu bien trop rare au cinéma ces temps-ci. Les bande annonces montrent tout, et ce qui n'y figure pas est allégrement révélé par des internautes peu scrupuleux, au point où certains spoilers manifestes, jouant un rôle clé dans le film, sont connus avant même sa sortie, puis totalement assimilés par le public qui les traite ensuite avec une banalité consternante. Le fait que certains et certaines s'étonnent de l'absence sur l'affiche de Spider-Man : No Way Home de deux personnages dont la présence dans le film aurait pu être une grosse surprise pour le spectateur, si elle n'avait pas été relayée massivement par des sites pourtant professionnels, en est une bien triste démonstration. Mais ce n'est absolument pas le sujet du jour. Ce qu'il faut retenir, c'est que j'ai vu The Suicide Squad sans pratiquement rien savoir du film et que cela l'a rendu d'autant plus appréciable. No connection. Après un premier opus sorti en 2016 et horriblement charcuté par la catastrophique politique des décideurs de la Warner, le film de James Gunn avait fort à faire pour redorer le blason de la Task Force X.D'ailleurs, j'ai l'impression que The Suicide Squad est passé pratiquement inaperçu pour le grand public adepte de blockbusters tant son prédécesseur a mauvaise réputation, et je compte bien vous démontrer que c'est une injustice. Se plaçant très inconfortablement le cul entre deux chaises, suite pas vraiment assumée du film de Ayer, mais bel et bien partie intégrante de l'univers DC au cinéma, The Suicide Squad trouve pourtant intelligemment sa place dès sa scène d'ouverture, tout en donnant le ton. Ça va être trash, gore, et un peu bête, au moins en surface, mais je vais y revenir. Si beaucoup vous diront que les figures telles que Batman, Superman et Wonder Woman sont la grande force de DC Comics, il ne faut pas oublier que l'éditeur dispose à son catalogue de nombreux seconds couteaux au fort potentiel, et ce notamment grâce à une politique de rachat agressive des éditeurs concurrents désargentés, menée durant plusieurs décennies. C'est ainsi que des personnages comme Shazam, anciennement Captain Marvel, La Question, ou encore Blue Beetle ont rejoint l'écurie DC Comics. Et c'est aussi le cas de Peacemaker, dont on va reparler un peu plus tard. C'est donc en grande partie en misant sur ces seconds couteaux que Gunn donne vie à une nouvelle Suicide Squad. Seuls Harley Quinn (Margot Robbie) et Rick Flagg (Joel Kinnaman) reprennent leur rôle au sein de l'équipe, ce qui fait office de maigre lien de continuité entre les deux films. Les autres membres de cette Task Force X version 2021 sont Bloodsport (Idris Elba), Peacemaker (John Cena), Ratcatcher II (Daniela Melchior), Polka-Dot Man (David Dastmalchian) et King Shark (Steve Agee pour le motion capture et Sylvester Stallone pour la voix). Une bande d'anti-héros pas forcément bankable au premier abord, mais campée par un casting de qualité et à la dynamique particulièrement efficace. Envoyés bon gré mal gré pour une mission suicide au Corto Maltese, petite île d'Amérique du Sud sujette à une révolte populaire après un récent coup d'état, pour y détruire toute trace d'un mystérieux projet scientifique dénommé “Starfish”, ces personnages aussi cinglés qu'attachants vont devoir coopérer, non sans quelques difficultés, évidemment. Si le film n'échappe pas à quelques clichés du blockbuster, il dénote de la majorité des productions adaptées de comic books par sa violence, plus grand-guignolesque que réellement gore, et son ton assez outrancier en comparaison des autres films du même genre. Il a d'ailleurs été classé R aux États-Unis, soit interdit aux moins de 17 ans non accompagnés. On retrouve ici le James Gunn que j'avais adoré sur le trop rarement cité Super et qui a fait ses classes chez Troma avec Lloyd Kaufman : provocateur, irrévérencieux, adepte de la violence directe et aussi très fûté dans le message qu'il délivre. Car, contrairement à ce que j'ai pu lire ici et là, The Suicide Squad, c'est pas seulement de la bagarre, des fusillade et des litres d'hémoglobine jaillissants de membres sectionnés. Some lived. Some died. Si au premier abord, on peut voir The Suicide Squad comme un film de super-héros un peu plus trash que la moyenne, ce qui est tout à fait vrai, il possède, de mon point de vue, un autre niveau de lecture. Premièrement, chaque personnage est habilement développé au détour de quelques scènes qui se fondent particulièrement bien dans la narration. Bloodsport est dépeint comme un père de famille dépassé, Ratcatcher n'a jamais manqué d'amour malgré son milieu social extrêmement modeste, jusqu'à ce que son père disparaisse dans des circonstances tragiques, Harley Quinn a toujours été maltraitée par les hommes, au point de ne plus pouvoir faire confiance à personne, et Polka-Dot Man offre, grâce à sa tortionnaire de mère, certaines des séquences les plus lunaires du film. Tout ça est drôle, touchant, et donne surtout une véritable profondeur à des personnages qui sont pour la majorité tout bonnement inconnus d'une grande partie du public. Provoquer un tel attachement pour autant de nouveaux héros, en un temps si restreint, c'est remarquable, et c'est pour moi l'une des grandes forces du film. Une recette d'autant plus efficace quand on a compris que Gunn n'allait pas hésiter à tuer aussi froidement que brutalement certains des personnages auxquels on s'est attaché ! Comme je le disais, j'ai eu la chance de découvrir The Suicide Squad sans pratiquement ne rien savoir du film et du sort réservé à ses héros, autant vous dire que cela à rendu mon visionnage assez intense. En y réfléchissant, ça faisait même longtemps que je n'avais pas autant vibré au rythme d'un film de super-héros. La liberté laissée à Gunn sur ce point est sans doute inhérente au fait que les personnages de DC Comics choisis pour l'occasion sont tous secondaires et remplaçables, et que personne ne misait vraiment sur le film. Ce qui est paradoxalement l'une des meilleures choses qui pouvaient lui arriver.  L'autre aspect vraiment intéressant de The Suicide Squad, c'est sa critique de l'interventionnisme, typique du genre super-héroïque. Si cette thématique a déjà été traitée sur le papier, notamment dans The Authority de Warren Ellis, ou même dans le crossover Civil War de Marvel, elle a moins souvent été abordée au cinéma. Aussi, voir cette équipe de super-héros mercenaires envoyée de force par le gouvernement des États-Unis pour faire le sale boulot dans un pays en crise, sans forcément se soucier des conséquences pour ses habitants, renvoie de toute évidence à des faits bien réels et très actuels. Depuis toujours, les justiciers masqués ont pu être utilisés comme des armes de propagandes politiques et culturelles. Si c'est peut-être moins flagrant aujourd'hui, cette caractéristique n'a pas disparu pour autant. Bien sûr, le temps où Captain America et Wonder Woman traversaient l'Atlantique pour combattre les Nazis est révolu, et Iron Man n'est plus vraiment vu comme le symbole de la supériorité américaine face au Communisme. Mais ces personnages restent porteurs de messages à différents degrés de lecture. Champions de la liberté, défenseurs de l'égalité et de valeurs positives, certes, mais aussi d'un mode de vie idéalisé et standardisé, y compris dans notre façon de consommer les divertissements dont ils sont les héros. En nous rappelant que le point de vue des “gentils” n'est pas toujours une vérité absolue, et que le “bien” n'est pas à l'abris des conflits d'intérêts, The Suicide Squad propose un petit plus qui fait la différence. L'autocritique n'est pas le fort des super-héros, et si le film ne va pas forcément au bout des choses, divertissement un peu barré oblige, soulever ces questions et faire en sorte qu'elles aient de vraies répercussions sur les personnages, évitant ainsi le sempiternel statu-quo final et la facilité scénaristique permettant de réutiliser les mêmes héros à l'infini sans se soucier des enjeux, est vraiment une très bonne chose. Au final, The Suicide Squad démontre, comme si cela était nécessaire, que créativité et liberté sont indissociables. Pour s'en convaincre, il suffit de le comparer à un Guardians of the Galaxy Vol. 2, du même James Gunn, aseptisé et standardisé au possible pour un résultat des plus soporifique et oubliable. Fuck Aquaman ! Enfin, je ne peux pas conclure sans vous parler de la série Peacemaker, directement dérivée de The Suicide Squad. Si je me garderai bien de vous révéler quoi que ce soit à son sujet, je ne peux que vous encourager à la visionner, bien que les solutions légales soient pour le moment totalement inexistantes dans l'hexagone, ce qui est une véritable aberration compte tenu de sa qualité ! Son générique halluciné et sa bande son impeccable valent à eux seuls la peine qu'on y jette un œil, mais, en plus, la série se paie le luxe d'être irréprochable en terme de rythme et incroyablement fun, se plaçant directement sur le podium des meilleures séries de super-héros tirées d'un comic book, avec Doom Patrol et The Boys. Une fois encore comme pour The Suicide Squad, l'humour flirtant avec l'absurde pourra décourager ceux qui attendent un divertissement très premier degré. Pourtant, c'est justement en se reposant sur ses personnages extravagants et en décalage avec la gravité de la situation que Peacemaker développe son intrigue très bien ficelée et pleine de clins d'œil à l'univers DC, qui raviront les amateurs de comics. Mon avis sur The Suicide Squad et Peacemaker vous paraîtra peut-être dithyrambique, et dénué de toute objectivité. Si j'évite volontairement d'appuyer chacun de mes arguments sur des comparaisons avec les productions Marvel, qu'une fois encore, je suis loin d'exécrer, c'est avant tout pour ne pas tomber dans ce petit jeu qui voudrait qu'on oppose systématiquement les deux univers, tous supports confondus. Il est difficile, voire impossible, de se détacher de tout ce qu'on a pu voir précédemment pour critiquer une œuvre, et je vous parle évidemment de The Suicide Squad en le plaçant sur une échelle comprenant de nombreux films de super-héros, mais aussi des films d'actions plus classiques, tous sous-genres confondus. Si vous avez eu l'occasion de voir le film, il est tout à fait possible que nous soyons en désaccord. Et si vous êtes réticent ou frileux à vous lancer dans son visionnage, j'espère vous avoir poussé à une forme de curiosité ! Enfin, pour aller un peu plus loin et découvrir la Suicide Squad sur le papier, je vous recommande Les Archives de la Suicide Squad et le volume Suicide Squad présente : Peacemaker, chez Urban Comics, deux excellents moyens de lire les aventures classiques de vos nouveaux héros préférés ! N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! 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    THE SCORCHED : SPAWN EN MODE MULTIJOUEURS !

    Play Episode Listen Later Feb 10, 2022 7:50


    270 000 exemplaires précommandés, c'est beau ! Mais que vaut vraiment ce premier numéro de The Scorched, la série mettant en scène une super-équipe de Spawn ? Est-ce qu'après 30 ans de bons et loyaux services, le héros de Todd McFarlane n'est pas devenu un peu has-been ? Violator : 1, Spawny-Boy : 0J'ai littéralement grandi avec Spawn. C'est la série de comic book que j'ai lue le plus longtemps dans ma vie, du collège jusqu'à la fac. Il faut l'avouer, même en étant un fervent adepte du personnage, la série principale lancée en 1992 à connu des hauts et des bas. Ayant mis de côté les aventures de Al Simmons durant quelques années, la sortie du numéro 300 en 2019 a été l'occasion pour moi d'y revenir et de constater que le génie commercial de McFarlane est intarissable. Alors qu'on aurait pu croire à un essoufflement définitif, ce bon vieux Todd a relancé la machine comme jamais en faisant quelque chose d'aussi génial que ringard : exploiter un univers étendu rempli de variantes de son héros. Avec les premiers pas du Medieval Spawn, dans le neuvième épisode de la série en 1993, McFarlane avait explicité le concept selon lequel les Hellspawn existaient depuis très longtemps et pouvaient revêtir différentes formes en fonction de l'époque et du lieu où ils vivaient leurs aventures. Cette version chevaleresque connaissant son petit succès auprès des lecteurs, jusqu'à obtenir sa propre mini-série au côté de l'héroïne de Witchblade, on verra au fil du temps les Hellspawn se multiplier au gré des nécessités scénaristiques ou par pur plaisir artirstique, avec Gunslinger Spawn en 2002, Mandarin Spawn en 2007, Centurion Spawn en 2022, ou encore She-Spawn, dans ce fameux trois centième numéro en 2019. Toujours doué pour s'entourer d'une équipe d'artistes de renoms, misant sur une forme de nostalgie pour les comics remplis de anti-héros bad-ass des années 1990, et surfant sur le record de longévité de sa série principale devenue le plus long comic book indépendant encore en cours de publication, Todd McFarlane officialise son univers étendu en 2021 avec Spawn Universe #1. Ce one-shot ouvre la voie à trois nouvelles séries : King Spawn, Gunslinger Spawn, et celle qui nous intéresse aujourd'hui, The Scorched. It's a little early for Halloween, Simmons !Si je devais résumer The Scorched sans vous divulgâcher quoi que ce soit, je vous dirais que son pitch tient objectivement sur un post-it. Pour affronter une menace commune à l'originalité douteuse, Jessica Priest, alias She-Spawn, Marc Rosen, le nouveau Medieval Spawn, le Gunslinger Spawn et le Redeemer (ou le Rédempteur, pour ceux qui attendent la VF chez Delcourt) vont devoir faire équipe. Dit comme ça, pas de quoi rêver, et si vous n'êtes pas fan du personnage de Spawn et de son univers, vous pouvez d'ores et déjà passer votre chemin. Par contre, si comme moi vous doutiez un peu du résultat, craignant un énième crossover poussif comme on en trouve plein chez les Big Two, il est utile de s'attarder quelques minutes pour y regarder de plus près. Renouveler une licence vieille de trois décennies n'est pas forcément facile, surtout quand celle-ci est ancrée dans un état d'esprit particulièrement caricatural. Spawn est indissociable du Image Comics des débuts et de ses personnages musculeux armés de flingues disproportionnés. Et en fait, sur ce point, il n'y a pas vraiment de changement. Ici, on vient pour l'action, la castagne et les cartouchières sans fin. Et si chacun des membres de The Scorched est sommairement caractérisé, les relations entre ceux-ci ne sont pas vraiment creusées. En somme, ne vous attendez pas à lire la Doom Patrol, au risque d'être un peu déçus. La où ça devient beaucoup plus intéressant, et même assez futé, c'est que tout en conservant ce ton typique des comics des 90's, l'équipe artistique dirigée par Todd McFarlane sait s'inspirer de l'air du temps. Le scénario de Sean Lewis et les dessins de Stephen Segovia et Paulo Siqueira rappellent en effet, dès les premières pages, des univers bien plus actuels et aptes à parler à une nouvelle génération de lecteurs. La constitution de l'équipe en elle-même renvoie immédiatement aux mécaniques des FPS compétitifs comme Overwatch, Apex Legends ou Valorant, auxquelles s'ajoutent un parfum d'aventure et de stratégie digne des MOBA comme League of Legends ou DotA 2. Si ces références seront peut-être obscures, ou même transparentes, pour les lecteurs de la première heure, elles m'ont pourtant sauté aux yeux, dans le sens où chaque membre de l'équipe a son rôle à jouer d'un point de vue tactique, à la manière du quatuor Flank, Support, Tank et DPS cher à ces jeux vidéo. She-Spawn endosse à la fois le rôle de tireuse d'élite et de meneuse, Redeemer est un soutient aérien de premier choix, Medieval Spawn fonce en première ligne et préfère le corps-à-corps, quant au Gunslinger, il tire sur tout ce qui bouge de façon incontrôlable devenant presque un fardeau pour ses camarades. Alors, bien sûr, ce n'est pas nouveau, car c'est un schéma que l'on retrouve déjà dans les premiers jeux de rôles, et chez d'autres équipes de super-héros, mais il faut croire que cela fonctionne particulièrement bien avec cette réunion de Hellspawn. Le résultat pourra sembler bas du front et déjà vu, et pourtant ça marche et on prend un vrai plaisir à lire ce premier numéro. Where you're going, every day's Halloween !L'autre gros point fort de la stratégie de Todd McFarlane, c'est incontestablement sa connaissance du marketing et de la faiblesse du collectionneur moyen. Chaque numéro symbolique, que ce soit Spawn #300, King Spawn #1 ou The Scorched #1, est l'occasion pour McFarlane Productions et Image Comics de proposer pléthore de couvertures alternatives par de grands noms de la bande dessinée américaine. Les fans sont au rendez-vous à chaque fois, permettant de démultiplier les ventes, donnant ainsi d'autant plus de visibilité aux publications. Avec ses 9 variant covers, The Scorched #1 peut se targuer d'avoir atteint 270 000 exemplaires commandés. Pourtant le titre fait presque pâle figure à côté des autres séries dérivées de la licence. Gunslinger Spawn #1 a en effet atteint 385 000 exemplaires, tandis que King Spawn #1, lui, approche des 500 000 exemplaires. Des chiffres colossaux qui permettent à ces titres de battre plusieurs records, en devenant notamment les comic books les plus vendus du XXIème siècle ! Difficile face à un tel engouement d'oser penser que la création de McFarlane s'essouffle. Certes, tous les exemplaires précommandés ne seront pas vendus, et les nombreuses couvertures, dont certaines à tirage limité, amplifient le phénomène. Mais nous sommes tout de même face à une démonstration de force qui place Spawn et son univers au même niveau que les séries stars de Marvel et DC Comics, les Avengers ou la Justice League étant parmi les rares licences à pouvoir espérer tenir tête au rejeton de Malebolgia. Et encore, avec l'appui, aussi minime soit-il, des super productions au cinéma, ce qui n'est pas le cas de Spawn pour l'instant… Évidemment, on pourra toujours, et par bien des façons, relativiser les chiffres et minimiser le rôle de Spawn sur le marché de la bande dessinée américaine. La recette de McFarlane brille plus par son efficacité éprouvée que par son originalité, mais l'enthousiasme des lecteurs, des collectionneurs, et peut-être des spéculateurs, confirme que quoi que l'on en pense, il est impossible de l'ignorer. Si, comme pour moi, Spawn a marqué votre parcours de lecteur et que le temps vous en a éloigné, je ne peux que vous recommander de jeter un oeil à The Scorched et aux autres séries de son univers étendu. À l'inverse si vous êtes un parfait néophyte, vierge de tout contact avec les héros affublés d'un nécroplasme, je vous conseille de découvrir Spawn, en commençant le plus simplement du monde par le premier tome, disponible en français chez Delcourt. Les débuts de la série commencent à accuser le poids des années, mais elle a gagné son statut de classique du comic book et est aujourd'hui incontournable. L'influence de Spawn est partout, et vous n'y échapperez pas. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

    JUDGMENT DAY : EC COMICS CONTRE LE RACISME

    Play Episode Listen Later Jan 16, 2022 13:59


    Les comics d'aujourd'hui sont-ils gangrénés par la représentation de la diversité et par un omniprésent message de tolérance ? Retour dans les années 1950, une époque bénie où on nous emmerdait pas avec toutes ces conneries ! A long time ago… Régulièrement, on peut voir une partie du lectorat fan de comic books se plaindre du contenu politisé de certaines publications. Aujourd'hui, d'après eux, les comics déborderaient de messages plus ou moins cachés prônant la diversité et défendant les positions de ce que certains et certaines appellent “le wokisme”. Si l'un des derniers exemples en date est la révélation de la bisexualité de Jon Kent, le fils et successeur de Superman, la liste est longue comme le bras. Que ce soit sur le papier avec Miss Marvel, de confession musulmane, ou au cinéma avec le comédien afro-américain Jeffrey Wright dans le rôle du commissaire Gordon du “The Batman” de Matt Reeves, la moindre évolution d'un personnage fait monter au créneau toute une frange de l'opinion. Mettons les choses au clair tout de suite : les histoires de super-héros ont toujours été politisées et chargées d'un message social. Dire le contraire, c'est mentir. Dès le premier numéro de Action Comics en 1938, Jerry Siegel et Joe Shuster mettent en scène Superman en train de corriger un mari violent et un politicien véreux. En 1946, dans son show radiophonique, Il affronte même des suprématistes blancs dans “Clan of the Fiery Cross”, adapté en comic book chez DC Comics sous le titre “Superman Smashes the Klan”. Dans les années 1970, d'autres personnages vont cristalliser les travers de l'Amérique dans leurs aventures. Le duo formé par Green Lantern et Green Arrow, sous la plume de Dennis O'Neil et le crayon de Neal Adams, va traverser les États-Unis et mettre en exergue les fléaux qui gangrènent le pays : racisme, drogue, sexisme, et dérives sectaires… En 1972, Luke Cage, alias Power Man, co-créé par Archie Goodwin, Georges Tuska et Billy Graham, montre le visage des ghettos où les afro-américains sont abandonnés par un système imprégné par le ségrégationnisme et la discrimination raciale. Toujours chez Marvel, à partir de 1975, les X-Men de Chris Claremont se posent en défenseurs du pacifisme, de l'humanisme et de la tolérance alors qu'ils sont eux-mêmes rejetés par la société qu'ils s'efforcent de protéger. Et que dire d'un personnage comme Captain America, qui dès sa première aventure, en 1941, va carrément mettre une droite à Adolf Hitler en personne ? Si comme une bonne partie de la première vague de super-héros du Golden Age apparue durant la Seconde Guerre Mondiale, il va jouer le jeu de la propagande américaine en encourageant l'effort de guerre, à partir des années 1970, Steve Rogers incarnera une autre vision des États-Unis, allant jusqu'à s'opposer physiquement à un président piétinant les valeurs pour lesquelles il se bat. Tout aussi politique et symbolique, mais beaucoup moins docile. Ce ne sont là que les exemples les plus connus et les plus flagrants du sous-texte social et politique présent dès les premiers pas de nos super-héros préférés. Les comics ont toujours été le reflet de la société dans laquelle ils étaient produits. Et si cette affirmation est sûrement plus vraie que jamais, penser que les publications du XXème siècle étaient totalement neutres en terme d'idéologie, et bien c'est faux. Et de la même façon, si vous avez tout à fait le droit d'être en désaccord avec les messages véhiculés par les comic books d'aujourd'hui, vous ne pouvez pas leur reprocher de contenir ces messages, car cela fait partie de la nature même de la bande dessinée américaine depuis qu'elle existe. Space Oddity Fondé en 1944 par le pionnier du comic book Max Gaines, Educational Comics, qui deviendra plus tard Entertaining Comics, se spécialise tout d'abord dans des adaptations en bande dessinée de la Bible et de l'histoire des États-Unis. Quand Max décède accidentellement en 1947, c'est son fils William qui reprend la société et donne une nouvelle direction à EC Comics. La particularité de William Gaines, c'est qu'il n'y connait rien aux comic books. Se destinant à devenir enseignant, c'est plus par respect de l'héritage familial que par passion qu'il va reprendre la maison d'édition, se contentant dans un premier temps de maintenir la ligne éditoriale établie par son père. Mais EC Comics est lourdement endetté et c'est grâce à l'intervention du dessinateur Al Feldstein, qui encourage Gaines à revoir son catalogue et à surfer sur les tendances en publiant des récits policiers, des westerns ou des histoires de romances, que l'éditeur va atteindre un certain équilibre financier. Gaines et Feldstein , tous deux amateurs d'horreur et de fantastique, vont tenter de publier quelques histoires dans ces styles qui ont le vent en poupe chez les jeunes, et rapidement constater que c'est un succès. À partir de 1950, les périodiques de EC Comics se transforment peu à peu en poussant les curseurs toujours plus loin. Les histoires policières mettent en scène des meurtres sordides toujours plus gores, et les comic books de guerre ou de romance sont renommés pour devenir des magazines d'horreur ou de science-fiction remplis de monstres et présentant plusieurs courtes histoires caractérisés par leur chute toujours plus choquante ! The Vault of Horror, Tales from the Crypt et The Haunt of Fear forment le trio de tête du catalogue EC Comics qui va inspirer pratiquement tous les autres éditeurs de l'époque, entraînant le marché dans une surenchère sanguinolente qui aura bientôt d'importantes répercussions sur l'histoire des comics, mais je vais y revenir. William Gaines, qui a grandi en lisant des pulp's, va également plébisciter la publication de récits de science-fiction dans ses magazines, un genre qui trouve un souffle nouveau à cette période, inspiré par les peurs d'invasions et de conflits nucléaires nées de la Guerre Froide. Et justement, maintenant que le contexte est posé, revenons-en au sujet principal de cet article : Judgment Day, une histoire de science-fiction publiée par EC Comics en 1953. Such a lovely color for you Paru pour la première fois dans le dix-huitième numéro de Weird Fantasy, Judgment Day, écrit par Al Feldstein et dessiné par Joe Orlando, est un récit typique de l'époque. Courte histoire de 7 pages, elle met en scène Tarlon, un astronaute terrien envoyé par la république galactique sur la planète Cybrinia afin de déterminer si celle-ci mérite ou non d'être intégrée au consortium qu'il représente. Cybrinia a la particularité d'être habitée par des robots laissés ici en autonomie par les humains pour y développer leur propre société. Et alors qu'il visite l'usine dans laquelle les êtres artificiels sont fabriqués par leurs semblables, Tarlon s'étonne de n'avoir croisé jusque là que des robots de couleur orange. L'émissaire terrien apprend alors de son guide que les robots bleus, eux, vivent dans un quartier à part, nommé “Blue Town”, et que dans le bus pour s'y rendre, les robots orange et les bleus ne doivent pas se mélanger, chacun ayant une place prédéfinie, à l'avant ou à l'arrière. Une fois à Blue Town, Tarlon demande à visiter l'usine dans laquelle les robots bleus sont fabriqués et il découvre, assez étonné, que le procédé est tout à fait identique à celui des robots orange, excepté la phase d'éducation, durant laquelle les robots bleus sont conditionnés pour être serviles et rester cantonnés aux tâches les plus ingrates, alors qu'il n'existe aucune justification à cela. Lorsqu'il questionne son guide orange quant à cette situation, ce dernier explique qu'il en a toujours été ainsi et qu'en tant que simple individu, il ne peut rien faire pour changer l'ordre établi sur Cybrinia. Tarlon quitte alors la planète en informant son hôte que son monde n'est pas prêt pour rejoindre la république galactique, mais que si son peuple se remet en question, tout espoir n'est pas perdu car il fut un temps où les habitants de la Terre avaient, eux-aussi, des difficultés à vivre ensemble. Une fois en route vers la Terre à bord de sa navette, Tarlon retire son casque et c'est le visage d'un homme noir qui est révélé au lecteur. Si, aujourd'hui, cette parabole pourrait sembler un peu moralisatrice et dépourvue de finesse, elle expose pourtant en seulement quelques pages tous les problèmes et les non-sens nés du racisme et de la ségrégation, et ça à tous les niveaux d'un système. Et c'est aussi effrayant que décourageant de constater que pratiquement soixante-dix ans plus tard, la situation n'a pas vraiment changé. En fait, lors de sa publication en 1953, Judgment Day sera très bien accueillie par les lecteurs et bon nombre d'entre eux témoigneront même que cette courte histoire les a poussé à se remettre en question. Mais quand EC Comics décide de réimprimer le court récit dans le trente-troisième numéro de Incredible Science Fiction en 1956, c'est une autre histoire… Sauvons la jeunesse ! Car entre temps, le monde de la bande dessinée américaine a changé. Au début des années 1950, l'Amérique cherche un nouveau bouc émissaire à qui attribuer la hausse des chiffres de la délinquance. Sous l'impulsion de livres comme Seduction of the Innocent de Fredric Wertham, de la commission menée par le sénateur Estes Kefauver, et du magistrat Charles F. Murphy, les comic books se retrouvent au centre de l'attention comme grands responsables de la déchéance de la jeunesse qui sombre peu à peu dans la criminalité. Bien avant que l'on accuse le Heavy Metal, les Jeux de Rôles ou le Jeu Vidéo de transformer les adolescents en créatures immorales et sanguinaires, les comics ont fait l'objet d'une campagne de désinformation menée par des politiques, des intellectuels et des religieux adeptes de raccourcis faciles et préférant s'en prendre à l'art plutôt que de regarder en face l'échec d'un système qu'ils entretiennent pour préserver leur petit confort. Ainsi, alors que l'on assiste dans plusieurs états à des autodafés durant lesquels d'honnêtes citoyens détruisent les comics qui pervertissent leurs enfants, il est décidé en 1954 de mettre en place la Comics Code Authority, un organisme d'autorégulation visant limiter les dérives des publications destinées à la jeunesse. Le Code impose dès lors de nombreuses règles aux bandes dessinées publiées par les éditeurs américains, parmi lesquelles l'interdiction de représenter le crime ou tout autre activité illégale sous un jour favorable, de ne jamais encourager le lecteur à remettre en question l'autorité en place, ou bien encore l'obligation de toujours faire triompher le bien face au mal. Ces grands principes s'accompagnent d'une large censure des thèmes abordés et des images pouvant être montrées : le Code interdit le sexe, la nudité, les scènes gores, la violence excessive, la torture, le cannibalisme, les morts-vivants, les vampires, les loups-garous, ainsi que tout ce qui est jugé “contre-nature” ou “anormal” à l'époque, comme l'homosexualité ou toute forme de fétichisme. De plus, plus aucun magazine ne pourra utiliser les mots “Horror” ou “Terror” dans son titre. Le respect de ces règles assure aux publications de pouvoir porter sur leur couverture le sceau “Approved by the Comics Code Authority“, et ainsi d'avoir la possibilité d'être distribuées en toute légalité, là où une bande dessinée dépourvue du célèbre logo risquait tout bonnement d'être refusée par les kiosques et ainsi de représenter une perte considérable pour l'éditeur qui ne pouvait alors plus écouler ses stocks. Si dans un premier temps, on peut penser que certaines des règles du Comics Code sont plutôt bénéfiques et limitent les dérives, on comprend assez rapidement que beaucoup d'entre elles sont largement soumises à interprétation lors du passage des publications devant la commission. Et c'était d'autant plus vrai dans le cas de EC Comics, qui, entre ses histoires horrifiques en grande partie à l'origine de la polémique et le caractère bien trempé de Bill Gaines, avait tout pour être dans le viseur du juge Murphy. Aussi, lorsque la réimpression de Judgment Day fut présentée avant sa publication, Charles F. Murphy déclara à Feldstein que le héros ne pouvait en aucun cas être noir, et ça sans aucune justification. S'ensuivit une prise de bec musclée entre le juge, l'auteur et l'éditeur, à l'issue de laquelle EC Comics refusa catégoriquement de changer quoi que ce soit à l'histoire. Pour vous dire à quel point Murphy tenait à avoir gain de cause, incontestablement pour emmerder Gaines, il n'y a pas d'autre mot, et bien face à la détermination de ce dernier, il aurait demandé à ce que les gouttes de sueur présentes sur le visage du personnage principal soient retirées. Une exigence absolument surréaliste qui, une fois encore, ne peut absolument pas être justifiée par l'une des règles du Comics Code. L'histoire sera finalement republiée telle quelle, sans prendre en considération les objections de la CCA. Un acte fort qui signera également la fin d'une époque pour EC Comics. Weird ScienceLa vérité, c'est qu'il existe un sous-texte peu glorieux et typique du puritanisme américain au Comics Code. Si celui-ci demande à ce que les femmes soient représentées de manière réaliste et le moins sexualisées possible, c'est pour mieux en faire des demoiselles en détresse ou de sages ménagères attendant un providentiel héros masculin, de préférence blanc et bien viril. Car si le Comics Code interdit aussi toute forme de discrimination, la commission s'assure tout de même que chacun reste bien à sa place, dans un pays où la ségrégation est toujours en vigueur en 1956 et où il faut veiller à ne pas attiser les revendications sociales des afro-américains. En fait, la principale règle outrepassée implicitement par Judgment Day était certainement celle de ne pas contredire le pouvoir en place. Prôner l'égalité et la tolérance entre des robots, pourquoi pas, mais en mettant en scène un personnage principal qui aurait lui-même était la cible de discriminations à l'époque, EC Comics va trop loin pour la Comics Code Authority. Bien avant que Stan Lee ne défie le Code en publiant une histoire traitant du problème de la drogue chez les jeunes dans les pages de Spider-Man, ou que le Swamp Thing d'Alan Moore ne s'affranchisse définitivement de l'estampille de la CCA, William Gaines et Al Feldstein ont été des précurseurs et EC Comics en a payé le prix. En ne se pliant pas aux règles imposées, l'éditeur s'est mis dans une situation très délicate qui l'obligera à abandonner la publication de comic books pour se concentrer sur des périodiques au format magazine échappant à la censure du Comics Code, dont le plus célèbre reste sans conteste MAD. Un triste sort qui rappelle pourtant le rôle majeur de la fiction, en l'occurrence de la science-fiction, et l'importance d'un art populaire accessible au plus grand nombre dans l'évolution des mentalités. De Victor Hugo à Star Trek, en passant par la Doom Patrol ou même The Witcher, chaque œuvre porte un message qui reflète les préoccupations de son temps. Qu'il s'agisse de conflits sociaux, de l'acceptation de la différence, ou de la nécessité d'une prise de conscience collective, ces thématiques parfois bien cachées pèsent pourtant bien plus qu'on ne pourrait le croire dans l'amélioration de notre quotidien quand les œuvres en question touchent des millions de personnes. Pour l'anecdote, et pour comprendre à quel point la science-fiction a encore du travail, il faudra attendre 1983 pour que Guion Bluford devienne le premier astronaute afro-américain à aller dans l'espace. Soit 14 ans après qu'on ait marché sur la Lune. Si vous voulez en savoir plus sur EC Comics et sur cette histoire, je vous recommande de jeter un oeil au livre EC Comics : Race, Shock & Social Protest de Qiana Whitted, qui m'a été très utile pour l'écriture de cet article. N'hésitez pas à partager cet article sur les réseaux sociaux s'il vous a plu ! Recevez mes articles, podcasts et vidéos directement dans votre boîte mail sans intermédiaire ni publicité en vous abonnant gratuitement ! Get full access to CHRIS - POP CULTURE & COMICS at chrisstup.substack.com/subscribe

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